Le paysage a toujours trouvé des incrédules. Michel-Ange lui fut très sévère jadis. Mais en somme il ne pouvait que juger sur des témoignages insuffisants un art qui n'était pas le sien. Si grand artiste qu'il fût par ailleurs, il est permis de ne pas être de son opinion sur ce point. De nos jours encore M. Péladan, esthéticien intéressant que je lis toujours avec plaisir et dont j'admire la foi artistique sans partager toujours son goût et ses opinions, persiste à tenir le paysage pour un genre inférieur et à se montrer fort hostile même aux premiers impressionnistes.
Sans doute on peut aimer l'art du paysage sans tant de préparation. On l'aime autrement, avec, sur certains points, une moindre richesse d'impression et d'évocation qu'on peut compenser par ailleurs. Une oeuvre d'art suggère plus qu'elle ne reproduit, mais la suggestion ne dépend pas seulement de l'artiste qui incarna sa pensée dans l'oeuvre, elle ne dépend pas seulement de l'oeuvre elle-même, ni des deux réunis. Elle dépend aussi du spectateur.
Une raison très simple, facile à trouver, facile à critiquer, justifie immédiatement, aux yeux de ceux que les subtilités inquiètent, la peinture de paysage. Nous aimons le paysage parce que nous aimons la nature et que le paysage en est le portrait.