Je commence par ce qui me semble secondaire. Je ne suis quasiment en accord avec aucune des opinions que Mila développe dans son livre. Je considère que les minorités ont raison de se sentir opprimées, dans un système qui se cache derrière un faux universalisme pour être normatif et excluant. Je considère que le fait d'être féministe n'est pas uniquement de libérer les femmes du voile mais de les laisser être ce qu'elles veulent être, sans être un obstacle supplémentaire.
Je considère aussi que nous vivons dans une société des égoïsmes parce que les individus ne sont pas reconnus dans toute leur unicité. de fait, j'ai de grandes divergences avec Mila.
Mais ce n'est même pas le sujet en réalité.
Le sujet est, et demeure la liberté d'expression et le respect de la loi sur le sujet.
Pouvons nous, nous exprimer sans faire l'objet d'un appel au viol, au meurtre, nécessitant une protection policière permanente ? Ou sommes nous un pays, une société qui a oublié qu'on avait le droit de nous exprimer selon des règles claires ?
Nous avons même le droit de dire des bêtises ou des stupidités. de rire des pires sujets, d'être polémiques voire choquant. Tant que cela respecte la loi.
Et nous avons le droit de critiquer toute idée, philosophie, spiritualité ou religion. Absolument toute.
Sans aucune exception.
Rien que pour rappeler ce propos qui devrait être une évidence, je soutiens Mila qui est victime du fait que la société soit amnésique sur ses fondements.
Même si la critique est mauvaise, insultante, ou choquante, tant qu'elle se limite aux religions et non aux croyants alors elle est possible.
Mila ne le dit pas mais je pense qu'une grande partie du problème dans notre société et notre espace public est que les personnes n'arrivent pas à distinguer leurs idées, leurs propos, de leur propre personne. de fait quand on critique leurs propos, on critiquerait leur personne, ce qui est faux.
C'est en cela que l'identité des personnes est importante, l'identité de chaque individu parce que nous ne sommes pas uniquement ce que nous disons ou faisons ou pensons.
Mila a tort sur sa critique de l'identité individuelle et de penser que c'était mieux avant. C'est justement une identité épanouie qui permet de cesser avec la revendication de celle-ci et de se sentir heurté par beaucoup de choses.
Nous en revenons sinon, à essentialiser les idées en des personnes et de fait justifions l'indignation actuelle.
J'ai été ému par la situation que Mila vivait… Il y a quelque chose de tellement injuste et de fondamentalement révélateur de notre époque.
Il serait bon de rappeler que le blasphème n'existe pas dans la loi française, que la laïcité est la liberté de croire et de ne pas croire.
J'ai pu voir avec surprise que Mila était TDA/H ce qui en soi n'apporte rien au sujet mais me permet de mieux comprendre ses propos et ses actions. Il est d'ailleurs intéressant de constater que le harcèlement avait débuté avant cet événement, qu'il en est même la cause.
Le bilan est fâcheux pour notre société : des milliers de personnes prennent le droit de menacer de mort, de viol, de tenir des propos homophobes, misogynes en toute impunité quand une jeune femme pour avoir dit un propos tout à fait légal (avec lequel on peut ne pas être d'accord là n'est pas le sujet) se retrouve à vivre dans la peur, l'angoisse, et l'isolement social.
J'anticipe pour finir sur le débat sur l'islamophobie. L'islamophobie est de se servir d'une religion pour discriminer les personnes qui pratiquent ou croient en l'islam. Cela n'a strictement rien à voir avec la critique de la religion elle-même.
Un livre à lire. Et soutien à une liberté d'expression sans peur de menace, pour sa propre vie, celles de ses proches. Une liberté d'expression dans le respect de la loi.
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Je voulais lire le témoignage de cette jeune fille tant j'avais été choqué par le déferlement de haine qu'elle a reçu pour quelques propos sur un Dieu. Mila nous décrit aussi son histoire et la situation dans laquelle elle se trouve suite à un banal live sur son instagrame .
On ne peut être que admiratif de son courage et de son intelligence pour son âge. A la lecture du livre, on ne peut pas rester aveugle face à la censure qui touche notre pays et à l'hypocrisie ambiante. Oui la liberté d'expression est en grand danger et cela est fortement inquiétant.
C'est aussi un témoignage à faire lire à nos adolescents / jeunes adultes pour qu'ils découvrent à quel point leurs messages de haines sur les réseaux sociaux ont des conséquences terribles. Mais aussi à nos dirigeants politiques et adultes qui trouvent que quand même " elle l'a cherché".
Dans un rêve, ce témoignage serait lu dans les écoles et permettrait d'ouvrir bien des débats et consciences.
Une lecture facile et un style très simple, mais le contenu est fort.
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Croire que Dieu puisse se laisser toucher par des injures c'est lui donner un caractère susceptible, typiquement associé à la psychologie humaine. C'est le réduire à quelque chose d'inférieur et d'imparfait, lui ôter de son essence divine. Considérer qu'il est légitime de tourmenter, violer, mettre à mort une de ses créatures, c'est se substituer à sa place de juge, c'est déifier son propre jugement.
Des deux, qui est le plus grand blasphémateur : celui qui ne croit pas et insulte, ou celui qui croit et qui prête ses propres intentions et émotions au Dieu qu'il prétend servir ?
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Loin des outrances des réseaux sociaux sur lesquels elle a insulté l’islam, après avoir été elle-même insultée en son nom, ce petit livre en dit long sur l’époque. Et incite à la réflexion.
Lire la critique sur le site : Telerama
"Crève sale pute, quand je vais trouver ton adresse je vais venir t'égorger de mes propres mains tu vas bouffer tes entrailles et celles de ta mère sale chienne t'as aucun respect et on va te crever pétasse on va rigoler quand je vais venir te violer tu vas implorer Dieu tu vas la sentir ma grosse bite te sortir par les yeux connasse pétasse pouffiasse j'ai hâte que tu meures je veux t'entendre couiner comme une truie tu vois mon couteau tu vas le sentir sous ta gorge je vais te découper et quand tu seras morte je vais te violer sale lesbienne ta mère va se la prendre dans le cul on va tous lui passer dessus on va te brûler à l’acide d’abord le visage et puis les seins on va t'égorger sale pute je vais t'enterrer vivante te massacrer on va te retrouver et on va te tuer tu vas souffrir avant de mourir c'est qu'une question de temps avant qu'on te retrouve.
Quand vous lirez ces lignes… J'ignore si je serai encore vivante. Une nouvelle journée commence. Et avec elle, de nouvelles menaces noient mon téléphone.
Hier soir, j'ai fondu en larmes. La fierté qui m'a permis de garder la tête haute jusqu'à présent me fait parfois défaut. Je me demande si j’ai encore la force de me battre et de vivre, ou si c'est simplement ce que j'essaie de faire croire. Dehors, le cœur du monde bat. Le mien s'est mis en pause.
Je m'appelle Mila, je suis majeure depuis peu, et je suis menacée de viol et de mort depuis mes 16 ans pour avoir publiquement, dit-on, insulté l'islam.
Il faut que je vous raconte ce que cela fait d'avoir 17 ans, de recevoir chaque jour des messages me promettant les tourments d'une mort violente, acide au visage, égorgement, écartèlement, décapitation, viols en série, démembrement, ce que cela fait de ne plus être libre, d’être incarcérée chez soi avec la menace qui rôde. On me dit souvent d'ailleurs que je l'ai mérité, qu'il fallait que je m'y attende. Certains pensent que ce livre va permettre de calmer la situation et d'éveiller les consciences.
Le monde entier a vu la vidéo que j'ai réalisée, et qui a tout déclenché. Parfois je suis tentée de la regarder : pour ce livre, bien sûr, et pour comprendre. Je reste stupéfaite et blessée. La regarder est comme impossible. J'ai la nausée, mon corps se paralyse – je ne changerais pas un mot, même si certains, lancés sous le coup de la colère, sont peut-être maladroits.
Je connais des musulmans de tous horizons, de tous pays, de toutes sensibilités, d'orientations sexuelles diverses, laïcs, tolérants, passionnés de mode ou de voyages, discrets ou grandes gueules, drôles ou ennuyeux. Bref, nos sœurs et frères humains. Et puis il y a les autres, les radicaux, dont je ne croise jamais le regard, et qui sont prêts à me tuer, par les mots ou par le sang. Et prêts sans doute à vous menacer aussi, vous qui comme moi aimez la liberté, la vraie, la liberté de rencontrer, de se vêtir avec goût, avec audace, avec amour, de ne pas être d'accord, de s’engueuler avec douceur, d'être amis, d'oser des choses, de sourire, d'aller trop loin, bref : de vivre.
Ce livre, c'est ma voix qu'on a essayé de censurer et qui renaît. Si vous pensez que je vais formuler des regrets, refermez-le. Je veux juste poser mes mots. Vous les livrer, calmement, longuement. Un livre n'a rien à voir avec la fugacité d'un tweet, d'une story Instagram ou d'un entretien de presse. Essayer de comprendre comment j'en suis arrivée là. Comment nous en sommes tous arrivés là. Mon histoire est entre vos mains.
L'ignorance conduit à la peur.
La peur conduit à la haine.
La haine conduit à la violence.
Je fais partie d'une génération qui adore cibler une proie sur laquelle elle va pouvoir se déchaîner. Il se trouve que je suis ce souffre-douleur depuis plus d'un an. C'est une mécanique d'attraction et de répulsion. Certains continuent à me suivre, à guetter le moindre de mes mouvements, c'est une obsession, un engrenage de haine. Je sais pertinemment que cette affaire leur a donné à penser qu'ils ne risquent rien à s'en prendre à une fille comme moi. Impuissante, jeune et maladroite. Je suis la personne qu'ils adorent détester.
Quant à la récupération politique, non merci ! N'essayez pas de faire de moi votre marionnette. Je suis quelqu'un de libre, et je ne vais pas casser les chaînes de la religion pour être prisonnière d'une pensée politique.
En France chacun est libre de critiquer comme il l'entend une religion.