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sur 502 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Il fut un temps où je lisais systématiquement le dernier Modiano, une sorte de rituel rassurant malgré la sensation de brouillard, le flou qui se dégageait de ses textes, ces atmosphères mystérieuses plus propices à se perdre qu'à trouver des réponses. L'auteur passait chez Pivot et rien dans ses propos hachés, ses phrases en pointillés n'offrait plus de matière à laquelle se raccrocher. Il y avait pourtant un phénomène addictif à suivre sa plume, à se perdre dans les quartiers d'un Paris que pour ma part j'étais trop jeune pour avoir connu. Dans les romans de Modiano il y avait des annuaires, des silhouettes de femmes entraperçues sous la pluie, des valises transportées à travers les rues à peine éclairées, des fuites, des coups de téléphone mystérieux, des réminiscences de l'occupation, les échos de disparus. Je m'aperçois qu'il me reste peu de choses de ces pages tournées, appréciées puis oubliées. Une impression, une musique, un style. Quelque chose de familier qui fait soudain penser à la lecture d'un texte "tiens, on dirait du Modiano"... Un jour le charme s'est rompu, je n'ai pas terminé le livre que j'avais en mains. le titre était L'horizon, paru en 2010. Je n'ai plus retenté jusqu'à cette dernière publication, La danseuse, joli titre pour un texte court, moins de cent pages. J'ai eu l'impression d'enfiler l'un de mes vieux pulls préférés malgré les manches détendues et les rafistolages. La petite musique s'est immédiatement fait entendre, "Ainsi depuis quelques jours me revenaient, par bribes, les images d'une période très lointaine de ma vie", et hop, bien sûr que l'on a envie de suivre le narrateur, de savoir qui est cette danseuse dont il garde parfois le fils, Pierre ; bien sûr que l'on trouve étrange cette ressemblance d'un homme croisé des années plus tard avec celui qui fut à l'origine de la rencontre avec la danseuse, avec tout un monde d'ailleurs de cette époque où le narrateur se cherchait, envisageait l'édition d'abord par la correction et pourquoi pas l'écriture. Pour une fois, Modiano fait un crochet par le Paris d'aujourd'hui, qui apparaît comme une tache bruyante avec ses hordes de touristes et leurs valises à roulettes, alors on est d'accord pour retourner dans celui plus feutré du passé, tenter de saisir la danseuse en mouvement, s'approprier la légèreté qui semble aller avec, en percevoir la grâce, résultat d'années de travail et d'exercices imposés. Comme la plume de l'écrivain qui semble à peine effleurer la page pour souligner ici un détail, là une impression, et laisser dans son sillage l'empreinte délicate des vies sublimées par le souvenir teinté d'imaginaire. Finalement, les livres de Modiano sont des invitations à la promenade, celle que l'on reproduit à l'infini, différente à chaque fois puisqu'il suffit d'un rien pour changer la perception du paysage pourtant connu.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Des ombres qui surgissent du passé.
Des souvenirs vagues qui remontent à la surface de la mémoire.
Des êtres aux traits estompés, perdus dans le temps qui s'écoule.
Une déambulation dans un quartier parisien qui n'est plus celui que le narrateur connut.
Horde de touristes, ville musée, ville dont l'âme profonde s'étiole entre le present et les images du passé.
Un milieu glauque mais aussi capable de compassion se profile derrière les différents protagonistes.
Une femme et la danse qui sauve, la danse qui permet d'exister dans un monde parallèle à celui qu'elle vécut.
On le devine dans les rares mots confiés au narrateur.
Un narrateur en demi-teinte faufilé dans ce qu'il fut, perçut et ressentit.
« Modianesque », on retrouve la patte de l'écrivain, le temps qui se dédouble, les traces de vécu, l'éternité recommencée.
Court, un peu trop court mais l'atmosphère étreint et nous accompagnons le narrateur vers l'indicible qui le constitue, qui nous constitue et les multiples que nous sommes.
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C'est une promenade dans Paris que nous propose Patrick Modiano, tantôt dans le présent, tantôt dans le passé. Nous visitons les quartiers. le narrateur a une vingtaine d'années, écrivain débutant, il accompagne parfois une mystérieuse danseuse lorsqu'elle va prendre ses cours avec le maître de ballet russe, Boris Kniaseff, s'occupe parfois du fils de cette dernière, Pierre, il nous entraîne alors dans un Paris doux, humain, précautionneux. Est-il amoureux platonique de l'artiste ? le narrateur est un vieil homme qui déambule toujours dans Paris qu'il ne reconnaît plus. Un Paris troublé par l'invasion touristique. Pourtant, à l'occasion d'une rencontre fortuite avec un homme qui a fréquenté la danseuse autrefois, il se remémore ces temps doux, cette femme et son fils. Mais que sont-ils devenus ?
On reconnaît rapidement l'écriture de Modiano par ses jeux de doutes, d'hésitations. C'est bien sûr ce qui fait son charme. C'est aussi sa manière de captiver son lecteur, de le retenir pour à un moment connaître la vérité… Mais ce flou littéraire et artistique nous enferme dans une bulle qui passe d'aujourd'hui à hier comme du passé au présent pour finalement être hors du temps, une parenthèse en souvenirs nostalgiques.
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Les romans de Modiano me font penser à ces lettres tracées sur une vitre embuée, signes tremblés perlant sur une surface lisse et froide, voués à l'effacement ou à l'évaporation avant qu'on en connaisse exactement le sens.
La mémoire chez Modiano n'a que peu de consistance : là une identité incertaine, des visages entraperçus, des silhouettes fugitives, ici une adresse dont on n'est jamais sûr, des coordonnées téléphoniques improbables. Seule la géographie de la ville, ses églises au nom étrange – Saint-Ferdinand des Ternes, Saint-Jean-des-Briques – ses boulevards, ses gares, semblent arrimer le narrateur à un passé nébuleux. Les personnages sont les figurines d'un décor figé dans la saison hivernale, presque sans passé et sans plus d'avenir, comme s'ils émergeaient du brouillard avant de se fondre dans une nuit à peine éclairée. Que saisira-t-on d'eux ? L'esquisse d'un visage, une vague occupation, un fragment d'existence dans un puzzle où il manque la plupart des pièces.
Il y avait donc cette danseuse qui répétait un ballet qui n'a jamais existé, le Train des Roses, fréquentait un studio de danse tenu par un Russe, Boris Kniasseff, qui avait fait travailler les plus grandes ballerines et voyait en la jeune femme celle qui succéderait à Yvette Chauviré. Il y avait aussi le fils de la danseuse, le petit Pierre que le narrateur gardait autrefois, entretenant avec l'enfant une relation faite de silences. Des noms sont parfois cités, comme celui de Maurice Girodias, qui permettrait peut-être de situer l'histoire racontée au début des années 1960, à l'époque où cet éditeur atypique tenait un cabaret. Mais, au fond, on sent que cela n'a guère d'importance, tant le narrateur est absorbé dans un jeu de reflets, vacillant dans un Paris envahi aujourd'hui par les touristes. Il ne cherche pas les vrais visages des êtres qui ont traversé sa vie autrefois, mais peut-être ce qui a décidé de sa vocation d'écrivain par une étonnante capillarité : la discipline de travail et la recherche d'incandescence de la danseuse, en l'arrachant à ses tâtonnements, l'ont sauvé du flou où s'engluait son existence.
L'impression de légèreté du roman est trompeuse. le pas du narrateur est celui d'un homme qui mesure la fuite du temps sans éprouver la consolation d'un apaisement en se retournant sur le passé.
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On rentre dans un roman de Modiano comme on rentre dans une église. le silence nous saisit malgré les mots. Puis nos yeux s'accoutument, et très vite on se rend compte que l'essentiel n'est pas dans ce que l'on voit- ce qu'on lit en l'occurrence.
Il y a aussi dans Modiano quelque chose qui fait penser à la photographie d'antan : un sujet clair et l'arrière plan flou, ou l'inverse. L'auteur ne cesse d'alterner entre le très précis (un nom de rue, un visage, une heure de train) et le très vague (au fait de quoi parle donc ce roman?).
"Tu n'aimes pas? Moi j'adore!"

La danseuse apporte une pierre de plus dans l'oeuvre du prix Nobel, comme sur un mur qui se construit. A première vue, la pierre ressemble aux autres. Pas de surprise. Toutes les pierres se ressemblent, mais sans elles pas de mûr…
Un beau moment de lecture, donc, même si La Danseuse n'est peut-être pas un roman d'initiation à l'oeuvre de Modiano. Juste une pierre de plus, pas moins, pas plus. C'est déjà tellement mieux que beaucoup d'autres romans contemporains.
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Lire Modiano, c'est flâner dans les rues de Paris, s'y perdre, faire des rencontres, s'attabler dans un café avec l'un de ses personnages et regarder passer les gens à travers la vitre légèrement embuée.
Lire Modiano, c'est faire une pause, prendre le temps, écouter respirer le monde et ses habitants, se perdre dans les souvenirs, arpenter le passé.
Lire Modiano, c'est un bonheur que je ne partage pas, je le garde pour moi, je le lis en secret, sans bruit.
Lire Modiano, c'est tellement intime, il faut être dans la retenue, respirer doucement et apprécier chaque mot, chaque silence. 
La danseuse, c'est Modiano et j'adore tout simplement ♥
Lien : http://www.levoyagedelola.com/
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J'ouvre ce dernier ouvrage de Modiano comme un recommencement. le sentiment du déjà vu n'y a pourtant pas sa place, c'est plutôt le plaisir de retrouver un paysage familier, avec ses couleurs, ses odeurs. Il y a là quelque chose du plaisir à enfiler un vieux jean. On s'y sent bien. On se laisse donc porter, on se demande où seront les variations cette fois ci, Modiano c'est aussi une musique. Malgré tout, la découverte y a sa place, même si elle se niche dans les détails. le lecteur fait donc le tri entre ce qui demeure de l'écriture de l'auteur et ce qui change imperceptiblement. C'est un voyage dans les mots, les impressions fugaces, l'histoire est un prétexte, et la magie de l'écriture de Modiano tient dans sa manière de donner à l'histoire qu'il raconte la légèreté de l'air. La danseuse, c'est bien le comble de la légèreté. le roman ne dévoilera d'elle que peu de choses. le studio Wacker où elle s'entraine, les fantômes qu'elle croise parfois, les ombres de son passé tellement floues s'il n'y avait l'enfant que le narrateur accompagne souvent, de son cours privé à l'appartement de sa mère. Comme toujours, les rues de Paris sont un écrin, on y rencontre des visages connus, qui surgissent d'hier, dont on ne se souvient pas de grand chose, sinon de leur nom, toujours d'une précision machiavélique, ils sont les révélateurs en pointillés de tous les clairs obscurs du récit. Comme souvent, le narrateur est perdu. Il importe peu de savoir pourquoi , l'important c'est ce qui advient: ce flottement éternel dans un présent pris en otage d'on ne sait trop quelles menaces. On les sent pourtant au bout des doigts. Ce dernier écrit laisse toutefois transparaître les changements du temps et le Paris d'aujourd'hui' se laisse apercevoir: Un Paris qui étonne l'auteur par ses foules de touristes dont il semble dénoncer le caractère fugitif, fugace, comme extérieurs au décor. le narrateur qui ressemble tant à l'auteur puisqu'il écrit lui aussi, jeu de doubles.
La poésie est convaincante, on la garde en tête en sortant du livre, on s'étonne d'être prêts à emboiter le pas à l'auteur « jusqu'à la nuit des temps » qui marque les derniers mots de son récit.
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A la recherche d'un temps disparu, emporté, dissous. A partir de fragments d'images présentes et de lieux actuels, l'auteur tente de se souvenir d'une époque passée. D'une époque incarnée par cette femme, la danseuse. Autour d'elle gravite tout un petit monde parisien, entre la rue du Bac et la porte Champerret.

Avec sensibilité et un talent littéraire certain, l'auteur nous offre une lecture agréable. Court roman, vite lu, peut-être trop vitre, j'ai eu du mal à me laisser emporter par cette ambiance de mélancolie voire de nostalgie parisienne. Cela dit, ça ne m'empêchera pas de continuer à lire Modiano.
Lien : http://animallecteur.canalbl..
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-C'est mon premier roman de cet auteur, assez déroutant, je dois dire, mais tellement poétique. le narrateur "écrivain", qui ne sait pas encore ce qu'il va faire de sa vie, est attiré par la rigueur de la danseuse. Il en prend de la graine en travaillant son écriture.
Mais, il ne se passe pas grand-chose dans ce roman intemporel ,il nous donne quelques fragments d'un passé comme une mosaïque inachevée. Et l'auteur nous laisse sur notre faim d'en apprendre un peu plus sur la danseuse et le petit Pierre et nous abandonne dans une rue de Paris, un soir de Noël. J'ai retenu une phrase qui fera sourire ceux qui me connaissent: "Les danseurs n'ont pas besoin d'alcool puisque la danse est le plus fort des alcools".
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Un nouveau roman de Patrick Modiano, c'est la certitude d'y retrouver ce qu'on attend et qu'on aime, de rencontrer des personnages mystérieux, une atmosphère pesante, des lieux plus ou moins établis, et évidemment un style littéraire inimitable. La danseuse ne fera pas exception à la règle, avec un personnage central qui rejoindra aisément les hommes et les femmes qui l'ont précédé dans les romans de Modiano antérieurs.

L'auteur de Un pedigree se met dans la peau du narrateur, qui au détour d'une rencontre impromptue dans le Paris d'aujourd'hui va se souvenir d'une femme, une danseuse qui prenait des leçons au studio Wacker, place de Clichy, après ses cours en compagnie de Boris Kniaseff, un célèbre professeur russe. Remontant le cours d'un passé lointain, plus ou moins net, le narrateur se remémore ces moments, quand il retrouvait la danseuse après ses cours, accompagné d'un petit garçon appelé Pierre, le fils de la danseuse, dont il s'occupait parfois.

Comme toujours dans les romans de Patrick Modiano, le flou domine, les personnages sont plus ou moins obscurs, certains sont même carrément louches et dangereux, les lieux, pas toujours bien définis… Même pour La danseuse, le personnage qui donne son titre au livre, il subsiste un doute : était-elle « Brune ? Non. Plutôt châtain foncé avec des yeux noirs. » Au fond, peu importe, car le plus important c'est l'atmosphère, c'est le plaisir de se plonger dans ce récit en noir et blanc aux côtés du narrateur, pour le suivre dans ses errances, à la recherche du passé, pour tenter d'y voir un peu plus clair dans ses évocations, en participant à un jeu de piste plein de secrets, pour recomposer un puzzle comme seul Patrick Modiano sait les imaginer.

La danseuse constitue une nouvelle pièce de choix dans la bibliographie du prix Nobel de littérature 2014, un roman, comme toujours, pétri de nostalgie et nimbé de mystère, duquel se dégage beaucoup de charme et de poésie. Rien de bien neuf donc, mais le plaisir reste intact, et le voyage agréable dans ce très court récit qui viendra s'ajouter à la longue et magnifique collection de livres entamée en 1968 avec La Place de l'Étoile.




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