L'auteur souhaitait nous plonger dans un huit-clos avec ce roman. Pourtant, en refermant ce livre, ce n'est pas du tout la sensation qui reste. le rythme est un peu lent sur ce bateau. Il ne s'y passe pas grand chose. Mais le mystère qui entoure Béa nous invite à la lecture. Veut-elle se suicider ou tuer quelqu'un ? C'est la question que l'on se pose dès les premières pages. Pour les défenseurs de la nature et des animaux, ce roman est une atrocité. Une atrocité pourtant bien réelle !
Béa est une jeune femme assez antipathique. Elle jette les hommes comme elle jèterait un sac poubelle, boit plus que de raison et en plus, s'adresse aux gens avec très peu de respect : « cette bière est chaude ! Si je veux quelque chose de chaud, je bois du café ! ». Au delà de ça, elle est très irrespectueuse : elle ouvre les hublots alors que c'est strictement interdit, jette ses mégots en pleine nature … Il est très difficile de s'attacher à elle, d'autant plus qu'elle est pleine de contradictions. Elle va s'émouvoir de la mort d'un ours malade, d'une femme qui l'a violé lorsqu'elle n'était qu'une adolescente mais pas d'un phoque en pleine santé tué par Georg. Pire, elle ira elle-même tuer des phoques. Et puis, elle sera choquée de voir les peaux d'ours prélevées par son amant. Très égoïste, Béa ne nous étonne pas dans ses réactions. Elle ne se soucie pas de grand chose, à part d'elle-même. Au final, même le drame qui lui est arrivé nous passe au-dessus de la tête tant on ne s'est pas attaché à elle. On l'a lu. Et puis, on l'a oublié.
Et les contradictions se rencontrent en toutes circonstances. Per, le guide, leur conseille de ne jamais se promener sans armes et de ne tirer qu'en cas de légitime défense car l'ours est une espèce protégée. La meilleure façon de protéger ces animaux n'est-il pas de ne pas aller les déranger dans leur milieu naturel afin de ne pas avoir à leur tirer dessus ? Pia, quant à elle, fait des études de vétérinaire. Pourtant, elle chasse depuis ses sept ans et participe aux safaris arctiques …
On comprend rapidement qu'il y a un trafic d'animaux sur ce bateau. La dispute de Per et de Pia ne laisse envisager que cette solution.
Georg, quant à lui, reste le personnage le plus horrible de ce roman. Insensible à souhait. Cruel. Intéressé. Rien ne va avec lui. Pourtant, au début de sa relation avec Béa, on s'y attachait. Ce qui rend notre déception encore plus grande ! On comprend que Dana ait envie de le tuer, car nous aussi ! En plus, en tuant le phoque, il se trouve des excuses : « Il faut comprendre, on nourrit les ours avec. » Pourquoi ne pas laisser les ours se nourrir tout seul ? Un ours a besoin de chasser. S'il s'habitue à être nourri par la main de l'homme, il ne chassera plus et se laissera mourir. le choix des mots de
Anne B. Radge est très bien mené, ici. Surtout lorsqu'elle écrit : « Le phoque était près du bateau, sur une plaque de glace, y avait plus qu'à le cueillir ». Volontairement, elle tue le côté vivant de l'animal, le rapprochant à une plante. Ce qui augmente encore plus la colère du lecteur qui se dit : « Mais il est vivant, ce n'est pas une fleur ! » - Georg a un esprit tellement étriqué qu'il estime que ce sont les gens de Greenpeace qui ne comprennent rien à la nature. Il ne voit que par sa condition d'homme qu'il estime bien supérieur aux autres êtres-vivants. Il ne comprend pas que certaines personnes puissent préférer l'espace animale à l'espèce humaine … Mais avec des gens comme lui, il est évident qu'on ne peut que préférer les animaux. On comprend à ce passage qu'il n'est, ni plus ni moins, un braconnier qui se cache sur son bateau pour assouvir ses desseins.
On apprécie la rencontre avec toutes ces espèces arctiques : renards, ours, phoques, morses, fulmars boréals, macareux moines, sternes, pingouins torda, mouettes, rorquals, bruants des neiges … Mais, également le fait d'en apprendre davantage sur leur mode de vie. Par exemple, qu'une ourse avec des petits doit se méfier du mâle car il est capable de dévorer sa progéniture.
Un tout petit défaut a attiré mon attention. le paragraphe sur le fait de manger les pingouins torda apparaît deux fois dans le cours du roman. Et il s'agit d'une répétition exacte. Presque mot à mot. Ce qui est dommage !
Avec ce roman,
Anne B. Radge a choqué pour sensibiliser les lecteurs sur l'intérêt de préserver la nature et ses espèces vivantes. Que ce soient des animaux, des plantes, ou des montagnes. Pour cela, elle met en avant le braconnage et la chasse à la baleine, pointant du doigt le regard émerveillé des Hommes qui apprécie les espèces tuées lorsqu'elle sont mortes. Mais elle fait également ressortir la beauté des paysages grâce aux fleurs arctiques, aux merveilleuses montagnes et aux glaciers. Il n'y a pas à en démordre, ici le véritable personnage principal n'est autre que la nature. Ce sont ses péripéties qu'on suit. Ses malheurs, ses joies … La nature est belle, alors préservons-la ! Elle et tout ce qu'elle comporte. Cela-dit, l'auteur rappelle que « l'Europe regorge de personnes bien-pensantes qui détestent les norvégiens pour tout ce qu'ils représentent, c'est-à-dire des tueurs de baleine et de phoques et maintenant aussi d'ours. Bref, des barbares sans foi ni loi ». Malheureusement, bien que nombreux européens fassent la différence entre Norvégiens et braconniers, ce roman n'aide pas à rompre cette image. Loin de là ! Car les Norvégiens représentés dans cette oeuvre sont barbares et ont peu de bon sens. Il aurait peut-être fallut, ici, apporter un personnage Norvégien qui soit différent de ceux-là et qui puisse contrebalancer l'image donnée.
Quoiqu'il en soit, c'est une oeuvre que j'ai apprécié lire bien qu'elle soit cruelle aux yeux d'un défenseur de la nature. Mais, il est important de pas pratiquer la politique de l'autruche et d'ouvrir les yeux sur ce type d'actes pour mieux les rejeter.