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EAN : 9783538069169
289 pages
Winkler Verlag /Patmos (30/09/2001)
4.13/5   52 notes
Résumé :
Avec Padre Padrone, Gavino Ledda nous raconte son histoire, celle d'un enfant retiré de l'école pour devenir berger. Il lui faut apprendre à reconnaître les arbres et les collines, les betes et les climats. Il lui faut accepter la loi d'un père violent, propriétaire de la terre et des hommes.
Viendront plus tard le temps de la révolte, la lutte de l'adolescent pour le droit d'apprendre et les efforts prodigieux qui le conduiront au professorat. Padre Padrone ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Vive les challenges !
C'est grâce à eux que je suis souvent tombée sur de vraies pépites. Padre Padrone en fait partie sans aucun doute.
Ce roman autobiographique est l'histoire d'un apprentissage obstiné et contradictoire. C'est une réflexion profonde sur la relation père-fils et un regard réaliste sur le malheur des pauvres dans la Sardaigne d'après-guerre.
Il lui faudra des années à Gavino Ledda pour se rebeller contre un père qui connaît comme seuls moyens d'éducation, la rudesse et le travail acharné. Berger illettré jusqu' à l'âge de 20 ans, il sortira de sa condition, grâce à sa propre volonté.
Quelle vie ! Et quel talent pour la raconter !
J'ai beaucoup aimé la construction du récit, qui intègre des mots sardes et des chansons populaires.
J'ai lu ce livre lentement en m'arrêtant souvent, pour savourer toute la beauté de l'écriture et la profondeur des paroles.

Inoghe mi vaghe die
Cantende a Palma dorada
Tue in su lettu coscada
E deo frittu che nie…
« Et voilà bientôt le jour
Chantons Palma la dorée
Toi, couchée dans ton lit,
Et moi dans le froid de la neige »…

Si on se concentre bien sur les mots de cette chanson, on ne peut s'empêcher de penser à la vie de Gavino, qui était celle de tous les bergers sardes de l'époque.
Gavino Ledda n'utilise jamais un mot par hasard. le langage de la nature et des animaux est tellement enraciné en lui, qu'il devient sa marque de fabrique le temps d'un roman.
Il ‘bêle' son chagrin lorsque son père l'arrache à l'école à l'âge de 6 ans, ou il laisse la nature s'exprimer lorsque la solitude des pâturages lui pèse de trop : ‘tout le feuillage hurlait comme un loup affamé. Dans la solitude, la parole de la nature en colère dominait tout'…
Et quand le plaisir de la découverte de la musique prend le relais, voilà ce que cela donne :
‘Non, la nature, à présent, je la laissais parler comme elle voulait et je ne répondais point à ses discours…Dans ma passion, je devenais insensible au gel, pareil à une bûche brûlante qui craquait et étincelait même sous l'eau. (…) Après trois mois de solfège clandestin, le bois de ma passion se transforma en un joli tas de braise, où on aurait pu mettre à cuire le plus savoureux des rôtis musicaux'…
Un récit dur et optimiste, une prose superbe. Tout simplement inoubliable!

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Abramo Ledda vient à l'école pour chercher Gavino, son jeune fils de 6 ans car il trouve qu'il lui sera plus utile à garder les brebis, il l'amène à Siligo ou vit la famille puis à Braddevrustana !
Dans un premier temps, il lui apprend les rudiments pour reconnaître les chênes, les collines, les bêtes et la nature sauvage, mais le père va cultiver une oliveraie, Gavino va rester tout seul avec le chien et Pacifico : le mulet..Son père n'est jamais content de son travail et le frappe avec violence à coups de ceinture, de branchages..Peu à peu, Abramo va l'envoyer au village pour apporter le lait, le fromage puis lui confier des boeufs pour labourer et aussi pour travailler comme journalier dans des métairies voisines ..
Gavino souffre de sa solitude, de ne pas revenir voir ses frères et soeurs et même ses amis de Siligo..
La Sardaigne est une île pauvre, aride, écrasée en été par la chaleur et glaciale l'hiver avec la pluie, la neige et en plus : Gavino est obligé de lutter contre les puces, la saleté de leur habitat rustique, les moustiques, et les poux, subir même l'invasion de sauterelles qui ravagent les cultures et puis il y aura le gel de 1956 qui fait périr tous les oliviers..
A l'âge adulte Gavino va, comme tous les jeunes du village être tenté par l'émigration pour fuir, avoir une vie meilleure, il fera une tentative pour les mines de Hollande : en vain et, finalement il va s'engager dans l'armée..
Le problème est qu'il ne sait ni lire, ni écrire et, ne parle pas l'italien, de plus il a choisi par erreur une spécialité : le radio-montage qui présuppose d'avoir fait des études de mathématiques jusqu'à la quatrième..Heureusement, il va être aidé par des jeunes gens à qui il raconte sa détresse.. Il réussira tous ses examens à force de volonté et de travail acharné et, il deviendra sergent..Mais, il a pris le gout des études et veut continuer d'étudier : il démissionne..
De retour à Siligo, son père va lui faire comprendre qu'il est un poids mort pour la famille et qu'il doit trouver un travail pour rapporter de l'argent ! A cette occasion, Gavino va enfin se révolter et affronter ce père violent et avaricieux qui a saccagé son enfance !
Gavino Ledda nous offre une biographie émouvante sur son enfance entravée, frustre et solitaire. Mais aussi, la sociologie de la vie rude et pauvre des Sardes dans les années 50, leur émigration massive pour échapper à la misère ! Une belle plume qui, au travers de ses souffrances d'enfant, n'oublie pas d'évoquer sa Sardaigne natale..
L.C thématique de mars 2023 : une biographie.
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A six ans tout juste, le père de Gavino retire l'enfant de l'école pour en faire un berger, l'emmène dans la montagne au dessus de Siligo, dans le Logudoro – province de Sassari . Il apprendra dans la solitude - glacée en hiver – à garder le troupeau avec la seule compagnie du chien Rusigabedra, de l'âne Pacifico du bruissement des frondaisons des grands chênes-liège ou du torrent. Intimité avec la nature sauvage.
Quelques histoires de bandits sardes.

« Pédagogie » féroce du père : les coups de ceinture ou de branchages au moindre écart. Plus tard, il apprendra à traire et ira même livrer lait et fromage au village.
Apprentissage du métier de berger, mais aussi d'agriculteur. Piocher la vigne d'abord . Dès que l'enfant est assez grand on lui confie une paire de boeufs pour labourer et il devra louer ses bras aux autres métayers.
« la compétition dans le travail servait de fondement moral, elle permettait d'accéder au prestige social » et à la richesse. »
La famille Ledda, quittant le village pour vivre à la bergerie, vit dans une certaine sauvagerie, loin des écoles, des distractions et de la société des hommes. Mais avec le travail acharné du père, la richesse n'est pas loin : ils défrichent les chênes, bonifient les champs et la vigne. La fierté du père est l'oliveraie crée de rien, avec des pousses sauvages, dans une clairière. Les oliviers sont plus « les enfants chéris » du père que ses enfants humains.

« Ce combat effréné pour accroître notre bien, dans une rivalité acharnée avec les autres, n'était qu'un mouvement incontrôlé de notre inconscient, dans la quête rapace de « ce qui est à moi » opposé à ce qui est à toi » terrain obligé du devenir social »

Analyse Gavino Ledda

« chacun de nous était un arbre engagé dans ce combaat impitoyable et cruel en pleine nature : tous les bergers, une chênaie, plongeant à l'envi leurs racines dans le sol et élevant leurs frondaisons en cherchant à avoir le dessus »
Monde d'une cruauté et d'une violence terrible. Renards qui mangent les agneaux, agneaux que les bergers, les valets mal nourris se volent entre eux. Combat avec les éléments : le gel décima en 1956 l'oliveraie réduisant à néant les efforts du père, les sauterelles que l'on combat avec des moyens dérisoires….
Arrivé à l'âge adulte, Gavino, comme tous les jeunes du village, songe à émigrer. Retenu par son père il va s'engager. C'est à l'armée sur le continent que le jeune solitaire, illettré, ne parlant que le Sarde va découvrir la solidarité de tous ceux qui l'aideront à apprendre l'Italien, puis le métier de radio-monteur, puis à faire des études.
Gavino trouve sa voie, il étudiera. Malgré l'opposition du père, malgré les privations.
Et il deviendra écrivain et professeur.

Un chef d'oeuvre!
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Une de ces magnifiques histoires de résilience comme il en existe parfois. Un berger sarde, contre l'avis de son père, qui en a besoin pour garder le troupeau, va peu à peu reprendre les études à force de courage et de passion, et grâce au service militaire, deviendra enseignant.
Lu en VO, après avoir vu le magnifique film des frères Taviani, c'est une intrigue que l'on oublie pas.
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Un très, très lointain souvenir époustouflant de lecture, telle que je m'étais précipitée pour voir l'adaptation cinématographique des frères Taviani, qui m'avait, de façon très différente, tout autant emportée.
En lisant la très convaincante critique de Miriam (17 septembre 2014), j'ai de grandes envies de "relecture"...de ce superbe texte....
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Le mulet avançait vite sur la route poudreuse et caillouteuse, et les sabots évitaient les pierres, s’éloignant rapidement de Siligo : il me transportait comme il avait souvent transporté les provisions pour le chien, la nourriture pour les porcs, la semence que mon père jetait continuellement sur les jachères. Et j’étais moi-même une semence, j’avais à naître et à germer tout seul dans notre terre, à suivre les lois du royaume végétal sur les friches de la solitude ainsi que tous les petits bergers de la Sardaigne.
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Avec une volonté rude, animale mais inexorable, mes doigts calleux et tordus par la bêche avaient pour la première fois l’occasion d’exprimer aux chênes séculaires la sensibilité de générations et générations jamais initiés à la musique. A travers mes doigts, l’homme des cavernes, encore intact en moi, mais sensible dans toute son humanité, s’apprivoisait grâce à la musique : il commençait à creuser en lui et à découvrir par - delà ses campagnes, que le monde ne finissait pas au bout de notre horizon...
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La cuisson achevée, j’assistai à une scène cruelle, désespérée. Le doyen des domestiques ôte la casserole du feu et la pose dans un coin de la cabane : les autres se groupent en rond autour du récipient, qui dégageait une véritable colonne de fumée, on aurait dit un tronc d’arbre s’élevant sous le toit. Ils s’y placent du mieux qu’ils peuvent, attendant que la ratatouille refroidisse et qu’ils puissent attaquer et dévorer ce plat chaud dont ils bénéficiaient rarement.
Puis, tout le monde de se ruer sur les cuillers entreposées dans une fente du mur sec de la cabane : malheureusement il s’avéra qu’il n’ y avait pas autant que de bouches ; l’un des valets ne retrouva pas la sienne.
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Notre famille se retrouvait dans la condition d’un essaim d’abeilles dont la ruche s’est éboulée, d’une nichée d’oiselets encore déplumés que renverse une bombe. Nos traditions nous montraient le chemin de la rescousse, le long passé des bergers nous enseignait la résignation et le retour aux tristes réalités : recommencer l’ouvrage.
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Notre famille s’était agrandie. Et, d’après la morale courante, mon père avait déjà accompli son devoir social. De même que les bêtes, les bergers doivent former physiquement leur descendance : veiller uniquement à leur entretien et nullement à leurs conquêtes intérieures. Dans un sens c’est juste. A la campagne, seuls l’instinct et la force ont une utilité : des muscles, que ses pères éduquaient avec rigueur pour les adapter à la nature qu’ils auraient à dompter.
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