Comme certains couples, certaines familles deviennent toxiques pour leurs membres après une trop longue période d’exposition.
Même dans les meilleures circonstances, il y a quelque chose de tragique à devenir adulte.
Quand il n’est pas soumis à la culpabilité ou à la honte, l’esprit humain est égoïste, méchant, et la majeure partie de nos pensées, à tout instant, n’est pas destinée au public, soit parce qu’elles seraient blessantes, ou qu’elles nous feraient passer pour les monstres nombrilistes que nous sommes. En vérité, nous ne livrons pas nos pensées telles quelles, mais des versions aseptisées, édulcorées, adaptations hollywoodiennes d’idées apprivoisées pour être présentables à toute la famille.
La seule chose dont on puisse être sur au sujet des autres, c’est qu’on ne sait jamais rien d’eux.
Je sens une immense vague de regret m'envahir quand je considère la personne que je suis devenue.
Il nous aimait quand nous étions petit. Quand nous avons grandi, il s'est senti perdu. L'enfance, on dirait que c'est pour toujours, c'est comme un univers en soi, et puis un beau matin, c'est la fin, et vous vous retrouvez à pelleter de la terre sur la tombe de votre père, confondu par l'inconstance des choses.
Phillip est une encyclopédie vivante de répliques de cinéma et de bribes de chansons. Pour avoir la place de ranger tout ça dans sa tête, il a dû dégager les zones réservées à la raison et au bon sens.
Même quand on aime le sexe, il y a quelque chose d'étrange et de perturbant à assister aux ébats des autres. La nature s'est donné beaucoup de peine pour faire en sorte qu'il soit impossible d'avoir une bonne vision de la situation quand on s'envoie en l'air. Et c'est vrai, à y bien réfléchir, baiser est une affaire désordonnée, maladroite, souvent grostesque à voir. Les poils, la chair à vif, contorsionnée, les orifices béants, les organes exposés, gluants... Et la violence du coït, primitif, élémentaire, qui nous rappelle que nous ne sommes que des animaux obtus, accrochés à notre place dans la chaîne alimentaire, qui bouffent, dorment, s'accouplent autant qu'ils peuvent en attendant qu'une bête plus grosse vienne les dévorer.
Ma mère n'a jamais su ce qu'était la discrétion. Elle n'a jamais eu non plus l'idée de faire semblant.
Autrefois, elle fouillait nos tiroirs, nos poches, inspectait nos draps, écoutait nos conversations, et lisait si souvent le journal intime de Wendy que nous avons pris l'habitude d'écrire certaines choses exprès pour elle:
" Mr Jorgenson, le prof de sport, dit que je ne peux pas l'appeler Ed, même après qu'on l'a fait tous les trois avec Mike Stedman, qui jure que toute cette histoire d'herpès génital n'est qu'une sale rumeur répandue par son ex, parce qu'elle est dégoutée qu'il ait couché avec Ed et moi".
"Liz Coltrane m'a filé ces pilules géniales qui font vomir après les repas, comme ça, je n'ai plus besoin d'utiliser mes doigts. C'est beaucoup plus civilisé, et je peux enfin laisser mes ongles repousser. Mince et manucurée! Gagnant gagnant!"
"Je sais que l'inceste, c'est mal. Je voulais juste essayer une fois, pour voir ce que ça faisait. Mais maintenant, Paul veut tout le temps remettre ça, et ça commence à être glauque. C'aurait été beaucoup plus simple avec Judd, si seulement il n'était pas gay".
En vérité nous ne livrons pas nos pensées telles quelles mais des versions aseptisées, édulcorées, adaptations hollywoodiennes d’idées apprivoisées pour être présentables.