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Voici un roman historique, l'histoire vraie de Nsaku Ne Vunda, né vers 1583, sur les rives du fleuve Kongo .
Orphelin et éduqué par les missionnaires , baptisé Dom Antonio-Manuel lors de son ordination, effectuant un travail local auprès des plus démunis , à l'écoute d'une population déboussolée et terrorisée, il fut chargé par le roi des Bakongos, Alvaro ÏÏ,au tout début du 17° siécle de devenir son ambassadeur auprès du pape Clément VIII au Vatican ...
Il serait la voix des Bakongos dans la lointaine Europe, en quelque sorte le trait d'union de son peuple, afin de traiter sur un pied d'égalité avec les nations européennes restées fidèles au catholicisme .
Animé d'une énergie intarissable, sérieux et cultivé , connaissant le latin , le portugais et le français, vigoureux et endurant, c'est la destinée de ce personnage compassionnel doté d'une foi en Dieu inextinguible , toujours accompagné de sa bible et son crucifix que l'auteur conte.
Sa tâche sera longue, ardue et périlleuse .
Le roi l'a choisi car il est totalement étranger à la corruption et aux intrigues qui gangrenaient les conversations dans les couloirs de son palais à Manza Kongo .......
Las ! Ce candide Africain va connaître au cours de sa traversée à bord du vent Paraclet la pire des horreurs , en découvrant dans la cale des colonnes d'esclaves enchaînés au fer rouge , des femmes, des enfants, des hommes débarqués au Brésil........il va passer par le Nouveau Monde .
Des déconvenues, des péripéties, des épreuves infiniment douloureuses vont mettre à mal sa foi en l'homme et en Dieu !
Loin de sa terre natale il vivra la plus extraordinaire des aventures parmi les paysages et les hommes !
L'auteur nous entraîne dans un voyage dur, tragique , tumultueux , qu'il peuple des souffrances inouïes de cette époque. IL dresse un portrait implacable des conditions de vie de mise en esclavage .......
Roman d'aventures ? Roman historique ? Roman de formation?d'apprentissage ? L'auteur signe un magnifique plaidoyer qui exalte les vertus de la tolérance , de la fraternité, de l'égalité ......
Il y met une ardeur poétique et imagée, à l'aide d'une écriture flamboyante et chaleureuse , ciselée et colorée, lyrique .
Cet ouvrage qui mêle réflexion et aventure , histoire, intemporel et universel a des résonances contemporaines !
C'est ce qui fait sa force .
Mais ce n'est que mon avis, bien sûr .
Merci à Marie , ma fidèle libraire de la taverne du livre à Nancy !
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J'ai lu quelque part que ce livre est une "ode à l'humanité". C'est vrai que le personnage central est empathique, mené par l'amour de son prochain.... Par contre il ne va pas rencontrer beaucoup d'"humanité" malheureusement.
Ce livre est un plaidoyer centré autour d'un personnage réel. Nsaku Ne Vunda devenu Dom Antonio Manuel, prêtre, va être envoyé par le roi du Kongo en tant que diplomate auprès du Saint-Siège. Nous sommes au début du 17e siècle. Parti de Luanda en Afrique, il voguera vers le Nouveau Monde (le Brésil) sur un bateau négrier. le récit est très documenté. Si je savais que ce voyage était atroce pour les malheureux embarqués, là il défie mon entendement. Surtout qu'il s'accompagne des questionnements et révoltes du jeune prêtre, noir, comme les esclaves, sur ce bateau de blancs, où il est protégé par son statut. Il s'interroge, se demande où est l'Amour annoncé dans les Evangiles, où est Dieu en fait....
Malheureusement son périple va le mener dans l'Espagne de l'Inquisition où être noir est signe d'hérésie...
Etape après étape, on cherche cette humanité au milieu de la barbarie. Quelques moments de lumière, mais surtout du sombre, de l'horreur....
Un très beau texte, très joliment écrit, pas toujours facile.
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QUAND ON N'A QUE L'AMOUR POUR UNIQUE RAISON...

Mais qu'était-il parti faire sur cette galère...? C'est, la causticité en moins, ce qu'avait dû songer feu Dom Antonio Manuel, né Nsaku Ne Vunda au Royaume du Kongo et premier enfant du continent dit noir à être envoyé en ambassade officielle auprès du Saint Père de Rome, lequel est alors Paul V. Nous sommes en janvier 1608 et ce bon père originaire du peuple des bakongos, qui vient de vivre trois années d'infamie, de drames, de dérélictions diverses, trois années d'un véritable chemin de croix spirituel, physique, mental et humain, va enfin être reçu par le Pape pour accomplir la mission qu'il s'est à lui-même confiée - assez éloignée de ce que son Roi lui avait mandé au départ -, non pour lui, mais pour tous ces déshérités, ces malheureux, ces hommes de tellement rien qu'on les vend comme des choses, que leur vie ne vaut guère plus que le dernier des objets, pour tous ceux à qui, il lui semble, s'était adressé son Sauveur...

Mais remontons rapidement le cours de cette stupéfiante et terrible histoire : Nsaku Ne Vunda naquit, bientôt orphelin, vers 1583 sur les rives du fleuve Kongo dans l'actuel Angola. Ses parents adoptifs reconnaissant en lui un enfant d'une grande maturité et, déjà, d'une grande sagesse, souhaitèrent qu'il apprenne à lire et à écrire auprès des missionnaires blancs : le destin était en marche. Devenant prêtre - le premier prêtre noir ordonné sans être de famille noble et sans avoir fait son séminaire au Portugal, la puissance occidentale alors "tutélaire" de ce grand territoire africain. Trop populaire, trop inaccessible aux délices du temps, presque déjà trop "saint", trop en décalage sans doute avec les affaires (sordides) du moment, c'est donc à lui que fut confiée, possiblement pour l'éloigner de sa paroisse et de ses ouailles qui ne l'aimaient aussi que trop, la très honorifique mais très pesante charge de représenter le Roi des Bakongos Alvare II, descendant direct du premier roi catholique d'Afrique de l'ouest converti par les européens. L'idée d'alors était d'émanciper le Kongo de la tutelle de plus en plus pesante et délétère du Portugal alors lui-même vassal, de facto, du Royaume d'Espagne - principalement en raison de la traite négrière et des prémices de ce que l'on nommerait plus tard, le "commerce" triangulaire -. Mais ce que va vivre notre jeune prêtre, pour ainsi dire dès les premiers instants avant l'embarquement sur un navire français répondant au nom de Vent Paraclet, commandé par Louis de Mayenne, tout à la fois sévère capitaine et homme d'affaire dénué de toute morale (comment pourrait-il en être autrement ?), c'est ni plus ni moins un aller simple vers l'enfer ! Car, bien entendu, le navire qui doit le mener dans un premier temps à Lisbonne a pour destination première le nouveau monde - plus précisément le Brésil - afin d'y vendre, au prix le plus fort possible, cette cargaison terrifiante qu'un euphémisme abject désignera dans les siècles à venir de "bois d'ébène" : des esclaves, hommes, femmes et enfants !
On peut imaginer ce que ce jeune missionnaire, un représentant de la foi qui prétend être celle de l'amour entre les hommes et qui n'a jamais été confronté directement à cette honte de l'humanité bien qu'en connaissant l'existence, a pu ressentir des mois durant à voir ses propres frères et soeurs, des représentants de son peuple ou des peuples environnants, ayant même couleur de peau - tandis que les blancs du navire montrent à chaque instant combien ils ne font aucun cas de ce que des Senghor ou des Césaire appelleront plus tard, par provocation et amour tout à la fois, la "négritude", ce qui, bien entendu, englobe ce pasteur qui ne mérite qu'à sa soutane de ne point être lui même enfermé, enchaîné et psychologiquement rompu. Ce sentiment terrible de ne pouvoir rien faire pour sauver ses semblables que le goût du lucre a ravalé au rang de simple - mais précieuse - marchandise. Ainsi les esclaves sont-ils tout à la fois incroyablement maltraités, rabaissés, entreposés comme bêtes que l'on mènerait à l'abattoir, de manière à les briser pour jamais, mais tout aussi invraisemblablement mieux nourris que les simples marins, eux-mêmes plus ou moins esclaves de leurs maîtres galonnés, interchangeables, pour ainsi dire superflus lorsque se dressent enfin à l'horizon les côtes brésiliennes : Les matelots coûtent forcément cher, trop cher ! Aussi, s'il en meurt en route (de maladie, de malnutrition, par accident, mauvais traitements ou punition), c'est autant de moins à payer, tandis que les esclaves rapportent, alors, si l'on doit absolument en faire de serviles machines à travailler, il faut absolument qu'ils parviennent de l'autre côté de l'océan en bon état, en perdre le moins possible en mer, en prévision du jour où sera enfin temps de les vendre : l'abjection se niche absolument partout sur de tels navires, y compris dans les résolutions qui paraissent les moins mauvaises...
Le chemin de retour sera à peine plus tranquille, le Vent Paraclet se faisant arraisonner par un pirate hollandais convertit à l'Islam et oeuvrant pour le Raïs d'Alger, bien qu'en réalité commandité par la papauté qui se méfiait de ce capitaine français ayant ses entrées à la cour du trop rapidement convertit Roi de France, Henri IV dit "Le Grand". Exit Louis de Mayenne, donc, et le reste de son équipage : seul Dom Antonio Manuel ainsi qu'un jeune matelot qu'il avait pris en amitié survivront au massacre. Après moult autres péripéties, nos deux compères débarqueront à proximité de Lisbonne. le prêtre trouvera refuge auprès de ceux de sa congrégation mais devra se séparer de son jeune ami... Qu'il retrouvera très vite puisqu'ils décideront de rejoindre l'Espagne afin d'y embarquer vers l'Italie. Hélas, rien ne pouvant se dérouler comme escompté dans cette odyssée, la Sainte Inquisition viendra freiner pour un long moment leur progression, Dom Antonio Manuel se retrouvant même iniquement enfermé dans les geôles de cette institution ignominieuse en raison d'accusations toutes plus improbables et injustes les unes que les autres. Fort heureusement la situation ignominieuse dans laquelle survit le prêtre va être connue du nonce puis du pape - est-ce lié à une ultime intervention du compagnon d'infortune de notre ami bakongo, qu avait réussit à échapper aux fourche caudines de l'inquisition ? Nul ne le saura jamais puisque nous en perdons alors toute trace -, et il sera enfin délivré pour enfin se rendre jusqu'à la ville éternelle, but ultime et que l'on a pu croire un temps inapprochable pour une unique entrevue officielle, et quelle!, avec le représentant du Dieu des Chrétiens sur cette terre. Mais fut-il compris, entendu...?

N'y aurait-il eu que le rythme fou - bien que supportant un grand nombre de pauses qui entremêlent réflexions, expositions diverses, descriptions aussi difficilement supportables qu'absolument essentielles - de cette étonnante histoire que ce livre eût déjà été passionnant. Mais plusieurs éléments, de forme comme de fond, le mettent encore un cran au-dessus de ce qui aurait pu être un déjà excellent ouvrage. Il y a d'abord cette narration, intemporelle et posthume, sous forme de confession à la première personne mais où le narrateur se met de lui-même très souvent en retrait de ce qu'il conte, et qui donne du poids - celui de l'expérience vécue, de la chose vue - à l'ensemble. Il y a, ensuite, ce style, d'une grande élégance, poétique parfois, sensible toujours, précis comme une piqûre dès que c'est indispensable, qui sait se faire vif et rythmé tout aussi bien que lent et majestueux comme on imagine que doit l'être ce fleuve Congo qui baigne les souvenirs du jeune prêtre. Une écriture qui sait aussi, sans aucun mal mais sans excès faciles ni voyeurisme outré, décrire toute l'horreur, toutes les horreurs que l'infortuné héros de ce beau récit décrit sans fard, sans artifices mais avec un profond dégoût, tant de ce qu'il est bien forcé de contempler que du dégoût qu'il a à le vivre sans pouvoir y rien changer. Ce style est riche de mille nuances, riche de mille circonvolutions, riche d'un phrasé tout à la fois simple et savant qui, à lui seul, pourrait faire de Un océan, deux mers, trois continents une belle prouesse dans le monde de la littérature francophone contemporaine, peut-être plus encore de celle strictement française, aux exigences d'écriture souvent médiocres lorsqu'elle n'est pas calamiteuses, qui nous échappent plus souvent qu'à notre tour... Mais le dernier enfant de Wilfried N'Sondé est bien plus que la rencontre entre une histoire et une écriture : d'abord, elle transcende les genres, car qui ne peut y voir un roman d'aventure tout autant qu'un roman d'apprentissage - on lit ici et là qu'il y est question d'un genre de Candide africain, et ce n'est pas non plus erroné - , un roman de vie à nulle autre pareille - et tant pis si cette biographie tient au moins autant de l'invention pure que de la stricte vérité biographique* ? -, un autre aspect de ce texte presque trop court - tant il est haletant, tant on peine à abandonner cet homme aux calamités de son siècle - est qu'il ravira le passionné de récit maritime aussi bien que le féru d'histoire de cette période aussi étrange à nos yeux contemporains que souventefois monstrueuse de ce que l'on appellera "la contre-réforme". Enfin (peut-être ?), une histoire d'amitié d'un intensité rare et d'une douceur presque cruelle tant le lecteur ne cesse d'être bousculé dans ce qu'il est pourtant convaincu d'être en droit de penser ! Ensuite, elle ne cesse d'interroger l'homme et son humanité, l'homme et ses racines, l'homme et ses croyances, par petites touches, presque d'une manière impressionniste, mais l'effet qui en résulte demeure au plus profond de la mémoire bien des jours après avoir refermé l'ouvrage. Enfin, cette histoire est - pardon d'user d'un mot qu'i n'a plus tant que cela bonne presse en nos temps de rationalisme désincarné, de scientisme absolu et triste, cette histoire, donc, procède de la magie !

Magique, oui ! Ce qui l'est strictement - car il s'agit bien ici de magie, blanche, et que l'on nous pardonne si le jeu de mot non voulu pourrait passer pour déplacé, mais qu'il faut prendre seulement dans le sens où c'est de la belle et bonne magie que Wilfried N'Sondé pratique avec grande et juste sapience - c'est que d'autres moins adroits, moins amoureux se serait échoués sur bien des écueils à vouloir trop en faire. Car oui : il en faut de l'Amour pour écrire un tel ouvrage, sans quoi c'est de la haine qui aurait pourrait y naître et, à la toute fin, l'amoindrir, même si la haine eût pu être compréhensible, tant la faute des hommes s'avère à ce point lourde, irrémissible -. Bien que, pour autant, rien ne soit passé sous silence de la monstruosité des hommes contre leurs semblables : des africains qui, contre vil prix, vendirent leurs ennemis puis, par goût du lucre, des représentants de basse caste de leur propre peuple aux blancs dominateurs. Les européens, bien évidemment - hélas, combien de fois hélas ? -, firent commerce de ces pauvres hères transportés dans des conditions infamantes, rompus, cassé, déformés jusqu'au plus profond de leurs âmes, revendus avec bénéfices sonnants et trébuchants de l'autre côté de l'Atlantique, chosifiés, marchandisés, mécanisés - il n'est point cas ici de ceux qui, en bout de course, exploitèrent ces malheureux, mais leur quasi absence pèse presque autant que si l'auteur les avait décrit directement. Il y a cette folie des hommes et de leurs prétendues absolues vérités qui ne sont que Peur, Violence, Refus de l'altérité et que notre bon Père ainsi que son lumineux ami n'auront de cesse de croiser, tant à la cour du Roi des Bakongos que sur le navire négrier ou au Portugal et plus encore en cette Espagne d'un siècle d'Or en voie d'achèvement mais qui sombre de plus en plus dans toute la douleur ignominieuse de la fameuse "Sainte Inquisition". Il n'est jusqu'à Rome et à ses faux semblants, son théâtre d'ombres, de mauvais bougres et d'hypocrites que notre narrateur ne nous aide à percevoir avec sa cruauté tendre et (faussement) innocente.

Il y aurait sans aucun doute encore beaucoup à dire sur ce roman - ce très grand roman au souffle impérieux et empli d'Amour primordial - qui est une des magnifiques surprises de ce début d'année. Qu'il est humain comme rarement. Qu'il allie le conte et la réalité, la légende (on ne peut se remémorer ces pages lues sans repenser au mythe fondateur du Royaume du Kongo, qui est d'une finesse et d'une fraîcheur renversantes) et L Histoire, l'amertume et l'espoir, qu'il est magique et spirituel, bien qu'il mette sans cesse en garde contre tous les dogmatismes, contre toutes les vérités supposément établies, contre tous les jeux de pouvoirs des êtres sur leurs semblables, que ce soit par la foi ou par la force... quand ce n'est pas les deux tout ensemble ! Un livre beau, assurément. Fort, sans concession, mais sans rancoeur inopérante et clivante. Un livre que l'on se dit heureux d'avoir découvert un peu par hasard, un jour de festival du livre, à Binic, par temps de pluie et de dent à quelques encablures de St Brieuc. Un livre qu'on a, assurément, autant besoin qu'envie de partager ! Merci à vous, M. Wilfried N'Sondé.



* La vie du "vrai" Nsaku Ne Vunda, que l'on peut trouver assez aisément sur le net, est tout aussi incroyable et tout aussi tragique que celle du jeune prêtre décrit dans le roman. Mais avouons que l'auteur de ce livre a pris plus d'une liberté d'avec la vie véritable - pour ce qu'on en connait - de ce premier ambassadeur venu d'Afrique noire. Mais, pour plagier ce cher bon Alexandre Dumas, qu'importe que l'on déforme L Histoire pourvu qu'on lui fasse de beaux enfants. Et le rejeton est de toute première force !
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Hey man, I'm not “une 4ème de couv' ”!
Babel en a fait une très belle.
What did you expect?

Ici, pour ton bien, quitte ton enveloppe charnelle et transforme-toi en esprit lecteur.
Pour ne pas ressentir les lames qui t'entaillent, les tisons qui te brûlent, la faim qui te taraude les entrailles, la puanteur et la putréfaction à vomir.
Pour que la charogne, la vermine et la peur qui te guettent à chaque page n'engloutissent pas ton corps au fond de ce navire saturé d'esclaves africains en route vers le nouveau-monde.

C'est un océan de souffrances, de violence et de rapacité que tu vas traverser avec un jeune prêtre Bakongo missionné par son roi pour aller plaider la cause auprès du Pape de ces
sous-êtres asservis, humiliés, mutilés, violés, voire morts avant d'arriver.

Le souffle épique de ce roman ne parvient pas à éliminer l'odeur fétide de la cruauté de la cupidité et de l'orgueil des hommes.

« Je fus assisté par une foule de suppliciés, des victimes d'imposteurs prétendant exécuter la loi de Dieu ou inventant d'autres prétextes pour légitimer le mépris de la vie humaine et justifier les pires atrocités. »

Wilfried N'Sondé dévoile avec intensité et talent le destin d'un personnage pur et intègre doté d'une foi inébranlable, ayant réellement existé.

« Mais l'être insignifiant qui m'adressa un regard ne sut que me tendre la pierre précieuse de sa bague. Je venais lui dire les souffrances d'enfants, de femmes et d'hommes oppressés, niés, livrés à l'arbitraire, et lui me réclamait un acte de subordination. »

Tout est dit, ou presque…

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Wilfried N'Sondé s'est inspiré de la vie d'un personnage ayant réellement existé, prêtre originaire du royaume du Kongo, chargé par son roi d'aller plaider auprès du pape l'abandon de l'esclavage.
Direction le Vatican donc. Sauf que les impératifs commerciaux régissent les routes maritimes et avant de se rendre en Europe, il faudra faire halte au Brésil…
Né Nsaku Ne Vunda, rebaptisé Dom Antonio Manuel lors de son ordination, cet homme doux, dont la foi en Dieu et en l'Homme semble inébranlable, se retrouve ainsi embarqué sur un navire français, en plein cauchemar.
Sur le pont, il est le seul noir.
Dans les cales du bateau, des hommes, des femmes et des enfants destinés à être vendus au Brésil. Dans les cales du bateau…l'enfer.
La prise de conscience sera brutale.
Voyage terrifiant et initiatique, le périple de Dom Antonio Manuel le mènera de son Kongo natal aux rives du « nouveau monde », du Portugal aux geôles de l'inquisition espagnole, jusqu'à sa destination finale.

Wilfried N'Sondé utilise sa plume comme un pinceau, les images sont promptes à surgir, le plus souvent terrifiantes, mais heureusement, aussi parfois apaisantes.
La langue est belle, empreinte d'une musicalité trompeuse, comme pour panser la cruauté du propos…
Un très beau texte, pour un terrible voyage
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Quelle épopée ! J'ai été passionnée par cette aventure que nous offre Wilfried N'SONDE. Tout commence dans l'Afrique profonde, sur les rives du fleuve Kongo.

Il nous conte l'histoire de Nsaku Ne Vunda, baptisé Dom Antonio Manuel, fils du Congo. « Non pas de la terre, mais de l'esprit des neuf femmes qui, il y a fort longtemps, donnèrent naissance à mon peuple. »

De nombreuses péripéties vont jalonner sa vie. Il sera éduqué par des missionnaires et ordonné prêtre.

Il aura pour tâche de se rendre à Rome, auprès du Pape après avoir été ordonné ambassadeur par le roi de Bakongos. Sa mission sera de plaider la cause des peuples africains, afin d'éradiquer l'esclavage. Nous sommes en 1600…

Il va devoir quitter son continent, prendre un bateau où ses illusions et sa foi vont être mises à rudes épreuves, il va découvrir l'esclavage, les pirates, la trahison, pour finir, l'inquisition. Il découvrira également les égarements des gens de pouvoir : son roi d'abord et le Pape qu'il rencontrera à la fin de sa vie.

Bien qu'ayant souffert, Dom Antonio Manuel, gardera sa compassion pour ses prochains et tous ceux qui sont morts sous ses yeux. Il les emportera avec lui à tout jamais.

Une écriture profonde qui m'a emportée. J'ai ressenti la passion, la souffrance, l'amour, et enfin la plénitude après avoir lu ce magnifique livre.

On y retrouve l'esprit de Kunta Kinté un des héros principaux du roman Racines d'Alex Haley. Alors que lui a été esclave, Nsaku Ne Vunda assistera, impuissant, à l'exploitation de ses frères, et de ses soeurs, de leur viol, et à la façon de les casser jusqu'à les rendre serviles.

Il se rendra également compte que l'Europe décrite par les missionnaires est loin d'être le Paradis sur terre, comme ils le laissaient entendre et que les petites gens inféodés à des seigneurs, les étrangers ou ceux qui ne sont pas chrétiens ne sont pas mieux lotis que les esclaves.
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Je suis tombée sur ce livre à la bibliothèque. L'illustration de couverture (Michelle Morin) m'a beaucoup plu mais aussi la 4ème de couverture. J'aime les romans historiques qui sortent de l'ordinaire, qui racontent des histoires méconnues de l'Histoire.

Le royaume du Kongo (avec un K) était un empire très vaste qui couvrait les territoires actuels de la RDC, du Congo Brazzaville, de l'Angola et du Gabon. C'est là que vivait Nsaku ne Vunda, un prêtre de la fin du 16ème-début 17ème siècle avant d'être envoyé comme ambassadeur en Europe.

Wilfried M'Sondé nous propose ici une version très romancée des dernières années de la vie de ce personnage historique. Je dis « très » car si on en croit l'article de Biographie Coloniale Belge, Nsaku ne Vunda « partit en compagnie de Garcia Baptista, envoyé comme ambassadeur en Espagne et avec une suite nombreuse. À peine embarqués, le bateau fut assailli par une furieuse tempête. Ils tombèrent aux mains de corsaires hollandais, qui les dépouillèrent de tout. Ils arrivèrent cependant à Lisbonne (1606?), d'où ils écrivirent à Paul V… »

L'histoire narrée par Wilfried M'Sondé est très loin de la vérité.

Nsaku ne Vunda embarque seul à bord du navire négrier le Vent Paraclet afin d'effectuer son voyage jusqu'au continent européen avec une escale sur les côtes du Brésil afin d'y amener une cargaison d'esclaves africains. Sur la route pour rejoindre l'Europe, le navire est attaqué par un corsaire hollandais. Il parvient à s'enfuir avec son ami Martin grâce à une aide surprenante. Alors qu'il est sur la route pour gagner Rome, d'autres obstacles de taille vont se dresser sur son chemin...

Si on met de côté cet aspect « non conforme à la réalité historique » je dois avouer que j'ai été totalement conquise par le style de l'auteur, et par la qualité de la narration. Nsaku ne Vunda est un personnage qu'il a su rendre attachant, humain sans tomber dans le cliché. Voir l'esclavage avec les yeux de ce jeune prêtre est bouleversant.

« Le spectre de la razzia planait sur le village, la peur d'être enchaîné et de disparaître à jamais. Les paysans tremblaient à l'idée d'être capturés et réduits en esclavage, niés, contraints à servir des étrangers, utilisés puis précipités sans sépulture dans l'abîme de la mort. »

Pour ce qui concerne les histoires de religion de l'époque (Inquisition espagnole, etc) rien ne m'a étonné. J'ai déjà fait le tour de la question.

Un très bon roman que je recommande.

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Ce roman retrace le périple de Nsaku Ne Vunda qui voulait convaincre le pape d'intervenir pour que cesse la traite des êtres humains ; nous sommes au début du XVIème siècle.
Nous allons le suivre sur un océan, deux mers et trois continents. le voyage est intense, révoltant, semé de cruautés et d'abjections.
Rarement, je n'ai lu un voyage en mer faisant commerce d'esclave si bien conté.
C'est aussi un plaidoyer contre la pauvreté, l'hypocrisie et la religion.
C'est un texte qui hurle la souffrance des opprimés, des esclaves, des juifs persécutés ou des femmes violées.
D'une écriture dense, exigeante, presque poétique, l'auteur nous fait toucher du doigt ces abominations.
Je remercie @elisabethGisele qui a déposé ce livre lors du pique-nique Babelio et de la chance que j'ai eu en le piochant.


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Que de puissance dans ce roman se déroulant au début du XVII eme siècle et qui a , malheureusement toujours , des résonances actuelles .

Orphelin, le jeune Tsaku Ne Vunda , né sur les rives du fleuve Kongo, après de brillantes études est ordonné prêtre et baptisé Dom Antonio Manuel . C'est un homme à la foi vissée à l'âme et à l'ambition modeste de retourner dans son village aider les plus démunis et construire une chapelle .
Mais il est choisi par le roi du Bakongo, Alvare II , pour être le premier prêtre noir présenté au pape et pour représenter le peuple Bakongo au Vatican et ainsi, pense le souverain, échapper au pouvoir trop puissant des portugais .
Le voyage ne se déroule pas vraiment comme le pensait Dom Antonio , car le bateau le Vent Paraclet sur lequel il embarque pour Rome , navigue d'abord vers le nouveau monde , et pour cause, les cales sont remplies d'esclaves noirs qui doivent être vendus avant de gagner les côtes européennes .

Le jeune homme assiste, impuissant , au drame de ces enfants, femmes et hommes entassés dans des conditions effroyables et traités comme du bétail avec cruauté par l'équipage .
Une fois sa cargaison débarquée au Brésil, le Vent Paraclet reprend la mer pour le Portugal mais c'est sans compter l'attaque de pirates assoiffés de sang et de pillage et le périple continue pour notre homme qui va également connaitre les geôles de l'Inquisition espagnole.

Si sa foi vacille parfois, si le courage de devenir un homme et non un instrument passif envoyé par un petit monarque ne lui vient que tardivement , les épreuves qu'il subit lui donnent l' énergie pour dépasser la souffrance et vouloir être le porte parole contre l'esclavagisme même si tous les enjeux politiques et financiers le dépassent complétement : sa conviction est ancrée profondément .

Un beau roman plus complexe qu'il n'y parait sur le cheminement d'une conviction qui devient le combat d'une vie .
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Ce roman au titre évocateur relate le destin de Nsaku Ne Vunda, orphelin né à la fin du XVIe siècle sur les rives du fleuve Kongo, éduqué par les missionnaires chrétiens, baptisé sous le nom de Dom Antonio Manuel et ordonné prêtre avant d'être élevé à la fonction d'ambassadeur du roi des Bakongos auprès du pape. Une statue de marbre noir a été érigée à son effigie à Rome. Ce récit à la première personne, grandement romancé mais inspiré de faits historiques, relate le périple d'un homme habité par sa foi et porteur d'une mission capitale pour l'avenir de son peuple.

J'ai été emporté par la plume poétique et vivante de Wilfried N'Sondé qui fait de ce roman tantôt un récit d'aventures, tantôt un récit de formation aux allures de conte philosophique. Véritable Candide africain, cet homme humble catapulté ambassadeur d'une nation est admirable par sa foi et sa détermination à accomplir sa mission, par sa confiance en la nature humaine et en sa capacité à améliorer sa condition. À travers ses yeux ébahis, innocents et blessés, nous découvrons les horreurs de l'esclavage, la corruption par le pouvoir et l'argent à tous les niveaux de la société et jusque dans la maison de Dieu. Il traversera un océan, deux mers, et trois continents dans l'objectif de défendre une haute cause devant le Saint-Père. Douleurs et désillusions se multiplieront sur son chemin, mais il verra aussi la lumière à travers la noirceur insondable de l'âme humaine, une faible lueur permise par l'amitié et l'espoir.

Si le rythme du roman peut paraître inégal voire déséquilibré, se dilatant dans sa première partie pour se concentrer ensuite, c'est sans doute pour mettre l'emphase sur les horreurs d'une interminable traversée, avec dans le ventre d'un bateau, une cargaison d'êtres humains voués à l'enfer. L'angle pris par l'auteur pour décrire l'esclavage montre que l'ignominie n'est pas qu'une simple question de couleur de peau. L'avarice et les appétits de domination sont des poisons universels contre lesquels doit s'élever le courage d'esprits humanistes.
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