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sur 2549 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Quel plaisir de retrouver Pierre Lemaitre et la famille Pelletier, en 1952, dans le Silence et la Colère !
Si Étienne, le plus jeune, n'a pas survécu dans le Grand Monde, restent bien sûr Louis et Angèle, les parents, ainsi que Jean, dit Bouboule, François et Hélène, leurs enfants.
Les parents sont restés à Beyrouth où leur savonnerie sera prétexte d'un nouveau pèlerinage annuel, un peu différent des précédents à cause de la fameuse Geneviève, l'épouse incroyable de Jean.
Ce second tome de la trilogie Les Années Glorieuses est concentré sur deux mois : février et mars 1952. Il va s'en passer durant cette soixantaine de jours !
Comme dans ses précédents livres, Pierre Lemaitre m'a captivé dès la première ligne. Il m'a fait trembler, espérer aussi, sourire enfin. J'ai été déçu par la tournure de certains événements, ému par les amours difficiles de plusieurs protagonistes, amours hésitants, conditionnés par un passé parfois lourd à assumer.
Les quatre grands thèmes autour desquels s'articule ce roman aux multiples surprises sont le projet de construction d'un barrage qui va noyer une vallée, la boxe à Beyrouth, l'avortement et le début des grands magasins vendant au plus juste prix.
Habilement, comme à son habitude, Pierre Lemaitre m'a fait passer d'un thème à l'autre tout en maintenant un suspense incroyable autour de la personnalité de Jean qui a déjà un lourd passif, sans oublier Geneviève son épouse…
Le Silence et la Colère, ce titre s'applique parfaitement aux habitants de Chevrigny qui tentent jusqu'au bout de sauver leur vallée. L'auteur le dit lui-même, il s'est inspiré du barrage de Tignes (Haute-Savoie) mais a changé de massif pour se rapprocher de Paris. Malgré cela, le ressenti, les divisions, les manoeuvres, les tentatives désespérées de certains habitants sont les mêmes et Pierre Lemaitre sait parfaitement mettre tout cela en scène.
En fait, ce sont Hélène et François Pelletier, la soeur et le frère, journalistes dans un grand quotidien parisien du soir – Hélène étant d'abord photographe – qui se retrouvent au coeur des différentes intrigues. Leurs articles et leurs photos font mouche à chaque fois. D'autres personnages secondaires animent, influent sur l'histoire mais il serait trop long de les citer tous. Je vous laisse donc le plaisir de la rencontre.
Dans ce roman, avec délicatesse et tact, mais sans ménager responsables politiques, police et justice, Pierre Lemaitre met en relief la lutte des femmes pour la liberté de l'avortement. Les relents du régime collaborationniste de Vichy sont encore bien présents. Actions et témoignages montrant bien tous les drames causés par l'aveuglement d'une époque niant le droit des femmes à disposer de leur corps, sont bien amenés par l'auteur, ce qui rehausse encore la qualité de son roman.
Pierre Lemaitre, avec le Silence et la Colère, m'a encore régalé et conquis et je crois savoir que je ne suis pas le seul dans ce cas…

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Après le grand monde, premier tome de la trilogie sur les Trente Glorieuses, quel plaisir cela a été de me replonger dans la France des années 1950, avec le Silence et la Colère de Pierre Lemaitre et de retrouver cette inimitable famille Pelletier. On la rejoint donc quatre ans plus tard, en 1952.
Si les parents Louis et Angèle sont restés à Beyrouth pour gérer leur savonnerie, les enfants Jean, François et Hélène tentent de faire leur vie à Paris.
Jean, dit Bouboule, encore en proie à des pulsions meurtrières, vient de créer un grand magasin « Dixie » et l'ouverture approche... Quant à son abominable épouse Geneviève, elle est bien sûr toujours là, plus invivable que jamais, même vis-à-vis de leur fillette Colette, 3 ans.
François toujours fou amoureux de Nine, est reporter au « Journal du soir » et Hélène, la plus jeune, 23 ans, photographe, est passée au rédactionnel en rédigeant cinq articles sur « l'hygiène des femmes » (clin d'oeil à Françoise Giroud ), avant de se voir proposer une enquête-reportage sur la construction d'un barrage et un village appelé à disparaître.
« Il en était ainsi chez les Pelletier. Émotions, secrets, silences, aveux et déclarations se succédaient, il y aurait eu un roman à écrire sur les pensées des uns et et des autres. Une vie de famille. »
Belle manière d'annoncer dans les premières pages ce qui se révèle une magnifique saga familiale, mais pas que.
En effet, Pierre Lemaitre, avec tout le talent qu'on lui connaît en fait un vrai roman social.
Il restitue avec maestria et beaucoup de rythme cette France d'après-guerre.
Il nous fait vivre au plus près, la naissance de la société de consommation, l'arrivée de la grande distribution avec l'ouverture de ce grand magasin. La vente à prix coûtant au début pour appâter les clientes. La fascination de ces clientes devant les étalages et les petits prix. Les méthodes utilisées pour garder un personnel compétitif, promesses, menaces. le besoin vital de travailler pour beaucoup de femmes. Leur obéissance pour garder leur emploi. Mais leur révolte devant l'injustice… Conflit social, revendications…
Il raconte également la condition féminine au début des années 50 avec cette chasse à l'avortement tous azimuts, en mettant en scène le désarroi de ces femmes désarmées ne sachant à qui s'adresser et le risque encouru par les médecins désireux d'apporter leur aide, les unes et les autres pourchassés par un inspecteur plus que zélé aux méthodes plus que discutables, Vichy n'est pas si loin...
Avec les deux journalistes que sont François et sa soeur Hélène, nous assistons quasi en direct à la montée des médias et à la course endiablée pour avoir la primeur des infos.
Si François se retrouve sur une ancienne enquête concernant l'assassinat d'une actrice, sa soeur, elle, est dépêchée dans ce petit village de Chevrigny qui vit sa dernière semaine avant la mise en eau du barrage hydroélectrique, référence au barrage du Chevril construit cette année-là et au village de Tignes en Savoie. Cela n'a pas été sans me rappeler le beau roman de Joy Sorman et Maylis de Kerangal : Seyvoz.
C'est à l'agonie de tout un village qu'il nous est donné d'assister, à la colère des uns, au fatalisme des autres ...
Cet épisode est très évocateur des sacrifices faits pour les nécessités du progrès et pour accéder à la modernité et à l'amélioration des conditions de vie. Certains passages sont vraiment très émouvants.
L'auteur nous entraîne également dans quelques incursions à Beyrouth pour le fameux « pèlerinage Pelletier » puis, en compagnie du jeune boxeur Lucien prêt à mettre sa vie en jeu pour conquérir son amour.
De belles histoires d'amour se tissent tout au long du roman mais de nombreux mystères demeurent pour notre plus grande curiosité !
Le Silence et la Colère, titre en parfaite adéquation avec le roman alterne et entremêle savamment les histoires de chacun avec la grande Histoire.
Roman totalement addictif, émouvant, haletant, qui peut parfois nous plonger au plus noir de l'âme humaine tout comme au meilleur, le deuxième volet de cette chronique familiale m'a absolument conquise et c'est avec une grande impatience que j'attends le troisième !
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Il y a quelques heures, je lisais les premières lignes de la chronique d'un lecteur, qui, désabusé par la lecture du premier volet de la trilogie de Pierre Lemaître, le grand monde, n'y allait pas avec le dos de la cuillère, qualifiant l'ouvrage de roman de gare ou de plage.
Les bras m'en tombent, mais libre à chacun de s'exprimer.
Pour ma part, et alors que je viens de terminer le second opus, le silence et la colère, je veux bien prendre le train régulièrement avec cet auteur que je prends le plus grand plaisir à lire, (pour la plage, je m'abstiens, je ne suis pas adepte du coup de soleil qui vous laisse sur la peau hâlée, la trace du marque-page).
Bref, revenons à  nos silences (Il y en a qui feraient bien d'y penser) et nos colères (elles sont mauvaises conseillères).
Une fois de plus Lemaître Pierre, m'a embarqué dans la suite de sa saga familiale.
Les Pelletier.
Quelle famille !
Pendant que Louis et Angèle, les parents, continuent de faire tourner la savonnerie à Beyrouth et que le père s'enthousiasme pour un jeune boxeur qu'il a pris sous son aile, les enfants tentent de se construire une vie en France.
Jean et sa charmante épouse (oui, je suis hypocrite) Geneviève, rêvent de conquérir le tout-Paris avec l'ouverture prochaine de leur magasin de vêtements à bas prix (enfin, c'est surtout Jean qui rêve, madame, elle est très sceptique pour ne pas dire plus).
François se voit confier un poste important dans le journal pour lequel il travaille, rivalisant avec sa soeur Hélène, photographe pour ce même quotidien, qui se voit, elle, proposer une mission, un reportage dans un village appelé à disparaître.
Évidemment, je n'en dirai pas plus, je laisse à chacun le plaisir de découvrir les péripéties qui jalonnent la vie des personnages de ce roman.
Le romancier accroche son lecteur dès les premières pages et ne le lâche plus, ou plutôt, c'est celui-ci qui ne lâche pas sa lecture addictive.
Le silence, c'est les choses qu'on tait, les secrets bien gardés, les actes qu'on feint d'ignorer, les résignations.
La colère, c'est les cris du coeur, les cris du corps, la révolte des exploités, les sursauts devant l'inéluctable, les luttes.
Si vous avez aimé le grand monde, vous allez adorer le silence et la colère.
Je suis impatient de découvrir la suite, mais que l'attente va me paraître longue.
Enfin, d'ici là, il y aura bien d'autres romans de gare ou de plage pour m'accompagner...
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En 1952, Françoise Giroud, débutante alors inconnue, publiait dans ELLE une enquête éclaboussante « La Française est elle propre ? ».

Pierre Lemaitre attribue ce reportage à Hélène, la fille de Louis Pelletier, prospère industriel, connu pour son slogan « Savons du Levant ; savon des gagnants » … qui profite sans aucun doute des retombées commerciales de cette campagne de presse. Et c'est à une grande lessive que nous convie le romancier qui confie au bâtard Calamar le soin de dynamiter et noyer un village et charge une épouse dévouée de détacher un mouchoir taché de sang à une époque où les faiseuses d'anges exercent discrètement en espérant passer sous le regard d'une police peu soucieuse de compromettre des familles honorablement connues.

Epoque où l'enseigne DIXIE (alias TATI) de vente de textile et de bazar bon marché révolutionne le commerce en proposant à une clientèle, sortie de la guerre et des pénuries, un vaste choix de produits peu chers, et bâtit sa prospérité sur le dos de ses vendeuses fermement dissuadées de se syndiquer.

Une cascade d'événements surprend à chaque chapitre le lecteur qui revit en 600 pages, le début des « trente glorieuses ».

Cette évocation historique rafraichit la mémoire et permet d'apprécier le chemin parcouru depuis 70 ans (c'est à dire depuis ma naissance).

En 1952, 75 % des Français n'ont pas de douche, seulement 27 % d'entre eux disposent de WC intérieurs et la moitié des locataires n'ont pas l'eau courante.
En 1952, beaucoup de logements ne disposent pas d'une puissance électrique permettant de brancher un Lave Linge.

En relisant ces pages, je me suis souvenu qu'à Rouen en 1970, en rentrant du lycée, une retraitée appréciait que je descende à la fontaine lui remplir ses brocs d'eau ; qu'en 1980, une voisine (qui nous fournissait lait et oeufs) n'avait pas l'eau courante dans sa ferme. Je me suis rappelé qu'en 1987, il fallait patienter un an pour être relié au téléphone au centre ville de Toulouse et j'ai jeté un regard nostalgique à mon combiné gris à cadran (que nos petits enfants sont incapables d'utiliser) et au Minitel qui traine dans mon grenier …

Véritable cure de jouvence, ce roman rajeunit et relativise le discours qui assène « on vivait mieux du temps de nos parents ».

J'ai pris plaisir à lire « Le silence et la colère », dont le titre évoque « Le bruit et la fureur », lui même référence à Macbeth et à ces vers :
La vie […] : une fable
Racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur,
Et qui ne signifie rien.
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Louis le patriarche, Jean, François et Hélène les enfants : les Pelletier, une famille où se succèdent les secrets, les jalousies, les ressentiments, les silences et les aveux. Il y aurait matière à écrire un livre sur cette famille et même plusieurs c'est ce que nous propose Pierre Lemaître. Nous sommes en 1952.
Pierre Lemaitre, dans la tradition du roman naturaliste et réaliste, nous offre un grand roman social ; la France est en plein essor mais cette marche en avant se fait au détriment de certains. La répression contre les avortements clandestins est terrible et pourtant c'est encore la seule solution offerte aux femmes. Les conditions de travail des ouvrières sont épouvantables : une exploitation permanente. Les logements sont vétustes et l'hygiène est déplorable. Pour la fée électricité, un village entier est sacrifié, englouti sous les eaux d'un barrage.
Le père et chacun des enfants Pelletier vont être mêlés à une sombre histoire différente que le lecteur suit avec plaisir tant l'écriture de Pierre Lemaitre est légère donnant au récit un rythme qui ne faiblit pas. Avec habileté l'auteur alterne avec chacune de ces intrigues, ajoutant de-ci de-là une dose de mystère ou de secret, n'hésitant pas à exhumer une vieille histoire de meurtre dont la victime était une actrice. Pierre Lemaitre a l'art de la description et tous ces personnages sont hauts en couleur mais il excelle particulièrement dans ceux qui sont exécrables et dans ce roman il nous régale avec Geneviève la femme de Jean, humiliante, manipulatrice, maltraitante envers sa petite fille.
Ce second volet des Trente glorieuses peut parfaitement se lire indépendamment du premier, Pierre Lemaitre a le talent de nous rappeler au détour d'un chapitre des informations qui facilitent la compréhension du récit. Une fois de plus la plume de Pierre Lemaitre m'a enchanté, il a su aiguiser mon appétit, une envie de connaitre la suite de cette saga familiale.



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1952, Jean, François et Hélène sont installés à Paris.
Louis et Angèle, les parents sont restés à la tête de leur savonnerie à Beyrouth.
- Jean, toujours animé de pulsions meurtrières et sa femme, détestable vont ouvrir un grand magasin place de la République. Grand magasin où les marchandises seront accessibles à presque toutes les bourses. Attention, cependant, à la tendance de Jean à mener de mauvaises affaires. La famille s'est agrandie avec la venue de Colette et la future venue d'un autre bébé.
- François, journaliste au "Journal du soir" se voit confier la direction des faits divers alors qu'il aurait voulu traiter d'affaires de plus grande envergure. Il est amoureux de Nine, relieuse. Elle se montre mystérieuse et cachotière, amicale et amoureuse à ses heures.
- Hélène entre comme pigiste au journal de Gabriel mais se verra confier un article sur l'hygiène des femmes en France ainsi qu'un article sur l'ouverture d'un barrage à Chevrigny et les conséquences de l'immersion d'un village entier. L'auteur fait allusion au barrage de Tignes inauguré en 1952.
Le roman, très vivant, très riche en sujets de toutes sortes nous tient en haleine.
Pierre Lemaître explore les défauts humains les plus sombres,leur donne vie à fond.
Le récit est construit de façon à ce qu'on ne lâche jamais le fil, à ce qu'on ne perde jamais de vue un personnage important .
Les actions se succèdent à un rythme rapide, très adapté à notre époque où on se déplace rapidement.
Il analyse la société de 1950 comme si on y était, à la manière de Zola au 18ème siècle mais en plus vif, plus rapide.
On se croirait même revenu dans "Les misérables"avec un personnage qui ressemble à Javert mais ici, ce n'est pas Jean Valjean qu'il traque mais les avortées et les avorteurs.
C'est un roman qui m'a grandement intéressée étant donné que j'ai passé ma petite enfance fin des années 1950.
Je ne savais pas qu'il y aurait une suite mais à présent j'en suis certaine. Il y a une place pour l'évolution des personnages.
Que va devenir Jean, la morale prendra-t-elle le dessus sur cet être que je plains et condamne en même temps?
Et son horrible femme? Geneviève, citée à tout bout de champ dans le livre? Et dire que je porte le même prénom !
François va-t-il pouvoir se réaliser dans son métier de journaliste?
Hélène va-t-elle trouver son chemin en tant que femme journaliste également ?
Cet opus m'a mieux plu que "Le grand monde"car j'ai pu prendre des repères avec une époque pas si lontaine quand on y pense bien.
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Eh bien, voilà : deux jours de lecture intense et ce deuxième tome a été comme le précédent un immense plaisir! Quel art du récit, une fois encore, quel tourbillon d'émotions variées!

S'appuyant toujours sur des faits historiques, Pierre Lemaitre arrive à les transformer en aventures humaines, mêlant intrigue policière, saga familiale et destins individuels surprenants et complexes.

On retrouve bien sûr la famille Pelletier, établie au départ au Liban, mais dont les trois enfants ( l'un , Etienne, étant décédé) vivent maintenant à Paris. Je préfère vous laisser découvrir par vous-mêmes leur devenir, vous vous doutez bien que l'auteur malmène encore leurs trajectoires et offre des situations inattendues et délicieuses au lecteur...

le silence, ce sera celui des femmes obligées d'avorter et menacées d'un procès, un silence qui se change en colère sourde, comme celle des habitants d'un village condamné à être submergé, comme celle aussi des vendeuses exploitées.

La famille Pelletier, au terme de ce deuxième tome, nous promet encore de formidables moments de lecture, soyez-en sûrs !
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Pierre Lemaître me fait penser à un vieux chat, de ceux dont on ne se méfie jamais assez, tant ils ronronnent d'aise dans leur sommeil. Jusqu'à ce qu'ils ouvrent un oeil vif. Et balancent un coup de patte bien ajusté.
Dans ce deuxième tome des "Années Glorieuses", j'ai retrouvé avec bonheur la famille Pelletier, entre Beyrouth et Paris. On est 1952, Bouboule s'apprête à ouvrir son grand magasin, François s'épanouit au "Journal du Soir", Hélène part en reportage dans un village qui sera prochainement inondé au nom du progrès. Et les parents organisent encore leur petit pèlerinage à la Savonnerie. Mais tous sont une fois de plus confrontés à leurs petits secrets (crime, mensonge, avortement, maltraitance...), et tous doivent affronter des personnages aussi retors qu'eux (juge, médecin, inspecteur de police, ingénieur de l'Electricité française...).

J'ai adoré cette suite du "Grand Monde". Ca commence un peu lentement, le temps des retrouvailles avec les membres de la famille (le chat qui ronronne), puis les éléments nouveaux apparaissent (le chat ouvre un oeil), et le récit s'anime, les histoires se croisent, s'évitent, s'entrechoquent (le chat bondit et joue avec ses petites souris). Et alors, il devient impossible de lâcher ce roman, tant le plaisir est intense.
Une nouvelle fois, j'ai été enthousiasmée par la façon dont Pierre Lemaître parvient à nous tenir en haleine avec cette saga familiale, en soignant simultanément ses personnages, tellement réalistes à force d'être improbables et si attachants dans leurs petits arrangements avec eux-mêmes (Bouboule en tête !), et son intrigue, qui imbrique la petite histoire dans la grande en nous offrant encore un morceau de récit national à la sauce piquante. Car l'auteur ne se départ pas de son écriture directe et limpide, tour à tour factuelle, subtile, drôle, tendre, mordante, et c'est un pur régal que de le lire.

Je reste donc hautement admirative de l'immense talent de Pierre Lemaître, de sa vive intelligence, de son imagination incroyable, de sa générosité illimitée -et de son humilité aussi (sa "gratitude" finale est éloquente). En mêlant roman populaire et exigence qualitative, il contribue à donner à la littérature française lustre et humanité, à la façon d'un Victor Hugo du XXIe siècle.
A lire sans hésiter, pour tous les amoureux des belles lettres, de Pierre Lemaître, de la famille Pelletier -et des chats, éventuellement.
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Février 1952. Tradition oblige, le pèlerinage Pelletier doit se tenir, comme chaque année, le premier dimanche de mars. Si Louis y tient plus que tout, notamment en la mémoire de leur plus jeune fils, Étienne, qui, pourtant s'en moquait comme ses frères et soeur, Angèle, son épouse, y voit là une occasion, devenue rare, de réunir toute la famille à Beyrouth. Même leur fille, Hélène, a rejoint ses frères et la capitale française. Photographe, collaborant au Journal du soir, elle se voit proposer par le patron, Adrien Denissov, avec qui elle entretient d'ailleurs une liaison, un reportage sur l'hygiène des femmes. Un nouveau statut dont elle se réjouit mais dont elle n'ose parler à François, lui-même journaliste au Journal du soir. S'il se voit proposer de partir en province pour couvrir un événement majeur, à savoir la disparition d'un village entier sous les eaux, projet auquel s'opposent les habitants, il ne peut accepter. En effet, le voilà bien préoccupé par Nine, sa compagne, dont il vient de découvrir ses penchants pour l'alcool et les vols. Qu'à cela ne tienne, il se replongera dans une affaire de meurtre, survenu il y a 4 ans et qui n'a toujours pas été résolu tandis qu'Hélène, elle aussi bien préoccupée, partira à Chevrigny. Quant à Jean, l'aîné, il doit mener de front et l'ouverture de son nouveau magasin et la deuxième grossesse de Geneviève, son épouse toujours aussi « charmante »...

Quel plaisir de retrouver la famille Pelletier, presque au grand complet ! Si les parents sont toujours à Beyrouth, où Louis se prend de passion pour la boxe et épaule l'un de ses ouvriers de la savonnerie, les enfants, quant à eux installés à Paris, sont chacun à une époque charnière de leur vie et devront prendre des décisions pour le moins importantes. Autour d'eux, un boxeur amoureux, une compagne menteuse, une enfant turbulente, des ouvrières exploitées, des bébés non désirés, un ingénieur inflexible, un journaliste empathique, un médecin lâche, des habitants déterminés, une rescapée d'un meurtre, un Petit Louis attachant... Autant de personnages forts, marquants et parfois hauts en couleurs qui peuplent, avec force et fracas, cette fresque familiale, sociale, politique, sociétale, parfois féminine, toujours aussi passionnante et romanesque. Sur plus de 560 pages, Pierre Lemaitre déroule, avec un semblant de facilité déconcertante, alternant les aventures, s'attardant aussi bien sur des détails que sur des drames, un récit tour à tour émouvant, jubilatoire ou tendu.
Un deuxième épisode exaltant !
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Quel plaisir de retrouver la famille pelletier après un an d'attente, attente récompensée par un roman qui offre de nouvelles problématiques ainsi qu' une analyse psychologique des personnages très intéressante.

Après la guerre d'Indochine et le scandale des piastres, après la difficile reprise économique d'après-guerre, l'auteur traite deux sujets qui méritent qu'on s'y intéresse tant leur retentissement dans la période qui est la notre aujourd'hui se fait encore sentir.

D'abord l'essor économique des années cinquante, la volonté de croissance qui ont donné naissance à cette société de consommation dont nous sommes à la fois acteurs et victimes si j'en juge par l'exemple du village de Chevrigny sacrifié pour la bonne cause, celle du besoin croissant d'énergie dispensé par la fée électricité, mais dont les habitants devront tout abandonner sans réelle possibilité de négociation. On remarquera que les article écrit par Hélène, soeur de François, devenue journaliste se contentera de relater les événement en laissant le soin aux lecteurs du journal d'interpréter les nouvelles. On remarquera également la mise sur le marché, d'ustensiles ménagers sensés changer la vie par le confort qu'ils procurent et dont Geneviève semble friande.

Ensuite le problème de l'avortement. J'ai ressenti un peu d'amertume pour Hélène parce que, perchée du haut de mes années 2000, je connais la suite, mais hélas Simone Veil en 1952 n'était pas encore en mesure de proposer sa loi qui mit fin aux actions des faiseuses d'anges, garantissant alors la sécurité des femmes.

Je suis heureuse d'avoir retrouvé les personnages de cette saga, dont l'évolution est captivante : François à l'avenir prometteur, Jean qui voit, lentement mais sûrement, un étau se resserrer autour de sa personne, Geneviève la mégère, celle qui fait profiter son entourage de son mélange de stupidité et de méchanceté, Hélène qui découvre la vie.

Le seul bémol, c'est qu'il va falloir attendre encore un an

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Challenge multi-défis
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