Mon Poulidor

"Poulidor, explique-t-il (cfr. le réalisateur Claude Sautet) à Olivier Margot, est un sportif qui donne l'impression de croire à des vertus humaines fondamentales. C'est sa grande force. Il est probablement le contraire du naïf que l'on décrit parfois. Et quand on dit, avec raison, que ce n'est pas un grand tacticien, attention ! Ce n'est pas un manque d'intelligence. C'est parce qu'il n'a pas le goût de l'autorité. Or, pour mener une équipe comme le fait Merckx, comme l'a fait Anquetil, il faut une très grande dureté dans l'autorité. Il faut une volonté de s'imposer aux autres. Cette volonté, Poulidor ne l'a pas. C'est ce qui fait sa beauté - il a finalement un goût du jeu extraordinaire. Sur la longue distance d'une carrière, avec le temps, il devient plus grand que les autres. La trajectoire de Poulidor, c'est ce que j'appellerais vouloir être le héros des cœurs simples." (p. 110)

"Si j'avais la charge de rédiger un dictionnaire, ce n'est pas après les pages roses que j'inscrirais votre nom, mais avant, parmi ces noms propres qui ont perdu leur majuscule pour devenir des noms communs, des mots qui ont un sens pour tout le monde, écrit Bernard Clavel. Et le jour, ajoute-t-il, où l'on dirait d'un enfant qu'il possède tout ce qu'il faut pour devenir un Poulidor, ça ne signifierait nullement qu'il a une chance de remporter le Tour de France, mais beaucoup plus largement qu'il ira loin dans la vie, suivant sa route au mépris des obstacles, s'accrochant à ce qu'il a décidé de réaliser, tenant ferme les mancherons de sa charrue sans se soucier des ronces, des cailloux et de mille pièges que dissimule la terre et tendent les éléments." (p. 176)

Quand un journaliste lui a demandé si Poulidor est éternel, il répond : "Oh non, sûrement pas. Mais je laisserai une petite trace." Avoir été le chouchou de la plus grande fête de France, imposé sa bonne humeur et son courage, il mérite, en effet, la reconnaissance du grand public. N'est-il pas une figure symbolique de la République française comme le fut Johnny Hallyday ? (p. 112)

Partager le vin et le pain avec "Poupou" est une manière d'aborder un personnage vissé sur sa bécane jusqu'à plus de quarante ans. Un record de longévité chez les coureurs professionnels. De quoi faire enrager les jeunots du peloton. (p. 10)

Plus j'étais malchanceux, constate Poupou, plus le public m'appréciait, plus je gagnais du fric ! Les gens m'aimaient quand je perdais ! Cette popularité, je ne me l'explique toujours pas. (p. 28)