Il prit le manuscrit entre ses mains et le contempla longtemps. Il ne s’était pas écoulé un seul jour sans qu'il sacrifie à ce rituel. Le simple fait de le toucher lui avait procuré un plaisir sans limites. Encore quelques jours et il devrait retourner là où était sa vraie place. Il soupira et remit le manuscrit dans le coffre. Il ne doutait pas qu'il y aurait d'autres batailles à mener, d'autres pièges à éviter, de nouveaux ennemis à combattre. Un jour peut-être.
Mais pour l'instant, le monde n’était pas prêt. Il poussa complètement la porte du coffre, confinant ainsi le trésor dans l’obscurité la plus profonde.
La souffrance peut aussi être aussi porteuse d'un sens, qu'elle peut si on le souhaite vraiment nous éclairer sur nous mêmes et sur les autres mais plus important encore, que l'exprimer autrement que par la colère est possible.
Qui avait envie d'une vie balisée par le malheur, la souffrance et l'impuissance ? Depuis qu'elle était à la criminelle, elle n'avait même pas été capable de retrouver l'assassin de son frère. A quoi bon continuer ? Elle subissait constamment les injustices sociales du système mais elle était aussi soumise à ses propres lois, celles qu'elle avait elle-même créées suite à ses attentes et à ses blessures intérieures et dont elle ne pouvait se défaire.
C'est un acte d’égoïsme que de penser que le trésor nous appartient. Nous savons tous qu'il appartiendra un jour à l’humanité. Notre puissance réside dans la confiance que nos diverses Fraternités ont su établir et conserver au-delà des frontières et des nationalités. Nous sommes avant tout les fervents gardiens d'une vérité et nous nous devons de la préserver jusqu’à ce qu'elle puisse être entendue, écoutée et comprise.
Si ce livre avait une quelconque importance, ce n’était certainement pas dans son contenu et elle n’y voyait qu’une seule raison. Un document bien plus inestimable était dissimulé entre ses pages. En réalité, en y réfléchissant bien, c’était même la cachette rêvée et elle correspondait au caractère austère et livresque de Julien. Elle avait trop travaillé et le manque de sommeil lui ôtait tout sens de la réalité.