AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782021450422
240 pages
Seuil (12/03/2020)
3.77/5   22 notes
Résumé :
Il y aurait donc encore des héroïnes, des vraies ? Et on peut les croiser dans la rue, leur parler, les connaître ?

Près de Dieulefit, dans la Drôme, vit Anne Beaumanoir, dite Annette, un petit bout de femme presque centenaire, aux yeux lumineux et à la parole vive. Entrée dans la Résistance communiste à dix-neuf ans, elle en enfreint les règles en prenant l'initiative de sauver deux adolescents juifs. Elle lutte à Rennes, à Paris, à Lyon ; elle parti... >Voir plus
Que lire après Annette, une épopéeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 22 notes
5
3 avis
4
2 avis
3
4 avis
2
0 avis
1
0 avis
L'épopée c'est la vie d'Annette, ou plutôt, disons son nom en entier - il n'apparaît qu'une fois dans le livre à la toute première ligne - : la vie d'Anne Beaumanoir. Née en Bretagne, issue d'une famille humble et engagée, à peine sortie de l'enfance elle devient militante communiste et elle rejoint la Résistance. Elle sauvera des enfants juifs.
Après guerre elle deviendra médecin et rejoindra le FLN dans sa lutte pour l'indépendance de l'Algérie.
Sa vie militante se poursuivra jusqu'à sa vieillesse au dépends de sa vie familiale.
Une vie exemplaire, admirable, sans concession, sans faux pas.
Le livre est écrit avec simplicité, le récit est clair, rapide, informé à la meilleure source : Anne elle-même. Pour ceux qui connaissent cette période, il n'apporte aucun élément nouveau, sinon le portrait d'une femme d'exception.
Commenter  J’apprécie          160
Ce livre me frappe pour trois particularités: l'histoire vraie de la résistante française Annette Beaumanoir, le style d'écriture et le point de vue narratif de l'auteure franco-allemande Anne Weber (née en 1964). Pour commencer par le premier : s'il est vrai que l'auteur a accidentellement croisé Beaumanoir alors âgée de 96 ans et a commencé à écrire l'histoire de sa vie, alors c'est un fait extraordinaire. Car la vie d'Annette ressemble à un film : jeune fille, elle a fait partie de la résistance française contre les nazis, a sauvé plusieurs juifs contre les directives de ses supérieurs communistes, a joué un rôle dans la résistance clandestine dans le sud de la France, et puis aussi une remarquable rôle dans la lutte algérienne pour l'indépendance contre la France, et les premières années après cette indépendance. L'auteur Weber décrit tout cela de manière très obsédante, mais aussi avec une certaine distance.

Et cela nous amène à la particularité la plus particulière de ce livre : il n'est pas écrit en phrases en prose, mais en vers libres. Ça parait un peu étrange au début, et il manque parfois la musicalité que vous attendez de la forme du couplet, mais cela fonctionne, en particulier dans les scènes d'action, qui obtiennent une sorte de effet saccadé. Et bien sûr, cela correspond à la nature épique de l'histoire.

Plus spéciale encore est la relation entre l'auteur et l'héroïne, du point de vue narratif. Anne Weber est la narratrice omnisciente, avec une admiration manifeste pour Annette, mais aussi une distance critique. Dans une sorte de ‘voice off', ses vers parfois expriment une critique prudente de la position d'Annette : comment elle n'a pas vu comment la résistance était manipulée par de grands hommes (De Gaulle, par exemple), comment elle n'a pas vu comment derrière la lutte Algérienne pour l'indépendance se trouvaient aussi des motivations financières (même par des antisémites), et comment elle est restée aveugle à la lutte de pouvoir entre les grands hommes après l'indépendance (Ben Bella, Boumedienne, Bouteflika, etc.). Et pourtant Weber indique aussi comment Annette avait un penchant naturel pour l'action et le danger, qui l'a même poussée à abandonner son mari et ses trois enfants. Mais Weber est doux pour Annette et précise que son engagement parfois risqué était fondamentalement idéaliste : sauver des gens, qu'ils soient juifs, algériens ou malades (Annette était médecin de formation), restant presque consciemment aveugle à la situation globale, et presque toujours en payant le prix. Ce faisant, elle a fait d'Annette une héroïne féministe contre son gré.

La lecture de ce livre était pour moi une expérience ambivalente : fascinée par le sujet, bien sûr, mais aussi aux prises avec le style d'écriture (en partie parce que je l'ai lu dans l'original allemand), et parfois aussi frustrée par le ton un peu trop moralisateur. Soit dit en passant : Annette Beaumanoir est décédée en mars de cette année, à l'âge de 98 ans.
Commenter  J’apprécie          50
"Car résister résulte, comme la plupart des choses qu'on fait, non pas d'une décision qu'on prend une fois pour toutes mais d'un glissement pour ainsi dire imperceptible, progressif, vers quelque chose dont on n'a pas encore idée."

Annette, une épopée est un chant, au sens antique du terme. On chante le héros, ici l'héroïne, en vers libre. Pour souligner sa force, sa bravoure et conter ses aventures. Une forme déstabilisante sur les quinze premières pages mais dont le rythme nous embarque. Et très vite, les retours nombreux à la ligne nous bercent plus qu'ils nous gênent.

Des aventures, Annette en a vécu de nombreuses. Sans vraiment l'avoir décidé. Toute jeune fille à l'aube de la Seconde Guerre mondiale, elle va s'engager politiquement comme on fait de la prose, sans le savoir. Au fil des actes de résistance, elle en prend conscience. Elle agit dans une sorte de flou qui la protège (elle ne connaît que de loin ses interlocuteurs au Parti, change régulièrement de point de chute...) et pourtant avec une acuité essentielle. Un homme derrière un journal peut cacher un camarade. Ou un collabo. Annette suit les règles du jeu, elle les enfreint aussi, quand l'amour frappe à sa porte. Et quand elle décide de sauver deux enfants juifs. Sans le décider vraiment encore une fois. La raison n'a plus sa place, il faut agir au rythme accélèré des battements de son coeur. La guerre lui prendra beaucoup, elle ne saura pas bien comment reprendre une vie normale après ça. Et le glissement en résistance va s'accentuer. Elle prend à bras le corps le parti de l'indépendance de l'Algérie, s'expose, s'exile... Une vie de combat. Camus n'est pas loin.

Les héros sont bien plus grands quand ils ne savent pas qu'ils sont héroïques. Quand ils sont étonnés des lauriers que l'on pose sur leur tête. Anne Weber dans ce texte dit avec beaucoup de justesse l'histoire d'Annette. Avec pudeur aussi. Pas de violence soulignée, quand c'est trop, elle écrit un simple "Pause". L'indicible restera derrière ce mot. Notre imaginaire est bien capable de faire le reste du chemin.
Annette n'imaginait pas de piédestal, Anne Weber lui en fait un à sa mesure. Un chant, une épopée pour l'héroïne inconnue.

Commenter  J’apprécie          50
Anne Beaumanoir, dite Annette, est une jeune femme au parcours atypique, sinueux et riche en rebondissements de toute nature : elle entre dans la Résistance à dix-neuf ans, sauve deux adolescents juifs au mépris de la discipline de groupe. Elle participe à des actions à Rennes, Paris et Lyon. Pour finir, elle prend part à la libération de Marseille, avant de s'engager pour l'indépendance de l'Algérie, pays qu'elle rejoint lors de l'indépendance en 1962. Elle participe au premier gouvernement de Ben Bella avant de fuir lors du coup d'Etat de Boumédiène en 1965.
Ce destin, Anne Weber a pris le parti de le restituer au lecteur de son roman sous la forme d'une radiographie en direct du comportement d'Annette, de la dissection de ses motivations. Ainsi, de la définition de l'acte de résister : « Car résister résulte, comme la plupart des choses qu'on fait, non pas d'une décision qu'on prend une fois pour toutes mais d'un glissement pour ainsi dire imperceptible, progressif, vers quelque chose dont on n'a pas encore idée. »
Toutes les étapes de sa vie sont remises par l'auteure en perspective, reliées aux circonstances, à la notion de devoir, d'impératif. Fréquemment, Anne Weber apostrophe son héroïne, la morigène, l'apostrophe, tout en lui témoignant au final une sympathie complice et chaleureuse. A propos de son propre enfant, Annette doit choisir : « Il sera perdu ou sacrifié puisqu'il y a un temps pour tout, un temps pour avoir des enfants, un temps pour résister ; les deux ne peuvent se concilier. »
Enfin, la dernière partie de son parcours, son séjour en Algérie, engendre de grosses déceptions : Après les espoirs démesurés, les découvertes cruelles : on torture aussi dans l'Algérie indépendante, l'indépendance ne profite pas aux femmes ;l'auteure interroge encore Annette sur les justifications de son engagement et semble lui donner quitus : « Mais ce n'est pas pour ces gens-là, ces gens précis ,nous diras-tu, mais pour faire avancer une cause et des principes qui sont l'égalité et la justice, c'est pour une fin, et cette fin-là, il n'y a rien à y redire, Annette ! »
Ce roman apparaît alors comme un remède contre le cynisme, un hommage à l'ironie bienveillante mais toujours interrogative déployée par Anne Weber.
Commenter  J’apprécie          11
Je commence ce livre après avoir lu une bonne critique...Page 11, 3 ème ligne :"Cette grand-mère deux, Annette ne la rencontre pas...."
"Grand-mère deux ?" Peu élégant ! C'est volontaire ? Je continue la lecture.. Lecture terminée...Les tribulations de cette femme exceptionnelle sont passionnantes..On reste un peu sur sa "fin" ! Moins enthousiaste en ce qui concerne l'écriture.."Elle commence à lorgner du coté du PC. C'est un parti -avant d'être un ordinateur comme aujourd'hui" ? Mais aussi des passages émouvants ..Lorsque le terme "PAUSE" évite de décrire l'indicible...
Commenter  J’apprécie          60

Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Le parti la déçoit. Il lui suggère non pas de sacrifier sa vie en combattant mais
d'informer l'électorat nouveau- les femmes ont depuis peu le droit de vote- de la meilleure façon de faire une bonne cuisine sans aucun ingrédient, avec presque rien, disons, et des moyens de tricoter avec un vieux et miteux pull-over trois paires de gants tout neuf et magnifiques.Quand elle affirme alors qu'elle considère ce genre de conseils comme superflus- et pourquoi donc faut-il aux femmes un magazine à part ? N'étaient -elles pas censées disposer de droits égaux ? -, on la déclare indigne d'être communiste. Ma foi.

( Points, 2022, p.78)
Commenter  J’apprécie          122
Plus tard, quand il va raconter
cette évasion ratée – Annette sera au courant
très vite -, il n'en dira bien entendu que ce qu'il
sait. Il y a des choses, sans doute, qu'il ne saura
jamais. Et soixante-dis années après, nous
découvrons sur internet (sur Légifrance, précisément,
qui est un site du gouvernement français), que
Sophie Jurestal mourut le 19 septembre 1942 non pas
au bord d'un fleuve mais à Auschwitz. Les tirs
n'ont fait que l'effleurer ou la blesser peut-être
et si on l'a tirée de l'eau, on a pu l'envoyer ensuite
à Drancy puis vers l'Est qui est le nom que porte
la mort en ce temps-là. Sa date de naissance, la
date de son décès, son nom, nous les confions à
cette blanche et frêle stèle de papier :

Sophie Jurestal, geb. Hammer
Varsovie .11.1.21 – Auschwitz 19.9.42
Commenter  J’apprécie          50
Car résister résulte, comme la plupart des choses qu’on fait, non pas d’une décision qu’on prend une fois pour toutes mais d’un glissement pour ainsi dire imperceptible, progressif, vers quelque chose dont on n’a pas encore idée.
Commenter  J’apprécie          30
C'est une jeune femme sans homme et sans enfants une parmi beaucoup d'autres et en même temps trop peu, qui aident tout de suite et où et comme elle peut. Et aujourd'hui son nom est oublié.
Commenter  J’apprécie          20

Video de Anne Weber (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Anne Weber
Les Matins - La réforme du collège en question (2ème partie) .http://www.franceculture.fr/emission-les-matins-l%E2%80%99invitee-politique-de-la-semaine-la-reforme-du-college-en-question-2015-05-13 Anne Weber Écrivaine allemande Traductrice Vient de publier au Seuil : Vaterland
autres livres classés : algérieVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (74) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3186 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}