Une bombe explose dans le bus alors qu'il atteint l'arrêt très fréquenté de Cantonment Railway Station à Karachi. Quarante morts, de nombreux blessés, des débris redoutables projetés dans un large rayon alentour.
Cela pourrait n'être que le résumé d'un article de la presse pakistanaise, d'une violence choquante dans sa sécheresse.
C'est aussi le sujet du roman de BilalTanweer : «
Le monde n'a pas de fin. ». Et la violence se transforme en une longue et poétique méditation sur la mort qui fit son entrée dans cette ville de Karachi, capitale animée à tous moments, bruyante, foisonnante de vie et de couleurs. Une ville animée et fascinante dans sa joie. Avant. Et puis l'islamisation radicale est apparue et avec elle la folie de tuer.
Comme beaucoup de citadins, les habitants de Karachi cherchent l'évasion du côté de la mer et pour la rejoindre, ils empruntent ces autobus surchargés, qui ne s'arrêtent pas pour qu'on y monte ou qu'on en descende, sauf si on est une dame âgée. Respect des vieillards oblige. Il faut tambouriner sur la cloison derrière le conducteur si on veut faire arrêter le véhicule.
Ce jour-là, l'autobus transporte des passagers de tous âges que nous suivons et qui ont des liens entre eux. Qui va mourir ? L'écolier qui fait l'école buissonnière ? le couple d'amoureux qui se câline loin des yeux des adultes ? Sukhanza, le camarade communiste poète qui a empoisonné la vie de sa famille avec ses obligations politiques ? Sadeq, le voyou amoureux qui trafique des voitures ?
D'autres seront des victimes « collatérales » comme on dit cyniquement...
Et qui sont ces frères vêtus d'une cape rose, à la langue pendante, crâne chauve et peau foncée ? S'agit-il de Gog et Magog, anges de la Mort, annonciateurs de l'Apocalyse ? L'écrivain-journaliste va rejoindre dans son repaire celui des frères qui a une relation étroite avec Dieu, lui qui est enfermé des épaules aux pieds dans une boîte de bois, paraplégique.
Nous suivons les personnages, le poète dans sa ville, l'écrivain qui retranscrit les histoires vécues par ses frères citadins de Karachi et nous découvrons, intrigués, fascinés, déconcertés, l'histoire de cette ville. Avant.
Comme l'auteur, nous regardons le monde au travers d'un pare-brise d'autobus étoilé parles impacts de balles : le regard se fait plus acéré au travers de ce trou, les chemins qui se dessinent sont multiples, chacun trace un itinéraire nouveau, encore inexpérimenté : l'avenir de Karachi ?