Sur un fond de belles images poétiques de "neige étrangement cruelle dans son incandescence de linceul",
Philippe Lemaire (grand reporter à France 3, auteur de chansons, réalisateur de documentaires, romancier, campe son décor tissé d'amour et de rage.
Deux histoires s'interpénètrent, celle de la jeune Camille "pelote d'épingles aux abois" partie de chez elle, en 1954,après avoir claqué la porte et réfugiée chez Thomas Aurenche le nouveau "maître d'école" timide et féru de photos et celle de sa mère Adeline (quelques 20 ans en arrière) partie d'Indochine, seule, avec un piano rouge dans ses bagages, après la ruine de son père, que Camille confie à son nouvel ami.
Je salue l'intrigue bien ficelée et l'imagination débordante de
Philippe Lemaire qui capte l'attention du lecteur dés le début.
Je ne dévoilerai pas le cruel secret qui entoure la fugue de l'une et l'exil de l'autre, je dirai juste que les portraits psychologiques sont très forts dans cette saga familiale sous le signe du patriarcat, du joug du grand-père Charles, patron d'une florissante fabrique de Vermouth savoyarde, un "sacré égoîste" "qui faisait de l'ombre" à son fils bégayant, à la petite jeune fille perdue qui passe un marché de dupes mais s'engagera pour vivre malgré tout.
On voit bien sur fond historique de crise de Wall Street qui touche le monde, puis de deuxième guerre mondiale les débuts du cinéma qui distrait de la violence ambiante, de l'incertitude (mises en parallèle avec les malentendus familiaux).
Le "rire de mésange" de Camille résonnera-t-il à nouveau lorsque les larmes étincelantes de la neige se seront évaporées?
Suspense, car quand "le destin se met à cafouiller, il cafouille"!
Bravo!