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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je ne me lasse pas du bonheur d'avoir découvert tout récemment un auteur rare dont la première incursion dans son oeuvre m'avait totalement envoûté. Il s'agissait de la Grande Peur dans la montagne et l'auteur était un certain Charles Ferdinand Ramuz, peu connu du grand public.
Derborence ne déroge pas au rendez-vous. Ce nom sonne comme une fleur de printemps.
J'ai la chance d'avoir découvert au sein de ma médiathèque préférée l'oeuvre complète de Ferdinand Ramuz dans La Pléiade.
Je m'y nourri comme un oiseau picorant et inspiré.
Ce texte est splendide.
Un jour, ce n'est pas le ciel qui s'effondre, mais les Diablerets sur la vallée. Ramuz s'est inspiré d'un fait réel remontant au XVIIIe siècle pour dire la même chose.
Il paraît que la foi déplace les montagnes. Moi, je pense que l'amour aussi. Ici en quelque sorte la montagne s'est déplacée, effondrée même, certains y ont même vu ce jour-là, ou disons plus tard, la main d'une décision céleste...
Des tonnes de pierres qui dégringolent sur des personnes, je ne sais pas saisir la différence entre une vague qui se ploie sur le nageur et l'empêche brusquement de respirer et une montagne qui se déverse sur le pan d'une vallée...
Ils étaient montés sur l'alpage, fiers et heureux avec leurs bêtes. Il y avait quelques chalets là-haut. Ils devaient être une quinzaine d'hommes, une centaine de bêtes. Je ne suis pas montagnard, bien qu'aimant la montagne... J'ai ressenti la même émotion que ceux qui chez nous partent en mer.
À quoi peut ressembler une montagne qui décide brusquement de lâcher un peu de son incertitude ? Des tonnes d'incertitude...
Thérèse attend un enfant d'Antoine là-haut, parti. Un enfant, c'est aussi une incertitude...
Un seul rescapé, un seul survivant, Antoine, redescendra deux mois plus tard vers le village comme un fantôme. En redescendra-t-il vraiment ?
Comme c'est beau ! Je ne sais pas dire autre chose devant un texte magnifique et se dressant à la hauteur du paysage et de l'âme qui en émane.
J'ai adoré ce roman, je voudrais qu'il se déploie encore plus grand au travers des vertiges auxquels il l'invite.
La langue de Ramuz est belle, mais comme on l'entend. Elle est belle dans ce texte, elle est jolie et rugueuse, elle coule de source comme un ruisseau de montagne et brusquement s'emporte dans le vertige et s'affole à chaque obstacle. Au fond, elle ressemble à la vie.
À nous !
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"J'm'appelle Derborence...c'est un nom d'fleur.." aurait pu dire Garance-Arletty dans une version suisse des Enfants du Paradis.....

Fleurs des hauteurs, alors, car Derborence au joli nom c'est d'abord un alpage haut perché, un creux de verdure "qui mousse de rayons " et de fleurs sauvages, s'ouvrant, comme une conque fraîche, tout en haut d'un raidillon de pierres, au pied des Diablerets, face au grand ciel...

Mais pour les Enfants du Paradis, vous repasserez: c'est là , dans ce petit eden alpestre, qu'un soir la montagne capricieuse et , sans nul doute, maligne, choisit soudain de s'écrouler, écrasant l'herbe tendre, les chalets d'estives, les bêtes en pâture et les bergers solitaires.

Voilà tout le village en deuil. Et la douce Thérèse, enceinte de son Antoine qui est resté là-haut, sous des tonnes de cailloux, se refuse à y croire.. Les mois s'écoulent, son ventre s'arrondit et sa foi reste inébranlable.

Mais si Antoine revient, qu'elle prenne garde aux pâles revenants que la montagne maléfique fait parfois sortir de ses entrailles pour y mieux engloutir les vivants.. .

Fable d'effroi et de mort ? Chanson de toile ou de geste , pleine de confiance naïve ou d'amour héroïque ?

Derborence, c'est tout cela...et Ramuz, une fois encore, fait vivre cet entre- deux avec gourmandise et finesse, dans un récit fantastico-réaliste comme il sait les trousser...

Fantastique, oui, sans doute, à cause des hésitations et du floutage subtil des points de vue, à cause de la présence magique du paysage et de l'ombre maléfique des Diablerets.. . Réalisme puisque Ramuz s'est inspiré d'un fait réel, remontant au XVIIIe siecle, réalisme aussi dans le parler et la carrure des personnages...

Au final, une fable sur l'amour fou des simples, qui, comme chacun sait, soulève des montagnes!
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"Derborence", 1934... Récit bâti sur un "faits divers" valaisian du XVIIIème siècle (*).

La lente montée aux pâturages. La pluie nocturne - d'abord si musicale - de ces petit cailloux sur le toit de tuiles d'une cabane de bergers. Puis un grondement inquiétant...

Nous y sommes.

Antoine se retrouve brutalement plongé dans les Limbes. Enfermé. Longtemps. Les mois passent.
Thérèse reverra un jour reparaître un mari fantômatique que la montagne avait gardé en son sein...

Magie étrange de la langue ramuzienne (Ramuz fut "contesté de son vivant en raison de ses audaces stylistiques" : et cela continue curieusement... Ce Purgatoire dans lequel le tient le "grand public"... )

Quelque chose d'intemporel, d'archaïque dans sa langue, avec notamment sa belle "discordance des temps".

Poésie.
Sensorialité.
Attention aux humbles.
Attention à leurs plus humbles gestes.
"Langue-geste"...
Chant de la montagne.
Grandiose.
Une histoire immortelle.

PS : merci aux 7 Amis ci-dessus pour leur beau travail & vivent les ouvrages (intemporels) de C.-F. RAMUZ !

(*) "L'alpage au pied des Diablerets qui donne son nom au roman fut victime, en 1714 et 1749, d'éboulements catastrophiques. Pour le lecteur suisse qui découvre le roman en 1934, le titre suffit sans aucun doute à évoquer les légendes qui entourent ce massif. D'autant que Ramuz, fait exceptionnel, ajoute une épigraphe au premier chapitre : " [...] Un pâtre, qui avait disparu et qu'on croyait mort, avait passé plusieurs mois enseveli dans un chalet, se nourrissant de pain et de fromage. [...] "

(Jean-Louis PIERRE, Notice pour "Derborence" dans l'Intégrale des Romans de C.-F. Ramuz, collection"La Pléiade", Gallimard, 2005, tome 2, page 1660)
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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« C'est la montagne qui est tombée. »

Derborence, ce mot résonne mélodieusement, rappelant les mots magnificence, silence, virulence. A la fois poétique, il est aussi un lieu maudit, fui par les hommes.

« Derborence, le mot chante doux ; il vous chante doux et un peu triste dans la tête. Il commence assez dur et marqué, puis hésite et retombe, pendant qu'on se le chante encore, Derborence, et finit à vide, comme s'il voulait signifier par là la ruine, l'isolement, l'oubli. »

Suite à plusieurs petits séismes qui fragilisent la paroi du massif alpin des Diablerets, un énorme éboulement survient en 1714.
Près de deux cents ans plus tard, en 1934, Charles-Ferdinand Ramuz s'inspire de ce fait divers et met en scène ce drame, racontant comment un pan entier de la montagne s'en est détaché et a dévalé sur l'alpage de Derborence, ensevelissant hommes et bêtes.

Avec fatalité, l'auteur aborde les répercussions de cette catastrophe sur les villages voisins et en particulier sur un jeune couple.

*
C'est le mois de juin.
Comme chaque été, les hommes mènent, pour quelques mois, leurs bêtes au pâturage de Derborence que surplombent les Diablerets.
Parmi eux, Antoine Pont et Séraphin Carrupt.
Antoine Séraphin, jeune marié, a des étoiles plein les yeux : il s'ennuie de Thérèse, son amour, restée au village.

Un soir, un bruit pareil au tonnerre emplit le silence et résonne jusqu'au fond de la vallée.

« … ça grondait sourdement sous eux pendant ce temps ; et, comme ils avaient le ventre appliqué contre la montagne, ils entendaient avec le ventre les bruits de la montagne qui montaient à travers leur corps jusqu'à leur entendement. »

La montagne est tombée, emportant tout sur son passage, ensevelissant les arbres, détournant le torrent, s'abattant sur les petites cabanes en pierre sèche des bergers, enterrant les hommes et leur troupeau de vaches et de chèvres.
Parmi eux, Antoine Pont et Séraphin Carrupt, engloutis sous des tonnes de pierre.

Puis, peu à peu, le calme et le silence revient, pesant, douloureux, angoissant, cruel, glacial.

« A présent, il n'y avait plus rien partout que l'immobilité et la tranquillité de la mort, la seule chose qui fût encore en mouvement étant là-haut dans le couloir une sorte de masse boueuse, une espèce de rivière faite de sable, de terre et d'eau, qui continuait à descendre… »

*
J'ai été totalement séduite par l'écriture de l'auteur, visuelle, poétique.
Dans un style oral direct et très moderne, on se sent en totale symbiose avec la montagne et cette petite communauté rurale.
L'auteur transmet son amour de la montagne et le lecteur ressent cet attrait, cette fascination pour ce lieu à la beauté majestueuse. La montagne prend vie et devient même le personnage central du récit. Beauté froide, elle se referme impitoyablement sur ceux qu'elle réussit à piéger.

"Et, au fin sommet de la paroi, la tranche du glacier ruisselait de lumière comme un rayon de miel; mais derrière ceux qui venaient et à mesure qu'ils venaient, tout le fond de la combe entrait définitivement dans la nuit et dans le silence, dans le froid et dans la mort."

Face à ce drame, femmes et enfants doivent trouver la force d'avancer, de se reconstruire.

« L'arbre qu'on fend par le milieu se cicatrise. le cerisier qui est blessé élabore une gomme blanche dont il recouvre sa blessure. »

*
Et puis, le récit se fait fantastique. Les croyances et les superstitions s'invitent, les hommes craignant que le diable soit responsable de cette tragédie et qu'il continue ses méfaits. En peu de mots, l'auteur sait nous raconter les peurs, l'abattement, la consternation, la peine de ces gens.

La fin est de toute beauté, .

*
Pour finir, « Derborence » est un superbe roman d'ambiance. L'écriture de l'auteur dépeint avec justesse et beauté, le drame de Derborence, mais sans jamais verser dans le pathos. Au contraire, la tragédie est vécue avec fatalité, la montagne souveraine.

Magnifique conteur, Charles-Ferdinand Ramuz est un auteur incontournable et captivant que j'ai découvert grâce à Berni_29. Je vous encourage à aller lire ses critiques, elles vous donneront, comme moi, l'envie de découvrir cet auteur.
Un grand merci à toi, Bernard, j'ai adoré cette histoire et je ne tarderai pas à lire ses autres romans.
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Ramuz, lit-on sur Internet, un écrivain méconnu en France, injustement oublié.
A dire vrai, peu m'importe, la culture (ou l'inculture) de mes contemporains n'est pas ce qui guide mes lectures, je préfère aller à la rencontre des autrices et auteurs qui peuvent m'aider à mieux comprendre le monde, y compris mon monde intérieur (« chaque lecteur, quand il lit, est le propre lecteur de soi-même »), et partager mes découvertes et mes impressions avec mes amies et amis, on ne déguste pas un bon vin avec n'importe qui.

Je n'avais lu de Ramuz, il y a plus que quelques années, cet impressionnant roman qu'est La grande peur dans la montagne, et son écriture poétique m'avait beaucoup séduit.
J'ai redécouvert récemment son immense production et la grande diversité des récits et des thèmes abordés, dont certains bien actuels comme cette allégorie du réchauffement climatique qu'est Présence de la mort. J'ai vu aussi que ses romans avaient été rassemblés dans deux tomes de la Pléiade parus en 2005 (voir à ce propos l'excellente critique de mon ami Babeliote Dourvach).

J'ai donc recommencé mon voyage en terre ramuzienne par Derborence,
considéré comme un des chefs-d'oeuvre de l'auteur, puis prévu de poursuivre mon circuit grâce aux deux volumes de la Pléiade disponibles à ma Bibliothèque municipale, avec au moins comme étapes Aline (sans Christophe), Présence de la Mort, et La Beauté sur la terre, un de ses derniers romans, peut-être d'autres, et sûrement de relire La grande peur dans la montagne.

La trame de ce roman est assez simple. Elle est tirée de l'histoire de l'effondrement d'un pan de montagne à Derborence, au début du 18ème siëcle, qui avait entrainé la destruction de plusieurs chalets et la mort d'hommes et de troupeaux.

Antoine Pont, récemment marié à Thérèse, part, accompagné de Séraphin, son oncle par alliance, avec son troupeau, vers les pâturages de Derborence.
Au bout de quelques jours, une énorme partie de la montagne des Diablerets s'effondre brusquement.Le chalet où Antoine dort avec son oncle est englouti sous les roches.
Dans la vallée, avant que ce désastre survienne, Thérèse découvre qu'elle est enceinte. Dans la vallée, aussi, on va entendre l'énorme grondement de la montagne qui s'effondre, qui fait penser à un orage survenant dans un ciel sans nuages.
Seul, un villageois, Maurice Nendaz va comprendre et ramener de là-haut un seul rescapé. Dans le village d'Antoine, tout le monde pense que tous ceux qui étaient partis sont morts, mais Thérèse ne veut pas le croire et pense qu'Antoine est vivant.
Dans la deuxième partie du roman, alors que sept semaines se sont écoulées, on assiste à la sortie de l'amas de rochers d'un Antoine hagard, et ayant un peu perdu la tête. Il redescend au village comme un revenant, les villageois finissent par le reconnaître. Mais, près avoir raconté de façon décousue son histoire, il s'enfuit au matin vers la montagne, persuadé de pouvoir retrouver l'oncle Séraphin. Thérèse part à sa poursuite et le roman se termine par la vision du retour d'Antoine et de Thérèse dans la vallée.

Un drame certes, mais une histoire bien simple, me direz vous. Oui, mais racontée d'une telle manière, car Ramuz en fait une épopée, un récit poétique, avec une puissance incroyable d'évocation de la montagne menaçante et toute puissante, de la vie, de l'amour et de la mort.
Ramuz emploie une écriture du langage oral, et l'on comprend que Céline ait dit l'influence profonde que Ramuz avait eu sur lui.
La poésie du récit, la sensation exprimée de la nature est magnifique et certaines phrases m'ont fait penser à cet autre grand Suisse, le poète Philippe Jaccottet.

En conclusion, encore une lecture à cinq étoiles, certes, mais il est vrai que j'essaie d'éviter autant que possible les mauvais auteurs, ayant pris, entre autres, pour guides (de montagne) mes ami(e)s babeliotes.
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C'était le 22 juin vers 9 h du soir. le vieux Séraphin et le jeune Antoine, assis au coin du feu sont installés pour l'estive à Derborence depuis 8 jours et Antoine s'ennuie de sa Thérèse qui est restée là-bas au village. Au même moment Thérèse se languit de son Antoine, son cher époux depuis deux mois ..... et soudain, tout va basculer. Au cours de la nuit les Diablerets sont venus en bas !
Derborence, cela fleure bon l'herbe et les plantes parfumées de montagne.
Derborence quel beau nom, empreint de douceur, laissant en bouche de douces fragrances.
Derborence, tout à coup va se muer en désespérance et transformer la vallée en écrin de larmes et de désespoir.

Mais parfois, la vie peut être plus forte que la mort .... et les revenants ne veulent pas disparaître, et les morts de hanter le village et Ramuz d'entraîner le lecteur dans les tréfonds de l'âme superstitieuse des villageois et de tenter avec succès de pénétrer dans l'esprit perturbé de celui qui a survécu, enterré sous des tonnes de gravats.

Alors, de la même façon que Thérèse, malgré l'avertissement des villageois, met un pied devant l'autre pour aller à la recherche de son homme au sommet de la montagne, le lecteur enfile fiévreusement une ligne après l'autre, happé qu'il est par l'écriture fébrile, hallucinée de Ramuz dont l'exaltation et la poésie magique captivent au point de retenir sa respiration jusqu'à la conclusion de cette remarquable chronique montagnarde.
Grandiose !
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Coup de coeur pour ce roman de l'écrivain suisse Ramuz, publié en 1934 et qui fut un de ses grands succès.
Il est basé sur le tragique éboulement survenu aux Diablerets en 1714. Dans le roman, cet éboulement survient suite à un tremblement de terre et ensevelit une vingtaine de montagnards montés à l'Alpage de Derborence avec leurs troupeaux. Un de ces hommes est jeune marié, il s'appelle Antoine et sa jeune femme Thérèse est enceinte bien qu'il ne le sache pas encore. Retrouvé vivant plusieurs semaines après, les villageois le prennent tout d'abord pour un fantôme jusqu'à ce que le curé lui fasse le test de la « croix ». Il est donc bien vivant mais très ébranlé et ne pense qu'à retourner à l'Alpage rechercher d'autres survivants en-dessous des immenses blocs de pierre, sa jeune femme le laissera-t-elle repartir ?

J'ai aimé la belle écriture de Ramuz, les descriptions de la montagne, et de la lumière. La lumière sur les sommets, la lumière qui se lève, celle qui se fait manger par l'ombre, celle qui se fait piéger dans les combes. le nuage de poussière soulevé par l'éboulement se répand comme une nappe opaque que les sauveteurs venus du village ont du mal à traverser. Il y a aussi la description du silence, il est ici annonciateur de malheur, c'est le bruit du ruisseau que l'on n'entend plus. Ramuz prend le temps de nous décrire le lieu, les différents versants ayant accès à cet alpage et les sentiers qui y mènent.

Ce roman restera pour moi un bel hommage à la vie et à l'amour. C'est grâce à la vie qui grandit en elle que Thérèse a le courage de rejoindre son mari dans cet endroit de mort et c'est par amour qu'elle espère le convaincre de rentrer au village.
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La montagne s'écroule. Un homme survit. Il y retourne. Une femme l'aime. La fable sur les rapports de l'homme et de la nature se renverse. L'homme prend le dessus. La montagne accouche d'un amour. La Grande Peur n'est plus. Ce qui demeure, c'est le style Ramuz, faussement populaire (ou peut-être plus véritablement populaire que le style populaire), répétitif comme le motif de la cloche qui sonne la mort, déroutant. Antoine sort de terre comme d'un tombeau, comme attiré par le soleil. Il veut y retourner. Thérèse le suit. Thérèse le sauve. Il n'y a sans doute rien de plus à dire. Comme en montagne, il n'y a qu'à admirer.
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Le Grand Miracle dans la montagne

Charles-Ferdinand Ramuz est un styliste rare ; il manie les mots en tailleur de pierre ainsi qu'en menuisier : son style est un burin qui cisèle la syntaxe et rabote l'inutile écorce.
Chaque phrase est de bon aloi : ici pas de fausse monnaie littéraire.
Cet écrivain suisse est un sourcier au verbe incantatoire.

Ramuz sait insuffler de l'âme dans l'argile de ses personnages afin que ceux-ci puissent prendre chair sous nos yeux de lecteurs attentifs.

Sa lecture est un véritable “ravissement”, en ce sens qu'elle nous arrache à nous-mêmes, nous fait prendre de l'altitude et nous enlève à la lourdeur d'un quotidien où la beauté fait, trop souvent hélas, office de fantôme.

La grâce fredonne, dans ces pages, un chant d'eau sur des galets.
Éclaircie après l'orage, la lumière de son écriture nous allège l'âme.

Thérèse, la femme d'Antoine – ce berger enseveli sous les roches, mort pour tous sauf pour elle –, pousse la pierre du tombeau pour ramener “Lazare” à la lumière du jour.

Par son acte créateur, elle devient comme une seconde mère qui accoucherait de son homme hors de la pierraille froide et bleutée pour le présenter en offrande au soleil.

La fin de “Derborence” est un “miracle”, dans tous les sens du terme.

© Thibault Marconnet
01/12/2013
Lien : http://le-semaphore.blogspot..
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Rien ne me prédisposait à lire cet ouvrage : je ne suis ni amateur de livre de montagne, ni particulièrement de littérature suisse du début du vingtième siècle. Mais alors, qu'est-ce qui a bien pu me prendre d'acquérir ce bouquin, et pire, de le lire (et jusqu'au bout, encore…) ?
Si je me souviens bien, j'ai dû tomber dessus en parcourant une des listes de Babelio dans le style "le livre qui vous a le plus marqué", ou dans le genre. Et la curiosité a fait le reste, vu l'étrangeté que cela représentait pour moi (la montagne, la Suisse…).
Eh bien je n'en suis toujours pas revenu ! Notez que ce n'est pas pour cela que je me suis jeté sur d'autres livres de montagne ou de littérature suisse (mais je n'ai rien contre, bien au contraire, comme on pourrait dire…). Ce livre m'a laissé une forte impression, à la fois par son écriture, par son sujet et par sa composition. J'en suis ressorti impressionné et respectueux. Je parle de l'auteur, bien entendu, mais aussi des lieux et des gens qui animent cette histoire. Que vous aimiez ou non la montagne, vous ressortirez de cette histoire avec des sentiments encore plus forts à son égard. Et vous aurez fait connaissance, en prime, avec un bel écrivain.
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