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sur 329 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Quel livre! Je devrais dire quels livres! puisqu'on lit 2 narrations, une, censée se dérouler dans la Grèce antique et l'autre étant un commentaire du traducteur traduisant cette oeuvre. Les deux narrations se font parallèlement d'abord, puis, de plus en plus, un système de miroirs et d'échos se met en place et finalement on se retrouve avec une seule et unique oeuvre, OVNI, à la fois roman policier et historique, philosophique et réflexion sur l'acte de création. Prenant, intelligent, ce roman est à coup sûr est des plus belles surprises parmi mes récentes lectures.
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La Caverne des Idées est un manuscrit racontant l'investigation policière d'Héraclès Pontor, le Déchiffreur d'Enigmes et de Diagoras le philosophe, mentor à l'Académie de Platon. le meurtre d'un éphèbe a réuni les 2 hommes épris de vérité.L'esprit rationnel de l'un et le plato- nicisme de l'autre vont éclairer un bien nébuleux mystère.Mais le tra- ducteur du manuscrit a lui aussi un grand mystère à résoudre,celui de découvrir le sens caché du texte et son écho dans sa propre existence.
La façon dont Somoza construit cet étourdissant édifice fictionnel est proprement époustouflante et c'est avec délectation que le lecteur pénètre l'univers de cet auteur de génie où s'entrecroisent tout ce qui définit la littérature: intrigue,suspense, réflexion philosophique, interprétation du texte (la fameuse "édéisis").Avec la même frénésie que le personnage du traducteur, on s'ingénie à chercher,déchiffrer, deviner jusqu'à douter de notre propre réalité, captivé, envoûté...épris !
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Dans ce roman, très souvent qualifié de roman policier atypique, Somoza plonge ses lecteurs dans le travail d'écriture et dans son approche de la traduction littéraire, le tout dans une enquête à quatre mains et une narration à plusieurs niveaux. du genre policier, nous avons les cadavres, étrangement mutilés, de trois éphèbes et d'un vieil esclave pédagogue et les investigations menées par un philosophe platonicien et un déchiffreur d'énigme ; mais nous lisons en fait un très vieux texte datant de la Grèce antique, déjà traduit et édité à partir du papyrus originel, qu'un troisième narrateur commente au fur et à mesure qu'il le traduit à son tour. Et peu à peu, les intrigues se mêlent avec la mort mystérieuse du premier traducteur et les péripéties que vit le second… tout en traduisant. En fait, ce n'est pas tout à fait ça, mais je ne veux pas trop divulguer le dénouement…
Tenez-vous surtout pour prévenus qu'il ne faut pas faire l'impasse des notes de bas de page !!!

C'est dans La Caverne des idées que Somoza invente la technique littéraire dite « eidesis » ; selon lui, l' « eidesis » permettrait de transmettre des clés ou des messages secrets dans les oeuvres, en répétant des mots ou des métaphores qui, reconnues par les lecteurs avertis, livreraient un message indépendant du texte originel. le texte est donc riche en images, détails, isotopies ou changement de rythme superflus et déstabilisants ; à noter également les fils conducteurs (ou perturbateurs) des douze travaux d'Hercule et de la jeune fille au lys…
Nous suivons le travail laborieux du traducteur, à la fois narrateur secondaire et personnage à part entière, dans ses doutes, ses hésitations, ses avancées et ses réflexions. le traducteur se fait double du déchiffreur d'énigmes et du philosophe platonicien, convaincu qu'il a « quelque chose des deux personnages » : il est à la fois méticuleux et sensible à la beauté, passionné même. Mais ce n'est pas l'enquête proprement dite qui l'intéresse : il veut résoudre l'énigme eidétique du texte. Ses notes évoluent en une deuxième narration de plus en plus personnelle : de simples précisions, elles deviennent des commentaires de texte, des dialogues avec ses collaborateurs, des tranches de vie.

Dans le texte d'origine, deux courants de pensée s'affrontent ; le déchiffreur d'énigme part toujours des éléments matériels, ne croit que ce qu'il voit et sa méthode est déductive. Ce n'est pas pour rien qu'il s'appelle Héraclès Pontor, nom à la sonorité bien proche d'Hercule Poirot. Il croit plus en l'intelligence qu'en la vertu (au sens antique de qualités morales essentielles, tant dans la vie quotidienne que dans le discours, forme d'excellence et de réalisation du plein potentiel : aretê en grec). Il sait prendre de la distance et rester insensible et pragmatique face aux évènements.
Diagoras de Medonte, son binôme - et employeur - est un philosophe platonicien qui croit au pouvoir de la pensée, corollaire d'une vérité éternelle à rechercher par-delà les inexactitudes et les imperfections de toute science déjà mise en oeuvre.
Naturellement, La Caverne des idées de Somoza possède une intertextualité voisine de l'allégorie de la caverne, développé par Platon dans le livre VII de la République. Ce dernier est d'ailleurs mis en scène dans le roman.

Tout se complique quand le texte original et sa traduction se dédoublent (fameux chapitres VIII en miroir) et quand le livre interpelle directement le Traducteur (avec un T majuscule) avec des « sauts à la deuxième personne » : « ils te regardaient toi ». Il y est question d'un papyrus original décrit comme le récit d'actions et de pensées chargées d'un sens occulte : les vies des personnages ont une signification qui leur échappe mais que le Traducteur décrypte au fur et à mesure : à la fin du texte, seul le Traducteur devrait atteindre à la compréhension ultime… le secret du texte est-il dans les personnages, dans les descriptions, dans les métaphores ? Les idées cachées dans le texte ont-elles une existence propre ?
Le déchiffreur d'énigmes Héraclès Pontor se présente aussi comme un traducteur quand il est confronté aux meurtres énigmatiques : « c'est la partie du texte que je n'ai pas encore traduite, Diagoras… Bien que je puisse t'assurer, modestement, que je ne suis pas un mauvais traducteur ».
Le Traducteur réalise qu'il fait partie du texte qu'il est en train de traduire : d'abord, ce ne sont que des coïncidences mais qui deviennent de plus en plus troublantes, surtout quand un sculpteur présent dans le livre réalise une oeuvre qui est son portrait fidèle et qu'il se retrouve en train de faire l'amour avec une hétaïre et qu'il « [sent] venir un plaisir étrange, asservissant ». Comment faire la part de la réalité et de la « présomption de tous les lecteurs » qui s'identifient à ce qu'il lisent ? Puis, il apprend que le premier traducteur a perdu la raison et qu'il est mort comme le premier éphèbe du livre. Enfin, il se sent épié, puis il est kidnappé et séquestré dans une cellule spartiate par un personnage qui veut qu'on le nomme Anonyme et qui lui intime l'ordre de continuer et terminer sa traduction…

Lire La Caverne des idées est donc l'occasion de réfléchir aux enjeux de la traduction littéraire d'un texte ancien : comment respecter l'esprit du texte original ? Peut-on ou pas améliorer le texte original pour coller aux normes contemporaines ou l'adapter pour qu'il plaise à un lectorat étranger ? A-t-on le droit de couper le texte, de combler les vides dus aux détériorations, d'enlever le côté vieillot, de gommer l'historicité et les marques textuelles qui renvoient au caractère ancien du texte ? Comment mettre en valeur l'originalité et la littérarité du texte ? Ainsi que le souligne Anonyme, «les mots ne sont qu'un ensemble de symboles qui s'accommodent toujours à notre goût ». le traducteur se fait interprète, chasseur d'intertextualité.
Il y aurait aussi d'autres clés de lecture en matière de linguistique. En effet, un texte est identifiable parce qu'on peut le pourvoir de signes, d'indices qui, même s'ils apparaissent chez d'autres auteurs, n'en sont pas moins caractéristiques. Je ne suis pas assez qualifiée pour aller très loin dans une étude de la Caverne des idées en me penchant sur des notions telles que « référent » ou « signifié » ou encore « isotopie » : je laisse cela à des spécialistes de syntaxe et linguistique, mais je sens qu'il a y quelque chose à creuser dans ces domaines-là aussi.

Je ne peux que recommander ce roman… Pour ma part, une claque littéraire !!! Vous savez, quand on reste figé sur un « whoua ! » en ayant tourné la dernière page…
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Ce livre diablement intelligent présente à la fois une intrigue policière dans l'Athènes classique de l'Antiquité, une dissertation érudite sur le mythe platonicien de la caverne et des idées ainsi qu'une éclairante description de l'"eidesis" ce procédé littéraire utilisé par les auteurs grecs pour transmettre des clés et des messages secrets à travers leurs oeuvres, répétant des métaphores qui, isolées de leur contexte, forment une idée ou une image indépendante du texte original.
Tout commence par la découverte du cadavre d'un jeune homme dévoré par les loups après une partie de chasse solitaire sur le Mont Lycabette.
Diagoras, son professeur à l'Académie, doute que sa mort soit due à des causes naturelles et engage Héraclès, le déchiffreur d'énigmes, lointain ancêtre du sagace détective Hercule Poirot, pour faire la lumière sur les circonstances du décès.
Alors que l'enquête des deux hommes progresse peu à peu, une nouvelle victime est découverte...
Somoza utilise sa parfaite connaissance de l'Antiquité grecque pour donner à son récit une saveur extraordinaire, plongeant le lecteur dans la vie quotidienne athénienne à un moment où la Cité naguère conquérante et invincible au temps de Périclès, a connu la défaite et vit dans l'amertume de la décadence.
Présenté comme un texte antique traduit une première fois par un intellectuel excentrique prématurément disparu, le roman antique "La caverne des idées" est confié à un nouveau traducteur qui va connaître bien des déboires, le mystère du texte traduit, renvoyant à une intrigue bien contemporaine qui fait aussi la part belle au danger ...
Avec la découverte des métaphores cachées dans le texte, qui illustrent les célèbres "travaux d'Hercule", le traducteur vivra une aventure personnelle hors du commun qu'il fera partager au lecteur par les notes en bas de page.
Une chute brillante pour cette histoire qui ne l'est pas moins et qui ne peut que donner envie de retourner à ses chères études et de se plonger à nouveau dans l' héritage antique qui structure encore la pensée aujourd'hui.
Somoza a vraiment réalisé un tour de force hors du commun en alliant avec maestria l'intrigue policière classique à la réflexion philosophique.
Une lecture absolument jubilatoire !
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La Caverna de las Ideas
Traduction : Marianne Millon


Voici un auteur dont, à notre humble avis, on ne parle pas assez. Dans la majeure partie de ses romans, pour autant que nous avons pu en juger, il y a toujours un assassinat ou à tout le moins une énigme mais l'enquête, qu'elle soit menée par une autorité régulière ou par des amateurs, amène peu à peu le lecteur à découvrir un thème qui n'a rien à voir avec le genre policier.

"La Caverne des Idées" constitue une démonstration parfaite de ce que nous venons d'avancer.

L'action se situe dans la Grèce antique, plus précisément à Athènes, Athènes où Platon enseigne encore dans sa célèbre Académie - nous nous trouvons donc à peu près au IVème siècle avant J. C. L'un des élèves, Tramaque, est retrouvé mort en forêt, apparemment déchiré par les loups. Mais Héraclès Pontor, le Déchiffreur d'Enigmes de la ville, désormais assez célèbre pour ne plus se contenter de résoudre les énigmes que viennent lui rapporter les visiteurs de la Pythie ou d'autres oracles fameux, ne partage pas l'avis général : pour lui, Tramaque a été assassiné. Et lorsque Diagoras, le mentor de Tramaque à l'Académie, également insatisfait des conclusions de l'enquête, lui propose de dissiper les ombres qui entourent le décès de son ancien élève, Héraclès accepte.

Le lecteur se prend très vite au jeu. Fasciné, avide de connaître la clef de cette mort et de celles qui vont la suivre, il lui devient difficile de s'arracher à ces pages qui se révèlent de plus en plus complexes. Pourtant, dès le départ, Somoza a pris le risque de le déstabiliser ou d'égarer son attention. En effet, il nous présente d'un côté le récit intitulé "La Caverne des Idées" comme une histoire arrachée au grec ancien par un traducteur aussi érudit qu'anonyme. Et de l'autre, nous lisons les annotations du Traducteur : hanté par sa propre recherche des images eidétiques* cachées dans le texte, il commence par découvrir çà et là des phrases menant aux Douze Travaux d'Hercule ("Héraclès" en grec), puis constate avec surprise - et aussi avec une peur qui va croissant - que le texte qu'il traduit paraît l'apostropher directement ...

Cette mise en abyme, véritable clef de l'oeuvre et dont le lecteur suit avec passion les développements successifs, trouve son enchâssement final dans l'épilogue de "La Caverne des Idées", épilogue où se révèle enfin l'identité de l'auteur du texte grec. Car lui aussi était jusque là demeuré anonyme - ou plutôt le lecteur le connaissait sans le savoir.

Les deux intrigues parallèles - celle dont Héraclès est le héros et celle où le Traducteur prend en quelque sorte sa place - sont menées avec une rare maestria. C'est un jeu de miroirs, de reflets et de mirages parmi lesquels la Vérité apparaît pourtant bel et bien - un peu plus loin que le milieu du roman - mais sans que, chose pourtant si habituelle, nous la reconnaissions comme telle. C'est un jeu qui absorbe, qui entête - c'est un jeu qui laisse pantois et ravi.

Attention : "La Caverne des Idées" n'est pas un livre à entamer si vous risquez d'être souvent dérangé dans votre lecture. En dépit d'un style simple, plus classique que dans les autres romans de Somoza, sans doute en raison du contexte Antiquité/Athènes, en dépit aussi de la grande fluidité avec laquelle l'auteur manie ses marionnettes, leurs discours et leurs idées, cela reste un livre exigeant qu'on ne peut lire sans s'interroger sur toutes sortes de choses : l'apparence et la réalité bien sûr mais aussi l'idée et les mots, l'action et la réflexion - voire le fanatisme. Enfin, cette "Caverne des Idées" est une critique fine, réfléchie et non dépourvue de malice non de la philosophie mais de certains philosophes et de leurs excès.

Courez vous procurer ce livre, lisez-le et revenez donc nous dire s'il vous a ébloui autant que nous.

* : l'eidesis est un procédé littéraire inventé par Somoza pour les besoins de son livre mais que le Traducteur déclare être une pratique assez courante dans la littérature grecque antique. Cette technique consiste pour un auteur à transmettre des clefs ou des messages secrets dans ses oeuvres - de fiction ou non - en y répétant des métaphores ou des mots qui, repris et isolés par le lecteur averti, donneraient une image - et une idée - indépendante du texte originel et n'ayant probablement rien à voir avec le sujet de celui-ci.
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C'est par ce roman que j'ai découvert Somoza et que j'ai lu la plupart de ses autres oeuvres dont aucune ne m'a decu , sauf la clef de l'abîme.
On suit l'enquête d'Héraclès Pontor avec un intérêt qui ne se dément jamais.
Lire ce polar antique et plein d'érudition est un véritable plaisir.
A lire et à relire.
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Il s'agit du deuxième livre que je lis de cet auteur espagnol, Somoza, dont la formation de psychiatre contribue sans aucun doute à l'élaboration de récits aussi timbrés que leur auteur. Ce livre à la lecture assez complexe se révèle malsain et surprenant, et nous emmène dans des histoires parallèles reliées par un graphe relevant du jeu littéraire et de l'énigme, voire de la joute. On en ressort avec une perte d'équilibre doublée de quelques interrogations sur les substances dont l'auteur se sert pour sa rédaction. Lecture sympathique et technique parfaitement à mon goût.
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Dans l'Athènes de Platon, dont l'Académie fleurit, un des disciples est assassiné. Diagoras, son mentor, fait appel aux talents du Déchiffreur d'Enigmes, Héraklès, pour comprendre comment ce jeune homme a pu s'éloigner et se faire déchiqueter par les loups. Héraklès voit immédiatement que les loups ne sont pas la cause du décès. Un autre jeune Académicien décède, soi-disant de ses auto-mutilations, sous l'effet de l'ivresse, et la piste commence à se préciser...

En réalité, il y a une polyphonie dans le roman. le Déchiffreur, c'est Héraklès, c'est aussi le traducteur du roman de Polytexte de Chersonèse (?!), qui ne cesse de faire des notes sur différents passages, raconte sa perplexité, les phénomènes étranges qu'il observe soit dans sa traduction, soit dans le travail du traducteur qui l'a précédé, Montalo, et qui est mort... dans les mêmes circonstances qu'un des personnages... Il a le sentiment que quelqu'un se joue de lui et lui donne à traduire des pages qui ne sont pas originales... de plus, il s'étonne de trouver des passages eidétiques (mélanges de métaphores et d'allégories) liés aux travaux d'Hercule... En réalité, le roman se lit comme un hiéroglyphe égyptien, avec trois sens : littéral, figuré et spirituel ! Mais c'est dans les théories de Platon autant que dans la littérature qu'il faut chercher une clé de lecture. C'est passionnant, un régal !

Pour l'helléniste que je suis, les noms propres sont très bizarres, pour la plupart, mais je me suis obligée à n'en pas tenir compte.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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L'histoire commence comme une intrigue policière au temps de Platon : un éphèbe est retrouvé mort dans les rues d'Athènes. Sa mort, annoncée comme l'oeuvre des loups, laisse son mentor perplexe. Celui-ci fait alors appel à Héraclès Pontor, celui que l'on nomme le Déchiffreur d'Énigmes - sorte de Sherlock Holmes des temps anciens – pour découvrir ce qui est véritablement arrivé au mort. Car les indices ne trompent pas le fin limier : il s'agit bien d'un meurtre.

Mais déjà, quelques notes en bas de page nous indiquent que cette intrigue policière est un récit ancien en cours de traduction. le traducteur nous indique que les premières lignes du texte sont manquantes, et on comprend alors qu'il découvre l'histoire du récit en même temps que nous-mêmes. La tentation peut être grande d'ignorer ces quelques notes en bas de page : grave erreur ! Celles-ci font partie intégrante du roman et vont prendre de l'ampleur au fur et à mesure de l'histoire. Car c'est bien là toute l'originalité du livre : il nous offre deux histoires en une.

Mais qu'est-ce qu'il raconte ? me direz-vous. Patience, je m'explique : le traducteur, alors qu'il progresse dans le récit (et que l'on progresse avec lui), pense découvrir dans l'histoire… une eidesis !
Une quoi ???
Une eidesis ! Allez, bonne âme que je suis, je vous l'explique (je peux faire mon malin, j'ai lu le bouquin et apprit ce qu'était une eidesis) : il s'agit d'un message caché dans un texte. Certains mots peuvent ainsi détonner par rapport au reste du texte et attirer l'attention du lecteur. Ces quelques mots formeront alors un message caché à l'intérieur du texte original. On peut par exemple proclamer son amour pour quelqu'un au sein d'un texte décrivant la beauté de la nature. Une personne non-initiée ou inattentive passera alors à côté du véritable message véhiculé par le texte.

Voilà donc que le traducteur pense découvrir une eidesis au sein de l'enquête menée par Héraclès. le voilà devenu enquêteur à son tour. Il travaille pour découvrir le sens caché de ce texte, il travaille dur, dans la solitude de son bureau, sa caverne à lui, et peu à peu… il croit se retrouver lui-même dans l'eidesis. C'est bien de lui qu'il s'agit, se persuade-t-il, c'est bien de sa vie dont on parle, c'est lui-même qui prend vie dans ce récit. La peur le paralyse, la tension monte, mais c'est déjà trop tard, il veut savoir si ce texte le mènera au bord de la folie ou s'il trouvera des réponses.

Vous l'aurez compris, « La caverne des idées » est bien plus qu'un simple polar. Les divers niveaux de lecture forment un tout cohérent et terriblement efficace. Les deux histoires – imbriquées l'une dans l'autre – sont passionnantes. Ce livre nous permet de nous plonger dans l'époque de la Grèce antique, des temples, des éphèbes aux corps de dieux, des affrontements entre les différentes écoles philosophiques… Un livre difficile à résumer, mais à conseiller. Précisons que l'auteur est psychiatre. Cela n'a sans doute rien à voir, mais quand on voit l'ampleur du roman, on ne peut pas ne pas y songer ;-)

Lien : http://lukesblog.fr/2010/05/..
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Vous êtes nombreux à avoir lu ce splendide roman avant moi (qui l'avais mis dans ma Pàl parmi les tous premiers ouvrages). Toutes vos notes en mettent en exergue des aspects assez différents, et, étrangement, je me sens prêt à souscrire à pratiquement chacun de vos propos et commentaires. {Le Traducteur y trouverait donc autant d'images eidétiques, sans doute...} Merci, donc, amis, après qui il est difficile de rajouter un billet encore différent.
Le point commun qui nous frappe tous, pourtant, c'est bien l'architecture de l'oeuvre et ses "boucles étranges". En grand admirateur du fameux Hofstadter, j'ai aussi fait ce parallèle d'abord. Si la construction narrative était à deux niveaux - le polar dans la fabula et celui du "manuscrit" - (et s'il s'agissait à tout prix de relever des parallèles), j'ajouterais celui avec le Club Dumas de Pérez-Reverte... et mille autres, y compris le dernier roman d'Eco, le cimetière de Prague.
Mais le fait est que, au fil des pages, je me suis complu à répertorier un plus grand nombre d'enchevêtrements, toujours de nature binaire, me demandant successivement si chacun de ces diptyques était ou recelait le sens caché du roman {autre subjectivation du Traducteur} :
- 1. l'empiriste Héraclès vs. le platonicien Diagoras
- 2. le rationaliste Héraclès vs. l'irrationaliste-dionysiaque Crantor
- 3. le rusé Traducteur vs. l'obtus Montalo
- 4. le crédule Traducteur vs. le fou-sage Montalo (qui découvre que...)
- 5. la Vérité des crimes vs. la vérité des suicides
- 6. la réalité platonicienne fondée sur le logos vs. le défi de ce logos par Philotexte (ou par le théorème de Gödel...)
- 7. (suggéré par la 4ème de couverture) la raison philosophique vs. la raison littéraire.

Je suis déterminé désormais à passer (au moins une partie) de l'été avec ce psychiatre cubain qui est aussi un écrivain migrant (pour mon plus grand plaisir...).
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