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EAN : 9782357000124
Editions du Revif (11/06/2014)
4.04/5   12 notes
Résumé :
Entre 1963 et notre avenir, une histoire stupéfiante se déroule en Russie, où le lecteur rencontre un foetus de génie capable de philosopher sur le Football ; une consolatrice de soldats, médaillée de guerre, devenue mannequin vers ses quatre-vingts ans ; un lézard magique ; des immortels et une féroce guébiste à moustaches. Il y est question, entre lyrisme et ironie, de la quête de l'éternelle jeunesse, de lévitation et de crimes atroces.
Que deviendra l'emb... >Voir plus
Que lire après Léonid doit mourirVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Chaudement recommandé par Sachka - que son absence sur Babelio me pèse… - je me suis laissé entraîner de suite dans ce récit

Dmitri Lipskerov a une imagination débordante et sans limites : ses personnages sont inoubliables, qu'il s'agisse de Léonid que nous suivons depuis qu'il est embryon, nous le voyons réfléchir, s'adresser à sa mère depuis le ventre de celle-ci, assister à sa mort en couches, comprendre Einstein, être capable de voler, et j'en passe tant il est véritablement hors normes.
Mais il y a également Angelina Lébiéda, sniper de 82 ans, multi décorée par l'Etat soviétique, qui ressent un frisson annonciateur de la mort prochaine de ses amants.
Il y a enfin, comme dans tout roman russe qui se respecte, une foule de personnages hors du commun, la mère de Léonid, au
« corps proche de la perfection,
une silhouette en sablier « , Mikhaïl Valérianovitch Outiakine, docteur menant des recherches sur le vieillissement, Romka le Roux, surnommé « le Cinglé », Macha, la petite orpheline dont s'éprend Léonid, …
la liste des principaux personnages est, comme à l'accoutumée, reprise en début du volume.

Les rebondissements sont nombreux, le situations imprévisibles, Léonid ayant par exemple, la faculté de se venger de quelqu'un en lâchant une centaine de fourmis rouges dans son oreille ; ou encore ce lézard vivant aux dons surprenants, serti dans une chevalière.

Tout cela est débridé et déjanté à souhait et m'a emporté.

Mais sous ce burlesque, la charge contre le régime, qu'il soit soviétique ou post-soviétique (le roman courant des années 1960 à 2048…) est féroce : le viol, la vie des enfants en orphelinat, le climat de méfiance régnant entre tous les Russes, les surveillances, les dénonciations, les fusillés.
« - Qu'est-ce que j'avais fait pour qu'on me mette sous surveillance ?
- Ben ça, justement, on vous l'a pardonné répondit le général, semant dans l'esprit du psychiatre une angoisse lancinante qui allait le miner jusqu'à la fin de sa vie. Que lui avait-on pardonné ? »

Les 436 pages se dévorent sans peine, cette lecture m'a ravi.
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Retour en littérature russe avec la découverte, me concernant, de l'auteur Dmitri Lipskerov à travers ce titre Léonid doit mourir. Il n'en laisse pas forcément paraître au prime abord, mais est tout bonnement un petit bijou d'excentricité et d'absurdité, d'ironie grinçante, sur fond de désillusion. Merci encore à Agullo Editions de m'avoir transmis de ce titre, publié en janvier dernier. Dmitri Lipskerov est lauréat du prix des Imaginales 2019, consacré à la littérature fantasy, et incarne selon le Matricule des Anges "une imagination toujours débridée au service d'une satire féroce".

Un foetus qui a la capacité d'échafauder une réflexion, s'exprimer et se fâcher contre sa mère, une mamie de 82 ans sniper qui carbure au , Lipskerov a à l'évidence choisit de prendre quelques libertés avec la réalité, et ce fut, ma foi, une idée réussie quoique loufoque. Leonid et Angelina, leur destin, très différent, vont brièvement se croiser, qui seront, mais finiront bien par se rejoindre. C'est un long fil biographique qui va amener le lecteur à comprendre l'originalité des êtres qu'ils sont et deviennent par la force des choses. Depuis la grande guerre patriotique jusqu'à nos années de ce XXIe siècle ou une partie non négligeable de la médecine est dévolue à la conservation de la jeunesse à tout-prix. Autant dire que l'on traverse une grande partie de l'empire soviétique puis de la Russie à travers les vies insensées de ces deux phénomènes.

Dmitiri Lipskerov est de ces écrivains qui a recours au grotesque, au fantastique pour se détacher d'une réalité sombre et peu joyeuse, pour en mieux dénoncer l'absurdité. J'ai pris un réel plaisir à suivre l'évolution de cet embryon pensant et virulent dès le début, limite hargneux, coincé dans le ventre de sa mère, qui deviendra Léonid : ce sera un enfant autant qu'un homme hors-du-commun. Cette absurdité, qui prête à rire, contrebalance en effet une réalité infiniment glauque, d'un enfant a priori bien mal parti dans la vie, qui va passer ses premières années à l'orphelinat du coin. Mais Léonid n'est que le reflet d'une société soviétique totalement déconnectée, ou chacun n'est plus que le membre désincarné d'une armée qui l'est autant : désormais plus capable de comprendre les besoins basiques et primordiaux des siens, même pas les pleurs d'un bébé en recherche de la chaleur maternelle. Marche ou crève : Léonid est bien heureusement doté d'une force peu commune, surhumaine, qui lui permet de traverser le semblant de vie en totale exclusion du système. Mais il faut être un Léonid pour oser affronter en toute impunité les rouages du système russe aussi bien que soviétique : lui seul survole tout, mais la chute est bien rude. Car Léonid possède cette âme de dictateur que les Russes connaissent si bien, il décide, choisit, prend, vole, sans se soucier du consentement de son prochain. À l'opposé de Léonid se pose Angelina, qui a tout pour se poser en parfait modèle soviétique, d'ailleurs elle en est recouverte de médaille, la seule reconnaissance que le pays peut bien lui décerner. Aussi vite qu'il peut lui enlever, à la moindre erreur.

Tout cela se prêterait à rire si derrière cette façade ne se cachait pas une vérité cruelle : celle de régime écrasant et destructeur, qui a laissé les orphelins pourrir dans des immeubles immondes, ou toute forme de chaleur et d'empathie humaine fait défaut. Un système qui laisse et oublie ses enfants derrière des murs, qui ne veut que des braves soldats, qui réagissent comme tel, sans sentiment, sans pitié, des machines, à tirer, à tuer, à agir - sans laisser de place à la réflexion. Mais ce n'est pas Léonid, Léonid vit hors-système, Léonid vit pour lui, en aucun cas pour l'URSS, pas pour la Russie, Léonid doit mourir. Angelina incarne ce soldat parfait, le meilleur tireur d'élite que le pays ait connu, mais Angelina vieillit et elle ne devient plus qu'une femme parmi tant d'autres.

L'auteur a choisi ainsi deux personnages extrêmes dans ce qu'ils sont, un modèle, un anti-modèle à travers une histoire abracadabrantesque qui tranche avec son fond profondément réaliste. Celui d'une république socialiste, puis d'une nation, qui contraint ses individus à rentrer et vivre dans le moule qu'elle a préfabriqué, celui du brave camarade soviétique, prêt à se sacrifier pour sa patrie. Si l'on apprend bien une chose à travers le destin de nos deux personnages, c'est quoi que vous puissiez faire pour la mère patrie Russie, la moindre erreur se paie très cher.

J'ai effectivement ri quelquefois, je crois que lire les ronchonnements d'un foetus est une expérience tout à fait inédite pour moi. Mais aussi parce qu'on retrouve toute une galerie de personnages qui s'inscrivent dans la lignée des plus grands portraits russes, des caricatures, que l'on retrouve forcément lorsqu'on s'aventure dans un roman russe : le vieil ingénieur célibataire frustré, fier de son rang, mais qui vit en solitaire farouche. Les gradés violents et autoritaires qui n'hésitent pas à y aller de leur dénonciation, faire condamner leur collègue. le revanchard. La matrone gradée. On retrouve dans le monde de Lipskerov un savant mélange des maux de cette Russie moderne - ou la jeunesse est devenu le rêve ultime et de cette Russie - ponctués de repères et de valeurs, qui au fond, ne valent rien dès lors qu'on sort des sentiers battus soviétiques.

On sourit plutôt que de pleurer, car derrière ces dessous grinçants se cache une violence inouïe qui a atteint les individus et qui ne s'en rendent même plus compte, dépassés comme ils le sont par la société dont les repères ne cesse d'évoluer, de changer ou les mérites d'hier sont esquissés par le temps, Lipskerov a écrit là un roman parfois déroutant - le fantastique ne facilite pas clairement le sens du roman - mais captivant, car sa plume possède ce charme, après, cocasse russe qui nous fait tant aimer la littérature russe. Et comme il le dit si bien dans une interview, tout ne peut pas être toujours rentré dans une case, et c'est bien pour cela que j'ai apprécié Angela et Leonid.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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A la réception du livre obligeamment envoyé dans le cadre d'une Opération Masse Critique (Merci Babelio et les éditions Agullo ), j'ai été pris d'un moment d'appréhension. L'ouvrage présentait plus de 400 pages et je redoute toujours des livres d'une telle ampleur.

Mais, à mon grand soulagement, très vite j'ai été pris par ces personnages originaux, ses péripéties entrecroisées.
L'écriture bien que dense est d'une grande fluidité et la traduction excellente, à ce qu'il m'a paru.
Autant le dire sans ambages, en refermant « Léonid doit mourir », je considère Dmitri Lipskerov comme un équivalent russe en tout point aussi talentueux que son homologue Japonais Haruki Murakami. Il partage avec lui ce goût du fantastique, cette vivacité d'écriture et cette capacité à vous tenir en haleine malgré le surréalisme du récit.
On ne peut bien sûr ignorer les différentes strates de lecture d'un roman aussi charnu. Critique constante d'une société cadenassée par ses élites où le petit peuple ne cesse de souffrir alors que les plus puissants ne cessent de s'enrichir, l'ouvrage exalte aussi, à travers ses protagonistes, le génie soviétique, la force de la Russie éternelle que le communisme a rendu un temps orpheline et criminelle.
Une belle découverte de plus que je recommande à tous les amateurs de romans fantastiques mais aussi satiriques.
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Si vous aimez le réalisme magique assaisonné à la sauce russe, ce livre est pour vous !
Ce roman de Dmitri Lipskerov est une découverte surprenante, déroutante et magique. Dans les pas des écrivains sud-américains ou d'un Murakami, ce roman russe nous fait découvrir les orphelinats dans les années 60, la guerre patriotique, la bureaucratie, les dirigeants du Parti, les logements communautaires et les scientifiques fous.

Deux histoires se deroulent en parallèle.
D'abord celle de Leonid dont on fait la connaissance dans l'utérus de sa mère au 26ème jour de sa conception. Mêlant considerations philosophiques, opportunisme et cynisme, la vie de Leonid est racontée avec un humour grinçant et parsemée d' épisodes totalement délirants : ses relations érotiques avec une nounou de l'orphelinat, son mariage à 7 ans avec Macha en se faisant passer pour un lilliputien....

Parallelement on découvre l'histoire d'Angelina, ancienne sniper de 82 ans, qui prenait systématiquement pour amants, tous les hommes dont elle devinait la mort proche. Angelina est un phénomène, son corps est en parfait état mais sa peau a vieilli et elle doit, pour retrouver la jeunesse éternelle, suivre les prescriptions d'un médecin fou et d'un lézard doré.

Un roman drôle, inventif et noir à découvrir !!!



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Partir du postulat que la narrateur est en fait un foetus, il fallait oser !
Deux personnages principaux qui l'un et l'autre disposent d'étranges pouvoirs...
Des chapitres qui vont et viennent de l'un à l'autre, semant suffisamment de suspense pour nous donner envie de tourner les pages plus vite encore... pour suivre la destinée de deux antihéros soviétiques aux 1000 vies sur des décennies durant.

Lui, narrateur omniscient à l'intelligence supérieure, acerbe, manipulateur, misogyne, méprisant, cruel, etc.
Un personnage pour lequel je n'ai eu aucune once d'empathie, bien au contraire.

Elle, championne de tir, héroïne de la nation, vigoureuse, téméraire, courageuse et assoiffée de jeunesse.
Un personnage que j'ai pris plaisir à voir évoluer.

J'ai été embarqué dans la vie tumul-tueuse d'Angelina mais je suis restée quelque peu à côté du personnage
masculin.

Je n'ai pas compris où m'a embarqué l'auteur dans la dernière ligne droite du roman. Une lecture qui s'emballe vers la fin dans une explosion de n'importe quoi. Je m'attendais à quelque chose de plus solide, j'ai été déçue. J'ai comme l'impression d'avoir loupé un épisode, que les destinées promises dans le résumé n'ont pas réussi à satisfaire mes espérances.

Quelques coquilles par-ci par-là également. Bref, grande déception.

Merci tout de même à Babelio pour m'avoir envoyé le livre via Masses critiques !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il n’y a rien de plus écœurant dans l’existence qu’une femme dont le comportement est prévisible.
Elle n’avait rien d’un long fleuve tranquille, elle ressemblait plutôt à un océan, capable de vous surprendre par une tempête inattendue , qui cherche un jour à vous fracasser contre les rochers du rivage , avant de vous réconforter le lendemain, en vous berçant doucement dans ses eaux étales, alors même que les météorologues ont prévu de fortes vagues.
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Il avait des doigts très fins pour un conducteur de tracteur, des doigts qui savaient jouer avec une telle virtuosité de l’instrument qu’était le corps féminin que souvent, aux moments paroxystiques de la nuit, elle se mettait à crier :
— Mon Richter ! (Ou parfois :) Van Cliburn !
Ce à quoi il répondait :
— il y a sur toi plus de touches que sur un piano à queue ! En fait, tu es tout entière un assemblage de touches ultrasensibles.
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Bien entendu, l'homme est une créature suprêmement hautaine, et il considère son cerveau comme le summum de la Création Divine.
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Leonid Pavlovitch Sévertsev passa les sept premiers mois de sa vie dans un orphelinat, et l’on ne saurait dire que ce laps de temps permit au nourrisson de se familiariser heureusement avec le fait d’être un enfant.

Pour commencer, lorsqu’on l’installa dans la chambrée ou quinze orphelins nouveau-nés braillaient sans cesse, exécraient par automatisme et réclamaient à manger vingt-quatre heures sur vingt-quatre, Léonid n’eut pas moyen d’éprouver autre chose qu’une irritation inhumaine. Après le silence relatif du sein maternel, après avoir pu gouverner l’organisme de sa mère et – c’était là le plus important – méditer sur le caractère éphémère de l’existence chaque fois qu’il en avait envie, le nourrisson avait perdu tous ses privilèges en une heure, pour devenir membre d’un collectif, obligé bon gré mal gré d’exister selon les lois communes.

Comme les autres mioches, le petit Léonid excrétait malgré lui, souffrait d’une faim permanente et hurlait à pleins poumons, faute de réussir à s’en empêcher malgré tous les efforts de sa volonté.

Au cours de ses rares instants de contentement physiologique, Léonid réfléchissait: Pourquoi je hurle ? Parce que c’est complètement ignoble de ne pas pouvoir retenir ses matières fécales ou son urine. Cela me détraque les nerfs et je ne peux pas retenir non plus mes cris hystériques.
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Etait-ce la faute d'Alexandra si la nature avait commis l'erreur de loger son âme de femme dans un corps d'homme?
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