Oeuvre trop peu commentée sur Babelio à mon goût, au regard des fondements qu'elle pose de la sociologie contemporaine, politique, mais pas seulement. Ecrivant au début du XXème siècle,
Max Weber propose dès cette époque une analyse du capitalisme, du rationalisme et des systèmes politiques contemporains -actuellement en délitement- différente de celle de Marx et du positivisme durkheimien.
Bien qu'engagé dans son siècle, et critique à maints égards,
Max Weber, défend, notamment dans le Savant et le Politique, une science de l'action sociale, consciente de ses limites (différente des sciences naturelles), et insiste sur l'importance des valeurs comme fondements de cette action. C'est pourquoi, pour lui, le savant (en sciences sociales particulièrement) se doit de maintenir une neutralité par rapport à son objet d'étude.
Par ailleurs, à bien des égards, en ce qui concerne la compréhension du politique,
Max Weber aura constitué pour moi un intermédiaire entre la lecture de Machiavel, puis Hobbes, et celle de
Raymond Aron, dont la préface de le Savant et le Politique constitue d'ailleurs un élément à part entière.
Contemporain de l'Allemagne de Bismarck, de l'exacerbation des nationalismes sous la 1ère Guerre mondiale, puis de la République de Weimar,
Max Weber va poser les bases d'une définition de l'Etat connue de tout étudiant en science politique et de nos Enarques en particulier : « un Etat est une communauté humaine qui revendique le monopole de l'usage légitime de la force physique sur un territoire donné » . Il approfondit ainsi le concept de violence légitime issu du Léviathan.
Son analyse n'est pas dépourvue de critique, puisqu'il met en évidence que la "professionnalisation" du politique conduit à un système ploutocratique ou/et bureaucratique, qui sera largement développé par ses successeurs de la sociologie allemande et US.
On pourra reprocher deux choses à
Max Weber : d'abord, intervenant quasiment à la naissance de la "science" sociologique et dans une période où la vision d'un capitalisme porteur de progrès était la norme, répondant par ailleurs à son éthique protestante et bourgeoise traditionnelle, ses analyses ne sont pas dénuées de subjectivité. Or, si le savant peut être engagé (à son image ou à celle de Aron), il devrait, selon ses propres termes, "mettre de côté" cela dans son travail de "scientifique".
Ensuite, sa langue même bien traduite, n'est pas facile d'accès. Bien que n'hésitant pas à répéter ses concepts, il les introduit de manière assez abrupte et, chaque mot ayant son importance, il faut souvent s'y reprendre en plusieurs fois à la lecture.
Néanmoins, bien que ces "cours" aient vieilli, le Savant et le Politique reste, à mon avis, une clé essentielle, au même titre que Machiavel, Hobbes ou Aron pour mieux comprendre les base de la sociologie, nos systèmes politiques contemporains (et leur déliquescence actuelle), le formatage de nos élites, et plus globalement quelques structures fortes de note société.