Tomber 8 fois, se relever 9

Graphiquement, les albums en ombres colorées de Frédéric Marais seront encore ici sublimes, surprenants, aux zooms avant et arrière dynamiques, nous offrant de la hauteur sur son monde faussement tranquille, nous plongeant dans des mers profondes de couleur tandis que le texte nous révèlera que l'heure est tendue, intense.
Orange était le destin du petit mendiant idien devenu brillant joueur d'échecs de "Le pousseur de bois" chez Hongfei Cultures. Bleu sera celui du boxeur Eugène Criqui et des bleus, il en aura eu et encaissé.

" On ne juge pas un homme sur le nombre de fois qu'il tombe, mais sur le nombre de fois qu'il se relève." (Jigari Kano)
Hommes, femmes, la leçon sera vraie pour les deux.
Cette histoire synthétique nous illustrera en quelques enjambées la force de caractère du personnage, frappé en plein visage par le feu de la première guerre mondiale et qui fera tout de même quelque chose de sa vie et même bien plus.
Comment ne pas se dire qu'une "gueule cassée" de cette guerre, avec la science de l'époque, n'avait pas une vie à venir fichue, le coeur, l'âme aussi cassés que la mâchoire?
Quelle injustice!

Frédéric Marais, comme pour le " Pousseur de bois", aventure confidentielle véridique, mais à la portée universelle spirituelle et philosophiquement haute, donnera encore dans le récit fort, incroyable, exemplaire.
Avec le pousseur de pièces d'échecs, nous avions retenu la leçon que la naissance ne définit pas les champions et les grands destins.
Ici, c'est presque une moralité complémentaire, la vie peut être rude, dure et on peut, contre toutes attentes de notre part, s'en relever, saisir ce qu'elle nous doit. C'est un récit bien plus sur la résilience que le combat mais les deux vont de pair.
Nous laisserons l'initiative de la surprise et le plaisir de découvrir le parcours d'Eugène Criqui, devenu champion de poids plumes français en 1923 et victorieux à New York.
On aime beaucoup.

En 1915, le jeune Eugène Criqui (1893-1977), boxeur poids plume, est mobilisé durant la première guerre mondiale et participe à la bataille des Eparges. Avec sa gueule d'ange et son allure frêle on ne mise pas sur lui.
Eugène fait désormais partie des gueules cassées. On aurait pu penser sa carrière sportive abandonnée. C'est là qu'interviennent la force mentale et physique ainsi que la résilience du jeune homme. Entrainements, persévérance, chutes mais détermination toujours. Eugène parvient à devenir champion du monde en 1923, à New-York.
Une revanche, quelle revanche !

J'aime :
- Ce récit inspiré d'une histoire vraie.
- La palette très restreinte, de noir, de bleu, de saumon et de blanc, qui attire l'attention sur Eugène et son parcours entre ombre et lumière.
- La double page qui me marque le plus : celle où la balle explose au visage. le texte est subtil mais l'illustration est percutante.
- Les différents surnom dont Eugène a été affublé. “Gueule d'ange” pour sa jeunesse en opposition avec “Gueule cassée” et son quasi anéantissement par la guerre. Et enfin “Mâchoire de fer” pour sa force et sa singularité.

« On ne juge pas un homme sur le nombre de fois qu'il tombe mais sur le nombre de fois qu'il se relève. »
Eugène, jeune soldat de la guerre de 14, s'est relevé après la balle qui l'a défiguré. Et il a continué le combat après la guerre, sur les rings de boxe.
Cet album ne raconte pas grand chose mais donne terriblement envie d'en savoir plus sur Eugène Criqui, gueule cassée devenue champion du monde.
Les illustrations sont très marquantes et hypnotiques : très sombres avec des touches de orange presque fluorescent.