Un thème qui fut relativement en vogue en SF , disons celui de la miniaturisation d'un sujet , qui entreprend éventuellement une ballade à l'intérieur du corps humain , ou ailleurs d'ailleurs .
C'est un processus où le sujet est plus ou moins volontaire . C'est en général pour des soins médicaux , que ce thème est sollicité .
Un thème porté à l'écran ( le voyage fantastique , l'homme qui rétrécit ) , et qui se prolonge aujourd'hui encore , avec la vogue de la photographie scientifique artistique .
En littérature ce thème fut porté par Asimov , Spinrad , Matheson , ….
Le rétrécissement , est un champs très riche parce que au fond cela revient à projeter le lecteur dans un univers , aussi familier et personnel , que : autre et étranger . le contraire existe également , alors que l'infiniment petit grandit par le même processus , mais inversé .
Service d'ordre en français ( The men Inside en vo ) est un roman bien écrit et très noir , un peu glauque-désespérant . le personnage principal est assez dense pour que l'on prenne ce pauvre sale type ( qui devient progressivement un sale type ) en pitié , à défaut de le trouver sympathique .
Il y a une sorte de cynisme assez clinique qui suinte de beaucoup de pages . C'est une ambiance réellement prenante qui fait que le lecteur se plonge dans cet univers où s'étale le cynisme le plus scintillant et le plus échevelé , pour se placer dans le cadre d'une sorte de voyeurisme réflexif et contagieux .
Le personnage est très seul , il porte sa vie largement comme un fardeau , mais non sans une certaine motivation , son plus gros problème vient d'une impuissance sexuelle tenace , qui ne le pousse pas à voire la vie en rose . Cette impuissance vient de son travail et du rétrécissement ( qui pour lui est un risque professionnel ) . Elle n'est donc pas psychologique , enfin disons que ce Coco est plutôt misanthrope et dégouté de la de la vie , mais il fonctionne socialement et il fait son travail un peu contre son gré , mais sérieusement .
Le voilà donc à s'affairer à sauver quelqu'un , que l'institut du cancer lui demandera ensuite d'éliminer . Ce monde n'est pas folichon et je le place dans un contexte dystopique , même si c'est éventuellement discutable .
C'est une étude sur l'aigreur , pas sur le pourquoi du comment mais sur l'état d'» aigrit « , sur l'être aigrit et l' »aigritude « ( sourires ) la plus noire et la plus pénible en mode cynique .
Voici un très bon roman , qui porte sur le grand rien douloureux qui peut habiter certaines personnes à tel ou tel moment de leur vie. le talmud dit que chaque homme est un univers ( lui et son environnement ) . C'est peut-être vrais car , de par ce roman , on sent bien le caractère absolument relatif et subjectif de l'univers réel qui entoure un sujet . Un univers dont la teneur et la tangibilité sont plus du ressort de la perception sensitive individuelle et de l'interprétation psychologique individuelle , que d'un caractère objectivement réel , tangible , expérimental et même consensuel.
Le personnage principal de ce texte vit une sorte de névrose d'intégration . Peut-être est-ce un excellent témoignage venu d'un monde ( désespérant ) , vu au travers d'une psychose et par les yeux d'un psychotique ou encore au travers du prisme de la névrose ?
Evidemment , c'est une réflexion cinglante sur l'hypocrisie du pouvoir et sur la virulence cynique , arbitraire et cinglante qui peut animer la violence politique .
Voici le serment de l'institut , : « Je frapperai à la racine et je chasserai le mal J'agirai avec humilité car je ne suis qu'un Messager. Mon péché est la vanité et mon avenir la guérison . Je suis un Messager. Serment de l'institut, 1996. « .
Ceci dénote un statut totalement dédié et subordonné à la fonction . Un peu donc à l'image d'une fourmi dans un organisme social . Voilà en gros le statut et le comportement de notre personnage principal .
Un texte très bien écrit , sarcastique au-delà du sarcasme .
Un univers totalitaire et dystopique à la présence remarquable .
Un personnage principal qui souffre et se déstructure de par son environnement désespérant et inhumain , du fait de sa problématique personnelle aussi .
Complexe et noir , comme l'encre noir …
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