Anima est un objet littéraire unique en son genre, à la croisée du policier gore, du poème noir et du théâtre dramatique. Si vous êtes à la recherche d'une lecture réconfortante, optimiste, respectueuse des conventions et des femmes, passez votre chemin.
C'est en effet une histoire terrible que nous conte
Wajdi Mouawad, celle de son double Wahhch Debch, survivant du massacre de Sabra et Chatila, canadien découvrant le cadavre horriblement mutilé de sa femme dans la scène d'ouverture.
Une histoire, une errance, une vendetta contée à travers les yeux des
animaux qui côtoient le héros, le croisent, et parfois communiquent avec lui comme avec aucun autre humain.
Car Wahhch Debch est né deux fois, sauvé de sa première tombe par des corps de chevaux et son père adoptif, de qui il s'est éloigné.
Devant l'inertie de la police, il se met en recherche du meurtrier de sa femme, un Mohawk aux pratiques sanguinaires, parcourt les frontières du Canada et des États-Unis, passant d'une réserve indienne au midwest profond, à la recherche de lui-même autant que de cet homme.
Le souffle coupé par la violence et la complaisance d'un récit qui n'hésite pas à décrire en détail les tortures abjectes auxquelles en particulier les femmes et les
animaux sont soumis, j'ai cependant été très admirative de la prouesse littéraire qu'il constitue. Je me devais de le lire, étant donné la nature de mon projet actuel. Je ne le regrette pas, malgré cette violence frontale et le désagrément de devoir vérifier chaque nom latin d'
animal pour ne pas perdre une miette de cette oeuvre, le style, les liens tissés entre peuples opprimés, la force du lien homme-
animal m'ont totalement séduite. Malgré aussi le soutien incompréhensible de l'auteur à B. Cantat, finalement cohérent avec les obsessions violentes et fatalistes qui traversent ce très sombre texte.