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sur 5334 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Et si Adolphe Hitler, le 08 octobre 1908, avait été reçu au concours d'entrée à l'Ecole des Beaux-Arts de Vienne, au lieu de s'y voir lamentablement recalé ? La face du monde en eut peut-être été changée ; et plus particulièrement entre 1933 et 1945. C'est du moins le thème de réflexion que nous propose Eric-Emmanuel Schmitt dans « La part de l'autre ».

Publié en 2001, voilà un roman bien étrange dans la mesure où l'auteur nous fait vivre en parallèle une biographie romancée d'Adolph Hitler et celle non moins romancée et U-Chronique d'Adolph H., son double imaginaire.

Que se serait-il passé si, au lieu d'être humilié, le sulfureux chef du Parti National-Socialiste – plus tard, nazi – s'était vu encensé ? Sa vie aurait sans doute été bien différente… Celle de nos parents et la nôtre également, je suppose… A moins que l'Histoire ne se charge de créer ex-nihilo, les monstres dont elle a besoin ; chacun d'entre nous ne cache-t-il pas au mieux une part d'ombre qui n'attend que l'occasion pour se révéler ?

« La part de l'autre » parle de chacun d'entre nous et nous ébranle dans nos certitudes : l'homme est un être dual.
Il faut tout l'art d'Eric-Emmanuel Schmitt pour ne pas tomber dans le conflit un peu simpliste du bon et du méchant : nul n'est parfaitement bon ou mauvais et chacun porte en lui la part de l'autre

Comme souvent chez Eric-Emmanuel Schmitt : dérangeant, fascinant… original !
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Et si ?
Et si cet homme avait été reçu à ce concours ?
Et si le jury avait été clément avec ce petit être freluquet, transparent, si banal ?
Et si la pièce était tombée du bon côté de l'Histoire ?
Aurions-nous basculé vers la lumière au lieu de nous enfoncer parmi les heures les plus sombres de l'Humanité ?
Aurions-nous engendré un Monstre ?

Cette question dérange. Elle nous renvoie au plus profond de nous. Quelle est cette part de « l' Autre » que nous renfermons ? Est-il possible qu'elle surgisse du néant pour s'imposer à nous ? Sommes-nous si différents de ce Führer au point de le considérer comme un être à part, exceptionnellement pervers, fou, génie du mal ? Sommes-nous assez naïfs pour laisser une nouvelle chance à l'Histoire de nous contredire à nouveau un jour ?

Oui, cette question dérange. Il était comme vous et moi, il n'est pas l'Autre mais nous l'avons laissé prendre cette part de l'Autre, nous ne l'avons pas cru et nous nous sommes lourdement trompés...
Plus jamais ! Plus jamais ça !

Eric-Emmanuel Schmitt nous offre une vision de l'Humanité à travers deux vies parallèles, celle d'un homme banal devenu Hitler, orateur hors pair, égocentrique, capable de lever les foules avec sa langue vipérine et la face noire du coeur, et celle de son alter ego imaginaire, Adolphe H, reçu aux Beaux-Arts, artiste, son exact contraire, qui exercera son talent de peintre dans une Europe en paix. Tout les oppose mais ce n'est pourtant qu'une petite minute de l'Histoire qui changera le Monde et les séparera.

Eric-Emmanuel Schmitt nous fait évoluer en alternance auprès de ces deux hommes, il nous joue avec virtuosité Wagner et puis Mozart, il nous fait courtiser avec grâce les jolies femmes de Montparnasse et nous sert avec une fièvre démente les foules aveuglées, il nous peint avec force le noir et le rouge de la svastika et nous offre de délicieuses aquarelles multicolores, il nous perturbe à ne plus savoir où se trouvent le Bien et le Mal, où se trouve cette part de l'Autre.

J'ai ressenti ce livre, ce voyage à travers les différents chapitres de la vie de ces deux hommes, comme on peut apprécier un repas dans un bon restaurant...
Tout se passe bien... Les chapitres se suivent comme les plats... apéritif, entrée, plat, fromage... tout m'a paru bon, fin, équilibré... l'instant est agréable, on se souviendra de cette très belle soirée... J'attendais la fin pour terminer en beauté... Mais cette fin, ce dessert, m'a un peu déçue... le flan qui retombe, le sabayon qui ne prend pas... Ce moment grinçant qui déçoit après tant de plaisir et qui va au final faire que le repas ne restera pas dans la mémoire. J'aurais aimé de l'apothéose dans ce bavarois ! (si je peux me permettre ce jeu de mots).
On se dit alors qu'on va sortir déçu du restaurant puis, par magie, comme on tourne encore une page après le point final, on découvre qu'Eric-Emmanuel Schmitt nous livre la genèse de son roman et la démarche intellectuelle et philosophique qui l'a habité durant toute la construction de celui-ci...
Le chef qui sort de sa cuisine pour te serrer la main et te demander ce que tu veux boire pour la maison... Et là tu découvres toute la finesse d'un Bas-Armagnac 18 ans d'âge, toute la force glaciale d'une grappa morbida, toute la saveur d'un pur malt écossais !
Vingt-cinq nouvelles pages d'intimité où on se retrouve accoudé au bar avec l'auteur et où tu te repasses tout le livre dans ta tête autour d'un dernier verre... Et tu comprends. Et tu apprécies. Et tu applaudis. Et tu lui mets quatre étoiles !

(Merci pour la découverte de ce beau roman, Magali)
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Eric-Emmanuel Schmitt se livre à un exercice périlleux et combien tabou à travers ce roman, couverture à l'appui: Hitler. A l'avancée de ce roman, Hitler s'insinuera dans les peurs de l'auteur. le passé semble encore tellement proche.

Dans ce roman, on découvre ou redécouvre une biographie romancée d'Adolf Hitler.
L'auteur ne prend pas le parti du jugement, il relate et apporte son juste nécessaire d'analyse. Il le nomme Hitler.
Il s'inspire de « La minute qui a changé le cours du monde ».
Que serait devenu Hitler s'il avait réussi aux Beaux-Arts ?

On le découvre dans les chapitres fictifs dessinant un portrait imaginé mais probable de l'artiste Adolf H.
Le génie de ce roman tient du fait que l'auteur s'inspire de la personnalité fanatique d'Hitler pour soudoyer la part de l'autre, un Adolf peu confiant, assailli de doutes, attiré par les femmes, rêveur.
L'auteur expose à travers de courts chapitres l'opposition de l'ombre et de la lumière. On suit, dans une suite chronologique d'évènements historiques la vie d'Hitler, le dictateur ou l'artiste raté et Adolf H., l'artiste acclamé.
« Ils ignoraient qu'ils n'avaient pas désigné un homme politique, mais un artiste. C'est-à-dire son exact contraire. Un artiste ne se plie pas à la réalité, il l'invente. C'est parce que l'artiste déteste la réalité que, par dépit, il la crée. D'ordinaire, les artistes n'accèdent pas au pouvoir : ils se sont réalisés avant, se réconciliant avec l'imaginaire et le réel dans leurs oeuvres. Hitler, lui, accédait au pouvoir parce qu'il était un artiste raté ».

Eric-Emmanuel Schmitt réussit l'impossible. Imaginer le visage de la part de l'autre. Imaginer que le bien et le mal cohabitent en chacun. L'auteur réussit avec talent à nous questionner sur ce qui conditionne tout un chacun à tracer un chemin en fonction de l'un ou de l'autre (le bien-le mal; la part de l'autre). Une minute suffit-elle a changer le destin ?
La question est posée, La part de l'autre lui donne la réplique avec brio.

Un roman marquant et magistralement retracé et orchestré.
Un coup de coeur pour toutes les questions qu'il suscite, pour la justesse et profondeur des lignes, parce que se rappeler est vital pour ne plus commettre à nouveau l'impensable.
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Et si Hitler avait eu un tout autre destin, s'il avait été accepté à l'école des Beaux-Arts comme il en rêvait, à quoi ressemblerait le monde aujourd'hui ?
Quelles alliances auraient ou non vu le jour ?
Y aurait-il un état juif et où serait-il implanté ?
Eric-Emmanuel Schmitt s'est risqué à créer un Adolphe H. humaniste, altruiste, qui cherche à se comprendre, qui aime d'amour et d'amitié.
Et on se surprend à rêver, à imaginer nos grands-parents préservés de la guerre et de son lot de souffrances, de peurs, de privations.
Face à cette version édulcorée d'Hitler, il y a le vrai personnage et son évolution vers la dictature, la haine du juif, la mégalomanie, la déchéance physique.
Le fossé entre les deux se creuse au fil des pages et , en tant que lecteur, on est de plus en plus attiré vers l'un et dégouté par l'autre.
Dans le journal que l'auteur a tenu tout au long de sa rédaction et qui figure en postface du livre, Eric-Emmanuel Schmitt dit s'être imposé une tension mentale tellement forte pour raconter cet horrible individu qu'il a eu peur pour son propre équilibre.
Lorsqu'il raconte la naissance de l'antisémitisme d'Hitler, on frissonne de dégoût face à ce délire qu'il retranscrit de façon heurtée et continue, lui-même révulsé par ce qu'il écrit.
La part de l'autre, c'est celle qu'on ne peut ignorer si l'on veut rester humain.

Un livre qui se lit sans ennui de bout en bout, qui captive et provoque la réflexion.
Je suis passée par une incroyable palette d'émotions qui resteront à jamais gravées en moi.
Une lecture inoubliable !
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Un coup de coeur pour ce roman magistral.

On suit le parcours de ces deux hommes Adolf H. et Hitler avec curiosité. EE Schmitt nous fait suivre sa pensée, son questionnement. On cherche le moment où tout va basculer, les indices qui prouveraient que lui, l'autre (surtout pas moi) était destiné au Mal. Que c'était écrit, inéluctable. Qu'il est tellement différent de nous.

Et puis on découvre un jeune homme dont on pourrait avoir pitié, qu'on pourrait avoir envie d'aider. On se dit que cette fois-ci l'histoire ne sera pas la même. Mais cette fois-ci encore l'histoire a suivi son cours et Hitler est devenu Hitler, l'homme qui a causé tant de souffrances.

Par ses choix EE Schmitt se révèle énormément. La mort de son chien adoré, l'hypnotisme ... j'ai eu l'impression qu'il fallait un déclencheur, qu'Hitler ne pouvait pas être naturellement mauvais.

Il le confirme d'ailleurs dans le journal en postface. M. Schmitt est un humaniste qui pense (si j'ai bien compris) qu'on ne nait pas mauvais, mais qu'on le devient.



Mais qu'est-ce que ça implique? ça implique que, quel que soit notre passé, notre enfance, nos meurtrissures, notre destin n'est pas une fatalité. Nos zones d'ombre il faut les découvrir, les regarder droit dans les yeux, les accepter pour mieux lutter contre elles.

Je crois que c'est ce qu'il a fait en écrivant ce roman. IL a regardé celui qui, pour lui, ressemblait le mal, s'est mis dans sa peau, a essayé de le comprendre pour mieux saisir dans quelle mesure il était en lui.



Un roman troublant, essentiel, intelligent ... , un roman d'Eric-Emmanuel Schmitt...
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Cela faisait déjà un petit moment que j'avais ce livre sous le coude et j'attendais à chaque fois le bon moment pour le lire mais je ne sais pas si il y a réellement un moment approprié car je savais déjà plus oyu moins à quoi m'attendre et je pense que c'est cela que je redoutais. En effet, Eric-Emmanuel Schmitt retranscrit ici une superbe uchronie de l'histoire mondiale.
A travers l'histoire de deux hommes qui ne sont en réalité qu'un, Adolf H. et Hitler, l'un étant la part d'umanité qui se trouve en chacun de nous et l'autre, au contraire, son pire ennemi, à savoir un monstre démuni de sentiments et capable des pires choses qui soient sur cette terre.

Adolf H. est un jeune homme très humain qui a réussi son concours d'entrée à l'école des Beaux-Arts, qui s'épanouit au fur et à mesures autant dans ses relations amicales qu'amoureuses et, plus que tout, apprend l'amour altruiste, en prenant du plaisir à donner du plaisir aux autres. Cet homme va d'ailleurs en payer les frais puisqu'en ayant appris à aimer plus qu'à être aimé, il va également découvrir ce qu'est la souffrance, et notamment la souffrane de perdre un être proche.

En parallèle de cette histoire, le lecteur découvre celui qu'il croyait connaître au travers des abominables actes qu'il a commis lors de son arrivée à la tête du parti naziste en Allemagne mais il se rend également compte qu'il ignorait une grande partie de sa vie avant qu'il ne devienne cet homme-là. En tous cas, ce fut valable pour moi et je crois que c'est un peu pour cela que je remettais sans cesse à plus tard la lecture de ce livre car l'auteur nous démontre qu'il existe un Hitler enfoui au plus profond de nous, qui est la part la plus obscure de nous-mêmes et que, même si c'est un être que l'on exècre, il est suscepible de remonter à la surface.


Un roman bsoulument envoûtant et captivant, tantôt effrayant, tantôt attendrissant. L'écriture d'Eric-Emmanuel Schmitt fait parfois peur tellement elle réveille en nous des émotions fortes, soit en nous indignnant, soit en nous démontrant que nous avons rarement raison et que l'erreur peut parfois être dangereuse autant qu'elle peut être instructive. Un roman, certes, mais aussi une magnifique leçon d'histoire, de morale et de philosophie. Une merveille. A lire sans faute !
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Vienne. 8 octobre 1908.
Ach ! Tous ces crétins n'ont rien compris au talent révolutionnaire d'Adolf Hitler ! Recalé ! Recalé, lui ! Voilà ce qui arrive aux génies incompris de leur temps !
Son père est mort et son héritage l'attend… quand il sera majeur ! C'est pour dans cinq ans ! Mais d'ici-là comment va-t-il subsister ? Sa pauvre, sa chère mère est morte ! Foutu cancer du sein ! Et cette Tchèque, cette saleté de propriétaire qui lui réclame son loyer et qui menace de faire intervenir ses gros-bras de cousins pour le flanquer dehors…

Adolf H. est le plus heureux des hommes ! Il a été reçu à l'Académie des Beaux-Arts de Vienne ! Il va fêter cela avec tous ces jeunes gens qui, comme lui, ont été reçus. Leur joie est d'autant plus forte qu'ils savent que tous n'ont pas leur chance… Ni leur talent…

Critique :

Mais que diable Eric-Emmanuel Schmitt vient-il faire dans une uchronie ? Un chef-d'oeuvre ! Voilà, c'est dit !

Il est rare que je relise un livre vu la quantité d'autres qui s'offrent chaque jour au toucher de mes petits doigts boudinés. Mais voilà… Lu il y a plus de quinze ans, je ne m'en souvenais plus trop. La seule chose dont je me rappelais avec certitude c'était d'avoir grandement apprécié cette oeuvre, la première à me faire pénétrer dans le large univers d'Eric-Emmanuel Schmitt. En évacuant de vieux livres que je ne lirais plus, je tombe sur les pages jaunies de cette édition de poche. Bêtement, je commence à parcourir quelques pages… Une heure après étant toujours occupé, une évidence s'est imposée : j'avais vraiment envie de le relire.
Tout en connaissant la vie d'Adolf Hitler, et sachant que l'auteur prenait beaucoup de libertés avec sa biographie de ses jeunes années, j'ai une fois encore été séduit par le talent de Monsieur Schmitt à rendre vrai ces deux personnages puisque nous avons deux Adolf pour le prix d'un, le raté et le miraculé. Et l'on se prend à rêver de ce qu'aurait pu être le XXe siècle si en lieu et place d'un petit frustré à la longue mèche tombante et à l'ersatz de moustache, on avait eu un artiste découvrant, notamment, sa sexualité, grâce au bon docteur Bloch et à Sigmund Freud. Ce dernier l'ayant psychanalysé, Adolf H. a su comment approcher sexuellement les femmes et vaincre le terrible souvenir de son père.
Les pages consacrées à la guerre de 14-18 sont d'une cruelle véracité dans leur inhumaine abomination. Cette tragédie pour Adolf H. est une délectation pour Adolf Hitler, le raté frustré qui y trouve sa vraie raison de vivre alors que la mort ne cesse de prélever, d'une gourmandise insatiable, tout ce qui vit autour de lui, tout en l'épargnant, lui ! Dès lors, il est plus que jamais persuadé qu'un grand destin l'attend.
Après la Grande Guerre, Adolf H. part s'établir à Paris avec un ami peintre, le meilleur des endroits pour des peintres qui espèrent être reconnus, alors qu'Adolf Hitler, le timide, l'idiot incapable d'aligner deux mots en société, va se découvrir des talents de tribun populaire.

Le lecteur (ou la lectrice, je ne veux pas d'ennuis avec les féministes) va découvrir en parallèle la vie de ces deux Adolf, dont l'une est celle de celui que l'histoire du XXe siècle a retenu. Eric-Emmanuel Schmitt a bien maîtrisé les connaissances historiques et s'en sert à merveille pour nous restituer le personnage monstrueux incapable « de reconnaître la part de l'autre ». le grand écrivain donne une vie alternative à un Adolf H., homme pacifique, et foncièrement bon.

A quoi reconnaît-on un fabuleux auteur, un de ceux qui a du génie ? A sa propension à nous immerger dans un univers en redonnant vie à des personnages qui suscitent en nous des sentiments très forts, en rendant ses protagonistes vivants et proches de nous, en nous montrant qu'un événement peut à tout jamais changer la vie d'un homme, pour le mieux… ou pour le pire !

Des milliers de livres sont publiés en français chaque année, et nous ne savons où donner de la tête, mais n'hésitez pas à aller dénicher ce pur chef-d'oeuvre qui se lit avec les tripes, même s'il a pratiquement deux décennies au compteur. Un chef-d'oeuvre n'a pas d'âge et est immortel.
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Le tristement célèbre Adolf Hitler a été recalé aux Beaux Arts en 1908. Etant persuadé qu'il est un génie, le jeune homme persiste à croire qu'il a un avenir dans la peinture et à partir de ce jour ment à toutes les personnes qui l'entourent. Il n'a plus d'argent, vit dans la rue, arnaque qui il peut. Jusqu'à ce que la guerre éclate, à la fin de laquelle il a LA révélation antisémite qui a conduit au carnage sanguinaire et historique que nous connaissons bien. Mais que se serait-il passé si Adolf avait été accepté ? L'un après l'autre, nous suivons la vie de Hitler et celle d'Adolf H., nous suivons en parallèle le triste cours de l'Histoire et le cours surprenant de l'Hypothétique.

Eric-Emmanuel Schmitt collectionne les prix et ce n'est pas par hasard. Cet homme manie la plume avec une extrême habileté, fait des mots ses sujets, emploie toujours le rythme adéquat et pétrit avec amour le français comme une maman pétrit la pâte à gâteau de ses enfants chéris. Oui, je me suis sentie une lectrice comblée et surtout reconnaissante qu'un auteur français vivant écrive aussi bien ; rassurée qu'on nous propose autre chose de bien meilleure qualité que ces Levy, Musso, Pancol et autres auteurs à succès mais à la plume assez légère.
Schmitt nous embarque dans L Histoire, mais nous suggère la vie sans l'un des pires dictateurs paranoïaques que la Terre ait jamais porté. Non seulement c'est bien écrit, mais en plus les récits constamment mis en opposition sont parfaitement ficelés. Les pages s'avalent comme des petits cookies, on s'abreuve de connaissances. Pour ma part j'ignorais totalement certains aspects de la vie du Führer, comme par exemple son aversion pour les femmes, son amour de l'art (oui bon, là c'est un manque de culture, j'avoue), et surtout son antisémitisme déclaré "tardivement" par rapport à l'idée véhiculée dans nos écoles. Schmitt n'écrit pas à la légère, Schmitt fait des recherches. Tous les historiens ne semblent pas s'accorder sur ce fait mais on partage à la lecture cet avis que Hitler n'était justement pas antisémite avant la Première Guerre mondiale.
J'ai adoré l'insertion des personnages de Freud et surtout André Breton dans la vie de Adolf H. : je me suis sentie comme dans une bonne série, quand un épisode se termine sur un suspense ou une révélation croustillante ! J'ai regretté le personnage de Onze qui, malgré ce qu'aura été la vie de H., ralentit le récit quand celui de Hitler prend de l'ampleur.
On est surpris durant les 100 premières pages de voir Hitler défendre les Juifs. Il apparaît même plus sympathique que H.. Il est également fort intéressant et non conformiste de narrer la guerre du côté du pouvoir et pas du côté des victimes, un peu comme dans le film "La Chute", de Oliver Hirschbiegel. Sentir la froideur, l'indifférence catégorique et sans vergogne du maître des Aryens envers la souffrance et le désespoir transmet tout aussi bien mais d'un autre oeil l'horrible trace sanglante que cette guerre a laissée.
On n'attend qu'une chose, que Hitler meure, tout en se délectant des péroraisons que l'auteur lui attribue, de sa logique illogique et de sa haine déraisonnée.
La fin de la réalité alternée de Schmitt est quant à elle surprenante, mais tout à fait plausible à bien y réfléchir. Mais surtout, le mot de la fin revient à l'impression générale que laisse la lecture de ce bouquin : un rien peut changer une vie. Un rien peut changer des millions de vies.

Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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« Accepté !» L'histoire du monde dans ce qu'elle a de plus sombre aurait pu basculer sur ce simple mot sanctionnant l'entrée du jeune Adolph H à l'école des beaux-arts de Vienne , lui ouvrant ainsi le chemin d'une riche carrière d'artiste. « Recalé ! » c'est ce qu'entendra Adolph HITLER l'éloignant définitivement de ses ambitions artistiques. C'est le bourreau qui se révélera et taillera une plaie béante dans l'histoire de l'humanité.Eric-Emmanuel SCHMITT imagine la biographie de l'artiste Adolphe H en la confrontant chronologiquement à celle du dictateur. Dans cet exercice, déroutant, captivant, magistrale, il met en lumière la dualité de l'homme, son aptitude à la résilience et la fragilité de sa destinée. Une invitation à l'introspection.
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Bonjour Monsieur Schmitt,

Je n'ai jamais eu la chance de vous rencontrer. Toutefois, à chaque fois que je vous vois à la télévision, je me dis qu'il faut absolument qu'un jour je lise un de vos romans. En effet, à travers la petite lucarne, vous dégagez une telle gentillesse et un telle passion pour ce que vous faites, que cela donne envie de vous suivre.

Ce jour, dont je parlais plus haut, est enfin arrivé. Après avoir lu les excellents livres "La disparition de Josef Mengele" et "Au revoir là-haut", je me suis dit qu'autant continuer dans le même thème avec "La part de l'autre". D'autant plus que la couverture du livre avait attiré mon regard de lecteur/acheteur compulsif.

Je dois dire qu'une expérience malheureuse dans la lecture du même type d'uchronie avait légèrement refroidi mes ardeurs, je citerai "Le Maître du Haut Château" de Philip K. Dick. Je me suis malgré tout lancé dans la lecture de votre roman car l'idée même de départ me séduisait.

Et .... j'avoue que j'ai été totalement séduit par votre manière de traiter le sujet. J'ai dévoré votre livre en moins de 3 jours tant j'avais envie d'en apprendre plus sur la vrai vie de Hitler ainsi que sur la manière dont vous voyiez celle de Adolf H..

Un grand moment de lecture en ce qui me concerne. Maintenant, je suis façe à un terrible dilemme. Dois-je me lancer dans la lecture d'un autre de vos romans, au risque d'être déçu?

J'en appelle à la gentillesse ainsi qu'à la connaissance littéraire de mes amis Babeliottes afin de me conseiller un autre de vos livres. Un tout grand merci à tous par avance.
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