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EAN : 978B003NKVO5E
Gallimard (30/11/-1)
4.5/5   5 notes
Résumé :
« Prose, vers, souvenirs, images ou sentences, ce qui vint du sommeil, ce qui vint des amours, ce que donnent les dieux comme les circonstances s’assemble en cet album de fragments de mes jours. Selon l’heure, naïf, absurde, aimable, étrange, esclave d’une mouche ou maître d’une loi, un esprit n’est que ce mélange duquel, à chaque instant, se démêle le MOI. »

« Le “moi” n’est peut-être qu’une notation commode, aussi vide que le verbe “être” – tous le... >Voir plus
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Le dictateur demeure enfin seul possesseur de la plénitude de l’action. Il absorbe toutes les valeurs dans la sienne, réduit aux siennes toutes les vues. Il fait des autres individus des instruments de sa pensée, qu’il entend qu’on croie la plus juste et la plus perspicace puisqu’elle s’est montrée la plus audacieuse et la plus heureuse dans le moment du trouble et de l’égarement public. Il a bousculé le régime impuissant ou décomposé, chassé les hommes indignes ou incapables ; avec eux, les lois ou les coutumes qui produisaient l’incohérence, les lenteurs, les problèmes inutiles énervaient les ressorts de l’État. Parmi ces choses dissipées, la liberté. Beaucoup se résignent aisément à cette perte. Il faut avouer que la liberté est la plus difficile des épreuves que l’on puisse proposer à un peuple. Savoir être libres n’est pas également donné à tous les hommes et à toutes les nations, et il ne serait pas impossible de les classer selon ce savoir. Davantage, la liberté dans notre temps n’est, et ne peut être, pour la plupart des individus, qu’apparence. Jamais l’État, même le plus libéral par l’essence et les affirmations, n’a plus étroitement saisi, défini, borné, scruté, façonné, enregistré les vies. Jamais le système général de l’existence n’a pesé si fortement sur les hommes, les réduisant par des horaires, par la puissance des moyens physiques que l’on fait agir sur leur sens, par la hâte exigée, par l’imitation imposée, par l’abus de la série, etc., à l’état de produits d’une certaine organisation qui tend à les rendre aussi semblables que possible jusque dans leurs goûts et dans leurs divertissements. Nous sommes des esclaves d’un fonctionnement dont les gênes ne cessent de croître, grâce aux moyens que nous nous créons d’agir de plus en plus largement sur les milieux communs de la vie. L’amateur de vitesse gêne l’amateur de vitesse, et il en est ainsi des amateurs d’ondes entre eux, des amateurs de plages ou de montagne. Si l’on joint à ces contraintes, nées des interférences de nos plaisirs, celles qu’imposent au plus grand nombre les disciplines modernes du travail, on trouvera que la dictature ne fait qu’achever le système de pressions et de liaisons dont les modernes, dans les pays politiquement les plus libres, sont les victimes, plus ou moins conscientes.

Quoi qu’il en soit, l’état dictatorial installé se résume en une division simple de l’organisation d’un peuple : un homme, d’une part, assume toutes les fonctions supérieures de l’esprit : il se charge du bonheur, de l’ordre, de l’avenir, de la puissance, du prestige du corps national, — toutes choses en vue desquelles l’unité, l’autorité, la continuité du pouvoir sont, sans doute, nécessaires. Il se réserve d’agir directement dans tous les domaines, et de décider souverainement en toute matière. D’autre part, le reste des individus seront réduits à la condition d’instruments ou de matière de cette action, quelle que soit leur valeur et leur compétence personnelle. Ce matériel humain, convenablement différencié, sera chargé de l’ensemble des automatismes.
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Instants


          DES COULEURS

                 II

  ROUGE.   « Rouge », est la couleur de la vie
substantielle.
  La rougeur de la pudeur dénonce l'aurore de
l'interne impudicité.
  Qui rougit en sait un peu plus qu'il ne devrait
en savoir.
  Le sang aux joues ruine brusquement le système
des lèvres closes et des yeux baissés, accuse l'âme
et même la confond. Son épanouissement vermeil
manifeste la connaissance du Bien et du Mal.

p.169
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Nous avons vu, en quelques années, sept monarchies, (je crois), disparaître ; un nombre presque égal de dictatures s’instituer ; et dans plusieurs nations dont le régime n’a pas changé, régime assez tourmenté, tant par les faits que par les réflexions et comparaisons que ces changements chez les voisins excitaient dans les esprits. Il est remarquable que la dictature soit à présent contagieuse, comme le fut jadis la liberté.

Le monde moderne n’ayant su jusqu’ici ajuster son âme, sa mémoire, ses habitudes sociales, ni ses conventions de politique et de droit au corps nouveau et aux organes qu’il s’est récemment formés, s’embarrasse des contrastes et des contradictions qui se déclarent à chaque instant entre les concepts ou les idéaux d’origine historique, qui composent son acquis intellectuel et sa capacité émotive, et les besoins, les connexions, les conditions et les variations rapides d’origine positive et technique qui, dans tous les ordres, le surprennent et mettent sa vieille expérience en défaut.

Il se cherche une économie, une politique, une morale, une esthétique, et même une religion, et même… une logique, peut-être ? Il n’est pas merveilleux que parmi des tâtonnements qui ne font que commencer et dont il est impossible de prévoir le succès ni le terme, l’idée de Dictature, l’image fameuse du tyran intelligent, se soit proposée, et même imposée, ici et là.
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Comme la faim engendre la vision de mets succulents, et la soif celle de breuvages délicieux, ainsi dans l’attente anxieuse d’une crise, le danger pressenti excite le besoin de voir agir et de comprendre les actes du pouvoir, et développe chez la plupart l’image d’une action puissante, prompte, résolue, délivrée de tous les obstacles de convention et de toutes les résistances passives. Cette action ne peut appartenir qu’à un seul. Ce n’est que dans une tête seule que la vision nette de la fin et des moyens, les transformations des notions en décisions, la coordination la plus complète se peuvent produire. Il y a une sorte de simultanéité et de réciprocité des facteurs du jugement et une sorte de force décisive dans les résolutions qui ne se trouvent jamais dans la pluralité délibérante. Si donc la dictature est instituée, si l’Unique prend le pouvoir, la conduite des affaires publiques portera toutes les marques de la volonté concentrée et réfléchie, et le style d’une certaine personne sera empreint dans tous les actes du gouvernement, cependant que l’État sans visage et sans accent ne se manifeste que comme une entité inhumaine, une émanation abstraite, d’origine statistique ou traditionnelle, qui procède soit par routine, soit par tâtonnements infinis.

En vérité, ce doit être une jouissance extraordinaire, (comme c’est pour l’observateur un spectacle prodigieusement captivant), que de joindre la puissance avec la pensée, de faire exécuter par un peuple ce que l’on a conçu à l’écart ; et parfois de modifier à soi seul, et pour une longue durée, le caractère d’une nation, comme le fit jadis le plus profond des dictateurs, Cromwell, monstre et merveille aux yeux de Pascal et de Bossuet, qui transforma l’âme énergique de l’Angleterre.
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Instants


          DES COULEURS

                 I

  NOIR. « Les pessimistes de la plume » : ils
cherchent un « beau noir », dirait le peintre.
  Pascal a de « beaux noirs " et les a cherchés,
et je vois trop qu'il les a trop bien trouvés.
  Les « noirs » magnifiques de l'Église, relevés
d'argent et d'or.
  Orgues, voûtes, latin : In saecula saeculorum…
Pompes, cires, encens, altitudes d'ombres pro-
fondes…
  Le « noir pur », couleur puissante de la solitude
totale ; plénitude du rien, perfection du néant.

p.168-169
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Vidéo de Paul Valéry
https://www.laprocure.com/product/1525906/chevaillier-louis-les-jeux-olympiques-de-litterature-paris-1924
Les Jeux olympiques de littérature Louis Chevaillier Éditions Grasset
« Certains d'entre vous apprendrez que dans les années 1912 à 1948, il y avait aux Jeux olympiques des épreuves d'art et de littérature. C'était Pierre de Coubertin qui tenait beaucoup à ces épreuves et on y avait comme jury, à l'époque, des gens comme Paul Claudel, Jean Giraudoux, Paul Valéry et Edith Wharton. Il y avait aussi des prix Nobel, Selma Lagerlof, Maeterlinck (...). C'était ça à l'époque. C'était ça les années 20. Et c'est raconté dans ce livre qui est vraiment érudit, brillant et un vrai plaisir de lecture que je vous recommande. » Marie-Joseph, libraire à La Procure de Paris
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