AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,63

sur 941 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Chez Haruki Murakami j'aime ce mélange très particulier d'étrangeté et de familiarité, d'étonnement et de douce sensation d'être dans son univers comme chez moi. Mais dans le Passage de la nuit, du moins dans la première moitié, c'est l'étrangeté qui domine, l'écriture est plus sèche au début, touche moins en profondeur que d'autres de ses romans.
Mais quand même, c'est un très bon livre, avec ce côté très séduisant d'un réalisme magique à la japonaise, et s'il me semble un peu moins subtil ici, ça reste assez fascinant. le réalisme et le basculement dans un monde où disparaissent les balises rassurantes de la normalité sont moins mêlés que dans mes précédentes lectures de Murakami. On suit deux soeurs, chacune de son côté. Mari Assaï et les gens qu'elle croise au fil de la nuit - La nuit, lui dit un barman, possède une horloge différente, et elle donne aux rencontres une texture particulière. La jeune fille va donc faire de belles rencontres nocturnes, profondes et inspirantes, notamment avec Takahashi, qui se décrit comme plutôt en retrait: « Je suis meilleur en tant qu'accompagnement. Comme les frites, ou le coleslaw. » Mais en fait il m'a tellement plu que ça ne m'aurait pas du tout dérangée de l'avoir en personnage principal.
Du côté de la soeur De Mari, la situation est beaucoup plus bizarre et flippante. Depuis deux mois, Éri Assaï dort tout le temps, et la voilà qui passe de l'autre côté d'un écran de télévision, qui devient évanescente, un corps creux, comme si tout ce qui la constituait avait été arraché par une main invisible.
Énigmatique, mais moins envoûtant que d'autres oeuvres de Murakami, ce roman montre bien néanmoins que son auteur était sans doute un des mieux à même de rendre compte du passage de la nuit, de ses rencontres insolites et de ses mystères.
Commenter  J’apprécie          5519
Encore un livre de Murakami qui ne m'a pas déçue, bien au contraire. de toute façon, étant donné que j'adore cet auteur, je ne crois pas que cela pourrait être possible.

Ici, l'histoire - ou devrais-je plutôt dire les histoires - se déroule en sept heures, durant une nuit quelconque à priori dans une ville japonaise. Et pourtant, cette nuit n'a rien de banal car au cours de ces sept heures seulement va se dérouler une multitude d'évènements, des personnages qui n'auraient probablement jamais dû se rencontrer dans d'autres circonstances ou, pour certains, se revoir vont pourtant le faire cette nuit. Tel est par exemple le cas De Mari et de Takahashi. Pourquoi ces deux-là ne se seraient sans doute jamais revus ? Tour simplement parce que Takahashi connaît en réalité la soeur De Mari, Eri Assaï.
Mais bien des liens peuvent se créer au cours d'une nuit, en quelques heures seulement et c'est ce qui va en partie se produire ici. Je dis bien en partie car l'histoire est en réalité bien plus complexe que cela et bien des choses, aussi étranges puissent-telles paraître, peuvent se dérouler alors que toute la ville - ou presque - dort.

Un roman fantastique absolument envoûtant, comme tous les livres de Murakami que j'ai lus d'ailleurs, et qui laisse une grande part à l'imagination du lecteur. Tout dépend si ce dernier accepte de jouer le jeu et de croire à l'incroyable. C'est ce que j'ai fait et je n'ai pas pu m'arrêter dans ma lecture et que j'aurais bien aimé le livre fasse une centaine de pages de plus pour me permettre d'apporter des réponses à des questions qui resteront sans réponse...si ce n'est dans mon imagination !
Commenter  J’apprécie          380
"Chaque homme dans sa nuit s'en va vers sa lumière " (Les contemplations - Victor Hugo) c'est de cela que nous parle Haruki Murakami dans son roman, au travers des déambulations nocturnes de ses personnages qui progressent, tous autant qu'ils sont, au gré du tic-tac immuable de l'horloge.

Ce roman est à mon sens l'un des plus atypiques de l'auteur, de part son style d'écriture qui est plus brut, plus épuré qu'à l'accoutumée mais aussi de par sa forme narrative. Murakami nous offre une histoire simple en apparence mais d'une profondeur psychologique exceptionnelle, accentuée par la minutie avec laquelle il nous décrit ses personnages.
Le récit est organisé à la manière de séquences cinématographiques, la narration est neutre, impersonnelle, l'auteur utilise le "nous", caméra embarquée et voix off, il nous fait toucher du bout des doigts, non sans un certain sentiment de voyeurisme jubilatoire, les personnages de sa vision d'un Tokyo sombre et mélancolique.
Il mélange savamment, comme à son habitude, le banal du quotidien et la fantasmagorie. Car oui Murakami est capable de nous décrire minitieusement une bouteille de lait "Takanashi" demi-écrémé et dans la seconde qui suit il est aussi capable de nous faire pénétrer dans les méandres obscures de son monde étrange et fascinant dans lequel dort d'un sommeil sans fin la belle Éri Assaï sous l'oeil terrifiant de l'homme sans visage, dans lequel se croisent les destins d'un joueur de trombone, d'une étudiante en mal de repères, d'une gérante d'un love hôtel, d'un salaryman en proie au vice et à la violence...

La nuit de Murakami appaise les âmes égarées et elle ne saurait exister sans musique. L'auteur dont l'on connaît la passion pour le jazz a truffé son récit de pas moins d'une douzaine de morceaux référencés, pour notre plus grand plaisir.

Won't you go away (little girl)
Wish you wouldn't stay (little girl)
Won't you go away (little girl)...
(Percy Faith - Go away little girl)

Bonne lecture !
Commenter  J’apprécie          3211
Quel puissant roman, sombre, fantasmagorique, énigmatique ! Il est facile à lire, les chapitres sont très courts et vous tiennent en haleine comme dans un bon thriller. le vocabulaire est simple, les personnages ordinaires vous ressemblent. L'écriture est sèche, saccadée, avec des solos magnifiques qui vous nouent les tripes. L'atmosphère est celle d'un film noir.
Au début, à 23h 56 vous survolez la ville comme un oiseau de nuit. Monstrueuse créature qui se régénère perpétuellement. "Agrégat" de corps interconnectés "qui clignotent au rythme des battements du coeur". Et puis vous plongez vers le centre-ville et plus exactement vers cette zone de néons multicolores où s'agglutinent les étudiants de retour de soirée, les prostituées, les rabatteurs de karaoké etc. Un monospace noir aux vitres opaques passe. Et vous vous rapprochez encore. Vous entrez au Denny's. Un restaurant sans charme appartenant à une chaîne. Et là vous vous fixez sur une fille attablée avec un gros bouquin.
Elle s'appelle Mari. Elle est étudiante en chinois. le genre banal et sérieux Elle lit un pavé. Elle n'a pas sommeil. Un gars nommé Takeshi qui porte un trombone s'installe à côté d'elle. Il l'a déjà vue avec sa soeur aînée Eri qu'il connaît.
Eri c'est une beauté. Dans le chapitre 2 à 23h56. elle est allongée et dort comme une belle endormie. Un torrent de cheveux noirs déborde de son oreiller. Elle est dans une pièce sans personnalité. Vous l'observez avec un autre observateur qui se cache et vole l'image de la belle. Vous voyez qu'elle est plongée dans un profond sommeil. A minuit vous entendez un grésillement. L'écran de la télé clignote. Il se passe quelque chose derrière l'appareil. Non, la télé est débranchée. Pourtant sur l'écran une image prend forme. Une pièce avec une chaise. Un type d'un âge indéterminé aux habits sombres et au visage caché y est assis...

Le roman fait alterner les deux récits le temps d'une seule nuit. Mari va se déplacer, quitter son abri de néons et son bouquin malgré elle, rencontrer des gens, une prostituée chinoise battue, des femmes blessées, d'autres coeurs solitaites qui vont lui parler, se livrer, lui donner. Eri, la belle endormie semble immobile. Rêve-t-elle ? Est-elle l'objet du rêve de sa soeur au physique banal ? de ce type inquiétant qui la regarde? de nous tous voyeurs ? Nous sommes tous complices semble dire Murakami, tour à tour victimes et prédateurs de la video surveillance, des images en général, du conformisme, du productivisme hyper moderne. Qu'est-ce qu'il reste d'authentique dans ce monde ? Comment y (re)trouver notre place ? Comment nous (ré)unir ?



Commenter  J’apprécie          316
Deuxième livre de Murakami que je lis (le premier était la ballade de l'impossible) est je peux dire que j'ai adoré.
Déjà l'écriture est au présent et on a l'impression d'être spectateur d'un film, il décrit les scènes comme si elle était filmée par une caméra.
Deuxièmement, les personnages sont toujours très étranges mais introduits dans la vie de tous les jours ce qui fait que le lecteur n'ait pas choqué par cet étrangeté et puis les femmes sont décrite toujours de manière mystérieuse et intrigante.
Bref encore une fois je suis conquise!!!
Commenter  J’apprécie          200
Qui est Eri Assaï, la jolie fille qui dort dans une pièce et qu'on épie tout au long du roman ? Qui est Shirakawa, l'employé qui s'attarde au bureau jusqu'au petit matin ? Qui est Takahashi, le joueur de trombone ?

Nuit tokyoïte. Et musique. du jazz, bien sûr. Webster, Duke Ellington, Sonny Rollins et bien d'autres encore. Faune nocturne, à l'heure où les derniers trains ont emmené les salary men dans leurs banlieues endormies. A l'heure des putes, des marginaux, des musiciens, des mafieux, ... A l'heure trouble où le regard des autres se détourne, où notre part sombre se révèle … A l'heure « où ces lieux-là ouvrent discrètement une entrée secrète. Ce sont des lieux où n'a cours aucune de nos lois fondamentales. Personne ne peut prévoir où et quand ces abîmes avaleront des hommes, où et quand ils les recracheront. »

Plongée très visuelle dans cette nuit, scènes caméra à la main. Et malaise tout au long du roman … Voyeurisme hypnotique, carcan social, schizophrénie, … Où sommes-nous ? Qui est l'autre ? Qui sommes-nous ? « Ces points d'interrogation resteront évanescents, aspirés sans pitié par le silence, en même temps que la toute dernière pénombre de la nuit. »

Enorme coup de coeur ...

Commenter  J’apprécie          173
Murakami nous emporte dans cette nuit profonde et nous invite à suivre et à accompagner ces personnages qui nous font découvrir deux mondes qui se côtoient et pourtant s'ignorent le plus souvent.
Par son génie du récit, l'auteur nous montre que la frontière entre eux est souvent ténue et ses contours varient au gré de l'avancée de la nuit.
Superbe histoire qui suscite certainement autant d'intérêt que de questions.
Commenter  J’apprécie          133
Tokyo, une nuit. Une jeune fille dort, une autre lit dans un fast-food, une prostituée se fait agresser… images banales mais qui glissent légèrement vers le fantastique. Une écriture cinématographique, très visuelle, qui n'est pas sans rappeler les tableaux de Edward Hopper (d'ailleurs nommément cité), et qui donne au lecteur le rôle de voyeur. Un roman envoûtant et fascinant, à lire de préférence de nuit en écoutant du jazz, ou du Bach.
Commenter  J’apprécie          120
Haruki Murakami sait comment communiquer avec ses lecteurs. On retrouve cette habilité dans "Le passage de la nuit". Il nous traduit la plus banale des actions et la situation la plus «naturelle» auxquelles chacun de nous est sans cesse confronté. C'est en cela que tous les lecteurs ne font plus qu'un. La nuit est universelle, c'est un fait, mais si chacun la subit, chacun s'en sert selon son bon vouloir. C'est ce que l'auteur nous fait découvrir à travers une panoplie de personnages tous aussi surprenants les uns que les autres. On découvre des personnalités touchantes, complexes et intéressantes, des individus caricaturés pour certains et sortant de l'ordinaire pour d'autres. Ce choc des modes de vie et des tempéraments nous transportent là où l'auteur en a décidé pour notre plus grand bonheur. En deçà est présent un regard perpétuel sur chacun des personnages. Ce regard très lourd et son pouvoir d'observation absolu amènent à la dimension de l'oeuvre un côté « rêveur » & « divin ». Lire ce chef-d'oeuvre c'est toucher de près à la simplicité au-dessus de laquelle chaque être humain passe sans y accorder beaucoup d'importance. On en ressort attentionné et perspicace quant à ce qui nous entoure.
Commenter  J’apprécie          80
Tokyo, la nuit.
Nous sommes tantôt un oeil ouvert sur toute la ville, qui couve un évènement puis un autre, tantôt notre oeil se focalise sur une personne : Mari, qui lit dans un bar, sa soeur Eri qui dort d'un sommeil particulier, un jeune musicien, une gérante d'un hôtel, un homme de bureau. Ils n'ont aucun lien, du moins on le pense, et pourtant toute la nuit tournera autour d'eux. Un drame, un événement malheureux se prépare.

Le récit de cette nuit, c'est un voyage sombre, drôle et presque onirique. le récit de cette nuit est un moment de repos où on peut mettre notre vie de côté, oublier un peu les tracas pour savourer une tranche de celle de quelques autres personnes.

Lu dans une période compliquée, où le moral et la concentration n'étaient pas au rendez-vous, le Passage de la Nuit a été une bulle d'air plus que bienvenue. le premier roman de cet auteur que j'ai pu lire, et sûrement pas le dernier. Merci, Monsieur Murakami, pour ces petits instants de rêve.
Commenter  J’apprécie          70





Lecteurs (1988) Voir plus




{* *} .._..