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3,38

sur 100 notes
Linda Lê a choisi de ne pas avoir d'enfant, et pourtant cet enfant qu'elle n'a pas eu existe dans son esprit et dans son coeur, au point qu'elle lui écrit ici une longue lettre d'explication, de justification et de tendresse.

En théorie, ce livre devait me plaire. En effet, le sujet me touche de près mais reste tabou dans notre société et est, de ce fait, peu traité dans la littérature. En outre, l'auteure parle de son vécu et de ses choix, pas d'une histoire qu'elle imagine, ce qui me laissait espérer un témoignage fort. Enfin, le procédé épistolaire me semblait prometteur et aiguisait ma curiosité.

Mais ça, c'était avant...

Pendant et après (ma lecture), j'étais un peu déçue. Certes, Linda Lê explique fort bien pourquoi elle ne veut pas d'enfant, mais son expérience reste éminemment singulière et ne touche pas à l'universel. Elle n'évoque pas les raisons que pourrait avoir une femme lambda aujourd'hui de faire ce choix, mais simplement les siennes propres : une enfance malheureuse, un équilibre mental précaire, une dévotion exclusive à son art... de même, elle ne s'attache pas aux pressions que la société peut exercer sur une femme en couple sans enfants, mais ressasse celles que son amant lui faisait subir pour la convaincre.

Dans ce contexte, il a été difficile pour moi de m'identifier ou de ressentir de l'empathie. J'ai donc vécu le livre comme un exercice de style intellectuel et brillant, mais un peu désincarné. Peut-être justement comme cet enfant qu'elle n'aura jamais...

Challenge Multi-Défis 2017 : 8/52
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J'ai lu beaucoup d'avis sur ce livre sur le net, souvent positif et émanant aussi souvent de femmes qui ont déjà des enfants. J'étais donc curieuse de le lire, moi qui n'ai pas d'enfants et n'en aurais peut-être pas.
Ce qui m'a surpris est l'acuité avec laquelle elle parle à cet enfant qui pourtant n'existera jamais, à quel point elle semble tout avoir envisagé de son avenir virtuel et de ce qu'il aurait été, de ce qu'il aurait changé dans sa vie et celle de S., son compagnon qui l'accusait de frustrer ses désirs de paternité (j'avoue ne jamais penser à l'enfant que je n'ai pas, je trouve juste dommage, si je n'ai pas d'enfants, de ne pas lui transmettre tout ce qui m'a été donné par les mien(ne)s). Bien sûr, certains arguments pour la convaincre de devenir mère sont rebattus - comme si avoir un enfant apportait la stabilité personnelle et professionnelle, comme si, finalement, avoir un enfant rendait adulte.
Linda Lê récuse aussi des clichés : écrire n'est pas enfanter. Elle revient aussi, profondément, sur l'absence d'affection qui a marqué sa jeunesse, sur le traditionnalisme de sa mère (je n'ose dire "machisme") et sa dureté à l'égard de ses filles. Sur sa solitude, aussi, sa peur de reproduire le schéma maternelle ou de se placer dans l'excès inverse.
A l'enfant que je n'aurai pas est un texte très travaillé mais aussi très émouvant, un texte court qui dit l'essentiel, bref, ce texte est une des belles rencontre de la rentrée littéraire.
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Je suis une inconditionnelle de Linda Lê et je trouve enfin le temps d'écrire deux mots sur ce livre diversement apprécié ici.

Je fais d'abord remarquer qu'il s'agit d'un texte de commande en quelque sorte puisqu'il est publié chez NiL, dans la collection « les affranchis ». C'est une des clés de ce beau texte. La collection conçue et dirigée par Claire Debru se présente en ces termes : «  Quand tout a été dit sans qu'il soit possible de tourner la page, écrire à l'autre devient la seule issue. Mais passer à l'acte est risqué. Ainsi, après avoir rédigé sa “Lettre au père”, Kafka avait préféré la ranger dans un tiroir. Écrire une lettre, une seule, c'est offrir le point final, s'affranchir d'une vieille histoire. La collection “Les Affranchis” fait donc cette demande à ses auteurs : “Écrivez la lettre que vous n'avez jamais écrite”. »

Il importe donc peu que Linda Lê ait elle-même des enfants ou pas. J'ai pour ma part trois enfants et partage largement les arguments de l'écrivaine à qui je voue une admiration presque sans bornes. C'est pourquoi je conseille la lecture de ce bref texte.

Page 38 elle reprend l'assertion de Tolstoï, glanée dans son « Journal » : «  La maternité n'est pas la plus haute vocation d'une femme ».
Si elle choisit de s'adresser directement à cet être qui n'existera que dans l'imaginaire de sa conceptrice c'est, à mon sens, pour mieux interpeller sur la condition féminine en général, par delà la maternité, car il ne faut pas l'occulter, dans le texte il y a un certain S., compagnon de la narratrice qui est également présent.

Linda Lê a choisi de consacrer sa vie à l'écriture comme semble l'indiquer le quatrième de couverture : « La mise au jour d'une fiction n'équivaut pas à l'éclosion en soi d'un germe de vie ».
La lettre est somme toute empreinte de tendresse comme l'attestent ses dernières lignes et le style très agréable d'écriture invite à découvrir d'autres livres de Linda Lê.
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Une lettre bouleversante

J'avoue que je ne connaissais pas du tout le principe : un auteur qui écrit une lettre pour une personne, en particulier et qui le publie. Je me suis dit que ce format court pouvait très bien me convenir après deux gros pavés. Et en effet, ce fut le cas ! Ce fut même l'effet amplificateur du tout ! Je me suis retrouvée bouleversée, révoltée, réfléchie, pensive, peut être même un peu défaitiste en fin de compte. Pour vous expliquer, Linda Lê va écrire une lettre à un enfant qu'elle n'aura pas. En effet, elle ne veut pas faire d'enfant mais sa famille et son compagnon le lui reproche. Et elle nous explique pourquoi.

Tout d'abord, sa famille lui a reproché d'être née fille. Puis d'être intelligente. Son compagnon lui a reproché d'être une femme et de se consacrer qu'à sa carrière. Et la société, en fin de compte, montre son incompréhension face à ce refus. Linda Lê nous montre ce qu'elle prend en pleine figure tous les jours : les réflexions, les on dits, les regards. Et elle nous explique son choix, sa culpabilité, ses envies. Et je dois dire que ce témoignage et cette réflexion m'ont fait énormément réfléchir

A lire pour tous ceux qui croient encore que les femmes sont l'égale des hommes

Oui, je sais, je suis dure. Mais en y réfléchissant bien, c'est vrai. On nous enfonce une sorte d'échelles de valeurs à respecter. On doit être jolies, intelligentes, trouver du travail, trouver un mari, enfanter, élever, tenir la maison. La liberté de la femme, enfin de compte, c'est l'addition des corvées de la femme et celle de l'homme. Car la pression sociale n'est pas du tout la même sur l'homme que sur la femme, et avec ce témoignage-ci (ajouté au mien enfin de compte, puisque j'en suis une … de femme je veux dire), je me rends encore plus compte qu'être une femme, à notre époque, c'est pesant. Oui j'aimerai bien être un homme de temps en temps, être moins responsable. Avoir le choix.

Pour moi, le choix des enfants ne s'est pas fait (je ne vous raconterai pas ma vie, mais en gros, j'en ai quoi). Mais j'ai surpris les mêmes réflexions de Linda Lê quand je suis redevenue célibataire : « Tu n'es pas perdue, tu vas pouvoir trouver quelqu'un. Au pire, tu as déjà montré que tu n'étais pas stérile ». Bon, c'est schématisé mais c'est là. Et ici, le crime de Linda Lê, ce n'est pas qu'elle ne peut pas avoir d'enfants. On pourrait l'excuser encore un peu à ce moment-là. C'est qu'elle ne veut pas en avoir. Pour les gens, c'est inconcevable ! Pourquoi une femme, cet utérus vivant tout plein d'oeufs pour propager le patrimoine génétique mondial ne veut pas utiliser son outil. Elle pourrait faire un effort tout de même ! Mais non. Elle est égoïste (véridique, c'est écrit dedans) car elle privilégie son intellect, sa carrière, sa liberté. Et pour cela, on serait prêt à la lyncher sur place !


Une lettre libératoire.

Le pouvoir de l'écriture est ce qu'il est (surtout qu'on ne serait pas là à papoter livre s'il n'existait pas, n'est-ce pas ?) Cette lettre pourrait être une sorte d'antidote à la prison dont on essaie d'imposer Linda Lê. On sent qu'écrire ces sentiments, de poser cette situation sur papier, la libère. Et nous aussi quelque part. Pourquoi devons-nous être dans un rôle qui ne nous convient pas. Pourquoi, nous les femmes, avec tout ce que l'on peut avoir de moyens de contraception, ne pouvons-nous pas dire non à la procréation. Cela doit être un droit et non un devoir. On peut avoir le choix d'en avoir ou pas, sans avoir cette espèce d'oeil accusateur au-dessus de nous.

Pour conclure à cette chronique, je voulais simplement dire Merci à Linda Lê, de coucher tous ses sentiments qui sont aussi à nous. Merci d'avoir apporté ce petit caillou à l'édifice qui permettra peut-être un jour de ne plus avoir un rôle prédéfini de pondeuse à retardement, que toutes les femmes aient le choix. Merci
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La quantité de pages ne fait pas la qualité d'un récit ! en voici une preuve supplémentaire avec ces 60 pages percutantes…un texte fort, qui claque ! Je suis admirative devant la prouesse de l'auteure qui a réussi à écrire un texte si dense dans une langue à la fois riche et précise…qui m'a un peu rappelé l'écriture d'Amélie Nothomb.
Elle écrit donc une lettre à l'enfant qu'elle n'a pas eu, donnant les arguments qui lui ont fait refuser la maternité (c'est un choix) et imaginant quelle aurait été la place et la vie de l'enfant si elle avait cédé à la pression exercée sur elle. Son texte, poignant et d'une grande intelligence, témoigne d'une réflexion profonde : il incite le lecteur à se positionner quant à ses conceptions de la maternité, de la filiation.
Elle refuse en fait de faire porter à un enfant le poids de ses souffrances, de son enfance, de sa mauvaise relation avec sa propre mère…Elle ne veut pas que son enfant soit son « pansement » et ne se berce pas d'illusions telles que « Je saurai lui donner ce que je n'ai pas eu ».
Ce texte résonnera longtemps pour moi !
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Thèse.Antithèse. Synthèse.
La narratrice écrit une longue lettre et un court essai à l'enfant qu'elle n'aura pas.
Pourquoi?
Parce que c'est son choix "dans un monde qui court au désastre", pour ne pas l'obliger à "pallier ses propres ratages", pour éviter contraintes, et entraves,parce qu'elle chérit sa solitude,parce qu'elle se donne déjà toute entière à la littérature véritable "sacerdoce",parce qu'elle a manqué de l'affection d'une "Big mother" à la "science infuse,abusive,exclusive et cassante et d'un père déraciné.
Et pourquoi pas? plaide S. atterré par leur "love affair" qui s'essoufle."Ce n'est pas être moutonnier que de vouloir engendrer", tu es immature,maboule,asociale...
Stop!
Et s'il fallait couper le cordon ombilical pour pouvoir engendrer soi même?
Alors elle le fait vivre quand même en mots sur "ce frêle esquif de papier" ....comme un Moïse à sauver.
Lettre émouvante, sincère qui ose aborder le tabou du refus de maternité et ouvrir une brêche dans la lourde chappe qui scelle le non-désir d'enfant jugé égoïste de l'extèrieur alors qu'il est peut-être tout le contraire.
A l'enfant que je n'aurai pas vient de recevoir le prix Renaudot poche 2011 et Linda Lê est par ailleurs l'auteur de plusieurs autres ouvrages aux éditions du Nil et ailleurs.
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Il est audacieux et courageux de dire haut et fort qu'on ne souhaite pas être mère dans une société comme la notre; société dans laquelle les femmes sont sommées d'entendre le tic tac de leur horloge biologique, sont regardées de travers quand elles sont sans progéniture après 35 ans.....
Sous forme de lettre à un enfant non né, l'auteur se dévoile en toute sincérité et sans pudeur.
Sans jugement, moi qui suis mère, j'ai aimé.
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Pas aimable Linda Lê : c'est elle-même qui s'évertue à nous le dire. Si peu aimable qu'elle refuse à l'homme qui l'aime de partager avec lui son rêve d'avoir un enfant. Non, elle ne se reproduira pas, elle ne se racontera pas d'histoires sur cet enfant qu'elle pourrait avoir, ce qu'il pourrait devenir, ce qu'il pourrait construire... Non, elle ne se laissera pas emporter par la rêverie de berceaux, de rubans, de vacances à la mer.... Non, elle serait d'ailleurs une bien mauvaise mère, trop "loufdingue", trop déséquilibrée qu'elle est, trop obsédée par sa création littéraire. Ce choix, si difficile aujourd'hui à affirmer pour une femme, elle en fait un texte admirable, une lettre d'amour qu'elle envoie à ce fils qu'elle n'aura jamais mais qui, pour toujours, est là présent en elle, l'accompagne, doué de vie.
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Ce texte de Linda Lê sur le choix de non-maternité est un témoignage émouvant (à destination de son enfant immatériel) qui en quelques soixante pages nous entraine dans une réflexion détonante. Quel est le point de la bonne société sur ces femmes qui ont décidé de ne pas enfanter? Il va de soi qu'elles sont jugées, pointées du doigt et doivent même se justifier car ne pas vouloir avoir de descendance est une décision lourde de conséquences. Linda Lê en fait l'expérience avec son petit ami, S., qui use de tous les arguments pour tenter de la convaincre d'enfin entrer dans le moule. Mais l'auteur a déjà bien réfléchi à la question et trouverait presque contre nature de donner naissance à un être non désiré. Doit-on abdiquer pour sa compagne ou son compagnon? Peut-on espérer un éveil de l'instinct maternel en voyant la "septième merveille du monde" pointer le bout de son nez?
Les mots de Linda Lê sont puissants, brillants et ont résonné en moi extrêmement fort car ils sont criants d'une autre vision de la vie, non moins belle, mais différente de la majorité. Je me suis plus d'une fois remise en question en me disant que foncièrement la femme a, à notre époque, son propre libre-arbitre et peut donc décréter ne pas vouloir être féconde. Est-ce un mal? Peut-on parler d'égoïsme? C'est un vaste débat auquel je ne suis pas sûre d'avoir une opinion très tranchée. Mais le non-désir de maternité m'interpelle car, au contraire de Linda Lê, j'ai un besoin viscéral de me "perpétuer". Je n'en suis pas encore là mais je ne pourrais concevoir un avenir sans enfant. D'un côté comme de l'autre il doit y avoir un certain égotisme, à vouloir avoir toujours une partie de soi et/ou de son nom sur Terre, pour continuer à exister, par prolongement.

Et comment aurais-je subvenu à leurs prodigalités, moi qui suis une cigale, gaspillant mon avoir dans les librairies, moi qui tombe toujours amoureuse d'irresponsables sans fortune, moi qui n'ai pas un métier solide, mais ne suis qu'un écrivain dont les romans ne font pas un tabac? (p. 27)

Sitôt tournée la dernière page, j'ai voulu reprendre certains passages et reparcourir le livre, avec un second plaisir, celui de bien m'imprégner de ces mots, touchants de sensibilité et pourtant très justes et mesurés. Car Linda Lê nous fait part de sa vie, avec S., mais aussi avec des parents (qui n'ont peut-être pas été des exemples de parents), mais aussi avec elle-même et ses démons.
A lire d'une traite et à reprendre à l'occasion pour ne pas garder des oeillères sur l'inévitable "fatalité" d'assurer la lignée. D'autres points de vue existent... et c'est tant mieux !
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« Écrivez la lettre que vous n'avez jamais écrite. », voilà le principe de cette collection. Dans cet opus l'auteure Linda LÊ s'explique sur son choix de non-maternité en écrivant une lettre à celui qui ne verra jamais le jour.

Une fois refermé le livre « Dépendance Day » j'ai eu envie de lire ce minuscule livre (65 pages) qui était dans ma PAL depuis un certain temps, afin de prolonger la réflexion sur les relations mère-enfant et sans le savoir encore mère-fille.
Car, je me suis demandée, si finalement cette lettre n'était pas adressée plutôt à la mère de l'auteure.
Je n'ai pas trouvé dans ce livre pourquoi Linda LÊ ne souhaitait pas d'enfant, mais une description de son éducation et de ses relations désastreuses avec sa mère. Même si je ne suis pas totalement blonde et que j'ai compris que les deux sujets étaient liés, j'aurai aimé que l'auteure exploite plus le pourquoi de sa décision : beaucoup d'enfants maltraités par leurs parents ont un jour le désir d'enfanter et deviennent des parents géniaux… Je ne suis pas certaine que cette lettre ai aidé la narratrice, dans le sens que son travail, à la fois littéraire et thérapeutique, n'est pas abouti.
Si je n'avais pas peur de me transformer en psychologue du café du commerce, je dirai qu'elle n'a pas pu envisager la maternité parce qu'elle n'a pas fait la paix avec sa mère et avec elle-même.
Son choix n'est pas assumé et celui d'un adulte responsable puisqu'elle va chercher à se justifier par le comportement d'un tiers.
Peut-être, Madame LÊ, faudrait-il reprendre votre ouvrage dans quelques années…

Le style m'est, en outre, apparu souvent alambiqué et lourd.

Au final, je suis passée totalement à côté de cette lettre. Dommage… Chapeau quand même à l'auteure d'avoir essayé d'aborder ce qui reste le tabou de la non-maternité.

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