Algérie, une guerre française, tome 1 : Derniers beaux jours

Avec le premier tome de la série « Algérie, une guerre française », Philippe Richelle et Alfio Buscaglia présentent en bande dessinée les prémices des événements d'Algérie. L'intention des auteurs est de raconter, dans une saga de 5 volumes sous forme romanesque, mais en respectant au mieux la réalité historique, les évènements de l'Algérie à travers les parcours de quatre personnages fictifs qui sont unis par les liens de l'enfance.

La série, dans ce premier tome, commence en 1943, donc peu de temps avant les fameux évènements de mai 1945 à Sétif. Ce premier album pose les bases de cette fresque en adoptant le point de vue de toutes les parties. Ainsi, dans un souci de neutralité, les auteurs ne prennent pas parti et essaient de rendre compte de cette époque que l'histoire officielle a longtemps cachée, en laissant de nombreuses zones d'ombre.
On assiste à la genèse du conflit et à la montée des tensions ; la violence est très bien exposée, ainsi que la perception des évènements chez les protagonistes des deux camps.

Le réalisme et la précision du dessin assez lumineux permettent de s'immerger dans l'histoire et de s'attacher aux personnages ; un beau travail, certes peu évident car il reste de nombreuses cicatrices, parfois instrumentalisées par les politiques, entre les deux pays.
Je ne lis que très rarement des BD, toutefois j'attends avec impatience le tome 2.

Une bande dessinée qui ose …
Algérie une guerre française…
Un titre qui claque et qui affirme.
Une bande dessinée qui ose appeler les choses par leurs noms.
Il ne s'agit pas là, en effet de parler des « événements d'Algérie » terme honteux pour raconter une page de notre histoire coloniale.

Une terre …
L'Algérie d'ouest en est … de Tlemcen à Tébessa …
L'Algérie du nord au sud … d'Alger à Aïn Serra …
Où la France a voulu oublier qu'elle était terre d'accueil pour certains métropolitains certes, mais surtout la terre d'Algériens.

Une bande dessinée qui nous raconte l'histoire dans ce petit coin baignée par la Méditerranée …
De la rébellion de Sétif en 1945 (1) …
Au démantèlement de l'OS en 1050 (2) …
Et jusqu'à Novembre 1954 (3).
Nous sommes prévenus dès le début, il s'agit d'une fiction mettant en scène des personnages inventés mais représentatifs de la société au milieu d'évènements qui eux, furent bien réels.
Les dessins sont sobres et efficaces, s'attachant plus aux individus et à leurs ressentis qu'aux paysages.
C'est une oeuvre didactique, montrant la genèse des événements, ne cachant pas les abominations des uns ou des autres, elle donne la parole à tous les intervenants et montre leurs hésitations.
C'est une réussite … le tome 2 est disponible à la bibliothèque … super !

(1)
Pour fêter la fin des hostilités de la seconde guerre mondiale et la victoire des Alliés sur les forces de l'Axe en Europe, un défilé est organisé le 8 mai 1945. Les partis nationalistes algériens, profitant de l'audience particulière donnée à cette journée, appellent à des manifestations pour rappeler leurs revendications. Les manifestations sont autorisées par les autorités à la condition que seuls des drapeaux français soient agités. À Sétif, après des heurts, un policier tiré sur Bouzid Saâl, un scout musulman âgé de 26 ans, tenant un drapeau de l'Algérie, et le tue, ce qui déclenche plusieurs émeutes et actions meurtrières des manifestants, avant que l'armée n'intervienne.
Il y a parmi les Européens 102 morts. le nombre des victimes algériennes, difficile à établir, est encore sujet à débat 70 ans plus tard. Les autorités françaises de l'époque fixent le nombre de tués à 1 165. le gouvernement algérien reprend, par la suite, le nombre de 45 000 morts avancé par le parti du peuple algérien (PPA). Certains historiens évalueraient le nombre des victimes dans une fourchette allant de 3 000 à 8 000 victimes alors que d'autres donnent pour plausible une fourchette allant de 20 000 à 30 000 morts.

(2)
L'Organisation spéciale (OS), fondée officiellement le 15 février 1947, était le bras armé clandestin du mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD). En 1950 l'Organisation spéciale fut démantelée par la police française, détruisant ses structures, arrêtant des centaines de militants et contraignant ceux qui furent en fuite à l'inaction.
La découverte de l'OS par les autorités françaises conduit à sa dissolution. Plusieurs membres dirigeants de l'OS sont jugés et condamnés par contumace pour leur responsabilité dans différents attentats. L'OS va choisir de se tenir à l'écart des dissensions qui opposent les deux clans antagonistes, centralistes et messalistes, au sein du MTLD.

(3)
La Toussaint rouge, parfois appelée Toussaint sanglante, est le nom donné en France à la journée du 1er novembre 1954, durant laquelle le Front de libération nationale (FLN) manifeste pour la première fois son existence en commettant une série d'attentats en plusieurs endroits du territoire algérien, à l'époque sous administration française. Cette journée est rétrospectivement considérée comme le début de la guerre d'Algérie (1954-1962) et elle est devenue une fête nationale en Algérie.

Un 1er album très fouillé, qui permet d'avoir un aperçu précis des prémices du conflit algérien, sans partie pris, tous les points de vue étant représentés (enfin, les points de vue masculins, les femmes étant très peu présentes dans ce 1er tome).

Début d'une série ambitieuse sur les événements d'Algérie qui va suivre différents personnages à partir des années 40 sur 5 tomes. On a donc André, fils d'un propriétaire, Paul son cousin hébergé un temps avec lui, Mo, jeune algérien bon en classe. En parallèle, sont évoqués les inégalités entre les natifs et les métropolitains, la révolte de Setif...
Beau trait clair. Personnages humains, bien campés.
A suivre.