En déplaçant/recentrant la question du vote « La question – implicite – étant bien sûr de savoir où se passe (de) la politique, par où elle passe, s'il en passe encore, etc. », ce numéro de Lignes permet à de multiples « intellectuel-le-s » de formuler des idées philosophiques ou politiques sur « pourquoi voter », peu d'entre elles/eux répondront à l'autre question (non posée) : pour qui voter.
Est-il surprenant que les arguments les plus pertinents, comme les plus « inadéquats » se partagent entre toutes les positions adoptables par rapport au vote ici et maintenant ?
Quelques idées, quelques phrases ont retenu mon attention. Elles ne sont pas forcément les plus indicatives de positionnement. Mais ces brides de réflexion, d'humour, de choix entrent d'une certaine façon en écho à mes interrogations. Il en sera probablement de même pour les autres lectrices et les lecteurs. Des thématiques sont largement discutées, d'autres approches sont plus rares. A chacun-e de se trouver un chemin dans cette ballade offerte à la pensée. Je ne souligne qu'un texte, celui de
Bernard Noël pour ses variations sur le « je est nombreux » et choisis pour titre une phrase de
Rémi Hess.
Pour
Michel Surya présentant le numéro « les auteurs de ce numéro dessinent par surcroît une sorte d'état – étrange, las, malheureux – du rapport des intellectuels à la politique comme elle est ». Je ne me prononcerais pas sur ce constat, mais plus globalement sur une position de retrait, pour certain-e-s, à observer « des gens », « le peuple » comme s'ils/elles n'y appartenaient pas. Comme le dit
Jean-Luc Nancy « Il ne faut pas prendre les votants pour des cons pris au piège. Il en va de même ici que dans bien d'autres domaines pour lesquels prévaut l'opinion d'une débilité ou d'une crédulité constitutive du tout-venant des populations ». Pour plus de clarté, il aurait fallu que les un-e-s et les autres se situent socialement ou d'un autre point de vue. Car énoncer, en politique, nécessite de ne jamais oublier notre rapport aux autres, à la société, et quitte à me répéter à se situer. Et se reconnaître dans la proposition de
Jérome Lèbre « Il faudrait répondre sans s'attribuer de compétence particulière »
Quoiqu'il en soit de nombreuses idées à discuter…
Et pourquoi ne pas terminer par les deux derniers paragraphes du dernier texte (
Sophie Wahnich) « Sans illusion et avec la conviction que la souveraineté populaire en acte, celle de la rue, des manifestations, des émeutes, des fêtes, des grèves et des insurrections faite du vote un moyen de prendre des décisions en assemblée et un rituel qui permet aussi à une communauté politique de se reconnaître comme telle, politique, capable de faire la guerre mais aussi de la ritualiser par amour de la vie.
Tout reste à refaire, c'est à dire à réinventer. Dans l'ordre et le désordre. »
En y ajoutant une remarque de
Frédéric Neyrat « Il serait pourtant dommage, plus que con, de ne pas voir dans les événements qui affleurent à peu près partout dans le monde la conscience rétablie d'une nécessité quant à un changement radical de perspectives politiques qu'aucune représentation ne semble, en l'état, capable d'accueillir, ne serait-ce que par des réformes dignes de ce nom. » ou deux dernières phrases de
Rémi Hess : « Osons faire de la politique ! » et « Osons le Principe Espérance qui doit nous aider à rendre possible l'impossible ! »