A propos de ce roman,
Yann Moix écrit qu'
Orléans est un roman d'humiliation comme il existe des romans d'initiation. Voilà, le décor est posé. Loin de l'arrogance qu'on lui prête,
Yann Moix évoque son enfance passée dans la capitale de la région Centre-Val de Loire vu de l'intérieur, c'est-à-dire entre les murs de la maison familiale, puis vu de l'extérieur, c'est-à-dire à l'école avec les amis et les premières amours.
Si
Orléans débute par de belles phrases empreintes de poésie, "Le monde rouillait. Derrière la fenêtre, c'était l'automne. L'air jaunissait. Quelque chose d'inévitable se déroulait
dehors : la mort des choses." s'ensuivent des scènes de violence et d'humiliations pas ordinaires. En les découvrant les viscères se nouent. Les horreurs s'enchainent rendant le tout insoutenable. On aimerait tellement que tout cela soit faux. Et si tel n'est pas le cas, on s'interroge. Que des parents prennent un malin plaisir à humilier et à violenter leur enfant, malheureusement on sait que cela existe. Mais quand un enfant est déposé à l'école en pyjama avec son petit déjeuner qu'il doit prendre au pupitre devant toute la classe hilare, on s'interpelle. Comment est-ce que l'institution scolaire a pu se rendre complice de tels actes dégradants ? Même si en 1970 on était moins sensibilisé à ces questions, comment se fait-il qu'un membre de l'Education Nationale ne se soit pas aperçu de la maltraitance Et puis au milieu de toutes ces violences, on se réjouit que très tôt le narrateur ait rencontré la littérature. Ce fut pour lui, et même si ses tortionnaires de parents ne l'ont pas entendu ainsi, une salvatrice découverte. Je crois ne pas me tromper en affirmant que la littérature a maintenu l'enfant
Yann Moix en vie. Elle l'a aidé à encaisser les coups, les insultes et les humiliations. Elle lui a apporté un halo de lumière dans son monde de noirceur.
La seconde partie d'
Orléans, "
Dehors" est dédiée aux relations que le narrateur a pu entretenir avec les autres. Ses camarades de classe d'abord, puis avec la gente féminine. Empreinte de passages moins violents, voire tendres, cette dernière permet peut-être de mieux cerner la personnalité de l'auteur, si tant est qu'il en ait voulu ainsi, mais elle est surtout plus poussive à lire.
Yann Moix évoque ses souvenirs de classe comme on regarde un album photo. Ce genre d'exercice est souvent délicat parce qu'en
dehors de l'intéressé, il passionne rarement ceux qui ne figurent pas sur la photo.
Alors faut-il lire
Orléans ?
Ce roman est le regard de l'adulte
Yann Moix devenu écrivain sur son enfance servie par une plume toujours aussi acérée. On referme ce texte habité en se réjouissant que l'enfant martyr qu'il a été, ait eu la chance un jour de croiser la plume de
Gide, Péguy,
Sartre, Bataille et les autres. Non seulement la Littérature a permis à l'auteur de survivre, mais surtout elle illumine et enchante son écriture. Rien que pour cela
Orléans mérite d'être lu.
Lien :
https://the-fab-blog.blogspo..