Amin Maalouf, prix Goncourt et académicien, est un écrivain bien reconnu. Pourtant, jusqu'ici je n'ai pas été convaincu par les romans que j'ai lus de lui. On m'a récemment prêté "
Les Désorientés" (joli titre) et j'ai été intéressé a priori par son sujet: comment les Libanais ont traversé la terrible guerre civile qui a ravagé leur pays.
Le narrateur Adam revient au "Levant" (c'est ainsi qu'il préfère appeler le Liban), parce qu'un ancien ami va mourir. Il forme le projet de réunir sa bande d'amis, qui se sont connus alors qu'ils étaient de jeunes adultes et qui se sont ensuite dispersés. Cette période représente pour lui un âge d'or, avant le déclenchement de la guerre. En attendant le rendez-vous où tout le monde se retrouvera, Adam échange longuement avec ses amis: ils font le point sur leur devenir, sur leurs positions, sur la vie en général. Mais, d'une manière assez surprenante, le récit finit en queue de poisson...
Comme je l'espérais, j'ai trouvé des notations instructives sur le destin du Liban, un pays fascinant mais disparate. Adam est, semble-t-il, un alter ego de l'écrivain lui-même (exilé en France depuis 1976) et je me demande jusqu'à quel point; je n'ai pas la réponse ! Pour illustrer la diversité du peuple libanais, l'auteur prend soin de mettre en scène des personnages de confessions différentes: un Chrétien (modéré), un Musulman (islamiste), un Juif (contraint à l'exil), etc… J'avoue que cet échantillonnage me parait trop "fabriqué". Et, à vrai dire, tout le roman parait trop "construit", son architecture est bien visible, prévisible (sauf le dénouement). Maalouf est un homme raisonnable et rationnel, il appartient au juste milieu, ses prises de position sont politiquement correctes et, sur le plan littéraire, on n'a aucune surprise (très bonne ou très mauvaise) à attendre de lui. Au niveau de l'écriture, je retrouve bien les caractéristiques de l'auteur: une prose fluide, mais sans relief; des procédés littéraires qui ne semblent pas indispensables; une prolixité qui nuit gravement à l'intensité du récit.
Donc, selon moi, ce roman sera apprécié par tous les lecteurs qui s'intéressent au Proche-Orient. Mais il lui manque clairement quelque chose d'essentiel pour que je le considère comme une réussite littéraire.