Citations sur Le livre des brèves amours éternelles (116)
Notre erreur fatale est de chercher des paradis pérennes. Des plaisirs qui ne s’usent pas, des attachements persistants, des caresses à la vitalité des lianes : l’arbre meurt mais leurs entrelacs continuent à verdoyer. Cette obsession de la durée nous fait manquer tant de paradis fugaces, les seuls que nous puissions approcher au cours de notre trajet de mortels. Leurs éblouissements surgissent dans des lieux souvent si humbles et éphémères que nous refusons de nous y attarder. Nous préférons bâtir nos rêves avec les blocs granitiques des décennies. Nous nous croyons destinés à une longévité de statues.
... le bonheur n’a, pour échelle de mesure, que notre propre existence, riche ou déshéritée.
Notre erreur fatale est de chercher des paradis pérennes. Des plaisirs qui ne s’usent pas, des attachements persistants, des caresses à la vitalité des lianes : l’arbre meurt mais leurs entrelacs continuent à verdoyer. Cette obsession de la durée nous fait manquer tant de paradis fugaces, les seuls que nous puissions approcher au cours de notre fulgurant trajet de mortels.
La plupart des opposants avaient, à cette époque, déjà émigré en Amérique, d'où ils pouvaient méditer sur l'imprévisible caractère de leur pays en citant cet ancien adage "Les Russes n'atteignent jamais leurs buts car ils les dépassent toujours."
... dans ce duel contre l’Histoire, il ne peut y avoir de vainqueur. Les régimes changent, reste inchangé le désir des hommes de posséder, d’écraser leurs semblables, de s’engourdir dans l’indifférence d’animaux bien nourris.
« Joli… peut-être. En tout cas, c’est une beauté parfaitement inutile. »
J’ai failli plaider la merveilleuse inutilité du Beau mais la discussion m’a paru soudain sans intérêt.
Pendant que la foule se ruait dans les wagons, il entonna le couplet que j'avais déjà entendu :
Là où une mer d'azur caresse une île de marbre,
Une magicienne m'attend dans son château doré,
Et chaque nuit, couchée sous l'éventail d'un arbre,
Elle pleure et m'appelle ! Jamais je ne viendrai ...
Du fleuve parvenait le froissement sonore des glaces qui commençaient à fondre. Dans l'air planait, grisante, la senteur froide des eaux qui se libéraient, encore invisibles, sous les neiges. Le soleil m'éblouissait et, au début, je ne réussissais pas à fixer ce visage aimé qui me souriait, je clignais des yeux, devinant inconsciemment qu'il ne s'agissait pas seulement du soleil mais de l'incapacité pour un regard humain à percevoir, au-delà de l'harmonie des traits, cette beauté insaisissable qui se créait et se recréait à chaque instant.
... Les amours qui ne prétendent plus à l’unicité de la grande passion offrent, en cadeau empoisonné, cette délicieuse désinvolture des sentiments. À cette étape de la jeunesse, on est encore trop insouciant pour comprendre qu’il s’agit d’un reniement.
Grâce à elle, je compris soudain ce que signifiait être amoureux : oublier sa vie précédente et n’exister que pour deviner la respiration de celle qu’on aime, le frémissement de ses cils, la douceur de son cou sous une écharpe grise. Mais surtout éprouver la bienheureuse inaptitude à réduire la femme à elle-même. Car elle était aussi cette abondance neigeuse qui nous entourait, et le poudroiement solaire suspendu entre les arbres, et cet instant tout entier où se laissait déjà pressentir le souffle timide du printemps. Elle était tout cela et chaque détail dans le tracé simple de sa silhouette portait le reflet de cette extension lumineuse.