Premier ouvrage que j'ouvre de
Jean-Joseph Rabearivelo, et si l'écriture est agréable bien qu'ampoulée, j'ai été très déçue par l'histoire.
On me promettait un livre anti-colonialiste, critique de l'influence anglaise et française, mais aussi de l'inaction des hautes castes malgaches, pourtant cette critique m'a paru très faible et cantonnée aux deux dernières parties du livre.
L'auteur, qui descend de l'ethnie des Merina et d'une famille de hauts propriétaires fonciers (dont tous les biens et privilèges ont été perdus à cause de la colonisation française), nous fait bien plus part de sa nostalgie pour les avantages perdus des grandes familles malgaches - notamment l'esclavage - qu'il nous livre une critique pointue sur les effets désastreux de la colonisation à Madagascar.
Voici une sélection des passages qui m'ont le plus dérangé :
"On ne verra jamais sourire plus ironique ni plus insolent que celui d'un nègre. Chez nous autres Indonésien, quand pareille fleur épanouit nos lèvres, ce n'est jamais que pour couronner une satisfaction honnête et un triomphe légitime."
"Ces jeunes hommes, ces jeunes femmes qui s'empressent de quitter la maison seigneuriale comme des détenus leurs geôles ! La plupart crient contre leurs anciens maîtres qu'ils savent maintenant égaux à eux. Ils leurs reprochent maintes exactions et maints sévices, oubliant les prérogatives naturelles, oubliant que chaque temps a ses moeurs, oubliant surtout qu'à ces mêmes exactions et sévices, ils doivent leur meilleure qualité qui, mieux comprise et mise à pratique, ne les desservira jamais : l'esprit de la discipline.
Ils crient, ils hurlent : "Liberté ! Egalité !"
Mai comprennent-ils vraiment le sens de ces mots ?"
Dernier point particulièrement décevant : la description et le rôle des femmes dans ce roman. Même si l'on peut rarement espérer d'un homme du début du XXè siècle une vue féministe ou même progressiste sur le sujet, certains passages ont eu le don de particulièrement m'hérisser le poil, notamment le procès de Ranivo et le ton tout naturel pour évoquer le mariage et les relations sexuelles d'une enfant de quatorze ans avec des hommes adultes.
Malheureusement, cette première lecture me décourage totalement de lire d'autres oeuvres du même auteur, y compris ces
poèmes, et me laisse un goût amer.