À tous ceux qui très loin sont captifs
Dans le silence ; aux âmes enchaînées
Par la longueur des muettes années
En nul ne sait quels abîmes plaintifs ;
À ceux dont l’ombre a tant de murs sur elle
Qu’ils n’ont jamais pu donner de nouvelle
De leur nuit noire aux gens qui sont dehors ;
Ceux pleins d’appels dont nulle voix ne sort,
Dont le secret cherche un mot qui l’emporte ;
Ceux dont le cœur bat sans trouver de porte,
À tous ceux-là - je ne sais pas combien -
Je viens. Je suis petit oiseau, je viens.
Je viens, je suis moucheron, un rien frêle.
Une aile. Et j’ouvre et je donne mon aile
Pour alléger leur épaule et mon chant
Pour délivrer mon âme à travers champs.
Je viens. J’ai pris dans leurs fers, à leur place,
Leur cœur en moi pour m’envoler avec.
Je suis le pleur jailli de leurs yeux secs,
Je souffre en eux, je lutte, je suis lasse,
J’ai faim. Je tremble en des rêves tout bas,
J’ai peur... Je suis ce que je ne suis pas,
Ce que je suis peut-être - jeune fille
Que le printemps entête et qui vacille
Avec ce cœur lourd de divin ennui
Qu’on ne peut pas porter seule - je suis
Celle blessée entre toutes qui pleure.
Et je serai les pauvres tout à l’heure.
Quand je suis eux je ne dors pas la nuit -
J’irai criant, pour qu’un cri nous soutienne,
Mes maux - les leurs - nos tâches, nos soucis
Avec leur bouche pauvre, pas la mienne.
Je serai vieille, veuve... morte aussi
Avec les morts. Je serai, quand la route
Fuit sous ses pieds, pâle, celui qui doute,
Tombe renversé dans le noir de Dieu
Et ne peut plus remonter au milieu
De ses dociles et douces prières.
Je serai lui - peut-être moi derrière,
Dans son abîme - Et peut-être, au bord bleu
Du Paradis, je serai sainte un peu
Pour ceux des saints emmêlés en ce monde
Les plus petits - dont la chantante foi
Veut s’envoler mais qui n’ont pas de voix.
Je viens, je suis, folle ou triste à la ronde,
Tous ceux qui sont...
Et quand je serai moi,
Moi toute seule, aride, sans génie,
Seule au lieu morne où la route est finie,
Seule au moment où le ciel obscurci
Ne s’ouvre plus ; quand, sans être entendue,
J’aurai ma voix et mes ailes perdues,
Déjà peut-être elles sont loin d’ici -
Quelqu’un viendra. Je l’attendrai dans l’ombre,
Un frère, un cœur entre les cœurs sans nombre,
Quelqu’un à moi viendra pour la Merci
Aider mon âme à se sauver aussi.
(Chant de la Merci)
Il arrive que nous cherchons, dans notre ami, la consolation et qu'elle ne s'y trouve pas aujourd'hui. Il arrive que nous ayons soif et que la tendresse de notre ami oublie aujourd'hui de nous donner à boire. C'est que la source de douceur humaine n'est pas inépuisable. Le consolateur a, comme nous, son heure de sécheresse. Celui qui nous donne la force manque aujourd'hui de force. Celui qui relève notre joie est tombé, aujourd'hui, de sa joie.
Comprenons-le. Ayons compassion à notre tour de cette pauvreté. N'exigeons rien. Ne réclamons pas sans cesse de l'amitié, de la bonté, le plus dont elle est capable, mais soyons toujours reconnaissants pour le moins dont elle dispose, le peu qu'elle a et nous donne. Et sachons attendre. L'instant vient où la grâce de l'ami lui sera et nous sera rendue.
Il arrive que nous ayons soif et que la tendresse de notre ami oublie aujourd'hui de nous donner à boire. C'est que la source de douceur humaine n'est pas inépuisable. Le consolateur a, comme nous, son heure de sécheresse. Celui qui nous donne la force manque aujourd'hui de force. Celui qui relève notre joie est tombé, aujourd'hui, de sa joie. Comprenons-le. Ayons compassion à notre tour de cette pauvreté. N'exigeons rien. Ne réclamons pas sans cesse de l'amitié, de la bonté , le plus dont elle est capable, mais soyons toujours reconnaissants pour le moins dont elle dispose... le peu qu'elle a et nous donne. Et sachons attendre. L'instant vient où la grâce de l'ami lui sera et nous sera rendue.
Celui qui n'a besoin de rien, tout lui manque. Misère de l'homme qui se suffit, de l'esprit comblé de lui-même. Toute la valeur de l'homme esr dans sa recherche, son appel, son désir.
"Celui qui n'a besoin de rien, tout lui manque.
Misère de l'homme qui se suffit,de l'esprit comblé de lui-même.
Toute la valeur de l'homme est dans sa recherche, son appel, son désir."
« Une anthologie de femmes-poètes ! - Eh oui, pourquoi pas ?
[…]
On a dit du XIXe siècle que ce fut le siècle de la vapeur. le XXe siècle sera le siècle de la femme. - Dans les sciences, dans les arts, dans les affaires et jusque dans la politique, la femme jouera un rôle de plus en plus important. Mais c'est dans les lettres surtout, - et particulièrement dans la poésie, - qu'elle est appelée à tenir une place considérable. En nos temps d'émancipation féminine, alors que, pour conquérir sa liberté, la femme accepte résolument de travailler, - quel travail saurait mieux lui convenir que le travail littéraire ?! […] Poète par essence, elle s'exprimera aussi facilement en vers qu'en prose. Plus facilement même, car elle n'aura point à se préoccuper d'inventer des intrigues, de se créer un genre, de se faire le champion d'une idée quelconque ; - non, il lui suffira d'aimer, de souffrir, de vivre. Sa sensibilité, voilà le meilleur de son imagination. Elle chantera ses joies et ses peines, elle écoutera battre son coeur, et tout ce qu'elle sentira, elle saura le dire avec facilité qui est bien une des caractéristiques du talent féminin.
[…]
Et puis, au moment où la femme va devenir, dans les lettres comme dans la vie sociale, la rivale de l'homme, ne convient-il pas de dresser le bilan, d'inventorier - si l'on peut dire, - son trésor poétique. Les temps sont arrivés où chacun va réclamer le bénéfice de son apport personnel. […] » (Alphonse Séché [1876-1964])
« Il n'y a pas de poésie féminine. Il y a la poésie. Certains et certaines y excellent, d'autres non. On ne peut donc parler d'un avenir spécial de telle poésie, masculine ou féminine. La poésie a toujours tout l'avenir. Il naîtra toujours de grands poètes, hommes ou femmes […]. Où ? Quand ? Cela gît sur les genoux des dieux, et nul ne peut prophétiser là-dessus.
[…]. » (Fernand Gregh [1873-1960])
0:00 - Jeanne Dortzal
2:19 - Edmée Pauline Delebecque
3:30 - Harlette Hayem
5:19 - Catherine Pozzi
6:31 - Andrée Magdeleine Husson
7:39 - Cécile Sauvage
9:32 - Marie Noël
11:01 - Générique
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Référence bibliographique :
Alphonse Séché, Les muses françaises : anthologie des femmes-poètes (1200 à 1891), Paris, Louis-Michaud, 1908.
Images d'illustration :
Jeanne Dortzal : https://poetesses.blog4ever.com/jeanne-dortzal-presentation-et-bibliographie
Edmée Pauline Delebecque : https://fr.wikipedia.org/wiki/Edmée_Delebecque#/media/Fichier:Les_muses_françaises_1908_Edmée_Delebecque.jpg
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Marie Noël : https://le-verbe.com/portrait/marie-noel-poetesse-de-lamour-et-de-la-douleur/
Bande sonore originale : Arthur Vyncke - Uncertainty
Uncertainty by Arthur Vyncke is licensed under a CC BY-SA 3.0 Attribution-ShareAlike 3.0 license.
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