Je me suis intéressé dans ce volume de la pléiade aux deux premières versions de
Tristan et Yseut, celles de
Béroul et de Thomas, deux poètes normands du temps des Plantagenêt qui illustrent de façon fort différente un conte devenu intemporel. Thomas privilégie les éléments psychologiques du mythe ainsi que sa dimension tragique. Tristan, séparé d'Yseut, est condamné au tourment, voire à la folie. Leur amour indéfectible et quasi surnaturel, puisqu' il est dû à l'absorption d'un philtre et, partant, à des pratiques liées à la magie, se heurte à une réalité où dominent la trahison et la jalousie. Il échappe aux normes de ce monde et condamne les deux amants à une vie d'errance et de malheur. La version de
Béroul est sans doute plus pittoresque. Elle s'inscrit d'avantage dans l'imaginaire propre aux romans arthuriens avec le faste de ses cours, ses joutes, ses forêts à l'aura si particulière, où l'on croise tout à la fois des nains et des ermites et où s'engagent parfois des combats des plus sanglants. Tristan, qui a combattu contre des géants, appartient à la fleur de la chevalerie ; mais sa liaison coupable avec Yseut, l'épouse du roi Marc de Cornouailles, son oncle, l'expose à la perfidie de certains barons. Les deux amants échapperont de peu à la mort et au déshonneur, en prenant la fuite.