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Marcelline Loridan-Ivens, de son nom de jeune fille Rozenberg, est née le 19 mars 1928 et elle est morte le 18 septembre 2018. Elle est déportée à Auschwitz-Birkenau à l'âge de quinze ans.
À son retour des camps, elle se jette dans l'existence, le cinéma et les amours, à corps perdu. Elle se cherche follement. Ce qu'elle veut, c'est ne plus subir, jamais.
De cette expérience, ô combien traumatisante, elle a réussi à se relever à travers les mots et les images. Ses premiers amours, elle les cherche d'abord parmi les autres survivants. Si, très vite, elle a des amants, c'est aussi pour s'émanciper de sa mère qui veut absolument la marier. Mais comment aimer, s'abandonner, jouir au retour des camps ?
Qu'est-ce que le désir quand on revient de si loin ? Pour elle, la nudité reste associée au regard humiliant des nazis. Elle a dû accomplir un long chemin pour renaître à l'amour. Elle écrit la difficulté à trouver ce lâcher-prise et l'abandon. Pour le raconter, avec la complicité de Judith Perrignon, journaliste et écrivaine, elle va s'aider de « sa valise d'amour ».
Elle a retrouvé cette valise dans laquelle sont conservées les lettres, les petits mots échangés avec les hommes de sa vie. Elle nous offre d'ailleurs quelques passages de sa correspondance, notamment avec Georges Perec qu'elle ne pouvait aimer, celui-ci l'attirant inexorablement vers son passé.
De ces hommes qui ont traversé sa vie, elle en épousera deux. le premier se nomme Francis Loridan mais c'est le second, Joris Ivens, qui sera le grand amour et avec qui elle coréalise une série de documentaires dans les années 1970.
Cette femme d'acier qui avait une énorme soif de culture, grâce à une force de vie incroyable a dû accomplir un long chemin pour renaître à l'amour après avoir vécu l'inacceptable. L'amour après nous parle de son inlassable quête de l'amour, de son apaisement impossible et de sa soif d'aimer.
Cette femme exceptionnelle et insoumise se livre sans fard et nous offre une véritable ode à l'amour et à la liberté. Tout au long de son livre, elle prône la liberté, la liberté de l'esprit.
Ce livre éblouissant, écrit par l'un des derniers passeurs de mémoire, est un livre intime, puissant, bouleversant, un roman vrai sur le corps, la féminité, la sexualité, qui parle essentiellement d'amour.
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Retrouver Marceline Loridan-Ivens, toujours avec la complicité de l'excellente Judith Perrignon, est l'assurance de passer un moment très émouvant et plein d'enseignements sur ce qu'a vécu cette femme au retour des camps de concentration. Comment parler de l'innommable, de l'incroyable, de cette industrie de la mort de nos semblables, pensée, mise au point et réalisée par l'Allemagne nazie, au siècle dernier ?

Dans Et tu n'es pas revenu, elle s'attachait à parler de son père et voilà que dans L'amour après, c'est son intimité qu'elle dévoile avec spontanéité et franchise, ses amours, ses joies et surtout ses difficultés à retrouver du plaisir physique alors qu'elle ne peut plus supporter de se déshabiller devant quelqu'un d'autre.
Elle perd presque totalement la vue à Jérusalem, en pleine séance de dédicace. Ce qui lui arrive et le lieu où cela se passe déclenche en elle une cascade de souvenirs. Elle, une fille de Birkenau, regrette son nom, Rozenberg, car elle porte les noms des deux hommes qu'elle a épousés, le second étant son grand amour.
C'est en plongeant dans sa « valise d'amour » qu'elle retrouve quantité de lettres et de mots qu'elle ne peut lire qu'avec l'aide d'un appareil spécial. Elle cherche d'abord l'amour parmi les survivants mais c'est un échec. Comme elle fréquente Saint-Germain-des-Prés, elle rencontre et aime des personnages importants : Edgar Morin, Georges Perec… Elle est la copine de Christine Sèvres qui épouse Jean Ferrat et se lie enfin avec Simone Veil qui avait bien pris soin d'elle à Birkenau. Elle s'implique aussi dans la lutte pour l'indépendance algérienne, fait l'amour mais ne veut pas du mariage puis épouse successivement deux hommes.
Georges Perec était très amoureux d'elle, amour non partagé mais elle nous livre des passages de lettres de l'auteur de la disparition. Plus loin elle confie : « J'en ai voulu à Georges de s'être fait incinérer. Pourquoi as-tu donné ton cadavre aux flammes, comme là-bas ? » Ses confidences, ses réactions, sont spontanées, empreintes d'une extraordinaire franchise qui m'a beaucoup touché.
L'amour après est un livre tellement tendre, avec des confidences les plus intimes d'une femme immensément courageuse dont la vie n'a été que du rab, comme elle le confie à la fin. Savoir qu'on a été dénoncé par de « bons Français », être déportée, côtoyer la mort, l'horreur des camps, c'est inimaginable pour nous qui lisons cela aujourd'hui. Cela a broyé celles et ceux qui en sont revenus et qui disparaissent les uns après les autres aujourd'hui. Il faut lire ce qu'ils écrivent pour qu'ils vivent encore, que leur sacrifice ne soit pas oublié.

Marceline Loridan-Ivens a eu une vie pleine ensuite, beaucoup d'amours, donné toute son énergie à ses passions, surtout pour le cinéma. Elle est morte le 18 septembre 2018 mais lorsque je la voyais répondre aux questions de François Busnel qui l'invitait dans son émission, La Grande Librairie, je ne pouvais m'empêcher de l'admirer, de l'aimer.

Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Marceline est haute comme trois pommes, elle a toujours sa tignasse rousse qui lui donne un air de petit faune ingénu et insolent, comme dans Chronique d'un été de Jean Rouch et Edgar Morin, où elle demandait à des Parisiens croisés au hasard: "Êtes-vous heureux?'.

Aujourd'hui, Marceline a 89 ans. Et cette fois c'est elle-même qu'elle interroge en fouillant dans sa "valise d'amour" qu'on imagine joyeusement bordélique.

Une valise pleine de lettres d'amour et d'amitié.

Lettres de Loridan son premier mari lointain, de Georges Perec amoureux fou de ce petit bout de femme qui était revenue d'un enfer où sa mère à lui avait disparu, de Jean-Pierre Sergent, d'Edgar Morin, de Joris Ivens son deuxième mari, de trente ans son aîné, compagnon de luttes et de tournages engagés.

Lettres d'anonymes, parfois oubliés, d'amies tendrement chéries comme Simone Veil, comme elle revenue " du même transport, du même quai, du même camp".

Sortie de Birkenau, vivante, Marceline y a laissé son père, tendrement aimé. Et ce qui aurait pu être une adolescence heureuse a été tué avec lui. Elle se jette avec frénésie dans la vie, dans ce "ballet des hommes qui a chassé le nom de (son) père de (son) état civil."

Mais les lettres de la valise , parfois citées partiellement, ne sont pas l'objet du livre: elles tendent un miroir à la narratrice et lui posent toutes la même question : "Es-tu heureuse, Marceline? Peux- tu être heureuse? L'as-tu été ? "

Comment fait-on l'amour, comment ressent-on l'amour après les camps quand on y est entré enfant -elle avait quinze ans- et qu'on y a tout appris de la mort, rien de l'amour?

Sans esquive, sans effet, Marceline répond et dit la vérité d'un corps qui refuse de se dénuder, qui reste insensible, qui ne découvre le plaisir des caresses que dans un mélange troublant de sensualité et de violence.

Elle dit la quête effrénée de la liberté : plus personne ne lui donnera d'ordres, désormais. Et la griserie de la séduction.. .

Mais cette ivresse de séduire n'a pour objet que de s'apprivoiser elle-même. Bientôt elle retrouve la confiance dans la tendresse paternelle et amoureuse du grand Ivens, dont elle devient la co-scénariste.

C'est toute une époque effervescente qui revit en même temps qu'elle : effondrement de l'empire colonial, guerre d'Algérie, naissance d'une Chine nouvelle, luttes politiques , luttes sociales, luttes féministes.

Sortir du camp c'est aussi sortir de soi, donner la parole à ceux qui ne l'ont jamais, aller vers l'autre. Mettre en images et en mots les secousses du monde...et jusqu'au dernier souffle de l'homme aimé dans cette "Histoire de vent"dernier film du vieux lion à crinière blanche, qui m'a laissé un souvenir magique.

Une vraie leçon de vie, d' éternelle jeunesse.

Petit bémol : la co-écriture, qui me gêne toujours un peu. Mais j'ai entendu Marceline parler.. Elle parle comme elle pense et , sans doute, comme elle écrit : vite, juste, précis. Vivant.

Vivante Marceline.
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Beau et énigmatique titre de ce récit paru chez Grasset en janvier dernier : L'amour après quoi me diriez vous ? Tout simplement et tout tragiquement, l''amour après Birkenau, où la cinéaste fut déportée à l'âge de quinze ans et où son père fut tué.

Dans ce livre écrit avec Judith Perrignon L'Amour après, irrigue de façon aussi percutante que déchirante la voix de Marceline Loridan-Ivens écrivaine, une cinéaste, rescapée des camps de concentration. Et sans le savoir on la connaissait un peu puisque c'est la jeune femme qui, dans un morceau du dernier album de Vincent Delerm, demande aux gens s'ils sont heureux, extrait tiré d'un film de Jean Rouch.

A 15 ans, elle était à Birkenau. A la question que l'on se pose souvent : peut-on vivre après l'horreur, Marceline Loridan-Ivens en substitue plusieurs autres, peut-on aimer un jour après les camps ? Comment peut-on aimer quand son rapport au corps a été totalement ravagé ? Peut-on avoir un jour du plaisir ?
Aujourd'hui à 89 ans, et notamment il Ya un mois sur le plateau de l'émission La grande librairie, elle réaffirme sa conception de l'amour : un amour synonyme de liberté et sans possessivité. Marceline Loridan-Ivans dit se sentir toujours jeune dans sa tête, seul son corps ne suit pas. Une vision aussi libre que rebelle et surtout hors des sentiers battus de l'amour par une résistante dans tous les sens du terme.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Sur la couverture du livre, la photo d'une femme que l'on devine espiègle, ses cheveux roux sont en bataille, ses yeux sont pétillants. Elle perd peu à peu la vue, mais elle a toujours la même verve. Elle vient de fêter ses quatre-vingt-dix ans, elle fume de temps en temps un pétard, elle se fout de son âge. Une valise oubliée, remplie de lettres, de photos, de souvenirs, l'occasion d'évoquer les maris, les amants, les amies.

« Ces amitiés et ses amours que nous tissions sans formalités, et qui nous donnaient le sentiment même fugace de notre liberté. »

Marcelline Loridan-Ivens a été déportée à 16 ans à Auschwitz-Birkenau, à 17 ans elle sort d'un monde qui lui a retiré son nom, sa personne, son corps. Dans ce témoignage émouvant, elle évoque librement l'amour après les camps.

« Jamais, avant le camp, je ne m'étais déshabillée devant quelqu'un, jamais je n'avais vu le corps de femmes nues, ni celui de ma mère, ni celui de mes soeurs. J'ai découvert le mien en même temps que je l'ai su condamné. J'en ai fait une quantité négligeable. Secondaire. Il fallait juste qu'il tienne, qu'il soit sec et solide. J'ai tout vu de la mort, sans rien connaître de l'amour. »

L'amour est pour elle une contrée inconnue, elle est un très jeune bourgeon que la guerre a gelé sur pied. Et pour très longtemps. Faire l'amour était devenu une façon claire d'affirmer son autonomie, sa liberté. Elle vit des histoires en sachant qu'elle n'ira pas au bout. Elle fait l'amour sans rien ressentir. Elle n'a pas grand-chose à donner, et elle ne sait pas le donner, elle n'aime pas qu'on la touche, elle n'aime pas se déshabiller.

« J'avais un comportement décousu sans doute, mais sans en avoir conscience. Je me cherchais dans les regards et je ne voulais pas y voir mon âme perdue. Qu'est-ce qu'une âme perdue ? C'en est une qui tâtonne dans la nuit, sur les routes du souvenir. Il faut agir follement pour ne pas la laisser voir. »

La fin des années 50, les nuits de Saint-Germain des prés, à traîner au café et à discuter jusqu'au lever du soleil. Un besoin immense de communiquer avec ses semblables, le besoin aussi qu'on la remarque, qu'on l'entoure, qu'on l'accepte. Elle sera de tous les combats des femmes, la révolution sexuelle, le féminisme.

« Il n'y eut, après les camps, plus aucun donneur d'ordres dans ma vie. »

Elle nous parle de ses deux tentatives de suicide, de Simone Weil sa compagne de détention, de leur difficulté de raconter ce qu'elles ont vécu, elles ne savent pas l'exprimer. L'évocation aussi de Joris son grand amour, avec lui tout s'est mis en place naturellement, la jeune femme et la survivante des camps ne firent enfin plus qu'une seule.

J'ai beaucoup aimé ce récit intime et puissant d'une femme en quête permanente d'amour, une femme anticonformiste tout en séduction. Tous ses souvenirs sont écrits avec une langue alerte comme elle. Parmi les nombreux livres que j'ai eu l'occasion de lire sur les camps de concentration, c'est la première fois que je vois aborder ce thème de comment se réapproprier son corps après avoir subi l'horreur des camps. le récit bouleversant, sincère, sans aucun artifice d'une femme libre, parfois provocatrice qui se moque bien du regard des autres et qui semble d'une éternelle jeunesse.



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Je referme ce roman en étant émue. Comme à chaque fois que j'ai lu les témoignages de Marceline Loridan-Ivens. Ce petit bout de femme, aujourd'hui âgée de 89 ans, dégage une telle force et une telle détermination!!!
Après avoir témoigné sur son expérience terrifiante de la déportation dans "La vie balagan" et les conditions de survie dans le camp de Birkenau dans "Et tu n'es pas revenu", Marceline se penche sur son vécu de l'amour. En découvrant une valise remplie de lettres aussi bien d'amis ou d'amoureux, c'est tout un passé sentimental et sensuel qui lui revient en mémoire.
Tout d'abord, il lui a fallu mettre à distance sa vision du corps. Comment lui découvrir un éventuel attrait après avoir vu à l'adolescence tant de corps dénudés abîmés par la vie et la maltraitance nazie? Comment supporter le regard, les mains d'un homme séduisant quand notre chair paraît repoussante à notre esprit?
Il aura fallu du temps et de la patience pour que Marceline puisse enfin accepter son corps comme objet de désir.
Une magnifique leçon de vie; un témoignage jamais impudique et pourtant sur un sujet qui pouvait paraître inabordable.
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Biographie des amours de l'écrivain aux 90 printemps, rescapée des camps. J'ai aimé sa façon d'écrire avec la liberté qu'elle se donne. Je trouve dommage que sa prose ne soit pas à l'identique de ces interviews pétillantes. Vite lu, agréable, parfois étonnant.
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Années 50, Marceline Loridan-Ivens qui est "une fille de Birkenau" est rentrée en France et ne tarde pas à prendre son indépendance vis à vis de sa mère.
La jeune femme dont le corps a été figé dans l'adolescence par le camp a soif de vie et de culture. Elle enchaîne aussi les aventures amoureuses ,même si son corps ignore toute sensation de plaisir, de désir ,et restera à jamais "sec", c'est à dire stérile, sans que Marceline le regrette, bien au contraire.
La nudité reste attachée au regard d'un médecin décidant de la vie ou de la mort et Marceline aura toujours des difficultés à se dénuder, y compris dans un contexte médical.
Un récit rare qui évoque le corps, les sentiments d'une jeune femme fracassée par les camps mais qui est pleine d'ardeur, de vie, d'énergie et d'une formidable liberté.
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Parcourir avec Marceline sa « valise d'amour » pleine de souvenirs au gré des écrits qu'elle passe sous sa machine à lire, c'est forcément un peu décousu… mais est-ce à cause de sa valise ou de ce qu'elle a connu adolescente… On découvre aussi ses deux amours dont elle aura conservé le nom, si différents et pourtant si nécessaires. Je reconnais que je me suis parfois un peu ennuyé ou perdu dans les pages mais il m'est bien difficile de critiquer un livre dont je ne me sens pas le droit de juger l'auteur.
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On ne peut qu'être émue en lisant un tel livre car au-delà du récit de ses histoires d'amours et d'amitiés, l'auteur nous livre un message fort et puissant : malgré l'horreur vécue, une vie peut se reconstruire dans l'amour et la liberté, deux forces vives qui ne font pas oublier hélas les tragédies mais qui réchauffent le coeur et font revivre le corps, en permettant de vivre une deuxième belle vie.
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