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sur 982 notes
Quatre-vingts minutes pour appréhender le monde c'est peu. Pourtant c'est ce qu'il reste de mémoire immédiate, après un accident de la circulation, à un mathématicien âgé lors de la rencontre avec sa nouvelle aide-ménagère.

La jeune femme peu troublée par le mode de communication du vieil amnésique, des formules mathématiques le plus souvent, y trouve même un grand intérêt, et accède à sa demande de venir accompagnée de son fils âgé de dix ans. C'est ainsi qu'au fil du temps se noue une relation, tendre et enrichissante, entre un ancien professeur de mathématiques au seuil de la vieillesse, une aide-ménagère approchant de la trentaine et un écolier du primaire, et ça malgré le couperet des quatre-vingts minutes obligeant sans fin à tout recommencer.

Poétique et apaisante, une belle fable sur la beauté des mathématiques, la mémoire, la transmission, la curiosité du monde et des autres : la formule préférée du professeur — celle qu'il n'oublie jamais et qu'on ne doit jamais oublier.
Quatre-vingts minutes pour découvrir, et aimer... pour l'éternité.
 
Challenge MULTI-DÉFIS 2018
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Waouh !!! J'ai des étoiles plein les yeux et de la joie plein le coeur. Quelle magnifique découverte !
2, 3, 5, 7, 11, 13, 17, 19, 23, 29, 31... ainsi démarre la farandole des nombres premiers
3,141592653589... transcendant, irrationnel, je fais de grands yeux ronds
2,718281828... ça y est : je m'envole vers l'étoile du berger
i si petit, m'emmène dans l'immensité de l'imaginaire
Mais dans la formule du professeur c'est
le 0 qui est le plus beau !

Concision mathématique n'est pas dureté
Mais harmonieuse beauté

La rencontre magique d'un vieux professeur, d'un petit garçon de 10 ans, d'une maman et d'un joueur de base ball portant le numéro 28, un nombre parfait.
Parfait comme ce petit livre qui dans mon firmament vient rejoindre pas moins que la planète du Petit Prince.

Tant de leçons de vie, ode à la curiosité, à la persévérance et à la générosité.
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Additionnez un ancien docteur d'université spécialisé dans la théorie des nombres de soixante-quatre ans, une aide-ménagère mère célibataire approchant de la trentaine, son fils écolier de dix ans.
Sans liant, vous obtiendriez un huis-clos grumeleux, à la consistance molle, sans grande saveur !

Retranchez la mémoire du professeur - bloquée en 1975 à la suite d'un accident de voiture et dont l'autonomie est de quatre-vingts minutes, pas une de plus.
Le mélange devient légèrement astringent.

Incorporez délicatement patience, endurance, attention à volonté et une pincée d'amour essentiel jusqu'à ce que l'huis-clos se raffermisse grâce à la confiance que mère et fils parviennent à instaurer progressivement.
( Je ne peux vous révéler comment l'amnésie est mise sous contrôle, il faut bien sûr observer l'alchimie en cours d'élaboration...)

Décorez ensuite avec des chiffres, des formules mathématiques décortiquées.
Servez avec un coulis de base-ball.

Vous obtenez alors une magnifique histoire à l'arôme subtil de tendresse, qui réussit ce tour de force, cerise sur le gâteau japonais, de faire apprécier la beauté cachée des mathématiques. Une réussite !
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Je vais tâcher ce soir de trouver la bonne formule pour vous dire tout le bien que je pense de ce roman et des mathématiques.
Soit un ensemble composé de trois éléments : a, b et c, figurant trois personnages jetés dans l'espace-temps d'une même histoire. Deux personnages a et b sont une aide-ménagère et son fils de dix ans passionné de base-ball, tous deux situés sur un même segment de droite, un segment de vie. Sur un autre segment éloigné, figure un troisième personnage que nous appellerons c, un mathématicien sexagénaire qui lui aussi possède sa propre histoire. Un accident de voiture a réduit l'autonomie de sa mémoire à quatre-vingts minutes. Et voilà que les deux segments se croisent un jour ! En mathématiques, on appelle cela une intersection. Dans les romans d'amour, on appelle cela un coup de foudre. Ici, ce n'est pas un roman d'amour, cependant ces deux lignes de vie qui se croisent subitement, vont former un triangle abc et construire ainsi une nouvelle histoire, bougeant les trajectoires initiales.
Vous me direz que je manque de romantisme en décrivant les choses ainsi. Mais la vie romantique a souvent emprunté des métaphores aux mathématiques. Ne parle-t-on pas de de triangle amoureux ? N'avez-vous jamais eu envie de prendre la tangente ? Et que dire de cette belle inconnue perdue dans une équation presque insoluble ? Et dans ce « presque », il y a sans doute des problèmes, des ellipses, des variables, des probabilités, des relations, des combinaisons, des constantes, des conjectures, des propositions, l'absurde comme démonstration, les limites, l'infini...
Le vieux mathématicien est ce que l'on appelle une personne dépendante, du fait que sa mémoire ainsi restreinte dans un espace de quatre-vingts minutes, limite considérablement son autonomie et nécessite les services d'une aide-ménagère. Jusque là tout va bien, sauf qu'à chaque matin, la jeune aide-ménagère doit de nouveau se présenter. C'est comme une histoire qui recommence à chaque fois, à chaque lendemain, c'est comme une récurrence... L'homme, visiblement surdoué, est enfermé dans ses raisonnements, ses travaux qui se poursuivent pour tenter de résoudre certaines énigmes, sa passion des nombres premiers... Oui, les nombres premiers peuvent susciter des regards vertigineux selon la manière dont on les approche.
L'aide-ménagère outrepasse un jour la mission qui lui est confiée en faisant venir son fils dans la maison du vieux mathématicien, par nécessité. Ce jour-là elle n'a pas trop le choix, l'enfant est malade et le vieux mathématicien, malgré son enfermement presque obsessionnel à résoudre des problèmes presque insolubles, insiste pour que cette venue se fasse, tout simplement parce qu'il a le coeur sur la main. En tous cas, il aide à résoudre à cette aide-ménagère un problème pratique qui lui paraissait presque insoluble ce jour-là...
Commence alors entre eux une étrange et belle relation où brusquement deux et deux ne font plus quatre... C'est le hasard, le choc des contraires... La magie des chiffres inversés...
Ce roman de Yôko Ogawa, - La formule préférée du professeur, m'a entraîné dans une magnifique histoire de tendresse, de transmission et de filiation.
J'ai été touché par la solitude de ce vieux mathématicien qui ne peut plus compter sur lui-même, son corps usé, son coeur seul, son coeur solitaire. Son univers bousculé, fracassé, est traversé brusquement par la tendresse d'un enfant passionné de base-ball.
Yôko Ogawa nous invite ici dans la beauté des mathématiques, mais oui je vous assure qu'elle existe cette beauté, même si a priori on peut s'en étonner.
Le charme caché des nombres. L'oasis des nombres premiers apparaît au détour d'un chemin.
Leur élégance.
Leur beauté absolue.
Les mathématiques sont comme une musique.
Ici Yôko Ogawa nous invite dans la fantaisie voluptueuse des chiffres et des règles. Et même si vous n'aimez pas les mathématiques, et même si vous en êtes allergiques, je vous assure que ce récit vous touchera.
Moi-même, j'ai été touché par ce professeur qui s'émeut, pleure en découvrant un chemin nouveau, improbable, dans la somme des nombres nomades qui s'invitent et se promènent dans cette histoire.
Un enfant forcément s'invite aussi dans ce dédale des nombres prévisibles et imprévisibles.
Alors, cette formule préférée, que serait-elle ?
Malgré la mémoire du professeur qui défaille, n'est-elle pas un itinéraire pour l'aider à franchir ce mur de quatre-vingts minutes, venir à un enfant, l'écouter, savoir écouter, savoir protéger, savoir transmettre... ?
N'est-elle pas un itinéraire pour venir nous toucher au coeur ?
J'ai été touché par cette histoire qui traverse avec beauté et sensibilité trois générations, se révèle comme un hymne merveilleux à la tolérance, l'écoute, le partage, la transmission.
Je ne sais pas si vous aimerez les mathématiques après avoir lu mon billet, cependant je compte sur vous...
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Notre personnage central, une jeune femme mère célibataire, est engagée comme aide familiale chez un ancien mathématicien aux facultés de mémoire diminuées à la suite d'un accident de voiture une vingtaine d'années auparavant.
Après quatre-vingts minutes, il perd la mémoire et on doit retisser un lien avec lui.
Lien qui se rétablit chaque fois à l'aide d'un repère mathématique, la pointure de la personne, sa date de naissance...
De nombreuses aides ménagères ont abandonné mais celle-ci reste car elle ne déteste pas réfléchir à propos des nombres, elle ressent bien la personnalité du mathématicien.
Quand il apprend qu'elle a un enfant d'une dizaine d'années, il exige qu'elle le prenne avec elle après l'école, l'aide à faire ses devoirs.
C'est une belle histoire d'amitié, de respect, de soutien mutuel qui se passe au Japon où Yôko Ogawa est installée.
Les notes mathématiques ne sont pas lassantes et quand elles sont un peu trop longues, je les ai sautées pour aller à l'essentiel mais ce n'est pas arrivé souvent.
L'écriture est magnifique, le style très clair et dans ce cas, j'admire bien sûr l'auteure mais aussi la traductrice Rose-Marie Makino-Fayolle qui sait si bien transmettre le texte original.
C'est une très belle découverte grâce à mes amies babeliotes.
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Une dame très sage me disait récemment que le plus beau cadeau que l'on puisse recevoir était celui qui vient du coeur et que l'on attendait pas.

C'est ce cadeau qu'à été pour moi ce roman de Yoko Ogawa. Je l'ai vu un jour dans ma boîte à lettre. Il venait d'une petite fille adorable de 10 ans. Elle me l'avait donné parce qu'elle était certaine qu'il me plairait puisqu'il parlait d'un professeur de mathématiques. Elle avait raison. Ce roman à tout pour plaire.

Je pensais déjà qu'il y avait de la musique dans les mathématiques. Je n'aurais jamais cru qu'il pouvait y avoir aussi de la poésie. Sans vouloir offenser Saint-Exepery, je serais tenté de voir dans ce professeur, le "Petit prince des nombres". Comme dans cette merveilleuse description du désert des nombres premiers au delà du million.

Poésie dans cette relation entre cette aide ménagère et le professeur incapable de se souvenir d'un événement 80 minutes après qu'il se soit produit. Cette aide ménagère s'attache à ce vieil homme même s'il ne se souvient pas d'elle.

Poésie surtout dans l'amour incommensurable de ce professeur pour tous les enfants mais surtout Root.

En tant qu'enseignant à la retraite, je suis presque jaloux de ses capacités pédagogiques et j'aurais aimé traiter tous mes élèves avec autant d'admiration et de respect. J'ai trouvé dans ce livre la plus belle citation de toutes celles que j'ai mise sur Babelio. Lorsqu'un enseignant ou un mentor permet à un être humain de voir cette étincelle qui surgit lorsqu'on a surmonté les difficultés et trouvé la solution.

On raconte souvent que pour être heureux il faut vivre le moment présent. Imaginez que vous ne pouvez rien retenir au delà de 80 minutes, que vous devez vivre votre vie et vous épanouir à l'intérieur de ces 80 minutes. Trois êtres humains se sont attaché les uns aux autres et se sont aimés à l'intérieur de ces 80 minutes.

Je viens de le mettre parmi les 6 livres que j'apporte rais sur une île.
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Le jour où une aide-ménagère entre dans la vie d'un professeur à la mémoire défaillante, leurs vies basculent. Elle va savoir prendre soin de ce vieil homme fragile, sensible. Elle va comprendre les codes qui régissent sa vie, sans le brusquer. Le professeur s'est égaré dans le monde des chiffres, ils sont ses seuls amis, son seul langage, la seule magie qui illumine encore sa vie. Mais, le jour où il rencontre Root, le fils de l'aide-ménagère, âgé de dix ans, un nouveau chemin s'ouvre devant lui, même si la maladie ne le lâche pas d'une semelle.

Il va partager sa passion des chiffres, sa vision du monde des mathématiques, qui pour lui détient le secret de l'univers. Les chiffres sont beaux, ils sont magiques et permettent d'exprimer et d'élucider la vérité éternelle, de lire le carnet de Dieu. Ils étaient présents dans nos vies bien avant que nous les remarquions.

Root et sa maman vont apprendre grâce au professeur. Ils vont faire confiance à leur intuition, ne plus avoir honte de leurs erreurs, de leur ignorance. C'est un véritable échange qui s'installe. Le professeur sort un peu de son isolement , de sa grande détresse. Root est aussi important à ses yeux que les nombres, et c'est peu dire, car il éprouve pour eux tendresse , respect et admiration.

Il a une manière bien à lui d‘enseigner, avec humilité et respect :

« Il ne se contentait pas d'une réponse simplement correcte, car il était capable de mettre en valeur la personne qui le questionnait. Devant la réponse vers laquelle il avait été guidé, Root était grisé non seulement par l'excellence de cette réponse, mais surtout par la pensée de la pertinence de sa propre question. »

Cet homme fragile, dont l'autonomie de sa mémoire n'est plus que de quatre-vingts minutes, dont l'énergie est accaparée par le monde des chiffres , va savoir transmettre sa passion à ce petit garçon réceptif à sa souffrance. C'est le cadeau de toute une vie, un héritage.

J'ai retrouvé dans ce roman la même émotion qu'à la lecture de « la petite fille de monsieur Linh ».
Chacun est attentif à la peine de l'autre et cherche à le consoler, à apporter ce qui lui manque dans la vie.
On perçoit aussi la beauté qui se dissimule dans les formules mathématiques, la poésie et la magie qui peuvent s'en dégager, et l'importance qu'elles ont dans nos vies. Avec des professeurs aussi sensibles que ce vieux professeur, à l'âme de poète, les cancres adoreraient les formules mathématiques. et les progrès seraient immenses !
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"𝘓𝘦𝘴 𝘩𝘢𝘶𝘵𝘦𝘴 𝘮𝘢𝘵𝘩𝘦́𝘮𝘢𝘵𝘪𝘲𝘶𝘦𝘴 𝘴𝘰𝘯𝘵 𝘭'𝘢𝘶𝘵𝘳𝘦 𝘮𝘶𝘴𝘪𝘲𝘶𝘦 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘱𝘦𝘯𝘴𝘦́𝘦", - George Steiner -

Saviez-vous qu'une équipe de neurobiologistes de l'𝘜𝘯𝘪𝘷𝘦𝘳𝘴𝘪𝘵𝘺 𝘊𝘰𝘭𝘭𝘦𝘨𝘦 𝘰𝘧 𝘓𝘰𝘯𝘥𝘰𝘯 publia en 1994 un article dans « 𝘍𝘳𝘰𝘯𝘵𝘪𝘦𝘳𝘴 𝘪𝘯 𝘏𝘶𝘮𝘢𝘯 𝘕𝘦𝘶𝘳𝘰𝘴𝘤𝘪𝘦𝘯𝘤𝘦 », dans lequel elle démontra que l'activité neurologique d'un patient appréciant la beauté des mathématiques se situait dans le cortex orbitofrontal, soit cette même zone du cerveau qu'activerait avec autant d'intensité un amoureux de poésie, littérature, peinture, musique ou sculpture ?

Étonnant, non ?

Pourtant, l'on peut parler de beauté mathématique comme nous parlerions de beauté artistique à la vue des courbes pures et parfaites de la Pietà de Michel-Ange ou du trait de pinceau d'un chef-d'oeuvre de la renaissance, à l'écoute harmonieuse de la Symphonie n°25 de Mozart ou de la suite pour orchestres n°3 de Bach ou encore à la lecture si chantante d'un poème de Rimbaud ou de Baudelaire.


La formule préférée du professeur, elle, fait partie de ces beautés que nous offrent les mathématiques, au même titre que le nombre d'or, si bien représenté par de Vinci dans son Homme de Vitruve et que l'on peut retrouver dans l'Art comme dans la nature.

Pour tout vous dire, il parait que cette formule a même été élue en 1988 « plus belle équation de l'Histoire », dans un concours international très sérieux où des Miss Équations ont joué de leurs charmes sur fond de musique s+e+x=y, dans un show se terminant en nu intégrales (et dérivées)... Oui oui, comme je vous le dis.

Cette formule, la préférée du professeur donc, est l'identité d'Euler (erronément appelée formule d'Euler dans le roman d'ailleurs – mais on ne va pas pinailler pour si peu, non ?).

Elle s'exprime comme ceci : e exp(i x pi) + 1 = 0

Oui, je sais, c'est fourni brut de décoffrage comme ça, et même si vous trouvez ça aussi sexy qu'un Hollandais tout rouge de coups de soleil, en Bob, Marcel, chaussettes de tennis et claquettes, sachez tout de même que cette formule a la particularité de relier entre elle cinq nombres parmi les plus remarquables des mathématiques en une équation des plus simples.

Il y a là le Un, que tout le monde connait (même les plus nuls en maths).

Il y a là le Zéro, qui symbolise le vide, le néant.

Il y a là le Pi (qui a dû donner des cauchemars à ceux d'entre vous qui n'étaient pas copains avec la trigonométrie) et le e, la base des logarithmes aussi appelé nombre d'Euler, tous deux étant des nombres transcendants (si si, croyez-moi sur parole).

Et puis il y à là le i, un nombre à la base des nombres complexes, qui vous ouvre la porte des mathématiques sur un monde imaginaire, dans lequel votre professeur de mathématiques, après vous avoir expliqué pendant un paquet d'années qu'un nombre élevé au carré était toujours positif, finira par vous dire qu'il peut finalement aussi être négatif... Pfff... Il aurait pas pu le dire plus tôt ?

Bref... Je commence à dériver exponentiellement dans une sorte d'ellipse hyperbolique à limite infinie et il me faut dès lors amorcer un demi-tour serré pour vous parler tout de même de ce très beau roman !


La formule préférée du professeur est l'histoire tendre et touchante d'un professeur de mathématiques arrivé au seuil de la vieillesse après avoir vécu un traumatisme crânien trente ans auparavant, lui laissant à jamais sa mémoire bloquée dans sa jeunesse passée.

Son cerveau ne pouvant plus enregistrer de souvenirs au-delà d'une fenêtre temporelle de quatre-vingt minutes, ses souvenirs quotidiens s'effacent jour après jour, en un éternel recommencement, ne laissant dans sa mémoire que le néant (tel le Zéro d'Euler).

Sa vie n'est dès lors plus rythmée que par sa confection des petits papiers qu'il s'attache à ses vêtements, comme des aide-mémoire pour ne pas oublier les choses essentielles, et aux allers-retours incessants entre son lit, son fauteuil et son bureau où il s'adonne à ses deux passions : la collection de cartes de joueurs de base-ball et les énigmes mathématiques, seules activités où son cerveau peut encore laisser parler son imaginaire (tel le i d'Euler).

Jusqu'à ce qu'arrivent dans sa vie sa nouvelle aide-ménagère, maman célibataire, et son petit garçon de dix ans, que le vieux professeur surnommera tendrement Root, en référence à la racine carrée que lui rappelle la forme plate de son crâne.

Le professeur leur fera découvrir son univers complexe, il leur parlera des nombres amis et des nombres jumeaux et leur apprendra la beauté des mathématiques.
De Root et sa maman, il apprendra à s'ouvrir sur le monde extérieur quatre-vingt minutes durant, jour après jour.

A force de patience, de petites attentions et de beaucoup d'amour, ces trois-là élèveront leurs trois coeurs en un lien asymptotique transcendant (tels le e et le Pi d'Euler) qui les unira à jamais.


Une histoire tendre, touchante, que Yôko Ogawa dépeint avec beaucoup de pureté et de pudeur, un long poème sur les petits plaisirs de la vie, sur les liens intergénérationnels et sur les troubles de la vieillesse.

Une émotion particulière en repensant à mon grand-père dont la mémoire s'est un jour envolée, pour quatre-vingt minutes, puis pour quelques mois puis pour ses dernières années, sans que des petites notes accrochées à sa veste ne lui soient d'un quelconque secours. Une période où je l'écoutais tendrement me conter les petites anecdotes « du jour », sans pouvoir lui dire qu'elles dataient parfois d'un temps certain...

Je lui dédie ce billet... Il aurait eu cent ans cette année.
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« La vérité ultime des mathématiques se dissimule discrètement à l'insu de tous au bout d'un chemin qui n'en est pas un. »

Quel livre magnifique ! C'est d'une poésie et d'une délicatesse...

Je n'aime pas particulièrement les mathématiques (doux euphémisme) mais je les ai vues enfin d'une autre manière. Comme un tout qui compose l'univers. Comme une partie de moi et moi reliée à l'univers. Même des formules avec des e ou une racine carrée ont une beauté que je n'imaginais pas. Root. Tout comme l'aide ménagère, j'ai eu une révélation en quelque sorte grâce à la lecture de ce livre. L'infini... Autre chose qui m'a beaucoup marqué avec cette lecture, c'est le respect et l'empathie pour l'autre. La manière dont l'aide ménagère et son fils prennent soin du vieux professeur pour ne pas le heurter avec sa mémoire limitée, à plus d'une heure. Et l'amour de l'enfance qu'il faut protéger à tout prix. C'était vraiment beau.
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Je suis entrée tout en douceur dans l'histoire de cette merveilleuse relation entre le professeur de mathématique, son aide ménagère et le fils de celle-ci.
On n'a pas envie de les déranger dans leur histoire d'Amour, car il s'agit bien d'amour entre ces trois personnages. Un amour pur et simple et qui pourtant pourrait sembler difficile vu de l'extérieur. Mais tolérance et respect sont les maitres mots de leur relation, ce qui va renforcer leurs liens et faire perdurer cet Amour.
Très beau et bon moment passé avec eux trois.
J'ai refermé ce livre tout doucement pour tenter de rester imprégnée par tant de douceur et de beauté des sentiments.
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