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sur 1456 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La relation entre signifiant et signifié fait naître des locutions cocasses. Par exemple ce « motocyclette à panier adjacent » a un côté pratique et descriptif, à la limite du mignon. Je vois déjà une vieille mémé au guidon de sa mopette, fichu sur la tête, se rendant au marché; le « panier adjacent » ne serait pas autre chose que son panier de courses accroché à l'épaule. La définition réelle de cette locution est bien différente puisqu'il s'agit d'un rutilant side-car prêt à avaler les kilomètres de bitume pour le plaisir de deux personnes, l'une étant aux commandes tandis que l'autre à la place du mort – dans le panier.

C'est ainsi que Sylvain Tesson a relié Moscou à Paris en motocyclette à panier adjacent en empruntant le même chemin que pris Napoléon lors de sa Retraite de Russie en 1812. Cela donne le livre Berezina. Analyse.

Le titre du livre est bien évidemment celui de la bataille épique qui opposa l'empire français au russe sur les rives de la rivière Berezina. La débâcle qui suivi est entrée dans le jargon populaire. C'est la Berezina! Qui d'autre que Sylvain Tesson pour nous conter cette histoire à cheval sur la culture russe et française. Ce dandy franchouillard. Cet amoureux de l'âme slave. Ce casse-cou un brin réactionnaire jamais à court d'aphorismes:

« En Russie, l'art du toast a permis de s'épargner la psychanalyse. Quand on peut vider son sac en public, on n'a pas besoin de consulter un freudien mutique, allongé sur un divan. »

Au niveau purement historique, l'auteur français nous apprend qu'une des raisons clés, qui a transformé cette Retraite de Russie en débandade, est le mépris avec lequel Napoléon traitait la météorologie, croyant plus en sa destinée qu'aux lois rugueuses de l'hiver. Il avait beau être un fin stratège, c'est finalement une trop haute estime de lui-même qui entraînera sa chute.

Sylvain Tesson, en coupant le moteur de son side-car Oural dans des endroits stratégiques de l'ancien bloc de l'Est rend non seulement hommage à Napoléon et Koutouzof, ainsi qu'aux centaines de milliers d'hommes morts sur les champs de bataille mais aussi au nombre incalculable de chevaux morts, dépecés, mangés, dont la peau a été utilisée comme vêtements de secours. Ainsi la peinture de Bernard-Edouard Swebach, sobrement intitulée Retraite de Russie, donne une représentation de l'atmosphère générale même si elle ne va pas aussi loin que Tesson dans la description de cette boucherie équine:

« Ils furent les grands martyrs de la Retraite. On les creva sous les charges, on les écorcha vifs, on les bouffa tout crus, à même la carcasse ou bien en quartiers, braisés au bout d'un sabre. Pour les bâfrer, on ne prenait pas l'égard de se détourner des bêtes encore vivantes. »

Au delà de nous conter certaines facettes de l'Histoire, Sylvain Tesson nous livre le récit de son voyage sur les routes de l'Europe de l'Est où il se gèle les miches toute la journée sur son side-car en compagnie d'une poignée d'acolytes eux aussi motorisés. Cela se termine chaque soir, dans un bistro paumé où la joyeuse bande d'adolescents se verse des rasades de vodka jusqu'à plus soif comme dans un film d'Andreï Zviaguintsev. Cela refait le monde à chaque toast, cela se chamaille comme une bande de bons potes et ça décuve, le lendemain, sur les routes de l'Europe de l'Est en espérant que les motocyclettes à panier adjacent ne tombent pas en panne jusqu'à la prochaine étape.

Avec Berezina, Sylvain Tesson nous plonge avec brio dans les détails de cette désastreuse Retraite de Russie où s'est joué le début de la fin pour Napoléon. Grâce à ses digressions personnelles sur le paysage et la géographie de ces mille-quatre-cents kilomètres, l'auteur français (géographe de formation si je ne m'abuse) a réussi à me donner envie d'en savoir plus, non seulement sur ce pan de l'Histoire napoléonienne mais aussi sur ces pays que sont la Biélorussie et la Pologne.
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Ayant fait connaissance avec Sylvain Tesson et son Petit Traité sur l'Immensité du Monde, sur le chemin de St jacques, grâce à mon ami Raphaël, je m'étais depuis intéressé à l'homme. Comme lu sur Babelio, certains petits travers m'agaçaient : côtés donneur de leçons et bobo se retirant du monde -sous l'oeil des medias- au bord du Baïkal.
Mais finalement l'homme reste terriblement attachant ! Derrière l'avis sur tout se cache effectivement une grande culture et une pensée vive, pleine d'humour et d'énergie brute... ainsi je retrouve chez Tesson les écrivains voyageurs du siècle précédent que j'affectionne.
Berezina est un beau récit de voyage, et l'idée de croiser la lecture des mémoires de Caulaincourt protégeant l'Empereur dans la retraite de Russie avec le raod trip en Oural sur les routes modernes de Moscou à Paris était excellente ! Sylvain Tesson analyse avec finesse les événements historiques relatés et les lie avec maestria à sa folle équipée de motards russo-français programmée avec le bon vieux Goisque et sa boîte à images.
Sylvain Tesson nous emporte dans son side avec la gouaille des plus grands. il réveille et dépoussière le wanderer romantique on y mêlant du Godard. La lecture est facile et la réflexion philosophique a la saveur des cafés. En bon grognard, l'homme se préoccupe d'abord d'isoler ses mitaines ; mais le plan d'attaque est juste et le trait est vif. Dans ses plus belles chevauchées, il se mue en maréchal Ney, ressuscitant le mythe de l'Empereur tout en en dévoilant maints faits histiriques du quotidien. Une défaite certes, et une virée mi vodka mi gasoil, mais quelle campagne et quel voyage !
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Bien que ne partageant pas ses idées conservatrices, j'apprécie énormément les livres de Sylvain Tesson.
Celui-ci en particulier, où j'ai trouvé une mine d'informations sur la campagne de Russie, le début de la fin pour Napoléon.
L'auteur, grand baroudeur, a l'idée originale de refaire le parcours de l'empereur entre Moscou et Paris, en side-car cette fois, mais au jour près.
Avec ses compagnons français et russes, ils partent pour un long périple dans le froid de l'hiver, se remémorant à chaque étape tous ce que "nos" grognards ont subi.
Ces aller-retour entre passé et présent ne sont pas pesants et donnent son charme au récit, très bien écrit, comme d'habitude.
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Avec quelques amis, l'auteur entreprend un voyage Moscou - Paris, à bord de motocyclettes russes. L'objectif est d'emprunter le chemin des troupes napoléoniennes de retour de la terrible campagne de Russie en 1812.
Le lecteur suit en parallèle les aventures de ces baroudeurs modernes ( que d'aventures entre les aléas de l'hiver russe, et les fantaisies de la mécanique) , et le désastreux retour vers la France de milliers de soldats dont la plupart mourront en chemin.
La partie moderne est agrémentée par l'humour habituel et le regard détaché de Sylvain Tesson.
La partie historique rend un bel hommage à ces anonymes que les livres ont oubliés, embarqués dans un enfer par un homme dont l'égo confine à la pathologie.
Merci M. Tesson d'avoir honoré la mémoire de tous ces sacrifiés (hommes et chevaux) avec sensibilité et humanité.
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Berezina j'ai beaucoup aimé , il n'y a que Sylvain Tesson pour écrire ça .
L'histoire est partie d'un pari un peu fou de l'auteur et de quelques amis , aventuriers des temps modernes qui entreprennent un long voyage sur ces motos russes increvables , enfin des sides cars pour être exacte , de marque Oural .
Sylvain Tesson et ses amis ont l'idée saugrenue de refaire la route de Napoléon et de ses célèbres grognards lors de leur retraite en Russie .
C'est un pari fou , démesuré , on vit leurs aventures par procuration , surtout moi , je suis une trouillarde pas possible .
Oui Sylvain Tesson peut être agaçant, énervant et j'en passe mais ce récit déjanté m'a beaucoup plu , j'ai aimé retrouver les sensations de ces soldats de Napoléon , qui avaient une foi inébranlable envers leur chef , j'ai appris des détails que je ne connaissais pas sur la déroute de cette grande armée , la foi en la victoire encore plus grande des russes .
Oui il y a quelques défauts mais le principe est là le dépaysement , l'aventure et que demander de plus .
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J'aime bien suivre les aventure de l'auteur confortablement installée dans mon canapé et bien au chaud. Il le dit lui-même ses voyages sont des folies arrosées de vodka, du moins quand il s'agit de la Russie.

Il décide avec quatre compagnons de vodka, voire de galère, deux français, deux russes, de suivre la route de la retraite de Napoléon de Moscou à Paris sur des motos ou plutôt des side-cars. Ils ont choisi de partir en hiver sinon quel intérêt ?

La route de la retraite de Napoléon est une route fréquentée par des camions maintenant et dangereuse pour les engins plus ou moins à deux roues.

Les deux copains russes partent plus tard à cause d'une avarie sur une moto et malheureusement ils ont les affaires des français permettant de braver le froid. Ce froid qui mord et s'infiltre partout.

le soir pas de bivouac, ils s'arrêtent dans des hôtels, auberges, bouis-bouis. de bons repas arrosés évidemment de vodka, histoire de l'oublier ce froid mordant. Les nuits au chaud sont indispensables.

L'auteur évoque, au fil de son voyage, la tragédie des soldats et des chevaux, morts dans l'indifférence. Un véritable carnage dû au froid, aux maladies, à la faim. Les soldats mangent les chevaux puis se mangent en eux. Qu'aurions nous fait à leur place ? Nous qui vivons avec tout le confort moderne et incapables de défendre une cause qui ne concerne pas un proche ?

J'ai pris un cours d'histoire et j'ai suivi le voyage de quatre fous furieux, voyage qui n'a duré que treize jours - je suis étonnée - mais je n'ai pas vu les paysages grandioses de la Russie, juste des routes boueuses entre deux camions.
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Je suis encore engourdi par le froid à la fermeture de cet ouvrage. Mais J'ai aimé la formule. Récit d'aventure sur fonds de commémoration historique d'un événement que l'on préfère effacer notre mémoire collective.

C'est oublier dans tout ça les êtres humains perdus dans l'immensité glaciale, lacérés par le blizzard, tenaillés par la faim, harcelés par les cosaques, ne trouvant nul autre refuge que les griffes du général hiver dans leur retraite honteuse. C'est cette perspective à l'issue fatale que Sylvain Tesson tente d'appréhender en refaisant le parcours de la retraite de Russie de 1812. Elle a laissé dans notre vocabulaire cette expression imagée symbole d'une déroute monumentale : Berezina. Il a voulu s'imprégner du paysage, se frotter aux frimas pour s'approcher de l'état d'esprit qui a pu tomber sur les têtes de ces soldats aux uniformes autrefois chamarrés devenus des pauvres hères promis à la mort.

Sylvain Tesson y fait le parallèle entre la mentalité qui pouvait animer les contemporains de 1812, galvanisés par l'empereur, au point d'aller mourir dans ses folles équipées guerrières, tout en lui conservant étonnamment leur vénération, et celle de notre époque, pour une question : pareille équipée serait-elle envisageable de nos jours ?

Mais il pose une autre question en corollaire. Que serions-nous capables de supporter qui approche les souffrances endurées par nos ancêtres ? Nous qui n'acceptons plus les lois de la nature, nous qui sommes prompts à protester et à nous plaindre dès que notre confort est écorné un tant soit peu.

Voilà un ouvrage qui ne se donne pas de prétention philosophique mais qui pourrait quand même en afficher. Il est en outre plaisant à lire avec l'humour froid de son auteur, pas autant que le climat des steppes russes, mais bien piquant quand même. J'ai beaucoup aimé.
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Napoléon, héros ou tyran? Si cette polémique est au coeur des conversations actuelles, Sylvain Tesson y a pris part depuis bien longtemps.

Comme dirait le dicton: on ne change pas une équipe qui gagne. C'est pourquoi Tesson ne s'éloigne pas de ses sujets de prédilection dans ce roman: la slavophilie, le voyage le vrai, les traditions, l'histoire, la politique, l'aventure et bien évidemment… la vodka. En effet, l'auteur nous emmène dans les sentiers battus au fin fond de l'Ukraine populaire et de la Russie impériale

Cependant j'ai trouvé l'oeuvre intéressante par sa dimension dichotomique: d'un côté nous avons les écrits de souvenirs des soldats de la Grande Armée napoléonienne pendant la retraite de Russie, et de l'autre nous avons le périple de Tesson et ses deux acolytes retraçant les endroits mythiques où serait passé Napoléon. Si le texte est intéressant historiquement, il l'est aussi par les explications que reçoit Sylvain Tesson sur place avec les avis de la population russe, dans un fond de regrets de l'époque soviétique et de l'époque tsariste (assez éclairant aussi sur la situation actuelle en Ukraine).

J'aime cette écriture parlée où Tesson se permet de nombreuses digressions au service du lecteur et de sa soif de culture. le roman révèle une profonde connaissance, des idées bien marquées, et un certain humour de l'auteur, tout en gardant un langage assez commun. Je fais partie de ceux qui aiment cet aspect assez discuté de l'auteur.

Si vous aimez le Grand Froid, l'Aventure, l'Histoire, et l'humour à la vodka, ce livre est pour vous!
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Le bonhomme n'est pas du style croisières en Méditerranée ou farniente sur une plage des tropiques. Avec Tesson, il faut de l'aventure, de la vodka, des potes, des distances, un ciel haut, des intempéries.
A l'occasion du bicentenaire de la retraite de Russie, il va convaincre 4 acolytes de se joindre à lui pour effectuer en side-car Oural le même trajet que l'armée napoléonienne de manière à s'imprégner de ce qu'ont pu vivre les grognards de la grande armée en déroute. Il va donc avec intelligence mêler des faits historiques, s'appuyant sur les écrits de Caulincourt, général et homme de confiance de l'empereur et du sergent Bourgogne avec son propre récit de voyage.
Imaginez-le pilotant de jour comme de nuit, en aveugle, les lunettes embuées sur une moto qui continue de rouler même avec 80% de ses boulons, évitant de peu les camions russes, bravant le froid avec l'aide de la vodka sans jamais s'apitoyer car ce n'est rien à côté de ce que les soldats ont vécu : l'horreur de la guerre, la faim ou le typhus. Et le déshonneur d'avoir suivi leur chef dans ce bourbier. Par excès de confiance, Napoléon a négligé les conseils de ses généraux à propos de l'hiver en Russie. L'intendance suivra. Mais l'intendance n'a pas suivi et ce fut une boucherie.
A l'heure du conflit en Ukraine, cette lecture prend un relief particulier.

Challenge multi-défis 2022.
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Sur les traces de la Grande Armée napoléonienne, Sylvain Tesson a réussi à me faire aimer son récit de voyage en side-car entre la Russie et la France. Et pourtant ce n'était pas gagné car sa "Bérézina" a commencé par me rappeler de mauvais souvenirs d'école avec des leçons d'histoire à apprendre par coeur. Il me restait en tête la date du 2 décembre 1805 pour la victoire à Austerlitz et des images traumatisantes de la débâcle en Russie quelques années plus tard. Et comme je n'aime pas la guerre, je ne me suis jamais intéressée plus que ça à cette période.
Pour autant, Sylvain Tesson réussit à captiver son lecteur en mêlant l'histoire à la géographie et le passé au présent. C'est ce qui me séduit chez lui.
Son carnet de voyage prend rapidement la forme d'un journal. Il nous raconte son aventure partagée au jour le jour avec deux amis français, Cédric Gras et Thomas Goique, et deux russes, Vassili et Vitaly, qui vont les rejoindre.
Même s'ils font quelques bifurcations entre Moscou et Paris, Tesson et ses amis vont suivre exactement deux cent ans après, les chemins de l'armée en déroute et ceux empruntés par le traîneau de Napoléon lorsqu'il les abandonne.
Un bicorne accroché sur la nacelle de leur side-car soviétique au non approprié d'Oural puisqu'il fait penser à la chaîne de montagne russe de l'Oural, ils vont subir le froid durant treize jours ce qui n'est rien comparé à ce qu'ont vécu les soldats napoléoniens. D'ailleurs, Sylvain Tesson ne manque pas de rappeler son intention et de renoncer à l'auto apitoiement en vivant cette aventure. J'imagine les soldats de 1812 piétinant des cadavres en putréfaction...
Je préfère quand même ses références à Tolstoï. Parce qu'il est vrai que les relations entre la Russie et la France sont fortes et compris du point de vue littéraire.
J'aime beaucoup la façon dont Sylvain Tesson écrit et ce livre est une célébration de son amour pour la Russie.

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