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3,71

sur 280 notes
Elle était là, dans cette bibliothèque universitaire, un soir. Il la regardait travailler, penchée sur ses feuilles. Elle a bien senti ce regard sur elle et, ses yeux bleus posés sur lui, lui a demandé ce qu'il y avait. Elle lui dit qu'elle est étudiante à la fac de lettres, qu'elle doit réviser pour son partiel et que son livre de Wittgenstein sur le langage est plutôt chiant. D'ailleurs, elle n'a déjà plus envie de réviser... Ils s'enfoncent dans la nuit noire, il la raccompagne chez elle. Elle lui dit qu'il faudrait qu'elle revienne pour travailler plus sérieusement et puis qu'elle doit y aller. Un rendez-vous vaguement pris, sûrement, puisqu'ils se retrouvent à la bibliothèque, plus tard. Mais aucun n'a réellement envie de travailler. Ils vont finalement aller manger tous les deux...

Bastien Vivès se place dans la peau du jeune homme que l'on ne verra jamais et dont on ne saura jamais le nom. Il croque cette jeune fille frêle, si belle, touchante, un peu timide, avec douceur et finesse, faisant la part belle aux émotions, à cette relation intime qui s'installe gentiment et aux conversations parfois gênées ou tout en retenue. le lecteur ne voit que cette jeune femme, infiniment tendre et émouvante, dans ses gestes et ses mots. Voilà un procédé intime vraiment original qui nous offre de belles séquences émouvantes et attendrissantes. Dépourvu de tout cadre, le dessin aux crayons de couleurs, spontané et délicat de Bastien Vivès, regorge d'émotions.

Il se perd Dans mes yeux...
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Innovateur et unique avec cet homme qui reste en retrait comme si son cerveau était une caméra avec parfois des gros plans qui subliment les parties du corps de cette jeune fille aux cheveux roux. On ne verra que ses mains ce qui a pour effet d'avoir la sensation d'entrer dans le roman graphique. Beaucoup aimé les dessins en mouvement aux couleurs chatoyantes. Un graphisme qui parle vraiment. Suis bluffée. Si toutes les femmes pouvaient être observées de la sorte !

Dans vos yeux
J'ai eu l'aveu de votre âme
En caractère de flamme
Je m'en suis allé joyeux
Pendant alors mon espace
Au coin d'horizon qui passe
Dans vos yeux
Dans vos yeux
J'ai vu s'amasser l'ivresse
Et d'une longue caresse
J'ai clos vos grands cils soyeux
Mais cette ivresse fût brève
Et s'envola comme un rêve
De vos yeux
Dans vos yeux
Yves Jamait
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Le narrateur – ou appelons-le plutôt le spectateur – rencontre une jeune et jolie étudiante à la BU. Son regard reste posé sur elle pendant toute l'histoire, il se gorge de son image autant qu'il le peut. Venu là pour lire, il ne savait pas qu'il tomberait amoureux de cette rouquine un peu mutine. « À ta place, j'irais lire autre part, c'est chiant la bibliothèque. » (p. 24) Elle, c'est une étudiante en Lettres Modernes qui ne lit pas beaucoup, mais qui a gardé de son enfance le souvenir d'un album qu'elle feuillète souvent.
Elle est un peu timide, mais elle irradie. Son assurance fragile se brise souvent dans un éclat de rire. le spectateur veut la séduire, mais doucement, sans l'effaroucher. Il l'écoute parler d'elle, il l'accompagne au cinéma, au zoo et dans des soirées. Délicatement, il se rapproche d'elle sans la brusquer. Il a compris dès le début qu'elle était un peu fébrile, pas toujours à l'aise. Quand il la rejoint chez elle, on suit d'abord son trajet parisien jusqu'au studio qu'elle habite : ce voyage amoureux est propice à l'impatience et la rêverie. « Depuis le moment où tu es venu me chercher devant la fac, j'avais envie de t'embrasser. On parlait, on parlait, mais tu ne m'embrassais pas. » (p. 60) Impatience de sa part à elle, prudence de son côté à lui. Entre eux, les baisers sont toujours aveugles et ils lui ferment les yeux. Image noire quand elle est proche de lui.
Le narrateur n'en est donc pas un, pas vraiment. Il se contente de regarder et d'écouter. Dans la disposition de la page, les cases vont par deux, comme deux yeux qui suivent tous les gestes de la jeune fille. Il y a un dialogue, des questions et des réponses, mais les seules répliques que nous avons sont celles de la jeune fille. Quoi que dise le garçon, finalement, cela a peu d'importance. Ce qu'il voit est plus puissant que tout ce qu'il peut dire, voire entendre. Parfois les paroles se brouillent et s'estompent pour former un brouhaha : quand il doit subir les autres qui ne sont pas elle, il n'entend plus rien et seul son regard compte, toujours posé sur cette fille si particulière, celle fille dont il est amoureux.
Servi par un très joli crayonné et une réelle maîtrise du mouvement, cet album m'a bouleversée. Dès le début, les premières pages qui sont comme les planches-contact d'un souvenir. Car cette histoire est un souvenir, comme en témoigne la fin. L'émotion file dans tout l'album : on sent que cette jeune fille est sur le fil, qu'elle hésite et qu'elle doute d'elle-même et de ses désirs. La tension émotive qui s'accumule explose dans la dernière partie, et elle a explosé chez moi aussi. Cette histoire, je l'ai vécue (l'auteur aussi, mais nous ne nous connaissons pas) ou du moins j'ai vécu cette situation d'errance et de déséquilibre. Voir ce souvenir en images et en couleurs, c'est stupéfiant, d'autant plus que Bastien Vivès maîtrise d'un bout à l'autre toute la puissance émotive de son propos : pas de débordement dégoulinant, pas de voyeurisme et pas d'hyperbole. Cette histoire fait mal, mais les douleurs ne sont toujours que personnelles, donc minuscules pour les autres, et c'est ce tour de force auquel parvient l'auteur : partager la puissance intime d'une douleur qui n'est pas la nôtre.
Polina m'a replongé dans mes années de danseuse, Amitié étroite rassemblait déjà de nombreux échos personnels : Dans mes yeux est une porte ouverte sur mes souvenirs. À chaque fois, Bastien Vivès vise juste. Précision : je ne prétends pas que l'auteur écrit sur mon histoire, je dis qu'il écrit pour le moi dans le sens où chacun de ses ouvrages me touche et interroge ma propre histoire. Ils sont rares les auteurs capables d'une telle prouesse. Ainsi, j'affirme que le dessinateur est aussi doué que l'écrivain : l'auteur, qu'il use de la plume ou du pinceau, mérite ce titre quand il emmène son lecteur au-delà de son histoire et qu'il lui ouvre les portes de sa propre réalité.
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J'ai l'impression qu'avec Bastien Vivès, c'est tout l'un ou tout l'autre, soit la finesse, soit le gros cliché bien lourd. Ici, c'est la seconde option qui l'emporte largement à mes yeux. Que le scénario se résume à peu de choses ne me pose pas de problèmes : c'était le cas déjà dans le goût du chlore, qui excellait dans le rendu d'une ambiance, de la naissance des sentiments et des non-dits. Ici, à l'inverse, l'album s'enlise dans un minimalisme assez creux, tout juste sauvé par un dessin, il est vrai, novateur et original.

Un jeune homme rencontre une étudiante dans une bibliothèque, une relation plus ou moins amoureuse s'instaure entre eux. L'originalité est censée venir de la narration : tout ce que verra le lecteur le sera du point de vue du narrateur, à la manière du procédé de la caméra subjective. Idem pour ce qui est des dialogues, on ne pourra lire/entendre que les paroles prononcées par la jeune fille, voire éventuellement d'autres personnes dans son environnement immédiat. Ce qui ne me semble pas très logique, soit-dit en passant, puisque dans la vie, si on ne voit que l'autre, on s'entend soi-même parler (je précise que le narrateur n'est pas sourd). Ce procédé de la caméra subjective montre donc très rapidement ses limites. D'autant que, si les paroles du narrateur ne nous sont pas audibles, il nous faut pouvoir les deviner (sans quoi on ne comprendrait rien à rien) : d'où des dialogues du personnage féminin pas toujours très naturels, car construits pour combler les blancs du narrateur.

S'ajoute à ce manque de naturel des dialogues un manque de naturel du personnage féminin, qui passe son temps à minauder, à faire des poses en veux-tu en voilà, à jouer les pimbêches du début à la fin. Histoire d'en rajouter une couche, les situations sont peu naturelles, comme lorsque la jeune fille se met à rire comme une hystérique parce que le narrateur a lu un livre pour enfants dans le métro. L'apogée, c'est la fin, qui relève du pur cliché sur la rupture, avec des dialogues du genre "On devrait arrêter de se voir", "Nan mais c'est pas toi, c'est moi en fait", bref, des trucs que les gens ne disent jamais dans la vraie vie (ou alors seulement quand ils ont une forte tendance à jouer la comédie). Cette fin en forme de rupture tombe comme un cheveu sur la soupe, s'avère être le but de l'album et se révèle sans intérêt. On se dit alors : "Ah ouais, tout ça pour ça, ça valait le coup, dis-donc."
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Une bande dessinée toute en sensibilité sur la naissance du sentiment amoureux.

Il la rencontre dans une bibliothèque, elle, une étudiante en Lettres qui « ne lit pas grand-chose ».
De lui, on ne verra jamais le visage, on n'entendra jamais les mots : la narration est menée en caméra subjective, à hauteur d'homme, et c'est là son originalité. Il n'a d'yeux que pour elle et on sait tout de la manière dont il la découvre, dont il la désire, dont il en tombe amoureux. Elle, on la devine séduite mais hésitante, à la fois sûre d'elle et fragile, craintive.

Entièrement illustrée aux crayons de couleurs, son autre point fort (malheureusement sa couverture ne lui fait pas honneur, je trouve), Dans mes yeux est une histoire d'amour actuelle et banale qui me touche, justement, par son « air de vécu ».
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Une nouvelle fois, Bastien Vivès aborde les sentiments amoureux mais d'une façon novatrice, tant par le dessin que par son style narratif.

"Depuis le moment où tu es venu me chercher devant la fac, j'avais envie de t'embrasser. On parlait, on parlait, mais tu ne m'embrassais pas ..."
En effet, l'histoire est écrite en caméra subjective, c'est-à-dire du point de vue du garçon, un narrateur silencieux dont le lecteur ne verra jamais le visage ni se saura jamais le nom.
Le lecteur va vivre cette histoire d'amour à travers les yeux du garçon et ne verra que la fille, sans jamais là non plus en connaître le nom.
Il n'y a qu'elle, avec son côté irrésistible et gauche, ses arabesques et la sensualité qui s'en dégage, terriblement attachante et touchante et qui scotche le lecteur au récit dès sa première apparition.
Cela tend à prouver, après "Amitié étroite", la forte dimension cinématographique dans l'oeuvre de cet auteur.
De plus, Bastien Vivès a fait tomber les codes de la bande dessinée en offrant un livre gommé de cases ou de bulles, le tout dans un style très minimaliste, et avec des dessins uniquement réalisés aux crayons de couleur.
Visuellement, cet album est une pure merveille et un régal à lire.
Je ne le qualifierai tout de fois pas de parfait, car j'ai trouvé la fin trouble et un peu en-deçà du reste de l'histoire.
J'aurai aimé un peu plus de clarté, ou un peu moins de trouble de l'héroïne, en tout cas pas une fin aussi insaisissable que celle-là.
Et puis, alors que l'intégralité de l'oeuvre est visuellement splendide, je trouve que la couverture ne reflète pas la qualité des dessins, du graphisme et des couleurs.
Une couverture est pourtant un élément important pour un livre, celle-ci pourrait presque rebuter une personne ne connaissant pas l'univers graphique de Bastien Vivès.

Dans un style graphique et narratif différent d'"Amitié étroite", Bastien Vivès livre avec "Dans mes yeux" un album très touchant, un beau bijou à découvrir et à lire sans modération.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Cette bande dessinée ne sera pas celle que je préfère de Bastien Vivès. Néanmoins, j'ai trouvé le parti pris de départ très intéressant. Voir cette histoire, ce début d'histoire se dérouler d'un seul point de vue, suivant le regard d'une seule personne, en fait un récit subjectif, incomplet et c'est ce qui fait sa force et sa faiblesse. Je me suis tout de même laissée prendre, cherchant comme le narrateur, à comprendre cette jeune femme indécise.
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Dans mes yeux, comme le titre l'indique, propose une histoire où les angles de vue partent du regard du narrateur, comme si il se servait d'une caméra. C'est une histoire de drague entre étudiants, une romance banale, l'intérêt se situe ailleurs. C'est justement cette vision personnelle qu'il nous fait partager, avec un graphisme au crayon de couleur, brut et original. Avec sa technique, on va se concentrer et découvrir ce qui l'attire chez cette jeune fille rencontrée à la Bibliothèque Universitaire. Je trouve très audacieux de ne pas avoir reporté les paroles du narrateur, on devine quand il parle et on imagine ce qu'il peut dire, mais à ce moment, ce qui compte, c'est le regard de la fille qui l'écoute, avec ce procédé, cela rend plus fort cette relation qui passe par les regards et on a l'impression d'être le partenaire de l'histoire, d'ailleurs la banalité de cette aventure rend notre identification encore plus réelle. On est dans son regard et on tombe presque amoureux de cette jolie petite rouquine, et c'est sans doute ce qu'a voulu nous faire ressentir Bastien Vivès, et de ce point de vue, c'est très réussi.
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Dans cette oeuvre, Bastien Vivès décide de ne pas montrer l'un des protagonistes d'une rencontre amoureuse. le thème reste le même mais la méthode change puisque nous découvrons l'action dans les yeux de son héros, un jeune garçon. C'est intéressant comme approche car on est bien dans un point de vue subjectif pour une analyse de lecteur qui sera objective.

Ce crayonné donne un aspect de beauté aux planches. Mais là encore, la fin nous laisse perplexe. On dirait que l'auteur ne sait pas comment terminer ces histoires ou du moins, cela se termine en queue de poisson ce qui laisse toujours un goût amer un peu comme dans celui du chlore. Je pense qu'il a prit en compte ces remarques car la suite de son oeuvre sera un cran au-dessus.
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Une BD POV...en voilà une bonne idée. Comme dans un jeu vidéo, nous sommes à la place d'un des intervenants de l'histoire. Nous ne voyons et n'entendons que ce que l'autre fait ou dit. L'autre, c'est une jolie rousse rencontrée à la bibliothèque...
La narration est très intéressante, riche et bien pensée pour une histoire somme toute assez banale qui ne me laissera que peu de souvenirs.
Par contre, une fois de plus, je reste sans voix devant la technique de Bastien Vives.
Quel talent! Je connaissais déjà sa parfaite maitrise des attitudes, de l'expressivité des corps et des gestes. de plus, il arrive à faire ressortir les sentiments par un simple trait parfaitement juste et par un jeu d'ambiance savamment induit.
Dans ce tome, je suis également ébahie par le traitement des couleurs. L'utilisation du pastel est à propos et la technique est parfaite. Quelle richesse dans les tons et quelle finesse dans les rendus!
Et, à mon sens, le croquis d'attitude et le rendu des couleurs trouvent leur apogée dans les dessins d'animaux! C'est juste magnifique.
5/5 pour le dessin, 5/5 pour la narration et 3 sur 5 pour l'histoire...
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