Citations sur Le portrait de Mr. W.H. (29)
— C'est une charmante chose, m'écriai-je, mais quel est ce merveilleux jeune homme dont l’art nous a si heureusement conservé la beauté ?
— C’est le portrait de monsieur W. H., dit Erskine avec un triste sourire.
Ce peut être un effet de lumière dû au hasard, mais il me sembla que des larmes brillaient dans ses yeux.
— Monsieur W. H. ! m’écriai-je. Qui donc est monsieur W. H. ?
— Ne vous souvenez-vous pas ? répondit-il. Regardez le livre sur lequel reposent ses mains.
— Je vois qu’il y a là quelque chose d’écrit, mais je ne puis le lire, répliquai-je.
— Prenez cette loupe grossissante et essayez, dit Erskine sur les lèvres de qui se jouait toujours le même sourire de tristesse.
Je pris la loupe et approchant la lampe un peu plus près, je commençai à épeler l’âpre écriture du seizième siècle : "À l’unique acquéreur des sonnets ci-après".
— Dieu du ciel ! m’écriai-je. C’est le monsieur W. H., de Shakespeare.
— Cyril Graham prétendait qu’il en était ainsi, murmura Erskine.
— Mais il n’a pas la moindre ressemblance avec lord Pembroke, répondis-je. Je connais très bien les portraits de Penhurst. J’ai demeuré tout près de là il y a quelques semaines.
— Alors vous croyez vraiment que les sonnets sont adressés à lord Pembroke ? demanda-t-il.
Le problème souligna Erskine, était le suivant : qui était donc ce jeune homme de l'époque de Shakespeare à qui, sans qu'il fût de sang, ni même de nature, noble, Shakespeare s'adressait en des termes marqués d'une adoration si passionnée que l'on ne peut que s'interroger sur cette vénération insolite, et que l'on redoute presque de tourner la clé donnant accès au mystère du cœur du poète ?
Les paroles ont sur l'âme un pouvoir mystique, et la forme peut créer l'émotion d'où elle aurait dû naître.
Les grands événements de la vie nous laissent souvent indifférents ; ils s'effacent de notre conscience, et, lorsque nous y pensons, ils deviennent irréels. Les fleurs écarlates de la passion elles-mêmes semblent pousser dans la même prairie que les pavots de l'oubli.
Sa peine avait un masque qui souriait et son chagrin revêtait de gais atours.
L'âme a une vie propre, et le cerveau un champ qui lui est propre. Il y avait en nous quelque chose qui ignorait tout de la séquence ou de l'extension et qui pourtant, semblable au Philosophe de la Cité idéale, était le spectateur de tout temps et de toute existence. Elle avait des sens qui s'animaient, des passions qui naissaient, des extases de contemplation spirituelle, des ardeurs faites d'amours flamboyantes. C'était nous qui étions irréels, et notre vie consciente était la partie la moins importante de notre développement. L'âme, l'Âme secrète, était la seule réalité.
C'est toujours une chose sotte que de donner des conseils, mais donner de bons conseils est absolument question de chance. Je vous souhaite de ne jamais tomber dans l'erreur de vouloir conseiller. Si vous le faites, vous aurez à le regretter.
L'Art, même l'art qui possède la portée la plus vaste et la vision la plus large, ne peut jamais nous montrer réellement le monde extérieur. Tout ce qu'il nous montre, c'est notre âme, le seul monde dont nous ayons vraiment conscience et connaissance. Et l'âme elle-même, l'âme de chacun d'entre nous, est pour chacun d'entre nous un mystère.
En Willie Hughes, Shakespeare trouva non seulement un instrument d’une extraordinaire finesse pour la présentation de son art, mais aussi l’incarnation visible de son idéal de la beauté, et il n’est pas exagéré de dire qu’envers de jeune comédien, dont les ternes chroniqueurs du temps oublièrent de citer même le nom, le mouvement romantique dans la littérature anglaise a une dette considérable.
Les grands événements de la vie nous laissent souvent indifférents ; ils s'effacent de notre conscience, et, lorsque nous y pensons, ils deviennent irréels. Les fleurs écarlates de la passion elle-même semblent pousser dans la même prairie que les pavots de l'oubli. Nous déplorons le fardeau que représente leur souvenir, et nous avons contre elles des antidotes. Mais les petits détails, les détails sans importance, restent en nous. Dans quelque minuscule cellule d'ivoire, le cerveau conserve les plus délicates et les plus fugaces.