Un des meilleurs polars de la série Les nouveaux mystères de Paris de
Léo Malet. D'abord, il y a ce très bon titre "
Les eaux troubles de javel" jeu de mot propice aux aventures de Nestor Burma, détective privé.
C'est dans les HLM du 15eme arrondissement de Paris où vivaient les ouvriers qui travaillaient à la chaîne chez "citron" en référence à Citroën mais aussi au fait d'être pressés comme cet agrume, que se rend le détective de choc. Il vient à l'appel d'Hortense Demessy enceinte d'un ancien protégé de Burma qu'il avait sorti de la cloche il y a plusieurs années.
Il a disparu depuis quelques jours et sa compagne est persuadée que c'est parce qu'elle attend un enfant qu'ils auront du mal à élever. Car il n'y a pas beaucoup d'argent dans cette cité où l'encadrement des fenêtres craque comme des jointures d'arthritique.
Nestor va se faire un devoir de retrouver son ami notamment parce qu'il est persuadé que ce n'est pas un salaud qui abandonne femme et enfant. Cela le chiffonne d'autant plus qu'il lui avait donné l'adresse d'une avorteuse pour lui rendre service.
Entre jolies filles, ouvriers à la chaîne et quelques cadavres se sont bien là des faits de société qui sont évoqués par
Léo Malet. Outre l'avortement et les mariages blancs il fait référence à la guerre d'indépendance en Algérie puisque le livre a été écrit en 1956. J'ai même été surprise qu'en tant qu'anarchiste il dénonce le trafic d'armes destiné à la branche armée du Front de libération nationale opposée à l'armée française.
Pour autant celui qui rôde pedibus jusqu'au port de Javel n'oublie pas les moments poétiques avec le pont Mirabeau, sous lequel coule la Seine. Il évoque aussi
l'Opéra de quat'sous de
Brecht, le Bal Nègre un peu plus loin rue Blomet et Martine Carol dont
Léo Malet devait être un peu amoureux puisqu'il l'évoque dans quasiment tous ses polars.