Premier étonnement à la réception du roman : son volume. Ayant abordé l'oeuvre de
Undset par son
Kristin Lavransdatter et son
Olav Audunsson, je m'attendais à un roman fleuve. Il n'en est rien. Ce roman est nettement plus concis, mais en littérature le volume n'indique en rien la qualité littéraire...
De ce côté, bien que l'éditeur ait mentionné qu'il s'agissait d'une oeuvre de jeunesse, nous ne sommes nullement déçus. Dans cette oeuvre magistrale, le souffle de la tragédie brise les ailes fragiles d'un amour impossible.
Du côté du style littéraire, ce roman est plus sobre que ceux qui suivront. On retrouve parfaitement le style des sagas médiévales qui ont inspiré la trilogie de
Undset. le style est concis. a la lecture des premières pages, on retrouve la même approche des lieux et des personnages abordés au travers de leur généalogie que dans les oeuvres d'un
Snorri Sturluson. Ce style pourra paraître aride aux lecteurs, mais il dénote une excellente étude et une appropriation sans pareille de l'oeuvre des anciens par
Undset.
En quelques mots, Cette Vigdis est effectivement farouche, en témoigne la manière dont elle venge la mort de son père... Elle est guidée par un caractère idomptable. Elle peut même paraître particulièrement dure au lecteur contemporain lorsqu'après avoir exposé son fils aux élements hostiles de la nature au moment de la naissance, elle fait de ce dernier l'instrument de sa vengeance. C'est cependant une image réaliste de la femme du Nord telle que nous la décrit la littérature Islandaise du Moyen Âge. Cette première impression est compensée par le fait que malgré tout, elle a aimé ce fils. Vigdis est déchirée entre l'amour qu'elle aurait pu porter à Ljot, l'affront qu'il lui a fait et la violence de son comportement qui rendent au final cet amour impossible.
Quant à Ljot, que ce soit sous ce nom ou sous celui d'Upsak, le lecteur comprend vite que c'est un homme fait pour l'expédition viking, pour la violence et même si ses sentiments son sincères envers Vigdis ou la femme qu'il a épousé, ce caractère rend tout amour réciproque fortement compromis, en témoigne le viol. Il finit par tout perdre et par se sacrifier pour cet amour impossible. Son amour paternel pour ses enfants est cependant indéniable, il retourve par là même une dimension humaine qui fait que l'on ne peut détester ce personnage
L'oeuvre est fortement teintée de tragédie. le décès des enfants de Ljot donne lieu à une scène poignante. Il y a indéniablement du Clytemnestre dans le personnage de Vigdis. le duel de la fin rappelle celui entre Cuchulain et son fils dans les cycles mythologiques irlandais.
Undset, avec sa plume magistrale cisèle des personnages que le lecteur ne peut totalement aimer ou détester. Ils échappent à un manichéisme facile et s'ancrent donc terriblement dans des réalités humaines.
Madame
Undset étant d'un autre siècle, je lui rend un hommage posthume : chapeau bas pour votre oeuvre !!!