Edouard LOUIS.
Combats et métamorphoses d'une femme.
Je referme à l'instant le dernier livre de
Edouard LOUIS. Je suis sous le coup de l'émotion. Je ne peux qualifier les diverses publications de cet écrivain de romans. Pour moi, il s'agit plus d' autobiographiques, d'histoires vécues, de l'enfance jusqu'à nos jours. Il est jeune, né en 1992.
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En finir avec Eddy BELLEGUEULE », son véritable nom de famille, cela ne s'invente pas. Dans ce tableau, il nous fait revivre son enfance, la pauvreté de la famille, les difficultés au quotidien, dont il va parvenir à se sortir de ce marasme grâce à son éducation, sa volonté. Il fait de brillantes études ; il est aujourd'hui enseignant, écrivain et va participer à la mise en scène de deux films, tirés de ses oeuvres.
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Histoire de la violence », décrit un viol dont il a été victime, viol perpétré par un compagnon d'un soir. Il nous a déjà révélé son homosexualité et nous conte cette soirée qui a mal tournée et qui s'achèvera avec un procès.
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Qui a tué mon père », un vibrant hommage à son père qui m'a beaucoup ému. Son père a été victime d'un grave accident du travail. Il a de nombreuses séquelles et vit grâce aux aides sociales, dans la précarité.
Et aujourd'hui, il va réhabiliter sa mère, Monique. Cette femme, enceinte à dix-sept ans, abandonne ses études pour épouser le père de son enfant. Son époux se révélera un véritable tortionnaire. Travaillant dans une usine, il rentre tardivement le soir, ivre. Il est méchant, il l'humilie. Avec ses deux enfants, elle quitte cet homme, tombe amoureuse du père d'Eddy, notre auteur, et avec lui aura encore deux enfants, des jumeaux. Elle aurait bien voulu avorter mais son époux lui refuse ce droit. Nous sommes dans les années 1990, le droit à disposer de son corps est reconnu. Elle mène sa grossesse à terme et n'a plus aucune autonomie. Elle est coupée du monde. La famille vit dans la misère, le plus grand dénuement. Son second mari est également un alcoolique. Quelle détresse familiale. Seul Eddy sortira brillamment de ce quart-monde.
Il nous dépeint la triste vie qu'a connu la famille. C'était pourtant une mère courage, mais placée sous la dépendance de ses époux. Elle a mené une existence de femme recluse. Son fils avait même honte de sa conduite et il lui interdisait de venir à l'école. Un tel misérabilisme dans les années 1990-2000, cela me laisse pantoise. Je ne pensais pas qu'un tel milieu pouvait encore exister…. Eddy ou Édouard offre de belles sorties à sa mère. Il y a tant de temps à rattraper ; elle a pris son envol et a quitté son époux.Mais elle a patienté plus de vingt années de servitudes, victime d'incivilités de la part de ses époux. Quelle abnégation, que de dévouement, de sacrifices elle a enduré! Et aujourd'hui, elle vit à Paris avec son compagnon, gardien d'immeuble. Elle est devenue coquette, se maquille, se teint les cheveux, etc.... J'éprouve beaucoup d'empathie pour cette femme. Elle a mené un dur combat pour gagner sa liberté. Une véritable métamorphose pour cette provinciale qui a eu l'occasion de rencontrer et bavarder avec
Catherine Deneuve. Je félicite cette dernière pour son beau geste. Et pour Monique, c'est un rêve devenu réalité. Édouard apporte du bonheur à cette femme qui n'a pas eu de chance, qui a toujours obéi à un homme et qui enfin aujourd'hui revit, sort, fait du shopping, va au restaurant avec son fils. Une belle preuve d'amour et un hymne à sa mère. Je compatis à l'émancipation de cette femme. Un petit chef d'oeuvre. Merci pour ce récit empreint de beaucoup d'amour.
Je ne partage pas du tout l'avis de
Fréderic BEIGBEDER que j'ai lu comme d'autres dans Figaro-magazine. Aujourd'hui, c'est un homme rangé qui a quitté la capitale et s'est réfugié sur la côte basque. Il y a prescription des faits. Frédéric oublie qu'il a eu beaucoup plus de chance que notre auteur. Frédéric omet de nous dire qu'il est issu de la bourgeoisie et qu'il a ainsi bénéficié d'une bonne éducation, de relations, d'un bon carnet d'adresse !. Il semble avoir effacé sa vie de bohème parisienne, ses soirées mémorables, dans le quartier de
Saint-Germain, mêlant, alcool, drogues, ses arrestations sur la voie publique par les forces de l'ordre, à la sortie des Bains-Douches, en galante compagnie. Ces faits ont été rapportés dans la presse, pas seulement la presse à scandales que je ne lis pas. Avant de juger autrui, il faut peut-être balayer à sa porte. Je salue le courage, la force, la volonté et la ténacité de notre écrivain qui a su prendre l'ascenseur social. Chapeau, Édouard et merci pour cet vibrant hommage rendu à votre mère. Je vous souhaite de vivre encore de belles années en lui apportant du bonheur, de l'amour. Vous avez assez souffert l'un et l'autre. Il faut rattraper ou tenter de rattraper le temps perdu. (15/05/2021)
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