Stanislas Warliss, est marin pêcheur. Il a la soixantaine et travaille dur depuis son adolescence. À son âge, il est cassé par son boulot mais la retraite n'est pas envisageable. Un jour, le moteur de son vieux chalutier prend feu et devient hors d'usage. Stanislas n'a pas les moyens de le faire réparer mais il ne peut pas non plus se résoudre à vendre son bateau qui appartenait à son père disparu en mer. Il est chargé d'un souvenir familial douloureux dont Stanislas a dû mal à se détacher. Convaincu qu'il peut faire réparer son rafiot, il va alors participer avec un ami d'enfance à des détournements de marchandises sur les camions de fret. Mais la combine va mal tourner et Stanislas récupère un colis dans lequel un enfant clandestin est caché.
J'ai beaucoup aimé ce roman social où l'introspection, l'émotion et l'humour se réunissent.
Philippe Pollet-Villard a écrit "
Le Naufrage de Stanislas" alors que le film "Tombés du camion" dont il est issu était en recherche de financement. Il a repris le synopsis de départ en se libérant des contraintes du cinéma. Cela donne une histoire différente mais complémentaire.
L'atout majeur du roman est le personnage de Stanislas Warliss. Un homme à la dérive qui a un peu plus de 60 ans ne sait pas vivre sans travailler et qui a surtout beaucoup de difficultés à exprimer ses émotions, à dire ce qu'il pense. C'est un taiseux comme on dit. Nous, lecteur, sommes dans ses pensées et vivons avec lui ses malheurs et ses joies. Un attachement se crée inéluctablement. Stanislas est certes bougon et cynique mais il se révèle touchant. Il a une profonde honte enfouie en lui. C'est d'ailleurs ce qui l'oblige à retenir ses émotions. Quand elles sortent enfin c'est un déluge pour les autres comme pour lui. Petit à petit il va s'ouvrir et prendre le temps de réfléchir. Lui qui pendant des années est parti en mer pour fuir. Fuir son passé et ses traumatismes, les convenances de la société, la relation avec ses fils jumeaux Luc et Fabien, 28 ans, devenus gendarmes.
Stanislas n'a pas toujours fait les bons choix. Bien que l'on sache pourquoi on ne l'excuse pas mais on le comprend.
Sa femme Françoise sera sa bouée de sauvetage comme elle l'a toujours été. C'est son amour pour elle qui le tient. Il y a beaucoup de tendresse et d'affection lorsque Stanislas évoque la femme de sa vie. Et puis Opiyo ce petit clandestin tanzanien va lui faire vivre une aventure humaine qui va le rendre meilleur. le traitement de la situation des migrants est faite de manière juste et sans pathos.
Il y a des situations qui prêtent à sourire et de beaux moments de fantaisie. L'histoire n'en reste pas moins mélancolique, difficile et violente à certains moments. Quelques petits éléments surnaturels et poétiques distillés tout au long du livre donnent un côté mystèrieux et ésotérique. La fin m'a particulièrement émue et retournée.