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4,02

sur 5036 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Mini-trilogie Luis Sepúlveda
Biographie romancée : Un nom de torero (1994)
Conte pour enfants : Histoire d'une mouette et du chat qui lui apprit à voler (1996)
Son chef d'oeuvre : le vieux qui lisait des romans d'amour (1989 VO) (1992 version française)

Luis Sepúlveda passe de torero à papa, et ici au grand romancier vendu à des millions d'exemplaires et traduit en trente-cinq langues.

Le vieux qui lisait des romans d'amour est un plaidoyer pour la sauvegarde de la planète. Il est dédié à son ami Chico Mendes, le défenseur de la forêt amazonienne, « l'une des figures les plus illustres et les plus conséquentes du mouvement écologique universel », qui est mort sauvagement assassiné le 22 décembre 1988, presqu'en même temps que Luis Sepúlveda finissait son écriture. Il est dédié aussi à un autre de ses amis, Miguel Tzenke, un autre défenseur de la forêt amazonienne, syndic shuar de Shumbi dans le haut Nangaritza.

Ce roman tient sa source d'un programme d'étude pour l'UNESCO visant à étudier l'impact de la colonisation sur les indiens Shuars, auquel Luis Sepúlveda a participé pendant un an, en 1978.

Antonio José Bolívar, le « vieux », est un vieux qui vit à « El Idilio », contrée reculée en Amazonie équatoriale, très peu peuplée, reliée au monde par un bateau le « Sucre » qui vient les ravitailler deux fois l'an.

L'histoire démarre avec un dentiste barbare fraichement débarqué du « Sucre », qui arrache les dents à mains nues, en pratiquant une « étrange anesthésie verbale pour atténuer les douleurs de ses clients », en vitupérant contre le gouvernement ou en martelant : « tais-toi si t'es un homme ! ».

Cette scène est interrompue par l'arrivée du cadavre d'un gringo. le maire surnommé « limace », soutient qu'il a été tué par les Shuars d'un coup de machette mais le « vieux » prouve le contraire en faisant remarquer plusieurs griffures.

C'est le fait d'une « tigrilla » qui s'est vengée parce que le gringo avait tué sa portée. le « Vieux » alerte sur le danger : « Une femelle folle de douleur est plus dangereuse que vingt assassins réunis ».

Le fil rouge c'est la chasse à la « tigrilla », mais le vrai sujet c'est la dénonciation de la raison d'état et de la stupidité criminelle des gringos : « Saloperie de gringo ! Regardez les peaux. Toutes petites, inutilisables ». C'est aussi une ode à la nature et aux Shuars.

Le « vieux » est un déraciné qui aurait voulu devenir Shuar. Sa vie est une suite de malheurs dans un monde dévasté. Mais, il fait contre mauvaise fortune bon coeur. Il a trouvé l'antidote, en toutes circonstances, il lit des romans d'amour.

@Fulmar dans son sublime billet, que je vous invite à consulter (je mets le lien en fin de critique) -, rend bien hommage à la beauté de ce livre – certainement qu'il est plus près de la nature que moi - : « Il serait possible d'en tirer des citations du début à la fin, tellement ça fourmille d'images pour exprimer ce qu'est le blues, celui des tribus dépossédées de leurs terres et celui du vieux qui aimerait pouvoir changer les choses avant de disparaître ». C'est @Fulmar qui m'a alertée sur deux non-sens : Luis Sepúlveda qualifie de "rongeur" les chauves-souris ; le tigre sur la couverture de la version française alors qu'il n'y a pas de tigres en Amazonie – dans la VO on voit bien un "tigrillo” (jaguar ou chat sauvage…) avec des points noirs sur la fourrure et non des traits -.

Le vieux qui lisait des romans d'amour est tellement riche que je le prends sur mon ile déserte pour le relire. Il n'est pas exclu que je complète ou modifie ce billet.

Ce n'est pas facile de chroniquer un livre qu'on a adoré, difficile de communiquer un grand bonheur de lecture. Je vous exhorte à le lire, à en faire un retour pour partager le plaisir d'en parler ensemble.
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Voilà une couverture bien attrayante ! Les couleurs de Broomfield, ça attire l'oeil. Mais l'oeil du tigre en pleine Amazonie, peu de chance d'en ressortir « survivor », y a comme une anomalie.
Oui, OK, la jaguar a un tigre dans son moteur, mais là, c'est un vieux, pas comme la cougar, si vous voyez c' que j'veux dire…
Un vieux, la sagesse et l'expérience, deux qualités indispensables pour survivre en pleine jungle, dans ce milieu hostile et oppressant.

« Le ciel était une panse d'âne gonflée qui pendait très bas, menaçante, au dessus des têtes. le vent tiède et poisseux balayait les feuilles éparses et secouait violemment les bananiers rachitiques qui ornaient la façade de la mairie ».

L'histoire se passe à El Idilio, joyeuse idylle, où les mots d'amour sont prononcés dans les romans. Pas de discours romantiques chez les Shuars, juste des attouchements, mais en évitant le baiser buccal, sacri-lèse majesté.

« Il existe chez eux, entre hommes et femmes, des caresses sur tout le corps, sans se préoccuper de la présence de tiers. Même quand ils font l'amour, ils ne se donnent pas de baisers ».

Un chasseur blanc se fait tuer, dur à digérer, même pour un colon. Evidemment, on accuse les Indiens, les Shuars, pas les Jivaros, ces sauvages dégénérés qui acceptent la soumission.
C'est là qu'Antonio intervient, sa mission à lui, c'est de découvrir la vérité, car une griffe de machette, ça fait pas très sérieux. Y a les traces de griffures, mais il y a aussi l'odeur, pas de l'essence, de l'urine, car la jaguar a laissé son empreinte, tout autant olfactive que visuelle. Sa manière à elle de marquer son territoire, pour alerter sa tribu, elle, bolide carnivore qui ne veut juste que sauver sa famille, les super prédateurs qui règnent en maîtres dans la forêt amazonienne.
Le bruit et l'odeur, on n'est plus chez nous. le bruit c'est les singes hurleurs et les perroquets criailleurs, l'odeur c'est la trace invisible aux yeux des humains, mais pas pour les autochtones qui ont tous leurs sens en éveil.
C'est aussi celle de bouches qui ont une dent contre l'hygiène, et la puanteur qui s'en dégage révèle le temps d'attente du quenottier.

« La venue du dentiste était accueillie avec soulagement, surtout par les rescapés de la malaria, fatigués de cracher les débris de leur dentition et désireux d'avoir la bouche nette de chicots afin de pouvoir essayer l'un des dentiers étalés sur un petit tapis violet qui évoquait indiscutablement la pourpre cardinalice ».

Chicots, oui, mais également Chico, allusion à Mendes, le défenseur de la forêt amazonienne, que Luis Sepulveda a bien connu, mais qui n'aura pas eu assez de temps pour découvrir ce bouquin. Ce premier roman de l'écrivain chilien est un hommage au héros écologiste assassiné par des destructeurs de milieu naturel. Les lanceurs d'alerte paient le prix de leur combat, inégal face aux lobbies tentaculaires.

Juste une centaine de pages pour transcrire l'immensité du paysage. Pas de longueurs superflues, un condensé qui va à l'essentiel, une minutie dans les détails et une histoire qui progresse comme l'avancée dans la jungle, à coups de machette.
Conte, récit initiatique, quête, poème épique, c'est tout à la fois.
Une narration qui alterne le récit, les descriptions et les dialogues avec un dosage parfait. J'ai été happé par l'aventure, elle m'a entraîné jusqu'au bout de la tragédie, sans aucun ennui, mais avec une jubilation contenue, pour ne pas apeurer les habitants de ces lieux.
Il serait possible d'en tirer des citations du début à la fin, tellement ça fourmille d'images pour exprimer ce qu'est le blues, celui des tribus dépossédées de leurs terres et celui du vieux qui aimerait pouvoir changer les choses avant de disparaître.
Histoire de pouvoir transmettre son jardin secret, découvert lors d'un vote où il fallait bien distinguer les candidats écrits sur les bulletins.

« Il savait lire. Ce fut la découverte la plus importante de sa vie. Il savait lire. Il possédait l'antidote contre le redoutable venin de la vieillesse ».

Alors il se servit de ce « pouvoir » pour résister à la barbarie, pour s'échapper de ce monde cruel et vil. En lisant des romans d'amour.

« C'était l'amour pur, sans autre finalité que l'amour pour l'amour. Sans possession et sans jalousie ».

Les livres lus s'accumulent dans sa tête, mais le nombre de cadavres augmente lui aussi. Pas seulement dûs aux jaguars, les prédateurs sont nombreux dans la jungle. Il y a le « Bagre guacamayo », l'énorme silure-perroquet. Il veut jouer, mais ses coups de queue peuvent être fatals.
Il y a aussi l'attaque au guano, lorsque les chauve-souris sont dérangées en pleine nuit.

« Vous leur avez fait peur avec votre lampe et vos cris, alors elles se sont envolées en nous chiant dessus. Elles sont très sensibles, comme tous les rongeurs et, au moindre signe de danger, elles lâchent tout ce qu'elles ont dans le ventre pour s'alléger ».

Alors là, je dis non, senor Sepulveda, je suis rongé par la honte de vous lire à ce sujet. Je ne puis guère sourire, car je ne suis pas encore chauve. Ces petits mammifères ailés ont des dents de carnassiers, ce ne sont pas des rongeurs.
A moins que ce ne fut François Maspero, un peu gauche dans sa traduction, qui se trompa d'animal.
Après le tigre, deuxième bourde faunique, heureusement les animaux n'en eurent cure et continuèrent leur vie tranquille.
Tranquille, leur vie ?

« En face de lui, quelque chose se mouvait dans l'air, dans la végétation, à la surface des eaux tranquilles, au fond même du fleuve. Une chose qui semblait avoir toutes les formes et se nourrir en même temps d'elles. Elle changeait constamment sans laisser aux yeux hallucinés le temps de s'accoutumer. Elle prenait brusquement l'apparence d'un ara, puis passait à celle d'un silure-perroquet qui sautait la gueule ouverte, avalait la lune et retombait dans l'eau avec la violence d'un gypaète fondant sur un homme. Cette chose n'avait aucune forme définie, précise, mais toujours, quelles que soient les apparences qu'elle prenait, demeuraient les yeux jaunes et brillants ».

Des mots qui explosent en bouche comme des  pop rocks. Une étrange sensation d'euphorie teintée de romantisme.
L'amour au coeur de la jungle. Frissons garantis.

Une bien agréable façon de terminer le mois.
Je vais pouvoir démarrer octobre sereinement.







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Où il est question d'un dentiste, d'un maire détestable et d'un vieux, Antonio José Bolivar, qui, au déclin de sa vie, est pourtant celui qui semble le plus à même de lutter contre un félin tueur d'homme dans un village reculé d'Amazonie.
L'auteur nous entraîne dans un pays qu'il connaît bien. Son héros a découvert les secrets de cette forêt grâce aux Shuars, un peuple autochtone. Depuis qu'il est retourné à une vie plus citadine (même s'il vit en retrait), il affronte la vieillesse grâce à la lecture de romans, et pas n'importe lesquels...

Ce court roman nous rassasie tant il est dense.


Un petit bijou
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Suite à la lecture de Histoire d'une baleine blanche de Luis Sepulveda, j'ai continué sur ma lancée en lisant son premier roman le vieux qui lisait des romans d'amour
Tout à déjà était dit sur ce roman.
En le lisant, j'ai retrouvé l'Amazonie des mythes et des légendes, j'ai retrouvé la nature et des lieux fantasmés.
Tous les personnages sont là : les Indiens Shuars, le vieux Bolivar qui a vécu avec les Shuars, les chercheurs d'or, les bons et les méchants, la flore, la pluie, la moiteur tropicale et puis les animaux et le jaguar.
Ce jaguar que respecte les légendes et mythes Shuars mais pas le chercheur d'or ou le chasseur.
Et un chasseur à tué les petits du jaguar. Celui ci rôde.
Du fait de sa connaissance de la forêt Bolivar est mandaté pour protéger le village et tuer le jaguar.
Le vieux va laisser ces romans d'amour et va poursuivre l'animal.
C'est court mais tout est là : la nature, la légende, la cupidité des hommes.
C'est un livre d'émotion, de larmes mais aussi de rêves
"Antonio José Bolivar prit la direction de sa cabane et de ses romans qui parlaient d'amour avec des mots si beaux que, parfois, ils lui faisaient oublier la barbarie des hommes"
Lien : https://auxventsdesmots.word..
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Voilà un voyage en Amazonie que je n'imaginais même pas.
Une aventure amoureuse où l'amour n'est pas celui qu'on croit.
Une poésie chaude et chantante pour un combat vibrant et droit.
Voilà un conte bien sage, bien noir, bien drôle, ou pas.

Une belle plume qui conte une petite tranche de vie.
Un rythme lent et soutenu pourtant, un rythme de vie.
Des syllabes, des mots, des phrases, savourés,
Des lectures, des romans, précieusement gardés.

Un personnage attachant au dentier bien mobile.
Une jungle colorée, sauvage, brutale et dangereuse.
Une société partagée, l'une méprisante l'autre heureuse.
Eh oui, lire des livres d'amour, c'est pas si débile.

A la lecture de ce roman, j'ai envié un peu le personnage principal qui découvre sur le tard qu'il sait lire. Et quand il lit, c'est lent, c'est un éternel recommencement, un cheminement des mots lus l'un après l'autre, un assemblage de mots pour former des phrases qui ont un sens que l'on déguste et ce, jusqu'à connaître les pages par coeur.

Moi, pour le coup, je suis plutôt une boulimique qui parfois avale en oubliant de savourer les mots, un peu triste mais bon, il y a tellement de belles choses à lire ;-)
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Il est des livres comme de nos contemporains dès le premier instant on tombe en amour. le philtre sentimental d'une écriture limpide nous emporte dans une contrée picaresque de l'Equateur où "el viejo" prend savoureusement vie. L'histoire est le témoignage haut en couleurs d'un monde disparaissant sous les coups de boutoir de la modernité et la plénitude que nous offre l'amour de la lecture, de la nature, et des animaux.
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Une plongée moite en plein coeur de la forêt amazonienne où les sensations sont exacerbées et remarquablement décrites par les yeux de ce vieux, dont on découvre le passé aventurier et le présent rêveur, empli d'histoires d'amour torturées et d'hommes durs et tranchants. Entre nature hostile, sauvage et profonde réflexion sur la sauvagerie humaine, l'auteur nous offre ici une très belle ode poétique à la Majestueuse Nature sylvestre des tropiques.
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Merveilleux petit conte qui nous plonge dans les forêts et les petits villages d'Amazonie au milieu des indiens, des chercheurs d'or et des arracheurs de dents.
Les personnages sont truculents en commençant par Antonio José Bolivar, héros peu ordinaire.
Et l'amour arrive par un chemin plutôt imprévu, une belle leçon de vie et de mort!
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Ce livre fut un coup de coeur! Je me souviens: du moment où je l'ai ouvert , je n'ai pu le lâcher. Je l'ai lu en faisant la queue à la librairie, repris dès la sortie et je me suis installée à la terrasse du premier bistrot que j'ai trouvé sur ma route, pour le finir! Une histoire simple, pleine de rêves, de simplicité, d'humilité; un conte qui parle d'humanité...
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Un très beau et court roman, qui se lit d'une traite. Etant donné la profondeur des descriptions, qui permettent de se projeter comme si l'on "regardait" le livre, et l'intensité de la réflexion soulevée par la lecture de cette fable écologique, on peut affirmer que ce n'est pas l'épaisseur d'un livre qui en fait sa qualité. Mention spéciale aux personnages, qui sont tous travaillés avec soin, tantôt taiseux, tantôt comiques, on ne se lasse pas de les suivre évoluer dans cette jungle humide et inhospitalière, qui n'accueille bien que l'homme qui s'adapte à elle.
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