KTR est une petite révolution pour moi. Je ne mets pas la note maximum parce que j'aurais aimé que ça dure plus longtemps -mais le format théâtre jeunesse ne s'y prête peut-être pas ! Dans mon coeur, c'est la note maximum.
Bref, de quoi parle
KTR? C'est donc une pièce de théâtre jeunesse mettant en scène des personnages passablement agacés du clivage entre les extrêmement riches et... les autres. Que faire pour corriger cette situation? Des jeunes s'organisent, et règlent les comptes à leur façon, grimés derrière leur attirail de démons et l'acronyme
KTR. En face, ce sont les forces de l'ordre et les ploutocrates qui s'agitent et réagissent.
Voilà pour les bases. Pour ce qui est de ma critique et/ou du ressenti, j'ai passé un très bon moment. Je l'ai lu pratiquement d'un coup et, ne connaissant strictement rien au théâtre, j'ai beaucoup apprécié les notes de mises en scène. Les descriptions d'yeux lumineux ou d'éléments de décors permettent de se sentir au coeur de l'action -avec une inspiration cyber-punk ou retro-futuriste fort plaisante. C'est très différent des romans qui parfois se perdent en description sans fin et peuvent un peu casser l'imagination : on n'a pas à en avoir puisque tout est expliqué. Aussi bien, j'ai imaginé quelque chose de complètement différent que l'auteur, mais ça ne gêne en rien la lecture -au contraire.
Par ailleurs, si l'histoire peut paraître simple ou un peu clichée, elle tombe à pic dans un contexte politico-social pour le moins survolté en France. Donner la parole et les moyens d'agir à une jeunesse dégoûtée et prête à en découdre est résolument libérateur, au même titre qu'effrayant. A ma lecture, j'ai eu une vraie sensation de "et si" qui fait réfléchir voire donne envie. Et si? Et si
KTR? Et si on en arrivait là?
A échelle plus modeste, et si cette pièce aidait des personnes, notamment des jeunes, à se rendre compte des immondices liés à l'argent dans notre monde, est-ce que ça ne serait déjà pas un bon départ? Réaliser l'absence totale de morale de certains milieux richissimes et l'absurdité de continuer à s'y plier? Lutter chacun à sa façon, avant qu'il ne soit trop tard. Et surtout, apprendre à être en phase avec ses convictions et savoir vivre avec.
L'histoire va un peu plus loin et n'est pas dans les nuances. du point de vue des personnages, il n'y a qu'une modalité : où on est avec eux, ou on est contre eux. Ca fait partie des choses qui m'ont plu également : dans leur situation, il est trop tard pour les excuses et les débats. C'est le temps de prendre des décisions, et d'agir.
J'aime à y voir une comparaison avec Matrix et le choix des pilules rouge ou bleue (a fortiori parce que le symbole de la pilule rouge a été récupérée par des groupuscules fascistes, et que ça fait plaisir de la voir basculer à l'opposé). Peut-être que je m'imagine trop de choses à nouveau, mais The Catcher in the Rye m'est venu à l'esprit aussi (roman encore interdit ou à problèmes dans plusieurs états pour des propos bien moins tranchés que ceux tenus dans
KTR), pour le "parler jeune" et le mal-être d'adolescent révoltés et déjà désabusés malgré leur courte vie.
Je conclue sur une note simple :
KTR est moderne, politique, manichéen (voir citation sur les fourmis et les pachydermes), engagé mais aussi amusant et quelque part un peu absurde. La fin peut être appréhendée de différentes façons, selon si l'on est optimiste ou non. Par ailleurs, l'idée qu'une idée transcende la personne qui la porte me plaira toujours.
KTR.