Ne réinvente-t-on pas tout sans cesse, dans l’espoir fou de donner du sens aux instants détachés et flottants de notre vie ?
Depuis, chaque fois que je vais au cinéma, que j'entre dans la salle plongée dans la pénombre, pleine de chuchotements et de rires étouffés, que je m'assieds dans un fauteuil, je ressens la même magie : les lumières s'éteignent, la salle plonge dans le noir, quelques derniers murmures, un dernier rire, et soudain c'est le silence, en moi tout se serre et se fige, j'attends quelque chose, je ne sais pas quoi, pas seulement devant mes yeux mais à l'intérieur de moi, des images, des musiques, des silences qui se coulent dans mon corps et le fassent vibrer, l'enchantent, le rendent à la vie. Oui, immobile, j'attends le plus beau des voyages.
Je me demande s'il en est de même pour les autres, si toutes les vies n'ont pas besoin de se laisser griser pour se délivrer de la peur, l'espace de quelques instants du moins, pour savoir qu'elles sont au monde, vibrantes, éphémères, magnifiques.
Le sourire s'était effacé. Votre visage était redevenu celui que je commençais à aimer, celui dont j'aurais voulu qu'il m'emmène loin, très loin, là où je n'étais encore jamais allée.
J'ai peur de vous revoir, mais comme j'en suis heureuse.
Je me demande si vous aussi avez longtemps pensé à moi, longtemps, avant de vouloir m'oublier.
(...) J'étais passée de l'Amour fou au vaudeville, je fermais les yeux et ton visage m'apparaissait, des larmes commençaient à rouler sur ma joue, le monde que j'avais inventé pour toi et moi n'était pas le nôtre, j'étais la seule à l'avoir habité, j'avais eu, comme on dit, tout faux.
Comment avais-je pu autant me tromper ?
Mon silence n'a pas semblé vous étonner. Je crois que déjà vous me connaissiez très bien, même si nous ne nous étions vu qu'une fois, une unique fois, il y a de cela six ans.
Avec certains êtres, très rares, il faudrait ne pas parler. Il faudrait tout de suite être dans les bras, caresser le visage, les paupières, les joues, les lèvres, les effleurer d'un doigt, lentement d'abord, puis dans un baiser, passionnément. S'embrasser. S'étreindre. Les mots sont inutiles. Les mots viendraient plus tard, confirmer ce que les corps ont su dès les premiers instants.
J𠆚vais peut être inventé un homme, dont l’image me brûlait, et qui, en définitive, n𠆞xistait pas.