Quand
Amin Maalouf raconte ici, pour mon plus grand plaisir, sa propre histoire à travers une fiction, celle d'Adam et de ses amis, une joyeuse bande d'universitaires qui dans les années 70 refaisaient le monde au café, il se dit désorienté.
Désorienté car il a perdu « son » Orient, sa culture levantine, le bien-être et la joie de vivre qui régnaient avant « le » conflit, la guerre civile qui a sévi au Liban de 1975 jusqu'en 1990, et qui a encore connu des sursauts au-delà de la date de ce récit.
« Ce conflit qui a bouleversé nos vies n'est pas une querelle régionale comme les autres, et ce n'est pas seulement un affrontement entre deux « tribus cousines » malmenées par l'Histoire. C'est infiniment plus que cela. C'est ce conflit, plus que tout autre, qui empêche le monde arabe de s'améliorer, c‘est lui qui empêche l'Occident et l'Islam de se réconcilier, c'est lui qui tire l'humanité contemporaine vers l'arrière, vers les crispations identitaires, vers le fanatisme religieux, vers ce qu'on appelle de nos jours « L'affrontement des civilisations ».
Mais rassurez-vous, cette histoire n'est pas un récit politique ni de guerre, c'est un récit personnel et universel. A travers le cheminement de quelques-uns de ces amis – juifs, chrétiens, arabes -,
Amin Maalouf nous parle, avec sa langue claire, vraie, percutante, du comportement de l'homme face à la – à les – religions, face à l'existence de Dieu, face à son engagement devant les faits politiques. Collaborer ? Résister ? Fuir ? Qui a raison ?
Il nous parle de l'amitié et de l'amour, de la trahison et de la fidélité. Peut-on changer avec le temps ? Doit-on pardonner à un ami mourant alors que ce qu'il a commis est horrible ?
Il aborde l'antagonisme entre l'Occident et l'Islam, de manière objective et édifiante. J'ai beaucoup appris, ou du moins j'ai réfléchi sur cela, moi qui avais des idées préconçues sur les Arabes et les Occidentaux.
Ce récit pas indigeste pour un sou, raconté sous forme de lettres, de commentaires, de dialogues, m'a emmenée dans l'âme humaine, celle qui transparait dans un sourire et dans les larmes, dans la violence et les soubresauts de la mémoire.
Amin Maalouf a tellement le don de l'empathie et de la justesse des sentiments qu'il m'a complètement fait adhérer à sa façon d'aborder le monde et les êtres humains. J'ai pris une multitude de notes, que je consulterai très régulièrement.
Adam, émigré à Paris et historien, qui voulait rassembler ses amis d'antan 25 ans après leur dispersion, est revenu « au pays » à l'occasion de la mort de l'un d'entre eux, et va y connaitre des faits majeurs, tout en notant pour lui ses réflexions. « L'histoire des nôtres, de nos familles et de notre bande d'amis, celle de nos illusions et de nos égarements, n'est pas inintéressante à raconter parce qu'elle est un peu aussi l'histoire de notre époque, de ses illusions, justement, comme de ses égarements ».
«
Les Désorientés », un livre capital et essentiel pour retrouver son chemin !