Le titre de ce roman d'
Agnès Martin-Lugand m'a interpelée :
Les Gens heureux lisent et boivent du café… Personnellement, j'aime assez le côté original des phrases-titres, je lis énormément, c'est de mes plaisirs et passe-temps favoris et je consomme beaucoup de caféine. Y serais-je en pays de connaissance ?
De plus, et sur un registre plus grave, le thème évoqué me parle et me touche particulièrement : il y a quatre ans, une personne de ma proche famille a perdu son mari dans un accident de voiture, elle a vécu comme un zombie pendant des mois. Nous la portions à bout de bras et puis elle est partie à l'étranger pendant trois mois pour un voyage qu'ils avaient prévu de faire tous les deux... Depuis elle a refait sa vie... a vécu une résilience en forme de roman photo.
J'abordais ce roman en ayant à l'esprit une certaine écriture de la vie et j'étais intéressée par la mise en mots, la manière de revisiter le thème.
Dans l'un des groupes de lecteurs que je fréquente, il est d'usage d'annoncer nos lectures en cours deux fois par semaine ; quand j'ai dit que j'avais commencé ce roman, les réactions ont fusé : il y a celle qui s'est écrié « oh non ! pas toi » se déclarant « affligée » tant par sa propre lecture de cette romance fell-good que par mon choix de lecture et celles et ceux qui ont essayé de défendre ma posture de lectrice toujours curieuse, arguant qu'un peu de lecture facile allait forcément me détendre et me faire du bien, admettant même avoir aussi ce le livre dans leurs P.A.L… Je ne m'attendais pas à un tel tollé.
D'où, avant de m'exprimer sur mon ressenti proprement dit, un petit rappel sur le roman dit « sentimental » ou à l'eau de rose, non pas pour excuser ou justifier cette lecture qui ne semblait pas pour moi, mais pour recentrer le débat… Genre mineur ou mauvais genre, ce type de littérature gravite autour d'une intrigue centrale basée sur une relation amoureuse plus ou moins compliquée mais connaissant toujours, après maintes péripéties et obstacles, un dénouement heureux. C'est assez codifié, de la rencontre initiale aux difficultés rencontrées, des personnages principaux aux secondaires, alliés ou rivaux, au gré des rebondissements et des épreuves traversées jusqu'au bonheur final, annoncé mais gagné de haute lutte.
Et oui, dans son ensemble,
Les Gens heureux lisent et boivent du café répond à ces critères, surtout si on décide de se plonger dans la suite ! J'avoue que j'ai poussé mon expérience jusqu'au deuxième opus, pour faire bonne mesure…
Le travail de deuil et de résilience est assez bien décrit cependant et quelque part, j'ai trouvé plus ou moins ce que j'étais venue y chercher. Certains passages sonnent assez juste, font vrai et provoquent une certaine émotion.
Mais, j'aime assez aussi quand un roman garde des zones d'ombre et
Agnès Martin Lugand détaille énormément, beaucoup trop : cela enveloppe et délaye son intrigue mais sans l'enrichir. Ainsi par exemple, je n'en peux plus de ces personnages qui fument tout le temps et qui se retrouvent au coin fumeur pour de longues discussions… dans une routine qui n'a rien de littéraire… et qui me fait un peu tousser. J'ai trouvé superflu les descriptions de la vie quotidienne, des douches aux repas, du choix des vêtements aux descriptions des intérieurs, des développements minutieux sur les temps de voyage au détail exact du nombre des verres bus, etc… C'est trop prémâché pour moi.
Si j'ai pu apprécier la longue parenthèse irlandaise de l'héroïne, j'ai regretté que la littérature ne soit pas, comme j'avais cru en lire la promesse dans le titre, partie prenante de la résilience de l'héroïne ; de même le lieu évoqué dans le titre, le café littéraire parisien, ne parvient pas à servir de fil conducteur.
J'ai choisi une version audio du livre, lu par Faustine Urbain, dont la voix correspond bien au style de ce roman.
Je ne regrette pas cette lecture. Même si la trame narrative est sans surprise, c'est bien écrit.
Pour les amateurs du genre.