AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur L'annonce (74)

Amoureuse, elle serait amoureuse comme d'autres sont coiffeuses ou vendeuses.
Commenter  J’apprécie          20
Il faudrait s'imposer ailleurs. Il faudrait, par exemple, dès le samedi suivant, empoigner sans frémir la combinaison raidie de vieille bouse et historiée de taches diverses que Paul abandonnerait, roulée en boule, sur le paillasson; Paul expliquerait, il dirait qu'il valait mieux ne pas mélanger la combinaison avec le reste, et la laver, par exemple, avec des chiffons du ménage, et la frotter au préalable à la brosse dure avec du savon de Marseille. A la hâte, et presque riant comme gêné la voix sourde, il s'excuserait de ne rien connaître, ou pas grand chose, à ces affaires. Qui relevait de la sœur. A qui, Annette le comprenait, il n'était pas question de demander conseil; et devant qui il importait de ne pas baisser pavillon sur le chapitre crucial du linge.
Commenter  J’apprécie          30
En juin le pays était un bouquet, une folie. Les deux tilleuls dans la cour, l'érable au coin du jardin, le lilas sur le mur, tout bruissait frémissait ondulait; c'était gonflé de lumière verte, luisant, vernissé, presque noir dans les coins d'ombre, une gloire inouïe qui, les jours de vent léger, vous saisissait, vous coupait les mots, les engorgeait dans le ventre où ils restaient tapis, insuffisants, inaudibles. Sans les mots on se tenait éberlué dans cette rutilance somptueuse. C'était de tout temps, cette confluence de juin, ce rassemblement des forces, lumière vent eau feuilles herbes fleurs bêtes, pour terrasser l'homme, l'impétrant, le bipède aventuré, confiné dans sa peau étroite, infime. L’œil s'épuisait à ne rien saisir; des odeurs s'affolaient, de foin de terre noire de chemins creusés de bêtes lourdes.
Commenter  J’apprécie          00
À quarante ans il s'était réveillé, calme et résolu. Résolu à ça, à cela seulement, il aurait une femme à Fridières, une femme avec lui, à son côté pour les jours et les nuits pour vivre et durer. Il était Paul, on ne l'empêcherait pas; on, les autres, personne ne l'empêcherait. Cette femme, Anette, de Bailleul, du Nord, écoutait ; elle était pour lui.
Commenter  J’apprécie          10
Nicole était la gardienne de Fridières, la grande prêtresse de cette religion du pays, ramassé sur lui-même, clos et voué à le rester autant par les fatalités de sa géographie et de son climat que par les rugueuses inclinations de ses habitants. On finirait au mieux par être toléré à Fridières, on n’y serait pas accueilli, en dépit de Paul et de tout son bon vouloir d’homme pacifique et résolu.
Commenter  J’apprécie          20
Il faudrait s’arracher du corps cette habitude que c’était de s’occuper de tout, de régner sur ses hommes, les trois, par là, par les tissus propres et doux rassemblés préparés pour la semaine. Nicole l’avait senti dès le début, dès les premiers mots, quand Paul avait parlé des travaux qu’il allait entreprendre pour installer en haut une cuisine. La personne qui viendrait aurait tout son matériel, et l’électroménager, c’était une personne déjà équipée, indépendante, là où elle habitait dans le Nord avec son fils. Paul avait dit une cuisine sans cloisons, ouverte, américaine ; et cet adjectif, relevé par une Nicole sourdement effarée de l’invasion dont était menacé son territoire, fut aussitôt enrôlé par les oncles pour désigner, au pluriel et en bloc, les deux impétrants, les formidables, les Américains qui à l’avenir mangeraient avec Paul, dans une cuisine de même nationalité, en haut, tandis qu’eux, les trois, les frustes Gaulois, les Cantalous préhistoriques, n’en mangeraient pas moins, aux mêmes heures et en bas, dans leur cuisine française.
Commenter  J’apprécie          00
Incipit :
Annette regardait la nuit. Elle comprenait que, avant de venir vivre à Fridières, elle ne l’avait pas connue. La nuit de Fridières ne tombait pas, elle montait à l’assaut, elle prenait les maisons les bêtes et les gens, elle suintait de partout à la fois, s’insinuait, noyait d’encre les contours des choses, des corps, avalait les arbres, les pierres, effaçait les chemins, gommait, broyait.
Commenter  J’apprécie          00
Annette s'était abritée derrière l'expression refaire sa vie qui était commode parce qu'elle rassurait les gens. Elle aussi refaisait sa vie, après l'avoir longuement défaite, plusieurs fois, avec patience.
Commenter  J’apprécie          322
Dans les annonces qu'elle lisait, elle comprenait que c'était dessous, tout le temps, à vif, la question des corps du corps du sien...
Il faudrait montrer, se montrer, vouloir, être voulue, s'empoigner, au-dessus, loin, loin de là fatigue épaisse du vivre.
Commenter  J’apprécie          210
Le maître avait demandé aux élèves d'écrire en un seul mot précédé du verbe faire ce qu'ils voulaient devenir plus tard, il avait répondu, de son écriture lente et ronde, heureux. Faire heureux; Toute l'école s'était régalée de ce mot; Annette et sa mère avaient été fières, et rassérénées peut-être de deviner, derrière les silences d'Eric, désir, douceur, et confiance mêlés , noués, pas éradiqués ni ravagés encore, en dépit du patent désastre paternel.
Commenter  J’apprécie          10







    Lecteurs (929) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Histoire du fils

    Qu’a entraîné la mort d’Armand Lachalme en avril 1908 ?

    Un accident de chasse
    Un accident de la route
    Un accident domestique

    19 questions
    14 lecteurs ont répondu
    Thème : Histoire du fils de Marie-Hélène LafonCréer un quiz sur ce livre

    {* *}