Odes IV, 22
À un aubépin
Bel aubépin, fleurissant,
Verdissant
Le long de ce beau rivage,
Tu es vêtu jusqu'au bas
Des longs bras
D'une lambruche sauvage.
Deux camps de rouges fourmis
Se sont mis
En garnison sous ta souche.
Dans les pertuis de ton tronc
Tout du long
Les avettes ont leur couche.
Le chantre rossignolet
Nouvelet,
Courtisant sa bien-aimée,
Pour ses amours alléger
Vient loger
Tous les ans en ta ramée.
Sur ta cime il fait son nid
Tout uni
De mousse et de fine soie,
Où ses petits écloront,
Qui seront
De mes mains la douce proie.
Or vis gentil aubépin,
Vis sans fin,
Vis sans que jamais tonnerre,
Ou la cognée, ou les vents,
Ou les temps
Te puissent ruer par terre.
Bel aubépin fleurissant,
Verdissant
Le long de ce beau rivage,
Tu es vestu jusqu'au bas
Des longs bras
D'une lambrunche sauvage .
Deux camps de rouges fourmis
Se sont mis
En garnison sous ta souche ;
Dans les pertuis de ton tronc
Tout du long
Les avettes ont leur couche .
Le chantre rossignolet
Nouvelet,
Courtisant sa bien-aimée,
Pour ses amours alleger
Vient loger
Tous les ans en ta raméee .
Sur ta cime il fait son ny
Tout uny
De mousse et de fine soye,
Où ses petits esclorront
Qui seront
De mes mains la douce proye .
Or vy gentil aubepin
Vy sans fin,
Vy sans que jamais tonnerre,
Ou la coignée, ou les vents,
Ou les temps
Te puissent tuer par terre .
ODE XXII
A Cassandre
Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avoit desclose
Sa robe de pourpre au Soleil,
A point perdu ceste vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vostre pareil.
Las ! voyez comme en peu d'espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! las ses beautez laissé cheoir !
Ô vrayment marastre Nature,
Puis qu'une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez vostre jeunesse :
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.
A Cassandre
Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.
Las ! voyez comme en peu d'espace,
Mignonne, elle a dessus la place,
Las, las ses beautés laissé choir !
Ô vraiment marâtre Nature,
Puisqu'une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse :
Comme à cette fleur, la vieillesse
Fera ternir votre beauté.
Odes II, 9
Ô Fontaine Bellerie…
Ô Fontaine Bellerie,
Belle fontaine chérie
De nos Nymphes quand ton eau
Les cache au creux de ta source,
Fuyantes le Satyreau,
Qui les pourchasse à la course
Jusqu’au bord de ton ruisseau,
Tu es la Nymphe éternelle
De ma terre paternelle :
Pource en ce pré verdelet
Vois ton Poète qui t’orne
D’un petit chevreau de lait,
A qui l’une et l’autre corne
Sortent du front nouvelet.
L’Été je dors ou repose
Sur ton herbe, où je compose,
Caché sous tes saules verts,
Je ne sais quoi, qui ta gloire
Envoira par l’univers,
Commandant à la Mémoire
Que tu vives par mes vers.
L’ardeur de la Canicule
Ton vert rivage ne brûle,
Tellement qu’en toutes parts
Ton ombre est épaisse et drue
Aux pasteurs venant des parcs,
Aux bœufs las de la charrue,
Et au bestial épars.
Iô ! tu seras sans cesse
Des fontaines la princesse,
Moi célébrant le conduit
Du rocher percé, qui darde
Avec un enroué bruit
L’eau de ta source jasarde
Qui trépillante se suit.
Pierre de Ronsard – Anthologie des 'Amours' lue par Jacques Roubaud (1971)
Un cassette audio enregistrée par Jacques Roubaud après 1971 à l'attention de sa mère.