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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je conclus l'année 2014 sur Babelio avec fracas, puisque j'y chronique rien de moins que le Temps retrouvé, crépuscule de l'édifice gigantesque proustien, au programme de l'agrégation 2015. Avec ma notation (4/5) et ce qui va suivre, je risque de me mettre à dos, d'offenser les babéliens les plus fidèles de l'ami Marcel, mais j'assume. Lisez jusqu'au bout, c'est tout de même l'histoire d'un repentir, de l'exécration totale à l'appréciation et l'estime!!

Alors déjà, lecture imposée, préjugés immensément négatifs et tenaces de ma part contre cet auteur et ses célèbres phrases démesurément longues, "for the sake of it" comme on dirait dans la langue de Shakespeare, juste pour dérouler de la syntaxe, au contenu le plus vain ou le plus masturbatoire, estimais-je, tout cela n'a pas aidé à me donner le courage d'entamer la lecture de ce roman, ni de la poursuivre une fois en cours. Non content de nous offrir un auteur qui me rebutait et qui me paraissait le plus surestimé de tout le XXème siècle, voire de toute la littérature française après Molière, on nous assénait le dernier tome, direct, sans préambule.

Me voici donc lâché au beau milieu d'une pléthore de personnages, de références aux tomes précédents, à des souvenirs dont je ne pigeais un traître mot, au centre de préoccupations dont je n'avais que faire, pour rester courtois, avec des constructions phrastiques qui me donnaient envie, au mieux, de m'avaler une boîte d'anti-migraines, au pire, de balancer aux chiottes le bouquin (moi qui déïfie tant l'objet, c'est beaucoup!!) ou de me brûler les yeux à l'acide. Des errances du narrateur dans le Paris de 14-18 et de ses réflexions exaspérantes sur la sexualité de Charlus sortaient, de temps à autre, quelques petites perles, mais, la plupart du temps, j'étouffais, pouffais, pestais et reportais sans cesse la suite de la lecture, qui fut extrêmement lente, laborieuse, n'ayant que faire des bordels homosexuels cachés et des tourments de personnages totalement inconnus, ne suscitant rien chez moi.

Puis, le narrateur arrive à la matinée des Guermantes, s'enferme dans la bibliothèque. Et là, c'est un tout autre monde, un tout autre auteur, un tout autre roman, qui s'ouvrent à moi. Il est victime du phénomène tant attendu, de la révélation, de l'épiphanie littéraire qui va lui apprendre comment écrire sa saga, et l'on vit avec lui ses émotions transcendentales, on pleure devant une telle déclaration d'amour à l'art et à la littérature, on revisite avec lui notre vie, nos amours, nos amis, nos emmerdes, à quel point on était différent à tel moment donné, mais si semblable, que tout n'est que question de perception, et que le Temps est le Maître de ce grand théâtre où l'on vit, où l'on aime, où l'on oublie, où l'on meurt. Je le trouve lisible, émouvant, sans doute aussi parce que je me suis habitué à sa fameuse phrase asthmatique, peut-être aussi parce qu'elle est plus travaillée et naturelle. Restent quelques considérations superflues qu'on gommerait bien, mais qu'importe, Marcel Proust a soudain gagné mon respect, et mes vieux a prioris sont oubliés, j'évolue en même temps que lui, le moi d'avant qui le dédaignait appartient à un passé révolu.

S'ensuit le théâtre thanatonique, comme j'aime à l'appeler, du bal des têtes, où il revoit les mondains qu'il a toujours connus, sur le seuil de la mort, naviguant sur le Léthé, et pour certains déjà remplacés. La vanité de ce spectacle, signe du Temps qui passe, qui emporte les querelles, les mémoires et les individus, le conforte dans l'écriture de la saga autobiographique. Là encore, trop de passages et de discussions avec les uns et les autres à tailler à grands coups de cisailles, on sait que Marcel n'a guère eu le temps de corriger cet ultime opus. Mais je n'ai jamais vu un roman, à part peut-être Villa Vortex de Dantec, qui fasse à ce point co-exister le sublime et le superflu total, monstre d'inégalité.

C'est un roman-essai, un roman sur le roman... Mais surtout sur la vie. Rarement les écrivains vous poussent à réexaminer vos propres souvenirs en même temps qu'eux, et à bouleverser votre point de vue. Là, à chaud, je dirais que seul Albert Cohen me vient en tête, dans un registre plus passionné.

Je ne lirai sans doute pas le reste de la saga avant très longtemps. Beaucoup trop de lectures m'attendent, imposées ou par plaisir, et Proust, malgré les déferlements d'émotion qu'il a suscité chez moi dans ses passages les plus réussis, n'entre pas dans mon panthéon personnel, car toujours inégal, s'attardant trop sur quelques obsessions qui ne sont pas les miennes, et puis tout simplement parce que la phrase à rallonge, même au sommet de son art, ne provoque jamais l'orgasme esthétique déclenché par du Baudelaire, du Hugo, du Lampedusa, du Shakespeare...

Je suis ouvert aux conseils sur les tomes à entreprendre dans le futur lointain. Je songeais aux deux premiers, ainsi qu'à La Prisonnière et à Albertine disparue, me retrouvant dans son histoire avec elle, ainsi que dans ses souvenirs bucoliques enfantins, bien davantage que dans les mondanités et les questionnements homosexuels de l'aristocratie que je devine hanter le Côté de Guermantes et Sodome et Gomorrhe.

Marcel, merci pour cette oeuvre considérable que tu as réussi à écrire. Je suis un vieux ronchon, un vieux con plein de préjugés, déjà à mon âge. L'agrèg m'a fait estimer Corneille, maintenant toi. Toujours selon les oeuvres, et avec quelques réticences qui restent valables, bien sûr. Faut pas trop en demander non plus!!

Sur ce, bonne année à tous et toutes qui passez par là, et rendez-vous en 2015 pour la suite de mes pérégrinations littéraires!!
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Voilà, je viens de rejoindre ceux qui peuvent dire sans rougir mais avec le sourire, "j'ai lu tout Proust" sans pour autant m'écrier "je recommence demain".
Depuis que j'ai quitté les amours de Swann, fait connaissance des jeunes filles en fleurs, puis suis passée du côté de Guermantes, j'ai fréquemment croisé l'ennui et des idées auxquelles je n'adhérais pas (propos sur l'homosexualité, visions réductrices de l'amour) mais je persévérais récompensée par de belles descriptions, des traits d'humour (souvent vache d'ailleurs), une vérité psychologique bien observée et/ou adroitement formulée, et tout en persévérant, j'attendais une récompense suprême du "Temps retrouvé". Mon attente ne l'a pas effarouchée et elle fut au rendez-vous. L'aurait-elle été si je n'avais pas lu les six tomes précédents ? Je ne le pense pas. "Le Temps retrouvé", oui, je vais le relire.
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Lu le tout, il y a plus de cinquante ans, relu par petits bouts ensuite...Là, j'ai abordé le Temps retrouvé en version audio, lue par Lonsdale, Podalydès puis Dussolier ,(je remonterai sûrement le temps par la suite). Il me semble que la version audio focalise sur les histoires au détriment de la langue et je me suis un peu ennuyée à ces propos mondains mais il y a de belles pages sur la vieillesse et sur la création de l'oeuvre colossale.
Je ne me souvenais pas des propos sur la guerre 14/18 ni de l'impact de l'affaire Dreyfus.
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Dernier tome de "la Recherche", et je me sens comme une heptathlonienne qui a terminé sa dernière épreuve. Ce roman est plus axé sur l'intériorité que les précédents, il y est question d'écriture, de vieillesse et de mort. Il y a aussi d'autres réflexions, trop profondes pour moi, que je n'ai pas comprises. Mais j'y ai également retrouvé, avec joie, des scènes cocasses et hilarantes, ainsi que des passages salaces, qui rappellent que Marcel Proust était d'abord un homme avant d'être un monument vénéré de la littérature française. Et c'est comme ça que je le préfère.
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Lorsque je lui ai parlé de mon engouement à la lecture des premiers tomes de la recherche, une amie m'a dit "Tu es face à un coffre au trésor, tu en as trouvé la clé, je t'envie".
Cette métaphore m'a beaucoup plu, elle représente exactement ce que je ressens, on m'a offert un coffre au trésor, j'en ai trouvé la clé et plus je fouille, plus je m'émerveille.
Terminer la lecture de À la recherche du temps perdu, qui m'accompagne depuis des mois, m'a chagrinée, mais je compte bien revenir à cette oeuvre, avec les livres audio notamment.

Dans le temps retrouvé, le ton est plus sombre, la Guerre occupe une bonne partie du récit, le propos regorge d'interrogations. Des interrogations sur l'oeuvre de Proust, sur le Temps qui passe ; et d'ailleurs, moi non plus, à l'instar du narrateur, je n'ai pas vu le temps passer, je ne l'ai pas vu vieillir, je n'ai pas vu les Guermantes et la société changer...
Le temps retrouvé est très touchant, c'est certainement le tome le plus personnel de la Recherche et certains passages sont d'ailleurs absolument sublimes.

Jamais oeuvre ne m'avait paru aussi magnifiquement bouclée, aussi parfaitement terminée.
Je n'ai plus maintenant qu'à sécher mes larmes et me mettre aux oeuvres annexes : biographies, correspondances, pastiches, films...
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Voici enfin terminé la lecture de "la recherche du temps perdu" avec "le temps retrouvé", Proust avait écrit le mot fin comme il le déclara à Celeste Albaret, et il put s'éteindre tranquillisé même s'il n'eut pas le temps de relire et de corriger toute son oeuvre. de quoi s'agit-il dans ce dernier volume qui ne parle plus du temps qui passe, mais cette fois du temps qui est passé: Cheveux blanc, visages bouffis, beautés envolées, décès des uns, cheminement difficile de fin de vie pour d'autres et le monde de la jeunesse disparu à jamais, nouvelles générations de l'après guerre qui ont changé les valeurs, de même que l'éclairage des villes et l'arrivée des automobiles scelle la fin des chevaux et du monde des bougies. Réflexion amère et lucide sur la vieillesse, il y a un paragraphe qui résume la recherche : "Et maintenant, je comprenais ce que c'était la vieillesse - La vieillesse qui de toutes les réalités est peut-être celle dont nous gardons le plus longtemps dans la vie une notion purement abstraite, regardant les calendriers, datant nos lettres, voyant se marier nos amis, sans comprendre, soit par peur, soit par paresse, ce que cela signifie, jusqu'au jour où nous apercevons une silhouette inconnue, comme celle de M d'Argencourt, laquelle nous apprend que nous vivons dans un nouveau monde; jusqu'au jour où le petit fils d'une de nos amies, jeune homme qu'instinctivement nous traiterions en camarade, sourit comme si nous nous moquions de lui, nous qui lui sommes apparu comme un grand-père; je comprenais ce que signifiaient la mort, l'amour, les joies de l'esprit, l'utilité de la douleur, la vocation, etc. Car si les noms avaient perdu pour moi de leur individualité, les mots me découvraient tout leur sens. La beauté des images est logée à l'arrière des choses, celle des idées à l'avant. de sorte que la première cesse de nous émerveiller quand on les a atteintes, mais qu'on ne comprends la seconde que quand on les a dépassées."
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Le temps retrouvé (1927) est le 7e et dernier tome de la recherche du temps perdu, l'oeuvre majeure de Marcel Proust. L'heure est à la guerre, le narrateur a vieilli, de même que les protagonistes des premiers tomes. Il s'attèle à la rédaction de son roman, même s'il craint de ne pas avoir le temps de l'achever. Inutile de s'appesantir sur un classique, a fortiori sur un chef-d'oeuvre, mêlant, non sans une pointe d'humour, mélancolie et ironie. Avec du côté de chez Swann (1913), le meilleur roman de la série.
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En débutant cette ultime étape de mon Voyage à la Recherche du Temps perdu, je n'étais vraiment pas emballé par le résumé du récit qui s'annonçait. Je me disais « il va se rendre compte qu'il a vieilli et que c'est terrible de vieillir, et qu'il serait peut-être temps de faire quelque chose de sa vie, en plus il va vouloir finir en apothéose, ça va être La Prisonnière en cyrillique et au ralenti, ultra-sopo… », et bien sans m'être véritablement abusé sur le contenu, je dois reconnaître que je me suis complètement trompé sur le ressenti. Ce doit être le tome que j'ai trouvé le plus captivant avec A l'ombre des jeunes filles en fleurs.

En réalité, on sent initialement une profonde fatigue dans la voix du narrateur, fatigue qui n'est pas le symptôme d'une bonne société nostalgique de ses anciennes exclusivités et que la guerre a condamnée à s'ouvrir, à se « mésallier » de plus en plus avec la roture, mais qui figure l'affleurement dans l'apparence de l'absence d'énergie qui, depuis toujours, empêche le narrateur de débuter sérieusement son oeuvre, systématiquement occultée par les plaisirs mondains et sentimentaux. La triple occurrence dans un temps très court d'un phénomène similaire à celui, lointain, de la fameuse madeleine, rend opportunément au narrateur cette attention aux phénomènes intérieurs qui le transporte aux différents instants de sa vie par le truchement de la mémoire involontaire, la restauration spontanée de souvenirs insoupçonnés, lesquels, ressuscitant le jeune homme que fût le narrateur qui lui est devenu parfaitement étranger, occasionnent un enthousiasme fondamental face à la découverte d'une faculté de l'esprit, occultent ou tout du moins apaisent l'angoisse de la mort vers laquelle le narrateur se dirigeait jusqu'alors avec une résignation triste pour finir une existence anonyme et inutile. A présent, l'oeuvre s'impose au narrateur comme le sens de sa vie, et tout le livre consiste à rapporter les faits de cette dernière journée dans le monde et les réflexions qu'elle suscite sur les effets physiques, mentaux et sociaux du passage du temps avant le commencement de la grande entreprise, laquelle vient désormais substituer à la peur de souffrir en mourant celle de ne pas réussir à terminer dans le délai imparti qui demeure mystérieux.

Synthétisant peu ou prou les autres tomes, on recroise un M. de Charlus sénile dont les penchants sont désormais de notoriété publique ; tous les autres personnages transformés par l'âge dans une réception mémorable, dont certains ont épousé d'autres dont ils n'auraient pas même toléré l'évocation au sein de leur milieu quelques années auparavant ; la fille de Gilberte qui incarne à elle seule la fusion du souvenir de Swann et des Guermantes, c'est-à-dire des principaux acteurs des amours et des amitiés réelles ou fantasmées du narrateur. le souvenir d'Albertine lui-même continue à se manifester, non plus de façon obsessionnelle mais comme un jalon notable de l'existence du narrateur, qui regarde avec détachement l'être qu'il fût et avec lequel il n'a plus rien de commun. Globalement, c'est un livre plein de nostalgie, de regards en arrière et d'horreur face au présent, mais tout cela alimente le nouveau projet du futur écrivain, qui, quelque temps plus tôt, n'y aurait trouvé qu'un motif de fatalisme bien stérile. D'ailleurs, l'horreur de la dégénérescence cède bien vite le pas à l'attendrissement devant la jeunesse de la prochaine génération, ainsi qu'à l'apaisement face au caractère immortel de l'art.

Une bien belle conclusion pour une histoire très nuancée, aux multiples renvois, aux multiples tons, et qui englobe jusqu'au livre tenu entre les mains du lecteur, produit de cette longue errance.
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Ce livre se décompose en deux parties. La première partie, assez classique, dans la lignée des autres livres d'A la recherche du temps perdu avec sa visite à Tansonville, ses échanges avec Gilberte, puis l'évolution de Saint Loup et de Charlus et enfin les salons parisiens pendant le guerre.

Une seconde partie qui m'a plus impressionnée commence avec le retour à Paris de Marcel Proust, après une absence pour des raisons de santé. Il revient pour une matinée chez la princesse de Guermantes. En attendant d'entrer dans le salon, il élabore toute la théorie de son oeuvre basée sur les impressions. Très intéressant. Bien plus, en entrant dans le salon, il croit s'être trompé de lieu et d'être tombé dans un bal costumé : il prend conscience de l'âge des gens qu'il a toujours connu et du temps qui s'est passé. Ainsi il repense à Gilberte, à son mariage avec Saint Loup et découvre sa fille, une ravissante jeune fille de 16 ans. Il se rend compte que le temps passe, lui est aussi compté et qu'il faut qu'il s'y mette en quittant sa vie de dilettante mondain. C'est là la notion de temps retrouvé.
J'ai beaucoup aimé cette seconde partie très inspirante.
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Proust est ici agé et il se retourne sur sa vie:Loin d'etre nostalgique ce livre est une ode à l'optimisme et à la foi en l'avenir et represente une synthese de son oeuvre: Les 200 premieres pages sont un chef d'oeuvre de la litterature francais pour moi, a ce jour je n'ai rien lu de superieur et je ne peux que remercier Marcel proust de nous avoir offert ces lignes: A decouvrir lire ou relire sans moderation !
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