Un livre qui plait ou ne plait pas.
L'auteur a inscrit son récit sous la triple ascendance de
Rabelais,
San-Antonio et de l'humour des fondateurs d'Hara-Kiri, notamment
Reiser, Wolinski et Choron, que tout le monde ne goûte pas forcément.
Le propos est volontiers crû, (même si l'on déguste surtout du faisandé -ils disent maturé -, du mijoté et du cuit chez les Souche...Les lecteurs comprendront...), décapant, pétaradant, dégueulant, au sens propre et au figuré.
L'histoire est parfaitement résumé dans la 4ème de couverture, je n'y reviens pas.
On ne peut que s'attarder sur la façon dont elle est écrite.
François Riéra a une écriture simple, alerte et efficace, jamais ennuyeuse.
Il ne fait pas dans l'ampoulé, ni dans le compassé, ni dans l'académique, l'affecté, l'amphigourique, le bouffi, le boursoufflé, le creux, le déclamatoire, l'emphatique, l'enflé, le filandreux, le grandiloquent, le guindé, l'hyperbolique, le pindarique, le pompeux, le prétentieux, le redondant, le ronflant, le sonore, le soufflé, le tarabiscoté, le théâtral...
Ses personnages ont des patronymes parlant : Pauline Bonichon est secrétaire de Mairie, le flic s'appelle Anselme Lagachette, le juge d'instruction Gibe-Troussard, le fossoyeur est André Piche, Hyppolite Tailledru est un ancien légionnaire et mercenaire de la pire engeance, sa mère indigne - elle l'a abandonné - est Alice Poussebouchon, le coiffeur se nomme Maurice Beaumerle, le boulanger Constant Massepin, le boucher Yvan Massecouille, Gaston Piedevigne est l'ancien instituteur du village et la factrice Adèle Pichemolle est la fille du maire Auguste, digne descendante de sa suédoise de mère Ilda prosélyte de l'amour libre.
Frank Souche appelle sa femme Rachel, la Grosse ou ma Génisse, et leurs déclarations d'amour sont ponctués de déflagrations sur l'origine desquelles le lecteur a peu de doute.
Les dialogues des acteurs sont à l'image de leurs patronymes.
La petite communuaté de Saucière vit autour des Souche à l'auberge de la «Flaque d'Eau», leur repas festif du dimanche après la messe, le pot-au-feu à nul autre pareil de Rachel, de même que sa terrine ou ses saucisses blanches, les grands crus façon bourgogne et bordeaux du père Souche, et leur âpreté au gain que les villageois supportent car ils partagent l'horrible secret des aubergistes.
Quand Pierre Delassalle disparait et que l'inspecteur Lagachette vient enquêter à Saucière, la solidarité dans l'horrible va fonctionner à merveille blousant Lagachette en s'appuyant sur ses rêves de gloire policière.
On rit et on passe le temps agréablement à Saucière.
Le livre se lit d'une traite, le seul reproche que je ferai à
François Riéra est de parfois retenir sa plume, de ne pas la laisser aller au bout de la logique dans laquelle il a inscrit son récit, de le faire tomber parfois dans le raisonnable.
Péché véniel que je lui pardonne volontiers, m'inclinant devant l'immensité de la tâche à laquelle il s'est attelé en écrivant ce roman.
Le bon artisan se doit de persévérer en apprenant de ses expériences.
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